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Accueil du site > Actualités > Economie > Le microcrédit mal connu du grand public

Le microcrédit mal connu du grand public

Le microcrédit même s’il fait partie des instruments utiles de développement économique, reste mal connu du grand public.

En 2005 avec l’attribution du prix Nobel de la paix à Mohammed Yunus, le grand public a découvert le microcrédit. Cela consiste à prêter de petites sommes d’argent à des individus très pauvres et exclus des systèmes bancaires traditionnels pour qu’ils puissent lancer une activité commerciale ou artisanale et ainsi améliorer leur niveau de vie.
Ces personnes démunies réputées insolvables affichent des taux de remboursement proches de 100%. Les taux d’intérêt auxquels prêtent les institutions de microfinance, organismes qui font office de banque auprès de ces populations, sont encore relativement importants (même s’ils restent très inférieurs aux taux pratiqués par les prêteurs informels des villages). Pourtant le taux de défaillance des microentrepreneurs est quasi nul.

Pourquoi les taux d’intérêt restent-ils élevés si le risque est faible ? Deux raisons permettent d’expliquer cette anomalie.
La première raison : les coûts de transactions sont très élevés. Les bénéficiaires de ces micro prêts sont souvent dans des zones rurales. Le déboursement des prêts et la collecte des remboursements se fait lors des tournées des agents de crédits, qui ont lieu quotidiennement, ou chaque semaine au domicile ou au magasin de chaque microentrepreneur. Cela coûte très cher. La productivité des institutions de microfinance est encore très faible. Ces taux d’intérêts élevés répondent ainsi à une certaine logique économique.

La seconde raison : l’activité de microcrédit est encore largement méconnue, il n’existe pas encore de modèle unifié d’analyse de risque adapté à ce segment de marché. Toutefois, des agences de notation connues des banquiers traditionnels, comme Standard & Poor’s, ainsi que des agences spécialisées comme M-Cril ou Planet Rating, ont développé des outils d’analyse et fournissent des « credit rating » des institutions de microcrédit. Mais malgré cela le secteur reste encore confidentiel. En économie comme dans la vie réelle ce qui est mal connu est considéré comme risqué, même si la réalité est différente. Il y a donc un formidable travail d’éducation et de communication à faire :
 - Education du grand public à qui proposer des produits d’épargne spécifique ; On voit d’ailleurs des fonds se développer dans le secteur de la microfinance
 - Education des futurs banquiers et gestionnaires d’actifs. Cela passe par un enseignement dans les écoles de commerce, les universités de gestion et les écoles d’ingénieurs où sont formés les banquiers de demain.

La communication auprès du grand public avance avec des événements focalisés sur le microcrédit et qui depuis l’attribution du prix nobel de la paix à Mohammed Yunus trouvent un certain échos dans les grands médias. On peut notamment citer la semaine du microcrédit qui se tient chaque année en France en juin à l’initiative de l’Adie.
Le microcrédit est aussi devenu une réalité tangible pour les internautes avec la création de plateformes de microcrédit en ligne ou « social lending plateform ». Un peu à la manière d’Ebay ces sites permettent à des internautes de financer des microentrepreneurs en ligne. C’est le site americain Kiva.org qui a lancé ce concept. Des plateformes européennes ont vu le jour avec MyC4.com au Pays Bas et Veecus.com en France.Si ces plateformes sont des concepts intéressants la demande de microcrédit est telle que seules les banques pourraient y répondre de manière efficace et globale.

A ce titre il est intéressant de noter que des enseignements spécialisées se développent dans les écoles de commerce. C’est notamment le cas de l’Essec qui a lancé une chaire « d’économie solidaire ». Ainsi quand dans 10 ans ils seront à des postes de responsabilité dans des banques, on peut espérer que ces nouveaux banquiers apportent un regard plus rationnel sur les activités de microcrédit qui ne leur seront pas inconnues.


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11 réactions à cet article    



    • plancherDesVaches 5 mars 2009 11:47

      Un peu de précisions sur veecus.com :
      http://quotidiendurable.com/news/veecus-le-micro-credit-de-particulier-a-particulier

      J’ai tout de même l’impression que vous ne voyez pas trop bien la réalité depuis les écoles de commerce.
      Le micro-crédit existe depuis que l’argent existe.

      - prêts entre parents et/ou amis.

