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Pourquoi s’emparer des conclusions du Grenelle ?

Nous l’avons déjà vu : l’éducation n’a pas eu sa part lors du Grenelle, il faudra y revenir.
Les acteurs de l’éducation à l’environnement vers un développement durable ont toutefois identifié des avancées méthodologiques indéniables. Ces avancées, si elles restent insuffisantes, méritent d’être connues, les acteurs dans les territoires peuvent s’appuyer dessus pour promouvoir la capacité de "faire ensemble". Il y a, dans les conclusions du comop 34 en particulier, des arguments qu’on aurait tort de négliger.

Les détracteurs peuvent toujours dire, montrer du doigt, critiquer en bloc… Nous serons un nombre certain à affirmer que nous avons acquis des points clés lors du Grenelle. Tous ceux qui, par la discussion et la participation souhaitent s’impliquer dans la lutte pourront y puiser des arguments à poser face à un élu, un préfet, un recteur, un directeur d’administration, un industriel...Et pourtant, ils seront nombreux à dire, ceux qui luttent pour le développement de l’EEDD (éducation à l’environnement vers un développement durable), « le Grenelle n’a rien apporté sur le volet de l’éducation ! » et ils auront aussi raison.

Si nous avons effectivement avancé sur la question de la façon d’agir pour construire la culture écologique de la société, en revanche force est de constater que l’opérationnalité n’est pas là. Il faudra encore du temps.

La question de la culture arrive après toutes les autres

Il faut bien avouer qu’en ce qui concerne l’éducation, les choses avaient plutôt mal commencé. Les associations spécialisées ont eu le sentiment d’avoir été oubliées au démarrage. Elles n’étaient pas présentes parmi les neuf ONG choisies au départ à l’été 2007. Les phases en région ont heureusement rappelé l’importance de l’éducation à l’environnement. Un Comop (comité opérationnel) 26 démarré fort tardivement sur l’éducation a soulevé quelques espérances. Hélas elles ont été vite déçues quand les participants ont constaté que le propos se focalisait sur l’enseignement scolaire.

Ce qui intéresse les acteurs dans les territoires est beaucoup plus vaste puisque c’est tout ce qui a une influence directe sur la culture de la population : l’éducation certes mais aussi l’information, la sensibilisation et la formation. C’est en fait de cela, et de tout cela, dont les forces sociales en mouvement parlent quand elles parlent d’éducation à l’environnement vers un développement durable (EEDD). Bien peu dans notre pays pourront dire ce qu’a apporté à la dynamique globale du Grenelle, ce Comop 26. Le temps nous permettra de dire s’il marquera l’histoire.

Le Comop 34 « Sensibiliser, informer et former le public aux questions d’environnement et de développement durable » a lui démarré encore plus tard. Il semblerait que la question de la culture arrive après toutes les autres et pourtant c’est la vie quotidienne de chacun des habitants de la terre qui accentue ou non le problème environnemental. Et c’est bien selon sa propre culture que l’on mène son existence. C’est bien du fait de leur culture que les Yanomanis d’Amazonie ou les bochimans du Kalahari ont développé des modes de vie respectueux de l’environnement. Espérons que personne ne pense plus qu’il puisse y avoir des cultures secondaires dans l’humanité.

Se consacrant à l’information, la sensibilisation, la formation, en quoi le Comop 34 change-t-il les choses ? Quoi de neuf ?

Tous différents, tous ensemble

Mettant en avant des idées comme « donner envie de participer et de faire ensemble » les conclusions du Comop 34 nous invitent à entrer dans le mode d’organisation que propose la pensée complexe. Ce rapport du Grenelle marque véritablement l’entrée en action de la pensée complexe au niveau national. Vision qui invite à y aller, tous différents, tous ensemble. On ne cherche pas à se ressembler et à savoir derrière qui il faut avancer, on cherche à comprendre par soi-même et à faire ensemble dans le respect des identités de chacun. Dans le rapport il est question d’opérations « co-construites », de « partenariat » de rendre « co-acteur le public ». En particulier, le « partenariat avec le monde associatif » est mis en avant. Le gouvernement est maintenant conscient qu’il est nécessaire de « rendre plus crédible les actions et les messages pour le grand public du fait de la présence simultanée d’acteurs très différents travaillant sur la base d’objectifs communs ». On peut en conclure que l’idée qui gouverne ici c’est que l’acteur unique est devenu peu crédible et que nous sommes tous invités à mettre en œuvre ce nouveau mode opératoire, la question de la confiance revient à plusieurs reprises dans le rapport, c’est bien le même sujet, c’est le sujet numéro un.

