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Les yeux de son maître

En ces temps de crise du travail, Rubens et quelques-uns de ses congénères ne connaissent pas la crainte du licenciement. Et pour cause, ils sont aux ordres du patron 24h/24 tous les jours de l’année. Des employés parfaits ? Non, juste des chiens guides d’aveugles dévoués à leur maître !

Rubens n’est pas que le nom d’un peintre flamand, c’est aussi celui d’un beau labrador noir de 6 ans, qui exerce avec art le métier de chien guide d’aveugle. Et, comme tout professionnel, il a suivi pendant deux ans le cursus correspondant, à l’école des Chiens guides d’aveugles de l’Ouest, basée à Angers.

Cette formation demande du temps, de la patience et des efforts. De nombreuses personnes s’investissent dans ce projet, et toutes ont un rôle crucial à jouer, à différents niveaux. Au final, le chien est évalué et affecté à un maître ayant un mode de vie adapté. Signalons tout de même que le futur maître doit lui aussi remplir certains critères pour pouvoir posséder un chien guide.

Pour Rubens, on a choisi Dany Lejolivet, un non-voyant de naissance. Cet homme travaille au Centre de ressources départemental du Calvados, au collège Marcel Pagnol à Caen (14), et y traduit les livres scolaires du CP à la Terminale pour les rendre accessibles aux personnes atteintes de déficience visuelle. Des chiens et des chats, il en a connus pendant son enfance, mais la relation qu’il entretient avec Rubens est très différente. Maintenant, ils ne se quittent plus, et un lien très fort les unit. Le chien est devenu une présence permanente, y compris sur le lieu de travail, et prend ainsi une place encore plus importante qu’un animal de compagnie habituel.

Au-delà du compagnon, le chien est un véritable travailleur qui ne rechigne jamais à la tâche. Et ça, monsieur Lejolivet l’admet sans aucun problème : « S’il est avec moi c’est parce qu’il a été éduqué et choisi pour faire ce travail. Il ne fait qu’appliquer au quotidien ce qu’on lui a enseigné. Il va donc me signaler des obstacles par des codes : par exemple, pour m’indiquer qu’il faut monter sur un trottoir, il va poser ses deux pattes avant sur le trottoir et s’arrêter ; ou bien va s’asseoir avant de descendre une marche.  » En tout, Rubens va répondre à une quarantaine d’ordres directionnels, et va ainsi guider son maître en lui évitant les obstacles.

La canne, Dany en avait une avant Rubens, mais il reconnaît que « la canne on la fuit ». Le chien guide d’aveugle prend donc une dimension sociale, et permet de faciliter le contact entre le maître et le reste de la population. A contrario, le chien demande beaucoup plus d’attention et de soin que la canne. Il faut donc en assumer les conséquences.

Mais, comme tout travail mérite salaire, le chien aussi a besoin de récompenses pour être efficace. C’est ce qu’expliquent Camille Letailleur et Stéphane Moreau, deux des fondateurs de l’association « A vue de truffe », une école (la seule dans la région) pour chiens guides d’aveugles et de malvoyants, nouvellement créée.

Les chiens ont été sélectionnés depuis des générations, aboutissant à des races aux caractères bien différents. « Un bon chien guide d’aveugle doit avant tout être réceptif à l’homme et avoir des aptitudes au travail. » Durant les premières semaines de sa vie, la mère va jouer un rôle important en lui inculquant le code social. Ensuite, c’est à l’homme de prendre le relais et de lui enseigner le plus tôt possible le code du travail.

Tous deux sont unanimes : «  Pour travailler correctement, un chien a besoin d’être équilibré, c’est-à-dire qu’il ne doit pas souffrir de carences. Un chien peut tout à fait déprimer si son maître ne lui donne pas suffisamment de caresses ; il n’est pas mauvais de féliciter son chien par les mots, un geste ou une friandise le jour où il a bien travaillé, ça peut le motiver pour recommencer. C’est pour ça que sur le lieu de travail, il est indiqué de s’occuper du chien : jouer avec lui de temps en temps, le laisser se reposer, le caresser... Si l’on n’assouvit pas ses besoins fondamentaux, il deviendra moins coopératif et donc moins efficace.  »

Finalement, ces canidés, animaux sociaux, acceptent de travailler pour la communauté, tout comme nous êtres humains, et demandent en échange de leurs bons et loyaux services un peu d’attention et quelques récompenses en guise de salaire. Quoi de plus simple ? Ces animaux ne seraient peut-être pas grand-chose sans nous, mais que serions-nous sans eux ?


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