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Accueil du site > Actualités > Economie > Agriculteurs : le piège se referme

Agriculteurs : le piège se referme

Le drame actuel de l’agriculture francaise est bien plus le résultat de 57 ans de la Politique Agricole Commune européenne et de la perspective du marché transatlantique à venir que des abus des banques et de la grande distribution.

Les multiples manifestations et actions actuelles des agriculteurs rappellent à la conscience publique le drame qui se déroule dans les campagnes où les dépôts de bilans se multiplient et où un agriculteur se suicide tous les deux jours. Depuis plusieurs mois dans toute la France, les actions d’épandage de fumier, de déversement de récoltes invendues ou de détritus ont eu lieu devant des banques, des supermarchés ou des bâtiments publics comme ceux de la MSA , de la DDTM ou des préfectures. Ainsi sont visés les acteurs du système économique et administratif dans lequel est insérée la majorité des agriculteurs. Ceux-ci sont aujourd’hui largement dépendants de ce système mais pâtissent d’un rapport de force défavorable, car banque et grande distribution bénéficient d’une grande concentration de capitaux et de pouvoirs politiques et économiques face à laquelle les exploitations familiales indépendantes sont bien démunies.

Mais la banque, le supermarché ou la MSA locaux ne sont en fait que le paravent des vraies sources des problèmes de la profession. Il est remarquable de noter notamment qu’un acteur majeur de ce système, l’Union européenne à Bruxelles, n’est pas du tout affecté par les actions actuelles, alors que la PAC lancée en 1958 a modifié en profondeur l’agriculture dans un modèle productiviste et de plus en plus néo-libéral.

L’instrument clé en fut l’utilisation des subventions agricoles. Il faut en comprendre la vraie nature qui repose sur une manipulation des prix à la consommation. Le circuit est simple et se joue entre le contribuable, l'UE, l'agriculteur et le consommateur. Une partie des impôts du contribuable est ansi dirigée vers Bruxelles qui la reverse sous diverses formes, directement ou indirectement, aux agriculteurs. Le marché prendra en compte ces "subventions" et les prix payés aux agriculteurs baisseront d'autant, ce qui garantit des prix bas pour le consommateur. Donc pour obtenir des prix des denrées agricoles artificiellement bas pour le consommateur, le contribuable fut amené à payer la différence entre le prix réel et le prix imposé.

Comme le consommateur et le contribuable ne font qu’une seule personne, le jeu est à somme à peu près nulle pour lui. Il en est de même pour l’agriculteur-subventionné, du moins comptablement. En revanche celui-ci perdit son indépendance et il dut s’orienter sur la politique agricole décidée à Bruxelles en se transformant, bon gré mal gré, en chasseur de primes. Comme des cultures sont fortement subventionnées et d'autres beaucoup moins, l'agriculteur fera généralement en effet ses choix plus en fonction des critères bruxellois que des critères agronomiques. Le grand bénéficiaire de cette manipulation fut donc l’administration bruxelloise (avec ses lobbyistes notamment de l’industrie chimique et agro-alimentaire) qui détint dès lors un très grand pouvoir d’orientation de l’agriculture en Europe, notamment dans une logique productiviste qui est ancrée aujourd’hui dans les traités (1).

Pour parfaire la manipulation, Bruxelles se posa en « sauveur » de l’agriculture, les consommateurs s’habituèrent à des prix artificiellement bas tandis que les contribuables considérèrent les agriculteurs comme des assistés. Ainsi fut dévalorisée dans les esprits une profession à la base des besoins essentiels.

L’agriculture est donc aujourd’hui complètement dépendante de ces subventions. Selon le Modef, « la réalité aujourd'hui [en 2013], c'est un revenu net de la branche agricole qui s'élève à 9,5 milliards, à comparer aux 9 milliards de subventions d'exploitation reçus en 2013. Sans les aides directes européennes et les aides aux produits, le revenu du travail des exploitants serait nul. » Cette quasi équivalence des revenus agricoles avec le montant des subventions signifie que le travail de l’agriculteur est complètement absent dans les prix à la production, couvrant juste les frais. Bien sûr il y a aussi une grande disparité suivant les cultures, certaines comme le maraîchage ou l'arboriculture étant beaucoup moins subventionnées.