      - prêts au sein d’une communauté au sein de laquelle la confiance existe.
      (pas la confiance des libéraux, la confiance parce que l’on connait l’autre. Ainsi, lorsque je veux travailler avec une entreprise : je la visite. Avec un peu d’expérience, vous voyez EXACTEMENT comment elle fonctionne. Et ça se voit aux locaux, au rangement, à l’activité, mais aussi à la tête des gens...ceci, en gommant toute subjectivité)

      Etonnant qu’il n’y ait pas eu de pub pour l’ADIE, d’ailleurs. Ce cher organisme qui demande un garant.

      Ce n’est pas le premier article que je vois vantant le micro-crédit. (né en Inde, je crois) et qui semble surfer sur un retour pressant à des valeurs plus humaines.
      Le bio semble marcher de la même manière.


      • K K 5 mars 2009 17:12

        Sauf qu il est tres rare de demander des interets lorsque ce credit se fait entre amis ou en famille. La on trouve des interets qui laissent les boites de credits traditionnelles reveuses a la vue du taux. Si elles ne s y interessent pas, ce n est pas a cause du risque, mais parceque le pret moyen de ces microcredits est trop faible pour le temps passe a ouvrir un dossier


      • Annie 5 mars 2009 12:43

        Un chiffre intéressant est que sur les 25 millions environ de personnes dans le monde qui utilisent le microcrédit pour financer des activités rémunératrices, 90% sont des femmes. 


        • Emmanuel 5 mars 2009 14:05

          Le micro-crédit n’est rien d’autre qu’une mesure de renforcement du capitalisme qui vise à démontrer qu’on peut utiliser même avec les très pauvres la technique de l’endettement qui vise tout à la fois à :


          - développer une vision marchande de la société (chacun a vocation ’à créer son business)

          - faire des bénéfices sur de l’argent prêté à ceux qui n’en n’ont pas (et ce n’est pas par philantropie que de grandes banques se lancent dedans)

          - contrôler socialement ceux dont l’activité et la vie dépendront ensuite du remboursement de leur emprunt.

          Il s’agit en quelque sorte d’assujettire éternellement les victimes du système au système lui-même et d’échapper à toute alternative qui viserait à socialiser l’activité au sein de coopératives ou d’entreprises publiques.

          C’est avec ce système qu’il faut en finir.


          • Annie 5 mars 2009 14:52

            @Emmanuel,
            Vous avez une vision très réductrice des choses. Dîtes-moi, une fois que vous en aurez fini avec le système capitaliste, vous allez nationaliser toutes les petites échoppes qui vendent de l’alimentation, tous les tailleurs, etc.... ? La raison pour laquelle le microcrédit est tellement prisé par les femmes, est que loin de les asservir, il leur permet de s’affranchir de la dépendance vis-à-vis de leurs conjoints, de décider comment et sur quoi dépenser leur argent (des études montrent qu’elles sont plus susceptibles de dépenser cet argent pour améliorer l’alimentation, l’éducation et la santé de leurs enfants), bref il leur offre l’indépendance financière qu’elles n’ont jamais eue, et la liberté aussi de défendre leurs droits, et aussi de combattre le capitalisme si cela leur chante, mais au moins elles ont un choix.


            • Emmanuel 5 mars 2009 16:08

              @ Annie


              Vous pourrez trouver ici une analyse du micro-crédit appliqué notamment aux femmes par un spécialiste du développement dont je cite un extrait :

              "Cependant, la question est plus complexe. D’une part, les femmes sont loin d’être toutes dépourvues d’accès à des liquidités monétaires. D’autre part, s’endetter, avant d’éventuellement s’enrichir, c’est s’appauvrir. Enfin, derrière l’aspect charitable ou égalitariste du micro-crédit pour les femmes, les banques escomptent surtout d’énormes profits. A ce sujet, on se référera avec profit au passionnant travail d’Hedwige Peemans Poullet (Peemans Poullet, 2000). Celle-ci montre bien d’abord qu’il existe dans le monde un ensemble de systèmes d’épargne traditionne à vocation sociale et sans intérêts, souvent gérés par des femmes —notamment en Afrique sous la forme des Tontines—, qui leur permettent de disposer d’argent liquide quand elles en ont besoin. Il n’est pas innocent de présenter les femmes —du Sud— comme des victimes passives qui attendent la main tendue qu’un banquier généreux s’intéresse à leur sort. Les micro-crédits accordés aux femmes, par contre, sont souvent assortis de taux d’intérêt élevés, parfois plus que les taux du marché comme dans le cas de la Grameen Bank. Or, toutes les études le prouvent : les femmes sont d’excellentes débitrices, capables de se saigner à blanc pour rembourser les prêts. C’est pourquoi Peemans Poullet souligne que les principaux bénéficiaires de ces micro-crédits sont plutôt à rechercher du côté des banques, qui espèrent ainsi drainer à leur profit au moindre risque les sommes considérables que génère l’épargne traditionnelle. Elle souligne également que la Grameen Bank, qui fait par ailleurs campagne pour la privatisation des services publics et la disparition de la protection sociale au Bangladesh, réutilise aussitôt l’argent gagné pour investir dans de très lucratives assurances de santé, d’éducation et de retraites. Ce n’est sans doute pas un hasard si d’autres fervents défenseurs des privatisations (en particulier les Etats-Unis et l’AID, déjà évoquée) appuient avec enthousiasme les politiques de micro-crédits".






