« Assad doit partir »
Slogan fumiste que l’on a entendu ad nauséam dans la bouche de politiciens occidentaux (dont un vil personnage français qui est finalement parti avant Assad de son poste de ministre des affaires « étranges ») mais aussi dans celles d’enturbannés du golfe. J’étais de ceux qui ont assez tôt compris qu’Assad ne partirait pas aisément. Il n’y avait pas besoin d’être énarque pour comprendre que la Russie, l’Iran, le Hezbollah entre autres ne lâcheraient pas le gouvernement légitime syrien car cela irait contre leurs intérêts. Comme certains occidentaux ont tendance à ne pas tenir compte des avis, intérêts et pensées des autres peuples ou groupes d’intérêt, ils n’y comprennent rien abreuvés d’une vision étriquée et orientée de leurs médias et de leur conviction d’être toujours dans « le bon camp ». Sauf qu’à un moment donné il faut se sortir la tête du sable pour essayer de comprendre ce qui se joue-là à savoir la guerre géostratégique du moment.
La Syrie c’est l’alliée de l’Iran, du Hezbollah et un partenaire plutôt fiable pour la Russie. Et chacune de ces alliances a de bonnes raisons de perdurer. Si l’occident avait voulu régler le supposé problème de « démocratie » on aurait pu faire des négociations pour organiser des élections anticipées et inclusives. Mais ceux qui suivent le dossier se doutent qu’Assad les aurait remportées haut la main. En vérité pour les « ennemis d’Assad », le problème c’est Assad et ce qu’il représente. Sans doute pensent-ils que s’il dégage son successeur éventuel sera beaucoup plus flexible sur certains sujets. Car ceux qui s’informent autrement que par les médias savent qu’il y a une affaire de gaz et de gazoducs (1). Des projets opposés se font face. On sait aussi que certains groupes en Israël jubilent quand des arabes et affidés se massacrent entre eux. Car plus ils sont occupés à se massacrer moins ils ont de temps et d’énergie à consacrer à l’entité sioniste. C’est cynique et sinistre mais c’est « de bonne guerre ». Malheureusement dans le monde arabo-musulman la question confessionnelle est très sensible. Les alaouites, la confession d’Assad est complexe. Combien sont-ils en Syrie ? Des recherches que j’ai faites on ne sait pas exactement car les alaouites qui ont été longtemps persécutés ont l’art de se camoufler. Ils sont sans doute plusieurs millions en Syrie et certains se cachent sans doute sous des « dessous » de sunnites. En tout cas la haine de certains pour les alaouites me semble très « concrète » (2) au point sans doute de leur faire perdre la tête. Je sais entre autres qu’ils (ceux de Syrie, ceux de Turquie seraient différents) n’ont pas de lieux de culte (ils prient à la maison), fêtent apparemment certaines fêtes chrétiennes, ils auraient un grand respect pour la vierge Marie etc… Assad lui-même prie comme un sunnite, donc peut-il encore être considéré comme alaouite ? Je ne le pense pas, mais de toute façon vu que dans l’esprit des gens c’est un alaouite, il sera toujours traité comme tel c’est-à-dire comme hérétique à occire pour certains musulmans ou prétendus tels. Le problème confessionnel est donc je le pense réel en Syrie est une partie du problème. Il n’y a d’ailleurs jamais de fumée sans feu… Les « ennemis de la Syrie » ont donc intérêt à jouer sur cette fibre confessionnelle et d’ailleurs ça a marché à un certain niveau. Car il ne faut pas nier que des forces réactionnaires et islamistes existent en Syrie depuis un bon bout de temps déjà. Mais puisque l’armée est restée assez soudée et que l’état ne s’est pas effondré, il était clair que cette guerre allait durer longtemps et serait atroce.
J’avoue sans peine que je suis de ceux qui ne croient plus un traître-mot des médias « grand public ». Je m’informe donc autrement et je veux avoir différents avis pour me faire ma propre opinion. Certains en sont à me dire qu’Assad doit partir mais sont incapables de dire que le gouvernement actuel est déjà un gouvernement d’union nationale et que des ministres comme Ali Haïdar (3), ministre de la réconciliation sont des opposants à Assad. Ces gens ne peuvent même pas citer des noms de responsables syriens et viennent vociférer leur haine d’Assad, qu’en plus ils ne connaissent pas. Quel délice de voir certains tomber des nues quand ils voient des interviews d’Assad. Ces gens ont aussi cru que Damas allait tomber, je ne sais combien de fois. En vérité ils n’ont pas vu qu’en Syrie, ce pays ancien, se joue une guerre qui aura une influence sur « l’avenir du monde ». La Syrie était entre autres un domino pour affaiblir le Hezbollah, l’Iran ou la Russie. De plus si l’état syrien tombait le fameux gazoduc venant du Qatar et passant par la Turquie (4) aurait sans doute été construit. On peut sans peine imaginer l’impact négatif que cela aurait sur la Russie notamment. Il était aussi fort probable que le port de Tartous (5) serait interdit à la Russie, autre coup dur. Sans oublier que l’aura de la Russie aurait été ternie. Quant au Hezbollah sans le soutien syrien ça aurait été dur pour lui. On ne parle pas de l’Iran qui aurait perdu un précieux allié, pour ne pas dire peut-être deux et aurait vu entre autres son influence s’effondrer dans la zone à la grande joie d’Israël. Donc j’étais convaincu que ni les russes, ni les iraniens, ni le Hezbollah ne lâcheraient Assad. L’homme est incontournable pour ces entités. Mais les ennemis de la Syrie peuvent-ils reculer face à la détermination russe entre autres ?