Il est important d’avoir un aperçu historique de cette évolution qu’un rapport de l’Insee détaille. Jusqu’en 1992 les aides prenaient la forme d’un soutien des prix des produits agricoles (fixation de prix planchers, les prix d’intervention, protection du marché intérieur européen par des prix minimaux à l’importation, principe dit de « préférence communautaire »). Après 1992 et le début de la globalisation, « le soutien par les prix a été fortement réduit pour ramener les prix européens vers le niveau des prix mondiaux. Pour compenser l’impact négatif de la baisse des prix sur le revenu des agriculteurs, des aides directes, partiellement découplées, c’est-à-dire non directement liées au niveau de la production, ont été attribuées aux exploitations agricoles. [...] Enfin, en 2003, est intervenue une réforme consistant en un plus grand « découplage » des aides directes de la production agricole, appliquée en France à partir de 2006. Les agriculteurs se voient désormais attribuer des droits à paiement unique (DPU) sur la base des aides liées à la production reçues au cours des années 2000 à 2002. »

De 1958 à 1992, il y a eu donc l’instauration d’un marché protégé mais sous le contrôle de Bruxelles où les agriculteurs étaient de plus en plus dépendants des institutions européennes. A partir de 1992 ce marché s’est ouvert à la concurrence mondiale en deux étapes pour amortir le choc : d’abord avec des "aides" couplées à la production puis à partir de 2005 avec des "aides" découplées, donc des rentes. En contre-partie de ces "aides", fut imposée une logique néo-libérale avec l'ouverture du marché et l'interdiction de toute intervention de l'État, minutieusement détaillée dans les traités européens (TFUE) .

Aujourd’hui se prépare la troisième étape avec le saut vers le grand marché transatlantique où l’agriculture française serait confrontée à l’agriculture super-productiviste américaine qu'il n'est pas besoin de présenter. Si ce marché se met en place (les parlementaires européens ont apporté leur soutien), l’agriculture française sera forcée de se mettre au diapason, ce qui signifiera :

  • soit l’augmentation de la taille des exploitations et la diminution automatique des agriculteurs ;
  • soit une sorte de mise à la pré-retraite des agriculteurs avec un système de rente découplée de la production, ce qui a été donc mis en place en 2006 par les DPU.

Les enjeux ne se jouent donc pas dans la banque, le supermarché ou l’administration locaux, mais dans les bureaux de Bruxelles et de Washington où sont planifiés les changements structurels de grande ampleur. C’est la volonté politique de transformer l’agriculture en France sur un modèle productiviste au service d'un vaste ensemble d'acteurs, des fabriquants de produits chimiques à la grande distribution, qui explique son état très préoccupant actuel. L'instrument de cette métamorphose fut la PAC qui a rendu dépendants les agriculteurs, ce dont ne font que profiter certaines banques et une partie de la grande distribution aujourd'hui dans des rapports de force déséquilibrés.

Il y a deux voies, sans doute complémentaires, pour que les agriculteurs redeviennent indépendants et sortent de ce système. La première voie est politique  : le système imposé à l’agriculture française depuis 57 ans ne sera pas modifié du jour au lendemain, mais il est aujourd’hui nécessaire d’en reprendre le contrôle pour sortir de cette voie super-productiviste qui est inéluctablement engagée dans les bureaux de Bruxelles (le verdissement de la PAC depuis 2015 arrive bien tard et reste trop limité face à la perspective du TAFTA). La seule possibité en est la sortie de la PAC et donc de l’UE, ce que propose l’Union Populaire Républicaine (UPR). Après une nécessaire période de transition, le but, selon l'auteur de cet article, devrait être de sortir de ce système de contrôle extérieur de la profession en mettant fin à la distorsion des prix par des subventions. La deuxième voie est économique et concerne tant les agriculteurs que les consommateurs : elle consiste à s’orienter sur des formes alternatives d’agriculture et de commercialisation (vente directe, AMAP...) et de tisser des liens de coopération avec son environnement. Les mentalités en effet changent comme le montrent notamment l’augmentation des surfaces bio en France et du nombre des AMAP : de nombreux consommateurs et agriculteurs sont devenus conscients des problèmes agricoles et sont prêts à prendre leurs responsabilités et à coopérer entre eux.

Ainsi le fumier déversé devant banques, supermarchés ou bâtiments publics ne changera pas à terme la dégradation de la branche. Au mieux les aides de l'État seront une bouffée d'oxygène pour certaines exploitations, à condition encore qu'elles arrivent à destination, vu qu'elles contreviennent en partie aux traités européens. Au pire de telles actions ne sont destinées qu'à être une soupape à la colère des agriculteurs, pris dans un piège qui se referme sur eux. Très locales, elles ne remettent en tout cas pas en question la structure d'un système dont la logique finale est une agriculture hyper-productiviste. Sans doute que nombre d'agriculteurs et consommateurs en sont bien conscients.

 

(1) Article 39 du TFUE : La politique agricole commune a pour but : (a) d'accroître la productivité de l'agriculture en développant le progrès technique, en assurant le développement rationnel de la production agricole ainsi qu'un emploi optimum des facteurs de production, notamment de la main-d'œuvre [...]


