L’écologie à l’école : toujours très difficile !
Le pays est dans une grande attente vis à vis de l'Education nationale en ce qui concerne l'éducation à la nature, à l'écologie, à l'environnement et au développement durable. Ce qui est attendu ce sont des sorties sur le terrain, des projets de proximités construits en partenariat, que des choses d'une grande simplicité. La circulaire de rentrée semble ignorer tout ce champ où le projet éducatif du pays pourrait pourtant se regénérer.

La circulaire de rentrée de l’Education nationale est parue au B.O. Dans les groupes, dans les réseaux, on a lu, on a relu, on a cherché, on en a parlé…et rien trouvé ou pour ainsi dire rien. La nature, l’écologie, l’environnement, le développement durable ne sont pas des priorités, pas plus que la pédagogie de projet ou le partenariat. Cette circulaire de rentrée 2011 sortie le 5 mai, c’est le moins que nous puissions dire et c’est trop triste, ne va pas motiver les enseignants, les inspecteurs, les chefs d’établissements, les techniciens des établissements à entreprendre. Et les parents, les élèves, les partenaires potentiels dans les territoires vont rester sur une profonde déception, mais là il faut le dire même si c’est dommage, ce n’est pas la première déception et certains, très impliqués pourtant dans l’éducation, regardent déjà ailleurs et n’en ont aucune émotion.
Trois ignorances
C’est comme si l’Education nationale à sa tête, vivait le temps présent dans 3 ignorances. Ignorance de la crise écologique qui prend de telles proportions qu’elle en oblige toutes les personnes et toutes les organisations à s’engager d’une façon ou d’une autre, mais à s’engager réellement.
Ignorance des bienfaits d’une éducation qui met les enfants et les jeunes dehors, sur le terrain, au contact des réalités, dans l’action.
Ignorance des milliers d’initiatives prises par, ici un prof d’APS ou de technologie, là par un chef d’établissement, ici encore un agent d’entretien, des parents, un adjoint au maire à l’éducation, une association…
Deux Education nationale ?
Nous avons l’impression aujourd’hui d’avoir à faire à deux mondes séparés : des jambes qui marchent, une tête qui bloque. Comment comprendre que d’un côté il y ait tant d’initiatives, tant de créativités, de richesses, d’ouverture et d’engagement ? Tous les français peuvent de leur fenêtre le constater sur leur territoire : il y a, même si elles sont très rares, comme les orchidées, de très bonnes actions en EEDD, quand de l’autre côté nous ne sentons que réticence, retenue, repli sur soi pour ne pas dire méfiance ? Comment se fait-il que les discours officiels affirment que l’EN œuvre énormément pour le dd et que ceux qui sont dans l’action pour l’EEDD restent dans la plus grande insatisfaction ? Là bas dans les bureaux de la rue de Grenelle, ils disent qu’ils font, mais en réalité ils ne font pas ! Il y a aujourd’hui deux éducations nationales : une qui tricote sur le terrain avec une énorme bonne volonté, des partenaires et trois bouts de ficelles, elle a des résultats pour les très peu nombreux élèves, (qui osera un pourcentage ?), qui peuvent en bénéficier et de l’autre, une qui nous dit qu’elle fait énormément pour le développement durable mais qui, en réalité, retient toute transformation. La tension est forte. Les palmes académiques sont renvoyées au ministère preuve que le temps est venu au mode ascendant. Les enseignants en rébellion deviennent légions, ils ont le plus souvent le soutien de la population qui la nuit est invitée à occuper les écoles, c’est la nuit des écoles, la tension est forte, parlons nous, c’est urgent.
