Economigate : les économistes sont des menteurs !
L’euro est attaqué. Ainsi causent les éditorialistes. Eh alors ? Ce qui est attaqué, c’est la subtilité du langage qui naguère, collait avec le réel alors qu’il joue de plus en plus avec l’irréel. N’avez-vous pas entendu causer de l’offensive du froid. Eh bien c’est vrai, l’offensive est présente chaque hiver. Des millions de réfrigérateurs d’atmosphère se déploient sur le territoire. L’armée du froid occupe la France. Et l’euro est attaqué. Le lecteur pressé peu directement aller à la conclusion de ce billet.
Réfléchissons un peu sur l’économie et le savoir. Quand une situation est complexe, comme peut l’être toute configuration d’un système ou d’une société, et qu’il se produit une défaillance, une crise, alors il faut réagir, il faut faire.
Proposition : tout faire dans un environnement suffisamment complexe nécessite un savoir-faire. Et pour le justifier, un faire-savoir auprès des gens concernés.
Scolie : quand les responsables prétendent qu’ils ne peuvent pas faire, il se produit ou bien un déficit dans la puissance du faire, ou bien une absence de savoir. Quand il y a une telle carence, ou bien on ne sait pas, ou bien on ne veut pas savoir. Aussi curieux que cela puisse paraître, surtout quand on vit dans un pays se réclamant des Lumières, de la raison, de Jules Ferry, de l’instruction, certains dispositifs fonctionnent comme s’ils avaient pour tâche de maintenir les individus dans l’ignorance.
L’euro est attaqué, ouais, certes. Disons que l’euro se déprécie. Le terme est plus exact. Aussi étrange que cela puisse paraître, l’euro n’est jamais au bon taux. Quand il est trop élevé, il pénalise les exportations et l’emploi et ça gémit dans les chaumières de la gouvernance économique, mais quand il s’oriente à la baisse, il est attaqué par les méchants spéculateurs et ça gémit dans les chaumières de la gouvernance économique. Pas besoin d’être savant pour interpréter ce vaudeville de chiffre. L’économie va mal mais la faute c’est à l’euro. Pour le dire autrement, les économistes nous prennent pour des cons et comme dirait Coluche, ils ont raison, on doit l’être un peu… con.
Des cons à la confusion il n’y a qu’un pas. On peut lire dans les colonnes de la presse que les méchants spéculateurs s’attaquent à l’euro en attaquant la Grèce, l’Espagne, le Portugal. C’est bien là une splendide confusion. Les financiers peuvent certes jouer sur les dettes de ces pays mais le cours de l’euro se décide avec d’autres facteurs. Et qui peut raisonnablement croire que les finances vacillantes de la Grèce puissent être déterminantes dans le cours de l’euro ? Bref, encore de l’enfumage. Le sort de l’euro se décide selon les règles d’appréciation dans les échanges monétaires. Les spéculateurs ne sont pas des farceurs jouant avec l’euro, ils ne font qu’en apprécier la juste valeur en fonction de divers paramètres. Les déficits publics des Etats de l’eurogroupe justifient une dépréciation. Les médias présentent un euro à 1.3 dollar comme une tragédie. Il fut un temps pas si ancien où un euro ne valait pas un dollar. Et le monde a continué à tourner. Le Portugal, la Grèce et l’Espagne sont les coupables désignés. Mais si l’euro plonge, c’est aussi la faute à l’Italie et la France. Quant à la refinanciarisation de la Grèce à des taux de 6 points (contre 2 pour l’Allemagne) le principe est le même que pour le micro crédit. Plus le créditeur est fragile, plus les taux montent, mais rien de neuf, on ne prête qu’aux riches et doit-on ajouter, à des taux raisonnables.
