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Dernières nouvelles de l’Amérique

Ce lundi 20 octobre, dans les salons de la librairie Mollat à Bordeaux, conférence de l’historien André Kaspi, qu’on ne présente plus. C’est l’un des spécialistes des Etats-Unis, souvent invité dans les médias pour nous éclairer sur ce pays que nous croyons connaître et qui, pourtant, nous échappe ; et du reste excellent orateur, passionnant, discourant debout sans prompteur, pas comme Ségolène.

L’intérêt de ce genre de conférence est de glaner quelques détails qui ne sont pas forcément dits dans les médias. Non pas que l’intéressé ne puisse pas parler, mais plutôt que la structure des émissions empêche tout discours libéré des contraintes. Pas de temps à partager entre intervenants, pas de journaliste pour influer sur les thèmes débattus. La conférence de Kaspi fut centrée sur les élections américaines. Quelques petits détails mais importants ont été livrés. D’où l’idée d’une recension choisie avec quelques commentaires.

Pour commencer, une vision globale sur cette élection. Selon Kaspi, qui se fait interprète des Américains, le choix entre Obama et McCain est un choix entre une Amérique du XXIe siècle, qui doit s’inventer, et une Amérique héroïque, celle de la guerre du Vietnam ; n’oublions pas que MC est un Vétéran. Quant au fond politique, il se traduit par un chiffre. La cote de popularité de GW Bush a atteint un record. 22 % là-bas. Autant taire les chiffres dans les autres pays du monde. Bush est impopulaire et l’image de l’Amérique au plus bas dans le monde. Autre détail d’ordre géopolitique. Si, pour l’instant, une divergence sur le retrait d’Irak sépare les deux candidats, sur la question de l’Afghanistan c’est un consensus géopolitique visant à inviter l’Europe à participer à l’effort de guerre. L’occasion de rappeler ce fameux discours devant 200 000 Allemands qui applaudissaient le messie du nouveau monde sauf que cet Obama allait à l’encontre de l’opinion de ces gens pour la plupart opposés à la présence allemande en Afghanistan et qui visiblement, avaient traduit de travers les propos du candidat démocrate sur ce point précis. Comme quoi, ces élections ont quelque chose d’une farce mondiale. D’ailleurs, la plupart des élections dans les pays démocratiques sont une combinaison de sérieux et de farce.

Autre détail sur cette élection. Le triste sort d’Hillary, persuadé que la candidature lui revenait de droit, et qui a dû revenir au monde réel après les résultats du super Tuesday. Les larmes d’Hillary sont les larmes de la rencontre entre une espérance et le résultat final. Parfois, ce sont des larmes de joie quand une jeune fille rencontre son prince tant espéré, ou des larmes de dépit quand on sait que l’espérance se solde par un échec. Un mot sur les fonds levés. Un détail pas étranger à la montée en puissance d’Obama, sénateur seulement depuis 2006, après un discours très remarqué à la convention démocrate de 2004. Obama qui, il y a six mois, s’était entendu comme McCain sur un financement public de la campagne, avec 84 millions de dollars, a fait volte-face vu ses 600 millions engrangés. L’argent mise toujours gagnant. Même s’il se trompe parfois. La loi électorale américaine encadre le montant versé par les donateurs. Ce qui n’empêche pas des collecteurs de dons de s’improviser. Entreprise, syndicats, groupements divers faisant des dons au nom des multiples citoyens qu’ils représentent. La société américaine ne croit plus vraiment aux républicains. Mais la société américaine, du moins une partie, croit que le canyon du Colorado a été créé il y a 5 000 ans, comme du reste les espèces animales. La société américaine est toujours aussi croyante, au point qu’un candidat déclarant ne pas croire en Dieu flingue ses chances sur l’instant. Voilà ce que nous enseigne Kaspi. Ce qui fait de ce pays une société étrange, un mélange d’irrationnel, de croyances, de sectes légalisées comme religions, de ressentiments de yankees des campagnes passionnés par le tir ; et de progressisme, d’intelligence technique, culturelle, économique, militaire, universitaire.

