Les étranges placements de la Caisse des dépôts et consignations
Vous connaissez ou avez entendu parler de la Caisse des dépôts et consignations, cet organisme d’Etat qui gère l’argent de l’Etat qui lui est confié pour le placer au mieux et le faire fructifier. Il est supposé être le bras armé de l’Etat pour prendre des participations dans des entreprises que celui-ci considère comme stratégiques. Son rôle s’est affaibli au fil des ans à cause de l’Europe qui a limité les possibilités d’intervention des Etats dans le système économique, par la rédéfinition du rôle des Etats au cours des cinquante dernières années pour passer de l’opérateur industriel important qu’il était au sortir de la guerre à celui d’un animateur d’une économie libéralisée, et surtout par l’impécuniosité de l’Etat.
L’affaiblissement de ce rôle s’est traduit récemment, par exemple, par l’incapacité pour l’Etat de jouer un rôle dans la prise de contrôle d’Arcelor par Mittal, pour la bonne raison qu’il avait vendu depuis longtemps toutes ses actions dans cette société, ou encore par le montage complexe de la fusion entre Suez et GDF pour empêcher l’Enel italien d’en prendre le contrôle.
Il est d’autant plus étrange de s’apercevoir que la Caisse des dépôts et consignations vient de racheter à la société Eiffage qui a construit 49% du viaduc de Millau ! - Après être entrée au capital d’Eiffage en janvier qui était alors sous la menace d’une prise de contrôle non souhaitée de l’Espagnol Sacyr Vallehermoso.
Vous avez compris immédiatement, comme moi, qu’il s’agit d’une manifestation de protectionnisme, ou plutôt de patriotisme économique comme on dit maintenant, et qu’il n’y a rien de stratégique pour le pays à posséder 49% du viaduc de Millau. On vous répondra que c’est un excellent placement, et c’est sans doute vrai, quand on voit la fréquentation de cet ouvrage d’art. Eiffage a d’ailleurs dû savoir intégrer ce succès dans le prix qu’il a fait payer à la Caisse des dépôts. Mais, dans ce cas, cela voudrait dire que la Caisse des dépôts a de l’argent disponible pour des tâches non stratégiques.
Peut être nos gouvernants devraient-ils redéfinir pour nous le rôle exact de cet organisme, les secteurs d’activités qui sont considérés comme véritablement stratégiques et dans lesquels on attend que la Caisse intervienne, et surtout contrôler qu’elle s’en tienne bien à ce rôle ? Car sinon ce sera tout et n’importe quoi, le règne du copinage et du bouchage de trous à court terme, et la constatation que quand un secteur stratégique est véritablement en danger d’être absorbé, nous n’avons plus d’argent disponible pour intervenir.
Nous avons décidément un problème pour établir la frontière entre les responsabilités de l’Etat et le jeu normal de l’économie de marché.
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