Ils ont sans doute été surpris des capacités démontrées par l’armée russe en Syrie et cela les a sans doute perturbés. L’intervention aérienne russe et sans doute terrestre via des spetsnaz, a changé la donne et a permis à l’armée arabe syrienne et ses alliés de passer en mode offensif. Mais une fois la surprise passée ses ennemis de la Syrie sont en train de mettre au point des stratégies pour contrer les russes. Le Su 24 abattu par les turcs visait sans doute à pousser les russes à réagir de manière impulsive afin de permettre à la Turquie de réclamer l’aide de l’OTAN face à l’agression russe. Sauf que Vladmir Vladmirovich Poutine n’est pas tombé dans le panneau. Maintenant turcs et saoudiens parlent d’entrer en Syrie ce qui on s’en doute pourrait transformer cette guerre en quelque chose qui horrifie les esprits sensés. Mais là où le comportement des alliés d’Assad semble parfaitement rationnel, celui des turcs, saoudiens et autres frise la folie (ou du moins je la trouve difficilement compréhensible quoique…). La Turquie prétend s’attaquer à l’Etat Islamique qui officiellement est l’ennemi de tout le monde y compris de l’occident, de la Russie entre autres mais dans les faits s’acharne plus contre les kurdes. Les récents tirs à l’artillerie lourde depuis la Turquie contre les positions kurdes devrait choquer les gens. Mais seuls les ignorants peuvent ne pas connaître le jeu perfide du frère musulman Erdogan dont la mégalomanie et l’impudence semblent sans limite. Quant aux saoudiens déjà embourbés au Yémen, déjà emmerdés à cause de la chute du prix du pétrole, ils seraient inspirés de ne pas se mêler du bourbier syrien. Ne flairent-ils pas le piège ? Ne comprennent-ils pas que leur affaiblissement est sans aucun doute souhaité par les occidentaux et Israël ? Car quoi de plus « intéressant » pour les étasuniens que de voir d’autres pays forts se taper dessus, s’affaiblir et donc ne plus représenter de forces en mesure de leur résister. Qui perd dans cette guerre ? Les syriens c’est sûr, le Hezbollah aussi et peut-être si ça dégénère, les russes, les turcs, les iraniens etc… Les russes sont intervenus parce qu’ils n’ont pas le choix. Si Assad tombe le cancer djihadiste ira enflammer le Caucase entre autres nuisances.
Les questions qui se posent sont de savoir que veulent réellement les étasuniens, les turcs ou les saoudiens et jusqu’où ils sont prêts à aller. J’ai fait certaines suppositions, mais en vérité je ne suis pas dans le secret des (o)dieux. Cependant je pense que cette guerre est loin d’être finie et n’a pas livré tous ses secrets. Le moi de Mars (Dieu de la guerre) sera sans doute capital pour l’évolution de cette guerre qui n’a normalement que trop duré. Mais pour un esprit sensé une telle guerre n’aura jamais du commencer. Quoiqu’il en soit le slogan « Assad doit partir » est-il encore d’actualité ? A-t-il encore un sens ? Cette guerre est devenue une folie qui pourrait « tout balayer », et tout ça pour quoi ? Cela en vaut-il la peine ? Pour les fous oui, mais ce n’est pas d’eux qu’on attendra une réponse sensée.
- http://danielclairvaux.blogs.nouvelobs.com/archive/2015/09/17/la-guerre-en-syrie-une-question-de-gaz-naturel-569649.html
- http://havredesavoir.fr/qui-sont-les-alaouites-noucayrites/
- https://en.wikipedia.org/wiki/Ali_Haidar_(politician)
- http://www.mondialisation.ca/syrie-le-trajet-des-gazoducs-qataris-decident-des-zones-de-combat/5311934
- https://www.frstrategie.org/publications/notes/web/documents/2013/201306.pdf
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