            • Annie 5 mars 2009 16:49

              Merci Emmanuel,
              En fait je ne voulais pas rentrer dans les détails, mais je pensais justement au système de tontines, ou aussi modèles de prêts comme les kamitis au Pakistan qui sont des prêts accordés par les voisins ou les clubs d’épargne au Bangladesh pour l’achat des rickshaw. Vous avez raison lorsque vous dites que les femmes sont plus débrouillardes qu’on ne le pense généralement, mais ce n’est pas vrai de partout, et elles sont terriblement désavantagées par rapport aux hommes quand elles veulent obtenir un prêt. C’est pour cela que l’idée d’associations à but non lucratif est intéressante dans ce cas. 


            • bernard29 bernard29 5 mars 2009 16:40

              Pourquoi les taux d’intérêts sont élevés dans le microcrédit ? 
              Une explication. 
              parce qu’il faut payer "ATTALI" et sa fondation Planet finance. ( subventionnée par l’ONU) ; Il faudrait voir le montant des frais de fonctionnement de ctte fondation par rapport aux crédits distribués (enfin vendus !!!)

              Il a déjà fait le coup à la BERD, où les frais somptuaires au siège social pesaient plus lourd que les prêts aux Etats de l’Europe de l’EST.

              Une solution  

              certains taux d’intérêt frisent l’usure. Bientôt nous aurons des Edouard Leclerc du micro crédit. Sous le couvert des frais de fonctionnement on profite de l’honneteté des emprunteurs.pauvres.

              l’ONU serait bien inspirée de promouvoir l’organisation de banques de micro crédit, publiques, contrôlées par les clients, et limitant drastiquement les taux d’intérêts, dans les Etats en développement , de telle sorte que les salaires des percepteurs ne soient pas beaucoup plus élevés que ceux des emprunteurs. Sinon, il vaut mieux être soi même banquiers de micro crédit qu’emprunteur.


              • plancherDesVaches 5 mars 2009 20:44

                L’ONU étant un organisme piloté par les US, cela m’étonnerait qu’il n’y ait pas récupération d’un bénéfice potentiel car juteux.
                Système d’exploitation décrit aussi par Emmanuel, juste au-dessus.


              • jeanpierrecanot jeanpierrecanot 6 mars 2009 10:13
                LE MICRO CREDIT N’EST QUE LA TOUTE PREMIÈRE ÉTAPE D’UN SYSTÉME MILLÉNAIRE
                 
                Micro finance et micro crédit sont devenus depuis quelques années la solution miracle chaque fois que la banque traditionnelle ne veut pas intervenir.
                C’est le cas dans les pays en développement où la Banque Mondiale, qui n’a d’ailleurs fait que des erreurs, après avoir fermement rejeté Muhammad YUNUS et sa Grameen Bank, en a fait le modèle que tous doivent retenir.
                 
                C’est le cas dans les pays développés où fleurissent les initiatives permettant aux tenus à l’écart par les banques de trouver des financements dont, si on y regarde bien, la ressource est procurée par ces mêmes banques au travers parfois de filiales qu’elles ont créées.
                 
                La crise actuelle où le système bancaire tend à limiter les crédits, est l’occasion pour certains de considérer que la micro crédit est une des solutions sinon la solution à cette crise.
                 
                Dans la recherche de solutions de financement pour les plus démunis que le système bancaire traditionnel maintient à l’écart de ses interventions, on oublie systématiquement le modèle coopératif qui il y a plus de cent ans apportait la solution à l’agriculture française notamment.
                Le micro crédit, la micro finance sont devenus les tartes à la crème du développement depuis que Muhammad YUNUS en a été déclaré l’inventeur.
                 
