Comment utiliser les fruits de l’embellie économique ?
Nous vivons en ce moment, pour la première fois depuis quelque années, une embellie économique européenne que nous n’attendions presque plus. De manière surprenante, en effet, l’Europe dont on pensait qu’en devenant l’équivalente de l’économie américaine, elle allait pouvoir jouer ce rôle d’entraîneur de l’économie mondiale, traditonnellement joué par les Etats-Unis, n’arrivait pas à jouer ce rôle de locomotive. Je n’épiloguerai pas sur les raisons de ce "retard à l’allumage" du moteur économique européen, ce n’est pas l’objet de ce message. Saluons le retour de cette croissance, et intéressons-nous maintenant à la manière dont nos gouvernants pensent utiliser les fruits de cette embellie.
En France, dans la plus pure tradition médiatique, on nous parle de nouveau de cagnotte fiscale, et on réfléchit à comment s’accorder, en cette année préélectorale, quelques dépenses supplémentaires, en oubliant que l’expression cagnotte fiscale est totalement impropre, puisqu’il ne s’agit en fait que d’un moindre déficit dans l’exécution du budget de l’Etat. Même avec l’embellie économique, notre budget malheureusement restera dans le rouge pour la 24e année consécutive, et les dépenses continueront à excéder les recettes d’environ 20 %. Mon message du 16 septembre sur le coût de l’intervention au Liban pourrait bien d’ailleurs sonner le glas de ce " moindre déficit". Signalons qu’un même débat sur l’utilisation de ce "moindre déficit" se déroule en Allemagne, avec une partie de la classe politique qui en demande la redistribution. Ils ne sont pourtant pas en période préélectorale...
Bruxelles vient en revanche de conseiller à certains de ses Etats membres, la France, l’Allemagne et l’Italie, de profiter de cette embellie économique pour au contraire rembourser leurs dettes et réduire le déficit public. Et non pas, comme cela s’était produit dans les années 1990, lors de la dernière reprise économique, d’en profiter pour faire de nouvelles dépenses et de nouveaux cadeaux fiscaux, à l’exemple de MM. Gerhard Schröder en Allemagne et Lionel Jospin en France. Nous verrons si cet avis de bon sens sera suivi de quelque effet.
Une autre catégorie de "promoteur de dépenses" en France est le nouvel eldorado des dépenses des régions, créé par la loi de décentralisation de Monsieur Raffarin, les 22 roitelets qui bénéficient de l’avantage de ne pas paraître avoir de responsabilité directe dans le respect des 3 % de déficit et des 60 % au maximum du PIB en dette publique. Leur déficit est pourtant pris en compte dans le calcul des 3 %, mais du fait de leur émergence récente dans la vie politique du pays, le grand public n’associe pas encore ses élus régionaux aux déficits et aux taxes (foncière et d’habitation, TIPP, etc.) dont ils ont maintenant la responsabilité. J’ai eu l’occasion dejà de vous signaler que c’était là le grand danger de la décentralisation, que de permettre à l’Etat et aux régions de poursuivre, chacun de son côté, des dépenses parfois somptuaires, en s’en accusant mutuellement !
Un rapport de la banque Dexia, spécialisée dans le financement aux collectivités locales, nous dit que la tendance est à la hausse forte de ces dépenses, avec des budgets d’investissement local de ces collectivités locales en hausse de 7 % en moyenne, et des budgets de fonctionnement en hausse de 5,7 %. Les frais financiers des collectivités locales augmentent pour la première fois depuis dix ans de 200 millions d’euros. Le cycle endettement, frais financiers supplémentaires à la charge future de nos enfants, et à terme impécuniosité de ces collectivités est donc bien lancé !
Autre élement d’augmentation, la fiscalité locale directe, taxe foncière et taxe d’habitation, qui doit augmenter cette année de 3,5 %. Comme si chacun d’entre nous voyait ses revenus progresser de 3,5 % cette année.
Constatation finale : la hausse des prélèvements obligatoires, et de l’endettement, n’a aucune raison de ne pas se poursuivre, quoi qu’en dise Bruxelles...
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