Crises économique, énergétique, environnementale : exercice d’anticipation
Face aux crises qui se développent actuellement, à quel futur peut-on s'attendre en suivant la voie actuelle ? Petit exercice d'anticipation.
Crise de la dette
La crise de la dette des pays dits développés ne se résoudra pas sans qu'ils ne fassent défaut.
Prenons l'Union Européenne, la faillite de la Grèce est déjà actée. Les taux d'emprunt de l'Italie ont explosé. L'Espagne, le Portugal et l'Irlande ne sont pas dans une situation plus enviable.
Prenons la France. Va-t-elle se retrouver dans la même situation ? Soit nous avons recours à un plan d'austérité qui va, comme dans les autres pays, nous amener en récession. Dans ce cas, la dette sera encore plus importante en regard de la richesse produite. Les taux d'emprunt vont donc augmenter devant cette augmentation relative de la dette, ce qui contribuera à aggraver la situation. Autre solution, nous avons recours à un plan de relance ce qui ne correspond qu'à acheter de la croissance avec de la dette. Quelle utilité ? Aucune. Ça coûte même plus cher que ça ne rapporte. Ce qui nous laisse le choix, en restant dans les schémas de pensée actuels, entre augmenter la dette et augmenter la dette.
De toute façon une telle situation était inéluctable : depuis 1975 le taux de croissance du PIB est inférieur aux taux d'intérêts : en moyenne 1,95% de croissance par an depuis 1975 contre des taux d'intérêts moyens à 6,14%. Si les intérêts augmentent plus vite que le PIB il n'est pas difficile de comprendre qu'à un moment le remboursement de la dette avec les intérêts risque de poser un problème majeur.
Crise énergétique
Mais cette crise de la dette n'arrive pas de nulle part et est liée à une crise de l'énergie. L'énergie bon marché n'est plus. Le baril de pétrole coûte plus de 100 $ alors qu'il y a 10 ans, il en coûtait cinq fois moins ! Avec cette énergie qui se raréfie nous sommes face à un problème majeur car nous ne disposons pas de pétrole (ni de gaz ni de charbon) et sommes donc contraints de l'importer selon le bon vouloir des exportateurs. Nous savons que la demande de pétrole aura de plus en plus de mal à être satisfaite dans les années à venir. Cette raréfaction de l'énergie produira un ralentissement de l'économie (une récession pour dire les choses) en raison du surcoût de l'énergie. Cela ne va certainement pas améliorer la situation de la dette.
Quelle solution aura alors un gouvernement pour résoudre ce problème ? Avoir recours à d'autres sources d'énergie. Quelles sont-elles ? On pourrait penser aux biocarburants. Ceux-ci sont polluants, contribuent à augmenter les prix des denrées alimentaires et donc aux famines dans le monde mais ce n'est certainement pas ça qui arrêterait un gouvernement en recherche de toute solution. Quelle autre solution ? Nous avons des réserves de gaz et pétrole de schiste sur le territoire français. Si pour l'instant on n'y touche pas trop, il est probable que face à une récession dramatique, des approvisionnements en gaz ou pétrole aléatoires, un gouvernement n'hésite pas longtemps avant d'autoriser des forages à gogo pour s'assurer une indépendance énergétique. Même si les gaz de schiste ne sont probablement qu'un miroir aux alouettes.
Crise environnementale
L'utilisation de biocarburants contribue au réchauffement climatique, l'exploitation de gaz de schiste, en l'état des connaissances actuelles, contribue à la pollution de l'environnement local (terres et nappes phréatiques). L'utilisation des gaz ou pétrole de schiste émet également des gaz à effet de serre, aggravant le réchauffement climatique.
Ainsi la crise économique actuelle se confrontant aux limites de notre planète (manque d'énergie), produira ses conséquences sur le climat futur. Nous savons d'ors et déjà que la limite de +2° de réchauffement qui avait été fixée comme objectif lors du sommet de Copenhague est quasiment hors d'atteinte. Ainsi nos gouvernants, la tête dans le guidon, n'étant obsédés que par une chose : le remboursement de la dette, ne remplirons non seulement pas leur objectif mais aggraverons la situation et contribuerons en plus à détruire l'environnement pour les générations futures.
Si l'analyse ci-dessus est principalement centrée sur la France, c'est parce que les données sur ce pays sont, pour moi, plus facilement accessibles. Mais l'analyse est facilement transposable à un autre pays comparable, en particulier à un autre pays de l'UE (ou aux États-Unis ou au Canada). Par exemple croire que l'Allemagne grâce à une gestion qui serait rigoureuse, grâce à une population qui serait travailleuse s'en sortirait sans problème n'est qu'une illusion.
Premièrement les grecs travaillent plus que les allemands, ce n'est donc pas un critère. Deuxièmement, le modèle allemand est basé sur les exportations. Si les autres pays sont dans la panade, l'Allemagne ne tardera pas à suivre le mouvement. D'autant que leur population est vieillissante et donc le financement des retraites est davantage un problème pour eux que pour nous.
Quelle solution ?
En dépit de cette analyse qui pourrait être considérée comme pessimiste, ou réaliste c'est selon, je ne considère pas pour autant que nous allons nécessairement dans le mur. Je pense seulement que les personnes qui nous gouverneront probablement ne sont pas celles qui prendront les mesures nécessaires pour sortir du carcan actuel.
Il faut clairement faire défaut de la dette puisque nous ne pourrons pas la rembourser. Le plus tôt sera le mieux. Peut-être faudra-t-il profiter de l'occasion pour nationaliser les banques, comme le suggère Frédéric Lordon. En tout cas il faudra arrêter cette idée folle qui consiste à faire emprunter un État sur les marchés, mettant de fait les États dans leur main. Désormais les États sont gouvernés par les agences de notation et par les traders. Berlusconi et Papandreou n'ont pas démissionné à cause de manifestations mais à cause du taux d'intérêt des emprunts de leurs pays !
Ensuite il faut se préparer à la fin de l'ère d'abondance. Il faut prévoir et changer toutes nos infrastructures pour qu'elles puissent faire face à une diminution générale de l'accès à l'énergie (isolation, transports, agriculture).
Je ne vois personne susceptible d'être élu et d'appliquer un tel programme. D'où mon pessimisme…
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