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39 réactions à cet article    


  • Ruut Ruut 29 juillet 2015 00:03

    Tuer l’agriculture nationale c’est assurer une dépendance nationale aux banques et aux importations des ressources vitales.
    C’est perdre sa souveraineté.

    La Grèce en est le [plus bel exemple.
    n’aillant plus les moyens de sa survie elle doit ce plier a tous les dictats, même les plus odieux des créanciers.

    La France suit donc ce chemin en détruisant son autonomie agricole.


    • sinonquoi 29 juillet 2015 01:41

      Article bien documenté.

      Toutefois, il ne me semble pas possible de dédouaner si facilement les banques et autres grandes sociétés.
      En effet, l’information cruciale est la crise alimentaire annoncée en 2050 due à l’augmentation de la population mondiale estimée à 9 milliards.
      Que croyez-vous qu’un bon gestionnaire ferait en sachant ça ?
      C’est simple, il investirait dans l’acquisition des terres agricoles au moment où elles ne valent pas encore trop cher et si le prix n’est pas assez bas, il est possible de pousser un peu avec la complicité des gouvernements.
      Le raisonnement est également suivi par certains états comme la Chine qui exploite des terres agricoles en Afrique (nouveau colonialisme).
      Résultat : en 2050, les produits alimentaires permettront des profits immenses mais ces profits ne bénéficieront qu’à quelques uns : les très gros (exploitations industrielles) et marginalement aux très petits privilégiant les produits de qualité et les circuits courts.
      Autres résultats : désertification de certaines zones rurales, destruction des paysages dans les zones où l’exploitation industrielle ne sera pas rentable, ...
      Une certitude, le peuple français n’a rien a gagné à ce que les petites et moyennes exploitations disparaissent (économiquement, socialement, indépendance, chômage, ...).
      Personnellement, je pense que notre gouvernement est soit aveugle (tentant mais je ne pense pas), soit complaisant (possible compte tenu de la corruption ambiante) ... soit faible (beaucoup plus probable au regard de la dette publique et de la puissance de ses prétendus alliés d’outre Atlantique). 
      La solution ne peut pas se limiter à des circuits courts et à l’agriculture biologique quand l’objectif est l’autosuffisance et par suite l’indépendance du peuple français mais ce n’est certainement pas non plus la concentration des terres dans les mains des Etats, des banques, des industriels ou des fonds de pension.

      • Captain Marlo Fifi Brind_acier 29 juillet 2015 07:47

        @sinonquoi
        Si nous ne sortons pas rapidement de l’ Union européenne, les agriculteurs français qui vont disparaître laisseront place à des surfaces agricoles encore bien plus grandes et bien plus industrielles, comme on le voit dans certains pays d’Amérique du sud.
        Ou bien vendront à des exploitants de gaz de schiste.
        L’UE a déjà commencé à subventionner le gaz de schiste.


      • aimable 29 juillet 2015 10:05

        @Fifi Brind_acier
        ce qui est valable pour l’agriculture est valable pour tout le reste , ex , la machine outil , l’Allemagne s’est renforcée aux dépends tous les autres pays de l’union européenne , maintenant c’est elle qui mène la danse , on peut gesticuler dans tous les sens cela ne change rien au fait que c’est elle qui commande
        petit a petit sans guerre , elle nous grignote !!!!


      • sinonquoi 29 juillet 2015 10:56

        @Fifi Brind_acier

        A mon avis, il serait plus efficace de menacer d’en sortir (politique de la chaise vide) et de rétablir la raison d’être de la PAC : subvenir aux besoins alimentaires de l’Europe, réguler le marché des produits agricoles et seulement après en tirer des profits.
        La sortie de l’UE ne doit rester que la conséquence d’un processus de négociations ayant échouées, sauf à se mettre définitivement à dos nos voisins. Nous devons préserver l’avenir.
        Dans tous les cas, si la France sortait de l’UE, elle devrait trouver des partenaires et de nouveaux traités seraient signés ... par sur qu’ils soient plus favorables, autant modifier l’existant.




      • Fergus Fergus 29 juillet 2015 11:38

        Bonjour, sinonquoi

        N’oublions pas, en outre, que l’évolution de la PAC est la conséquence directe d’une politique productiviste d’apprentis-sorciers initiée par la FNSEA elle-même en France dès les années 50, puis reprise par les instances européennes. La bonne voie à suivre est celle que défend la Confédération paysanne depuis sa création à la fin des années 80. Mais elle n’a jamais eu l’oreille des gouvernants, trop alliés à la FNSEA lorsqu’ils sont de droite, et trop craintifs des actions violentes lorsqu’ils sont de gauche.


      • Idées de la Tripartition sociale Idées de la Tripartition sociale 29 juillet 2015 14:52

        !@sinonquoi
        Merci pour vos remarques.