                Muhammad YUNUS et la Grameen Bank du Bengladesh n’ont pourtant rien inventé du tout, ce qui n’enlève d’ailleurs rien à leur mérite.
                 
                La Grammeen Bank et tous les modèles de micro finance qui en découlent est la première étape du modèle coopératif inventé par les Babyloniens et qui, après l’expérience des pionniers de Rochdale ou des producteurs de micocoulier dans le Gard en France, a été il y a cent ans à la base des modèles européens de la coopération agricole, notamment le Crédit Agricole français, que l’on oublie systématiquement dans les programmes de développement au profit du seul modèle de Muhammad YUNUS porté désormais aux nues.
                 
                Le problème est que malgré tous ses mérites, le modèle mis en œuvre dans cette seule première étape, ne marche pas – à l’échelle de l’économie globale- et ne marchera jamais, pas plus d’ailleurs que les modèles coopératifs européens pris dans leur forme actuelle et que nous nous acharnons à développer en vain depuis les indépendances.
                 
                Il faut pour mobiliser le maximum de ressource bancaire vers le secteur agricole sous forme de prêts, bancariser les populations rurales de façon à ce que tous les flux financiers résultant de leur activité –essentielle dans les pays en développement, il s’agit du secteur primaire- restent dans ce secteur et ne s’évadent pas vers la banque commerciale, qui dans la meilleure des hypothèses fera semblant d’aider l’agriculture en avançant des fonds aux organismes de micro finance qu’elle crée la plupart du temps sous forme de filiales.
                Ceci est vrai aussi pour les autres secteurs et pour nos pays en ce qui concerne les laissés pour compte du système bancaire traditionnel.
                 
                Cette mobilisation indispensable de la ressource de base qui devra d’ailleurs être complétée notamment pour les investissements longs ne peut se faire qu’au travers du modèle coopératif qui a fait ses preuves depuis des siècles.
                Encore faudrait-il que ce modèle soit et reste l’authentique, et ne soit pas remplacé par les ersatz infâmes que l’on a vu se développer tant en Afrique que dans les pays communistes et qui ont conduit à la ruine et à l’abandon de ce modèle coopératif .
                Ceci ne pourra se faire que par la mise en place de lois et règlements propres à la Coopération, agricole notamment, et qui en retiennent impérativement les authentiques principes de base.
                 
                Au Sénégal en particulier, la tentative faite au début des années 80 de mise en place d’une caisse de crédit agricole s’est très vite soldée par un échec, parce que l’on s’est refusé à adopter le modèle coopératif pour ne faire qu’une banque commerciale de plus qui ne s’intéresse pas à l’agriculture et aux plus pauvres.
                Vingt ans après en 2004 au constat que dans la vallée du fleuve les terres irrigables suite à la construction des barrages ne sont toujours pas mises en valeur, d’aucuns posent béatement la question : « Mais que fait donc le Crédit Agricole ? »…
                 
                Ce n’est pas la multiplication des initiatives de micro finance au travers des MEC (Mutuelles d’Épargne et de Crédit) qui permettra d’apporter une solution.
                Personne ne semble prendre conscience du rôle essentiel que pourrait jouer dans ce pays, et dans l’ensemble de la zone sahélienne la seule structure qui s’appuie sur le modèle coopératif authentique : le Crédit Mutuel.
                Au-delà du fait qu’elle s’intéresse en priorité aux plus pauvres et aux plus petits, elle a le mérite énorme de pouvoir transférer à moindre coût l’épargne de la diaspora sénégalaise en France (On parlait annuellement de 300 milliards de CFA en 1984), et de la réinjecter dans l’économie rurale.
                Il faut en effet savoir que les transferts par officines spécialisées coûtent aux malheureux qui veulent renvoyer de l’argent chez eux, en moyenne 10% du montant transféré et que ces sommes n rentrant pas dans des circuits bancaires ne peuvent constituer une ressource pour faire des crédits.
                 
                Il faudrait bien se réveiller un jour et traiter le problème avec un minimum de bon sens.
                 
                Jean-Pierre Canot auteur du livre « Apprends-nous plutôt à pêcher ! »
                http:\\jeanpierrecanotbergerac.blogsudouest.com/ 
                 
                Bergerac le 15 janvier 2009
                 
                 

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