J’ai posé une question. La seule dans une perspective historique, évoquant la fin d’un cycle commencé en 1945, marqué par la montée en puissance des Etats-Unis, puis l’effondrement de l’Union soviétique en 1991, l’avènement d’un monde unipolaire avec son hyper puissance et maintenant, en 2008, la crise financière, les States dans le collimateur, la tectonique géopolitique en Asie, avec l’OCS, la Russie et l’Europe. Et donc un possible déclin, d’abord économique, lent, comme le Japon après 1990, dû à la situation financière des States, et à la croissance des autres économies, Chine notamment ; puis politique, avec la recomposition du monde. André Kaspi a répondu sans détours ni fioritures, épinglant au passage des démographes américains qui en 1934, en pleine dépression, prédisaient un déclin de la population américaine vouée à passer de 140 millions de têtes à la moitié à la fin du siècle. Or, nous en sommes à 300 millions, ce qui fait beaucoup et peu à la fois. Beaucoup compte tenu de la puissance technique et militaire acquise, peu au regard des six millions d’habitants sur cette terre. J’ai cru entrevoir dans cette mise au point une pique lancée en filigrane à E. Todd, notre démographe érigé en référence qui anticipe un déclin américain avec sa propre analyse qui eut du succès après la chute de l’URSS. Kaspi a évoqué le relatif déclin des Etats-Unis dans les années 1960. Ce qui est avéré. Puisque l’Europe et le Japon ont accru leur position économique pendant ces Trente Glorieuses. Et que les Soviétiques ont fait illusion pendant quarante ans avec une économie centrée sur l’effort de guerre. Maintenant, les Etats-Unis ne sont pas démunis. Loin s’en faut. Certes, ils traversent une crise financière de grande intensité, mais ils ont quand même les plus grandes entreprises et les plus grosses banques. Ce qui justifie aux yeux de Kaspi d’évoquer les quelques longueurs d’avance des Américains, confirmées du reste avec la qualité de la recherche scientifique et les Nobel s’accumulant depuis 1945 avec une insolence sans concurrence.

Au final, Kaspi n’est pas pessimiste comme je l’ai été dans mes questions, ayant évoqué dans le micro un éventuel pétage de plomb des States, avec, au hasard, un bombardement de l’Iran. Mais il n’est pas optimiste non plus, jugeant à juste titre que la partie du prochain président ne sera pas une sinécure, pariant sur une impopularité après un an de mandat, quel que soit le gagnant de ces élections de 2008. Au final, nous ne savons rien de l’avenir, sauf que les Etats-Unis, comme l’Europe et d’autres zones, vont traverser quelques turbulences. Kaspi a sans doute raison. Les Etats-Unis ont une telle avance qu’ils peuvent se permettre une décennie de déclin relatif sans perdre le statut de première puissance et sans abandonner leurs bases militaires de par le monde.


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5 réactions à cet article    


  • John Nada John Nada 21 octobre 2008 16:50

    Quelques petites remarques :
    Déjà j’en ai plus que marre des soi-disant "experts" qui monopolisent la lobovision : à chaque fois qu’on veut nous "expliquer" "ce qui se passe aux USA", on a systématiquement le droit à un monologue des "experts" André Kaspi et/ou Nicole Bacharan.

    Nous parlons d’un continent entier, de la première puissance économique et militaire mondiale, de 300 milions d’habitants, et il faudrait croire que ces deux là sont les seuls en France capables d’emettre un avis sur n’importe quel sujet touchant les Etats-Unis, particulièrement leur histoire et leur politique depuis 400ans.

    Comme par hasard, Nicole Bacharan fait partie du groupe néoconservateur français le Cercle de l’Oratoire, où elle écrit des ouvrages de propagande avec les guerriers humanitaires mondains, Goupil, Glucksmann, et Bruckner, partisans acharnés de l’invasion et de l’occupation éternelle de l’Irak, et qui réclament à corps et à cris de recommencer en Iran, Syrie, Liban etc etc.