        « La solution ne peut pas se limiter à des circuits courts et à l’agriculture biologique »

        Je suis tout à fait d’accord, à moyen terme tout au moins. C’est pourquoi à mon sens j’ai insisté sur la nécessité politique : celle de reprendre le contrôle de la politique agricole en France et non de la laisser dans les mains des idéologues productivistes. Cela signifie la sortie de la PAC, mais que vous considérez comme une mauvaise solution :

        « A mon avis, il serait plus efficace de menacer d’en sortir »

        ... Tsipras a aussi voulu jouer à un tel jeu de Poker avec l’UE pour le résultat que l’on connaît. Vous répondrez : la Grèce n’est pas la France. Mais la France de 2015 n’est aussi pas la France de 1966 lors de la politique de la chaise vide de C. de Gaulle. Et l’UE de 2015 n’a aussi rien à voir avec la CEE de 1966.
        Les rapports de force se sont inversés et les prérogatives de l’UE ne cessent d’augmenter dans une perspective historique. Donc il est, à mon sens, peu crédible de penser que la France aurait plus de succès que la Grèce à jouer au Poker avec l’UE.
        Soit on sort résolument de l’UE, soit on y reste résolument, mais il faut trancher.


      • sinonquoi 29 juillet 2015 16:23

        @Idées de la Tripartition sociale

        Effectivement, la France d’aujourd’hui n’est plus ce qu’elle était et je conçoit parfaitement que la politique de la chaise vide implique un rapport de force que la France aurait certainement du mal à supporter ... mais la France n’est pas la Grèce. Je n’imagine pas l’Euro et l’UE survivre sans la France, en tous cas moins que l’Europe sans la Grèce.

        Au plaisir de lire vos prochains articles.

      • Captain Marlo Fifi Brind_acier 2 août 2015 20:11

        @sinonquoi
        La sortie de l’ UE est de droit, article 50 :
        « Tout Etat membre, conformément à sa Constitution, peut quitter l’ Union. »


        Il ne faut pas pendre ceux qui ont rédigé les traités pour des enfants de chœur, ce ne sont pas des perdreaux de l’année... Vous ne pourrez jamais changer les Traités, l’article 48 verrouille tout changement, en imposant des votes A L’ UNANIMITÉ des 29 membres. Or, les 29 pays ne sont d’accord sur rien.

        L’Allemagne et l’Espagne, qui n’ont pas de SMIC agricole, s’opposeront à tout changement dans le domaine agricole. Et comme il suffit qu’un seul pays ne soit pas d’accord... 

      • Loatse Loatse 29 juillet 2015 11:40

         les consommateurs s’habituèrent à des prix artificiellement bas 


        On voit tout de suite que monsieur ne fait pas souvent les courses... et d’ailleurs s’il était attentif,il verrait que dans bon nombres de supermarché, le boeuf se vend mal, finit le plus souvent dans des bacs, en promos pas vraiment de toute fraîcheur.. qui s’écoule tout aussi mal sauf chez certains fauchés téméraires et pas trop regardant sur l’odeur et les dates...

        L’idée d’une politique agricole commune visant à réglementer les prix, et donc à compenser d’une manière équitable (nos impots) afin que le consommateur puisse se nourrir sans se ruiner est bonne à mon avis..

        A condition bien sûr que les éleveurs (pas ceux qui s’endettent pour acquérir un tracteur plus performant que celui du voisin alors qu’ils n’en ont pas l’utilité ou quelque gadget dernier cri en mode tape à l’oeil), à condition disais je que les éleveurs s’y retrouvent également...

        or voilà, à 3,80 euros le kilo avant abattage, si l’on part du principe que l’éleveur ne vit que de l’élevage (rare, la plupart diversifient), ce n’est plus rentable....

        Je précise tout de même que le cout du rumsteack est de 23,48 euros le kilo pour le consommateur...ce que l’on appelait avant les bas morceaux (pour pot au feu par exemple) ne sont pas donnés non plus...pas plus que les abats (foie notamment)

        le contribuable est donc le dindon de la farce en bout de course.. il paye deux fois !