Reconnaissance aussi pour les enseignants

On souhaite aussi « favoriser une plus grande transparence », on met au premier plan des valeurs qui ont pour l’instant bien peu droit de cité en France, comme la « préservation de notre héritage collectif », un « héritage non matériel que nous souhaitons pour nos enfants » ou « l’émerveillement lié à la nature ». Les anglais ont sur nous des milliers de kilomètres d’avance en ce domaine. Il est primordial que l’idée de valeur patrimoniale de la nature fasse enfin son chemin. Des points méthodologiques considérés comme fondamentaux par les acteurs associatifs sont retenus. Ainsi l’invitation à la participation « inciter aux initiatives », « mutualisation et un porté à connaissance plus systématique des bonnes pratiques », « s’appuyant sur l’exemple de pairs », « développer les moyens d’échanges entre pairs », « développer les démarches de concertation pour la définition de plans d’actions… », « renforcer l’information dans le conseil de proximité  », nous sommes bien là très proches des pratiques que les associations d’EEDD vivent avec leurs partenaires de l’Etat ? des collectivités et parfois du monde de l’entreprise depuis des années.

C’est une reconnaissance de l’existant, une prise en compte de ce que disent ceux qui font. Reconnaissance aussi pour les enseignants qui oeuvrent pour l’EE dans les établissements et qui en ce moment en ont bien besoin de reconnaissance. Le rapport prône la « valorisation de l’engagement au sein de l’enseignement », oui enfin que les enseignants qui oeuvrent pour l’EEDD et surtout que leur institution l’Education nationale nous montrent ce qu’ils savent faire, et elle à travers eux, la société l’attend… Pourquoi ne pas aller jusqu’à payer plus les profs qui mènent des projets en partenariat, ce qui exige beaucoup de temps et souvent, c’est un comble mais une réalité, beaucoup de courage ? Souhaitons que ce soit une prochaine étape et que le ministère de l’Education nationale ne sera pas sourd à cet appel de la société. Hélas mille fois hélas le projet de réforme de la seconde ne montre pas qu’on en prend le chemin. Et cela sans parler des postes supprimés d’enseignants détachés sur des missions d’éducation à l’environnement dans des associations, ou même des collèges et autres établissements. Des profs qui se battent, qui font, qui partagent, qui oeuvrent parfois depuis des années sur des projets globaux d’éducation à l’environnement et qui, pour des raisons financières se voient retirer de cette fonction et retourner à une action de face à face avec les élèves. Pour exemple la disparition du Pôle Environnement et Citoyenneté dans le Cher (18) [www.grainecentre.org/disparitiondupec]

Méthodes des publicitaires 

Bon, s’il est clair que ceux qui agissent sur le terrain pourront trouver quelques arguments pour appuyer leur désir d’action dans le rapport du Comop 34, ils trouveront aussi des choses dont, très probablement, ils douteront.

Le rapport souligne, tel un slogan « unicité, pertinence, simplicité et répétition du message ». Les communicants qui étaient à la tête du comité sont ici trop dans les méthodes des publicitaires, on est de plain pied dans bourrage de crâne… Eduquer ne passe plus par là, éduquer c’est d’abord développer l’esprit critique, c’est d’abord amener à réfléchir ! Le contraire précisément du bourrage de crâne.

Le terme « Compétitivité durable  » pourra aussi laisser perplexe…. Comme laissera perplexe cette idée d’ « embrayer sur le court terme » parce que le développement durable c’est précisément d’arrêter un peu de se soumettre à la tyrannie du court terme, de voir et penser loin !