un « véritable raz de marée »
Ce qui vient du haut ne marche pas, ce qui descend ne marche plus ! L’exemple de l’opération l’école agit pour le développement durable en est un des meilleurs. Opération menée par le plus haut niveau au ministère, implication de Nicolas Vanier l’une des plus grosses vedettes médiatique de l’écologie. Et puis quoi ? C’en est incroyable et je voudrais que des lecteurs témoignent, des enseignants qui ont rempli les dossiers en ligne, qui ont fait l’action avec les élèves, les enseignants qui n’ont pas compté leur temps, impliquant parfois famille et amis, les enseignants ont été comme on dit, laissés en rade. C’est incroyable ils n’ont jamais eu de nouvelles des dossiers qu’ils ont rempli consciencieusement. Je me vois encore, c’était 2008 je crois, autour de la table de la commission nationale de suivi de la décennie de l’éducation au développement durable des Nations Unis au ministère de l’écologie, le représentant de l’Education nationale avait parlé du décollage de l’opération d’une façon étonnante évoquant un « véritable raz de marée » ! S’il y a des raz de marée qui se remarquent celui-là, peu de gens en ont entendu parler. Il a fait pschitt le raz de marée, no buzz ! Et pendant ce temps là des enseignants, des parents, des élus de collectivités, s’impliquaient en toute discrétion dans des projets, qui font qu’aujourd’hui, grâce à la cantine bio par exemple, des enfants mangent des aliments beaucoup plus sains, produits à côté de l’école.
La circulaire de rentrée nous amènerait à nous demander si nous ne serions pas finalement devant un double langage. Il n’y a pas cinquante solutions, il y en a deux. Soit les hauts fonctionnaires qui posent ces affirmations sont dans la duplicité, ce que je ne crois pas, soit ils ne pèsent vraiment pas lourds face à un cabinet dont on pourrait dire cette fois qu’il est complètement décollé de la réalité.
c’était la vraie vie qu’on avait en classe
Pendant ce temps, en plus d’agir, le terrain pense et parfois résiste. Voici ci-dessous l’extrait brut d’un compte rendu d’un atelier du colloque de Digne en 2010 ; il en dit long. « En atelier, une prof dénonce les écarts entre le « caractère ambitieux des textes de l’Education nationale et les moyens donnés ». Elle identifie des freins que nous connaissons bien, les horaires fractionnés qui interdisent de faire des sorties, les emplois du temps rigides, la « méconnaissance absolue des circulaires », « l’absence quasi-totale de formation continue » et le « chacun fait comme il peut ! ». Elle relève que la « notion de développement durable semble faire obstacle » chacun considérant « le dd à sa façon », « pour certains c’est très politique, pour d’autres pas du tout ». Les leviers relèvent de l’organisation, il faut « une volonté politique forte ». « Les itinéraires de découverte (IDD) donnaient du temps pour les projets », dommage qu’il faille parler au passé ! « l’IDD ça a été une ouverture terrible », « on voulait que les élèves soient acteurs, ça nous a entrainé dans des situations insoupçonnées ». « Les élèves ont fait des propositions, ce sont eux qui donnaient les idées », « pour une fois on leur disait : qu’est ce que vous voulez faire ? ». « Pour une fois c’était la vraie vie qu’on avait en classe, ils étaient très enthousiastes ». « Avec la suppression des IDD je ne fais plus rien ». « Les enseignants ne sont pas du tout sensibilisés aux enjeux environnementaux ». L’EEDD remet en cause le système, « c’est un moyen de remettre en cause le système éducatif ». « On est loin de la généralisation ». « Le coordinateur académique motivé a démissionné ». Elle dira aussi : « la formation entre pairs c’est très important » en ajoutant que « le milieu associatif a toujours été en pointe au niveau de l’EEDD ». « Au niveau de l’Education nationale, les ressources humaines, ce n’est pas ça ! » « Il n’y a pas assez d’heures et la compétition règne dans les établissements ». Pour finir, elle se demande si la démarche E3D sera un formidable outil de changement. Une représentante d’un Conseil général dira : « il existe des classes aménagées musique, mais pas de classes aménagées développement durable ».
Le geste précède la parole
Est-ce que ça pourra tenir longtemps comme ça ? La tension devient trop forte. Pour l’éducation à l’environnement et au développement durable il y a des postulats incontournables. D’abord tous concernés, nous sommes condamnés à travailler ensemble, donc évidement avec l’Education nationale, elle-même condamnée à travailler avec les autres. Autre postulat : les transformations nécessaires sont telles que nous devons dans la plus grande humilité aller sur le terrain à la recherche de ce qui marche en se disant que les mieux placés pour dire ce qu’il faut faire, ce sont ceux qui font eux-mêmes. Oui il est temps de remettre les choses à l’endroit. Le geste précède la parole disait Leroi-Gourhan qui dans sa tête et son cœur vivait avec les hommes des cavernes, un temps c’est certain un peu moins chaotique que le nôtre.
RG
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