Bref, ces jérémiades de commentateurs servent la communication d’un ensemble d’élite qui ou bien ne comprennent rien, ou bien nous arnaquent, mais de ces deux choses l’une, la seule qui compte, se dédouaner et désigner des facteurs climatiques faisant que les responsables sont démunis face à la crise et aux inégalités. La vérité, c’est qu’il y a conflit d’intérêt entre les économistes et la finance. C’est évident. Des économistes décidant de servir les peuples seraient condamnés à vivre de subsides. Le plus important pour un économiste, c’est de conseiller les princes de la finance. De ce point de vue, l’économiste sait et les financiers font, mais pour irriguer la société dans son ensemble, là, l’économiste ne sait plus et les gouvernants ne font pas. C’est logique, car le faire dépend d’un savoir.
Le savoir sert celui qui sait s’en servir. Il dessert ceux qui en sont privés. Deux exemples. Eurotunnel ou Natixis. Ceux qui savaient on su attirer l’épargne de ceux qui ne savaient pas. Les uns ont réalisé des bonnes opérations, les autres non. La grippe H1N1. Les autorités savaient au moins comment réaliser le plan coûteux et inutile de vaccination. La société civile a dû accepter cette bureaucratie sanitaire, surtout parce qu’il n’y a pas eu de dénonciation de la part des médias. Ces élites de la santé publique ont fait comme si elles savaient, y compris en se réclamant de la précaution. Elles ont su surtout préserver leurs intérêts et défendre leurs positions. Vaccination ou Natixis, ceux qui font savoir qu’ils savent sont les bénéficiaires du système. Bref, ceux qui savent, et qu’on pense être les dépositaires du savoir utile et nécessaire, sont les maîtres du jeu.
Qu’il s’agisse de Natixis ou de la grippe pandémique, le paradigme est clair. Ceux qui savent sont ceux qui en premier lieu savent défendre leurs intérêts et c’est aussi le cas de l’économie avec ces experts qui reçoivent des prébendes offertes par le monde de la finance qui n’est pas fauché et peut soudoyer les économistes en versant quelques maigres sous comparés aux salaires des cadres, directeurs et autres bonus des traders. En bons samaritains dociles, ces économistes causent dans les médias en diffusant quelques explications fallacieuses permettant de justifier aux yeux du public l’impuissance des autorités. Bref, ces économistes ne savent pas comment réduire les inégalités mais ils savent comment augmenter les profits. Etrange ? Non !
Les historiens du futur sauront faire le lien entre le climagate, le pandémigate et l’économigate. Des gens qui ont un savoir et s’en servent en jouant sur l’impuissance de ceux qui en sont dépourvus. Mais rien n’est définitivement acquis et si la lutte des classes est dépassée, le combat des savoirs est lancé.
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Conclusion. Un indice dévoile le mensonge des économistes. Un mensonge par manque de vision. Ou du moins par vision orientée. Les économistes ont les yeux sur les chiffres et plus spécialement, sur les taux de profit et la croissance mais pas par souci de la société, non, plutôt par intérêt. Du coup, un JM Sylvestre a pu sortir dans une conférence la vulgate séquentielle qui arrange la chose. Phase 1, milieu 2008, crise immobilière et financière, septembre 2008, Lehman Brothers en faillite. Phase 2, crise du crédit, les banques ne veulent plus se financer et financer l’économie. Phase 3, 2009, la crise économique. Phase 4, la crise sociale. En vérité, les choses ne se sont pas passées ainsi car bien avant la faillite de Lehman Brothers, les indicateurs montraient que la crise économique était bien entamée. Pour preuve, ces diagrammes de la Banque de France et un premier constat avec la plongée des investissements au second semestre 2007, soit plus d’un an avant la crise financière tant médiatisée et redoutée. La trésorerie des entreprises et le résultat d’exploitation ont commencé à décliner avant la faillite de Lehman Brothers. Ces éléments sont complétés par le taux d’utilisation des capacités industrielles, un taux dont la chute a débuté fin 2006.
Six mois avant la crise financière, les indices d’un problème économiques étaient présents. Rares sont ceux qui avaient parlé de ce clash. Sur Agoravox, un chroniqueur avait alerté les lecteurs sur quelques signaux financiers devant être pris au sérieux, parlant d’une année grise, puis noire en 2008. Non sans quelques prédictions qui se sont avérées inexactes puisque la Chine a continué ses exportations alors que le dollar ne n’est pas effondré ; c’est même l’inverse.
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