On verra aussi dans le rapport que sont proposées des « formations théoriques (qui) pourront être complétées par des visites de terrain » ! Pour de nombreux éducateurs à l’environnement c’est prendre les choses à l’envers, le terrain c’est d’abord. Dans une pédagogie active, les constats, les questions c’est d’abord, et la théorie ensuite ! On trouvera des affirmations ressemblant à des incantations comme « formaliser un corpus de messages consensuels ». J’imagine faire un essai sur la question du nucléaire ou des OGMCe n’est pas là se situer dans la pensée complexe. Nous sommes aujourd’hui très nombreux à vouloir faire notre opinion nous-mêmes en allant à plusieurs sources d’informations. Pouvoir nous faire notre propre idée, c’est notre liberté. Le « plan national d’engagement pour le DD » dont il est question dans le rapport risque fort d’être vu comme venant trop du haut, l’appropriation ne sera peut-être pas des plus facile.

Mac Donald 

Autant que ces éléments de contenus, des aspects de méthode qui ont gouverné ce Comop 34 en interrogent plus d’un. Pourquoi cette absence du ministère de l’Education nationale lors des travaux ? Pourquoi l’absence du ministère de l’Agriculture lui aussi en charge d’enseignement dans notre pays et détenant en plus une expertise sur la question qui est reconnue par tous ? Pourquoi l’absence du ministère de la Santé, jeunesse et sport ? Cela veut-il dire que l’information, la sensibilisation et la formation du public aux questions d’environnement et de développement durable ça concerne tout le monde sauf la jeunesse, sauf les enfants ? Là précisément où nous pouvons avoir une influence sur leur culture dans les établissements scolaires, les centres de loisirs... Pourquoi avoir préféré la présence de Mac Donald dans le comité ?

Au cours des travaux et dans les documents, le mot « éducation » fera toutefois plusieurs fois son apparition. C’est bien un chantier unique que nous avons là, c’est celui de la culture. La culture du développement durable c’est avant tout une aptitude à décloisonner. Une instance nationale unique et pérenne est nécessaire sur cette question.

Forces sociales en mouvement

C’est certain, nous devrons encore aller beaucoup plus loin pour avoir un impact réel sur la crise écologique que nous vivons, mais nous avons bien dans ce rapport les signes d’une avancée : concertation, travail en commun, partenariat, engagement à l’initiative, à la participation… Il y a bien quatre sphères d’acteurs à mobiliser et à écouter pour résoudre la crise environnementale.

Le ministre en acquiesçant à ce rapport le 13 janvier nous encourage à nous mettre en oeuvre dans cette nouvelle façon de faire, alors allons-y que chaque acteur prenne sa place, toute sa place !

Les députés et les sénateurs qui traduisent toutes ces recommandations en lois ne vont pas suffisamment, c’est le moins que nous puissions dire, vers l’avantage de l’environnement et des générations futures. Toutefois on ne pourra pas le nier quelque chose est en train de changer du côté de la méthode. Alors oui les forces sociales en mouvement doivent s’emparer des conclusions du Comop 34 pour convaincre leur entourage que c’est ensemble qu’il faut travailler. Pour dire qu’il n’y a plus à suivre un seul homme mais qu’il faut aller en quête de l’intelligence commune celle qui se construit avec la présence de tous pour le bien du territoire. C’est une culture commune en construction. Cela demande sans doute à chacun de jeter par-dessus bord certaines vieilles certitudes. L’urgence écologique l’exige. 

RG


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1 réactions à cet article    


  • Colure Colure 24 février 2009 14:34

    Délosé d’avance pour la suite mais, le Grenelle , c’est quoi ? Une méga-réunion (les petits fours étaient bons ? ) pour se dire ce qu’il faut faire pour l’environnement ? Et ensuite ? Un budget pub pour faire passer le message au méchant consommateur/pollueur ? Un vrai politique coercitive au niveau industriel ? Même pas ...

    Franchement, tant que les choses iront dans ce sens, l’environnement continuera à se dégrader et les publicitaires eux , continueront à s’enrifichir au frais du contribuable ... c’est n’importe quoi ... des mots, des mots et toujours des mots , ça doit en faire vivre du monde le concept "environnement", tant que cela reste un concept.

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