        La solution à mon humble avis passerait donc par un relèvement du prix à la vente pour les éleveurs et un encadrement des marges pratiqués par les intermédiaires entre l’éleveur et le consommateur... D’un coté, la baisse des prix de la viande de boeuf dans les supermarchés permettraient moins de perte... donc moins de temps passés à trier, transporter, réemballer et réétiquetter la viande.. (qui dit temps dit argent)

        la participation (je préfère ce mot à subvention qui fait assisté) serait de 1 euro supplémentaire par kilo répartie entre le contribuable et les intermédiaires. non déductibles pour ces derniers..

        ou.. nous attendre à ce que lassés de bosser pour des prunes, nos éleveurs ne se mettent tous à devenir uniquement céréaliers, ce qui est plus rentable. (je ne parle pas non plus de ceux qui veulent vendre des bêtes de réforme, agées au prix d’une bête à viande plus jeune)





        • Fergus Fergus 29 juillet 2015 13:22

          Bonjour, Loatse

          « ceux qui s’endettent pour acquérir un tracteur plus performant que celui du voisin alors qu’ils n’en ont pas l’utilité »

          Ô combien vrai ! Je ne cesse de dénoncer cette terrible dérive qui contribue à placer les paysans dans une situation économique intenable. En France, des milliers d’exploitations utilisent des tracteurs disposant d’une puissance disproportionnée aux besoins. Et c’est ainsi que l’on voit un peu partout des monstres de 250, 280 ou 300 cv là où des engins de 100 ou 120 cv suffisaient largement naguère à faire le travail ! On marche sur la tête, et cela d’autant plus que ceux qui ont su rester raisonnables sont moqués ou ringardisés. C’est aussi cela, la réalité agricole de notre temps !


        • sinonquoi 29 juillet 2015 13:58

          @Loatse

          A moyen/long terme, le tout céréalier devrait disparaître dans la mesure où cela n’est viable qu’avec l’apport d’engrais « chimiques » dont les prix vont exploser plus vite que les prix des produits agricoles, compte tenu de la raréfaction des matières premières.

          Je suppose que les futures exploitations géantes voulues par nos élus et l’Europe intégreront à la fois l’élevage et des cultures ... mais quel gâchis.


        • Idées de la Tripartition sociale Idées de la Tripartition sociale 29 juillet 2015 15:25

          @Loatse
          Vous remettez en question de facon tout à fait justifiée mon assertion que les prix à l’alimentation sont artificiellement bas. Vous prenez des exemples contemporains, mais je me rappelle aussi de mon grand-père dans les années 80 s’étonnant que les pommes vendues en vrac soient si bon marché et disant qu’on vivait bien.

          On peut effectivement considérer qu’en raison de la filière en aval du producteur, les prix sont auourd’hui hauts (gaspillage, marges élevées etc...). Mais ces facteurs sont indépendants de l’agriculteur : les prix à la consommation seraient malgré tout encore plus élevés si les prix à la production n’étaient pas manipulés par le système de « subventions ».

          Je reformule donc volontiers ma phrase en « les prix à la consommation furent artificiellement abaissés », sans juger si les prix actuels sont « hauts » ou « bas » (ce qui en fonction des jugements subjectifs de tout un chacun).

          A noter cependant que le budget affecté à l’alimentation a baissé continuellement de 1959 (28%) à 2007 (16%) ( dans http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ref/CONSO09c.PDF&nbsp ; - p.17).


        • Loatse Loatse 29 juillet 2015 15:31

          @sinonquoi


           des mégas surfaces cultivées et des non moins aussi grands élevages concentrés dans un seul pays européen ?... (j’ai pensé à l’ukraine jadis grenier à blé de l’urss )

           Resteraient en france que les agriculteurs de la filière bio, les éleveurs qui satisferont aussi à certains critères de qualité ( bête nourrie au pré en non en batterie à l’ogm) pour nourrir l’élite.. les autres boulottant de la m...e

          quoique c’est déjà le cas, il me semble....

          ce qui irait dans le sens de ce que disait un type influent (je sais plus qui) qui préconisait de délocaliser toutes nos industries polluantes en afrique, car les africains avaient la chance eux, de n’avoir pratiquement pas de pollution...

          dans ce scénario plutôt sombre digne d’un roman de sf, pour s’épargner les épandages de pesticides et autres saloperies, les lisiers de porcs qui nous font des algues vertes, pour avoir du boeuf à bas cout également, hop tout à l’est....

          Ah j’oublie de rajouter pour faire bonne mesure en mode « le meilleur des mondes », l’interdiction in fine de faire son potager...

          On peut aussi tenter de rester optimiste.... et cesser d’imaginer des petits troupeaux de charolaises broutant au milieu de barbelés, gardées par des types en armes comme des champs de pavot, tandis que des masses boutonneuses d’avoir ingérées des pesticides nouvelle génération, donnaient l’assaut pour se tailler un steack....

           smiley





        • Croa Croa 30 juillet 2015 08:36

          À Idées de la Tripartition sociale,
          En fait ce sont surtout les prix intermédiaires qui ont baissés, les prix à la consommation (le prix final) a peut être baissé un peu aussi mais dans des proportions bien plus faibles.


        • Croa Croa 30 juillet 2015 08:40

          En fait, comme la qualité a beaucoup baissée (nous mangeons de la merde en premiers prix !) que finalement nous pourrions considérer que les prix à la consommation (les prix finaux) n’ont pas du tout baissés !


        • Loatse Loatse 29 juillet 2015 13:41

          Bonjour Fergus,


          On retrouve les mêmes travers dans le monde agricole que dans le reste de la société (celui des yeux plus gros que le ventre ou de l’épate sans que les pèpètes suivent ), autant le spécifier sans pour autant généraliser...

          M’enfin il y a tout de même quelque chose qui ne va pas quand on considère la différence du prix au kilo du boeuf et celui auquel il nous est revendu même pas transformé, juste découpé...

          le prix à l’éleveur lui, me semble bien bas même si les paramètres ne sont pas les mêmes suivant l’exploitation (nombre de bêtes, charges, frais qui varient selon que l’exploitant a des crédits pas obligatoirement non justifiés, frais de vétérinaire etc.. etc... et les imprévus comme l’achat de fourrage les années de sécheresse)

          si ça ne devient plus rentable, il ne faudra pas s’attendre non plus à ce que malgré les nouvelles technologies le cultivateur/eleveur travaille à perte... ce que l’ampleur du mouvement laisse entendre..





          • Fergus Fergus 29 juillet 2015 16:10

            @ Loatse

            « il y a tout de même quelque chose qui ne va pas quand on considère la différence du prix au kilo du boeuf et celui auquel il nous est revendu même pas transformé, juste découpé... »

            Effectivement, et l’on ne fera croire à personne que payer le kilo sur pied quelques centimes de plus serait de nature à couler les autres étapes de la filière. Quand les prix évoluent de 2 centimes au kilo payé à l’éleveur, c’est souvent de quelques dizaines de centimes, voire plus, qu’ils évoluent dans la grande distribution. Il y a là un hiatus insupportable !


          • aimable 29 juillet 2015 16:31

            @Loatse
            les intermédiaires , eux aussi veulent des grosses cylindrées Allemande, avec tout et tout dedans


          • Parlez moi d'amour Parlez moi d’amour 29 juillet 2015 22:53

            @aimable
            Les Halles étaient encore au centre de Paris. J’avais une amie vivant à proximité dans un très bel appartement. Son père était « négociant en fruits et légumes ». Il n’en avait jamais touché un seul de ceux qu’il vendait, il travaillait par téléphone uniquement, ce qui permettait à sa fille d’acheter ses pulls en soie Faubourg St Honoré.


          • Captain Marlo Fifi Brind_acier 30 juillet 2015 06:49

            @Fergus
            2 centimes X par des tonnes, cela finit par faire de l’argent.
            Le but de la mondialisation c’est d’acheter aux prix les plus bas.
            Pas de SMIC agricole en Allemagne et en Espagne, peu importe la qualité pourvu qu’on ait des prix plus bas que le voisin.


          • Fergus Fergus 30 juillet 2015 08:32

            Bonjour, Fifi Brind_acier

            Certes, mais cela n’a aucun sens car les coûts sont, au final, toujours répercutés sur les consommateurs. Et l’on voit mal des clients, même avec un faible pouvoir d’achat, refuser de payer leur kilo de viande quelques centimes de plus. Cela ne tient pas debout !


          • CN46400 CN46400 2 août 2015 14:22

            @Fergus


            Attention quand l’éleveur parle du prix au kilo, c’est de la bête sur pied qu’il est question. Quand un boucher parle d’un kilo de viande c’est de ce qui est posé sur l’étalage. Dans une bête il y a, au max, 50% de viande...

          • zygzornifle zygzornifle 29 juillet 2015 14:47

            de toute façon avec le signature du traité transatlantique qui s’approche les agriculteurs seront rayés de la carte par la France par l’Europe et par l’Amérique ..... Vous êtes cuits les amis .....


            • goc goc 29 juillet 2015 16:52

              Merci à l’auteur pour cet article qui traite parfaitement des racines du mal

              j’oserais quand même ajouter un élément important en ce moment

              Si la crise agricole explose aujourd’hui c’est aussi parce que nos dirigeants nous ont obligé a sanctionner la Russie qui en retour a lancé un embargo sur nos produits agricoles
              Et a cause de cela, la surproduction agricole due aux sanctions russes, amplifie la crise et permet aux distributeurs et autres mafieux d’acheter au plus bas

              Ce n’est qu’un point de détail au vu du problème agricole français, mais cela peut aussi être le détonateur de mouvements violents et dramatiques pour notre pays, après une prise de conscience des « paysans » sur leur sort catastrophique et inéluctable, a court terme


              • Idées de la Tripartition sociale Idées de la Tripartition sociale 29 juillet 2015 18:53

                @goc
                Effectivement les sanctions russes sont sans doute la goutte d’eau qui fait déborder le vase...


              • smilodon smilodon 29 juillet 2015 23:01

                @ l’auteur : Je connais un peu le « problème » !.... Y’a des mecs qui se tuent chaque matin pour que vous mettiez un nuage de lait dans votre café !... Pour le café je sais pas. Pour le nuage de lait, vu que j’ai « tiré » les vaches, je sais un peu !... 70 % de la population mondiale est allergique au lait !.... Le « lactose » !...L’allergie au lait est une règle !.. Vous le saviez ??.. Non, probablement !.. Boire du lait, manger des yaourts, des fromages, est une exception !... CECI est la règle !... Vous ne le saviez pas ??.. Normal !... Donc, on mange ou boit tout ça entre nous !... Si vous voulez des détails demandez-moi !.....Adishatz.


                • Croa Croa 30 juillet 2015 08:49

                  Très bon article même si tout ça sont évidences mêmes.
                  *
                  Les comportements de la grande distribution servent de diversion aux responsabilités de l’UE et à nos politiques complices de tout ça. La propagande officielle fait la confusion entre causes et conséquences de cette politique et les ’’paysans’’ tombent en plein dedans (la majorité des gens aussi.) !


                  • files_walQer files_walQer 31 juillet 2015 08:18

                    Pour aider les agriculteurs (et sauvegarder l’image de la France) il eut été une excellente idée de livrer les Mistrals payés par les russes, au lieu d’appliquer des mesures de rétorsion (le mot sanction est utilisé lorsqu’il y a faute) injustifiées puisqu’il est largement démontré que les russes ne sont pour rien dans les problèmes en Ukraine.


                    • Croa Croa 2 août 2015 11:29

                      À files_walQer
                      Oui, ce n’est pas Monsieur Hollande qui ne vends plus ses fruits !  Cet irresponsable fait payer par les autres ses humeurs anti-Poutine : Trop Facile !
                      Et à propos... Ce seront tous les Français, en tant que contribuables, qui vont payer pour les vedettes non livrées !
                      Quel CON, Mais quel CON !  smiley smiley smiley


                    • Captain Marlo Fifi Brind_acier 2 août 2015 20:14

                      @Croa
                      Il est juste la carpette de Washington.


                    • tf1Groupie 31 juillet 2015 19:28

                      L’UE est une nouvelle fois désignée comme bouc émissaire, une démarche simpliste et à la l’analyse très pauvre.

                      D’abord comme le signale Fergus la France n’a pas attendu l’UE pour se tourner vers le productivisme.

                      Ensuite cette amélioration de la productivité agricole depuis les années 50 a quand même porté ses fruits puisque la population française est bien nourrie, et pour pas cher.

                      Et justement l’auteur oublie que l’un des principaux bénéficiaires est le consommateur.
                      Mais l’auteur ne met surtout pas en question le consommateur, celui qui achète les fraises d’Espagne dégueulasses parce qu’elles sont moins chères que les gariguettes.

                      Ce qui suggère que notre auteur est un bon consommateur de base et qui aime bien être dans le rôle de celui qui désigne les coupables.

                      Et il me semble que les agriculteurs allemands sont beaucoup moins malheureux que les agriculteurs français ; probablement que l’Allemagne n’est pas dans l’UE.


                      • Idées de la Tripartition sociale Idées de la Tripartition sociale 31 juillet 2015 21:26

                        @tf1Groupie
                        Vous êtes bien entendu libre de penser que la PAC n’a eu aucune influence sur l’agriculture en France en 57 ans d’existence...
                        Le consommateur comme les agriculteurs qui ont suivi le système productiviste mis en place par la CEE-UE ont également eu leurs responsabilités, évidemment. Mais il est souvent difficile de résister à tout un système dominant social. Les révoltés et les moutons noirs n’ont jamais été la majorité, par définition.
                        Quant au sempiternel argument du modèle allemand, il est basé en agriculture sur des salaires très bas depuis 15 ans d’une main d’oeuvre venue de l’Est ou bien d’une mécanisation ou un productivisme à outrance. Les fermes à 1000 vaches sont ainsi légion dans les anciens Länder de l’Est. Pas sûr qu’un abattoir où sont abattus par jour 420 000 poulets soit vraiment un modèle (http://www.mopo.de/umland/mega-schlachthof-in-niedersachsen-hier-sterben-bald-taeglich-420-000-huehner,5066728,24160058.html)
                        Pas plus qu’un abattoir avec 1000 cochons par heure (http://www.mz-web.de/bernburg/reaktionen-auf-geplanten-schlachthof-in-bernburg—1-000-schweine-pro-stunde---pfui-teufel-,20640898,26607662.html).
                        Mais à chacun sa vision.


                      • Croa Croa 2 août 2015 11:40

                        À tf1Groupie,
                        Pour le productivisme t’as raison mais pour tout le reste c’est bien l’UE qui est responsable ! Les productions agricoles sont notamment tournées vers le commerce international à base de spécialisations, les prix ne sont plus réglementés et il y en aurait encore à dire... !
                        Par ailleurs, dans un contexte relocalisé il serait possible de sortir du productivisme mais dans le contexte imposé par l’Union non ! smiley


                      • Hervé Hum Hervé Hum 1er août 2015 10:36

                        Ce que je retiens de cet excellent article, c’est que dans tout cela on cherche vainement où est le libéralisme économique ?

                        Il n’existe tout simplement pas, sauf en tant que mythe fait pour manipuler les esprits.

                        En fait, pour répondre à cette gigantesque manipulation consistant à engraisser quelques uns au détriment de tous les autres, il n’y a qu’une seule solution.... La coopération !

                        finalement, le mérite de cette politique commune avec la pac, a été de montrer que les agriculteurs se retrouve aujourd’hui être des salariés de Bruxelles et que fondamentalement, cela ne leur pose pas de problèmes dès l’instant où c’est suffisant pour vivre !

                        Bref, quand les gens réaliseront que finalement, la société fonctionne uniquement grâce aux salariés des entreprises et même ici où les agriculteurs ont tous les aspects du salariat, puisqu’ils doivent se plier aux dictats de leur employeur, indirect certes, mais tout aussi impérial, ils supprimerons le patronat qui n’a pour d’autre fonction que de prélever la plus-value pour la reverser aux propriétaires et autres rentiers monétaires. La concurrence économique n’a d’autre fonction que de justifier ce patronat, car en économie coopérative, celui ci perd toute justification et est clairement désigné comme l’ennemi.

                        L’économie en mode coopération n’a besoin que de coordination pour bien fonctionner,et seulement de coordination, en aucune manière elle a besoin de patrons et de concurrence (celle ci agit à un autre niveau, sur les projets et non sur les produits eux mêmes), seulement pour la maintenir en servitude et esclavage au profit de la minorité propriétaire des moyens de production

                        donc, ni l’Europe, ni les USA, ni aucun pays sur cette planète n’est un problème, le seul problème, c’est la concurrence et celle ci s’appuie sur la propriété. Autrement dit, si la volonté des gens est de résoudre tous ces problèmes économiques, sociaux, politique, environnementaux, ils doivent revenir à sa source, son code source, sa relation de causalité première et ce n’est autre que la propriété.

                        Tant que la majorité des citoyens ne comprendront pas et refuseront se fait, rien ne changera et tout ira de mal en pis. On ne s’affranchit pas d’une relation de causalité, on la change ou on la ni, mais dans ce dernier cas, la conséquence est de renforcer la relation de causalité et la rendre toujours plus violente.

                        En attendant, comme le dit Bossuet « Dieu se rit de ceux qui vénèrent les causes dont ils déplorent les conséquences »


                        • Captain Marlo Fifi Brind_acier 2 août 2015 20:19

                          @Hervé Hum
                          Tous vos commentaires ne servent qu’à protéger les Traités européens en dédouanant la construction européenne... S’il y a bien un domaine dans lequel les coopératives sont légion, c’est celui du lait ! Elles sont pourtant en difficulté aussi, puisque elles sont en concurrence avec des productions moins chères.


                          Puisque vous en restez à Marx au 19e siècle, que dit-il sur l’ Union européenne, et le Nouvel Ordre Mondial ? Et sur TAFTA, il dit quoi ?

                        • CN46400 CN46400 2 août 2015 14:13

                           Et il arrive que les produits agricole mal payés en France soient bradés sur des marchés étrangers où ils ruinent les paysans locaux, lesquels n’ont d’autre solution de traverser les mers pour venir ici tenter de trouver une place dans notre « eldorado »....Et la boucle est bouclée !


                          • CN46400 CN46400 2 août 2015 15:02

                            Histoire vécue : çà a eu payé..


                             Septembre 1969 : mon père et ma mère viennent de vendre leur cheftel (10 vaches laitières). Avant de louer l’exploitation (8 hectares cultivables, veaux sous la mère + lait au détail), ils font les comptes de l’année qui donnent une moyenne hors charges de 2000F/mois (SMIG 68 = 600F) soit le double de mon salaire de débutant de technicien des télécoms.

                              Juillet 2015 : Les voisins (deux frères en GAEC) qui ont repris cette exploitation plus quelques autres (200 hectares et 150 vaches laitières) ne trouvent aucun repreneur (même pas leur enfants) pour une affaire qui dispose d’une solide ardoise au.... Crédit Agricole !

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