    Dés lors on comprend mieux pourquoi elle est de facto la seule ’spécialiste des USA’ autorisée à donner son avis définitif et incontestable. Evidemment elle ne modère largement ses idées à l’antenne pour mieux faire passer la pilule, c’est le B.A.BA.

    Pour revenir à André Kaspi, il est plus subtil, mais ce "spécialiste" nous a expliqué dans une grand moment de propagande que finalement, dans l’affaire JFK, c’était bien Oswald "tout seul" qui a tué Kennedy, et que si certains, comme le Juge Garrison, en doutaient c’était probablement parce que "ça leur paraissait trop simple". Exit la balle magique qui fait une pause en plein vol, on remplace par un dessin animé sur ordinateur, ça fait plus "scientifique".

    Ainsi il n’a pas jugé bon dans cette "emission d’enquête" d’informer le lobospectateur que le Congrés Américain lui-même a invalidé en 1978 le rapport Warren, et a conclu que, je cite "sur la base des preuves disponibles, le President JFK a probablement été assassiné suite à une conspiration". Pas parce que c’est "trop simple" mais parce que l’enquête du Congrès a déterminé que Oswald ne pouvait pas avoir tiré seul tous les multiples coups de feus qui ont été enregistrés et surtout rapportés par des dizaines de témoins.

    A ce sujet voir cette vidéo on voit bien les témoins de la fusillade qui accourrent vers le "grassy knoll" d’où ont été tirés la plupart des coups de feus, et également cette petite vidéo où l’on voit clairement l’ordre donné aux gardes du corps de ne plus protéger JFK.

    Donc tu m’excuseras mais l’avis d’André Kaspi...on s’en tape !




    • Gzorg 21 octobre 2008 17:34

      Je suis vraiment d’accord avec votre commentaire, cela fait longtemps que je n’ai plus aucune illusion sur les Bachanan et autre "expert es-plateau de télé".

      Tout cela n’a que peux d’importance car contrairement a ce que pense B.Dugué je suis intimement persuadé qu’un mouvement de panique a l’égard de la "devise Dollar" sera inéluctable....

      Et dans le "sauve qui peux" généralisé qui s’en suivra, les USA ne resterons pas "le leader du monde" , par contre le danger va être immense à ce moment là pour la sécurité du monde.

      Je ne vois les Chinois continuer a travailler indéfiniment pour des monceaux de papiers sans valeurs, pourquoi le ferait -il pour sauver ceux (les bon du trésor) qu’ils ont déjà emmagasinés, ce raisonnement ne tiendra pas longtemps.

      Et gaffe à ce qui va se passer alors !


    • Proudhon Proudhon 21 octobre 2008 18:06

      Tout à fait d’accord avec les deux internautes de dessus ! Ras le cul de ces glandeurs, valets des puissants, qui osent encore diffuser leur propagande pour mongoles attardés.

      Mais bon, ça à l’air de marcher leur business !


      • moebius 21 octobre 2008 22:30

        les USA, 1000 milliards de fond de réserve monétaire, l’Europe quelques centaines , les pays émergent 5000 milliards


        • John Nada John Nada 22 octobre 2008 00:22

          Au programme ce soir sur Arte
          21H45 "Génération Irak" de Barbara Necek, qui assimile le doute sur la version officielle du 11 Septembre à de l’antisémitisem pur et simple genre "protocole des sages de sion", sur Agoravox.

          C’est elle aussi qui avec son copain Antoine Vitkine du Cercle de l’Oratoire, véritable "think tank" (officine de propagande privatisée) français créé -ah le hasard- au lendemain du 11 Septembre, a commis le mémorable le "11 Septembre n’a pas eu lieu", présentée par Daniel Leconte du cercle de l’oratoire.

          C’est le même néocon Daniel Leconte qui a tourné le "documentaire" "C’est dur dêtre aimé par des cons" (les cons étant les musulmans) défendant la liberté d’expression de Philippe Val, qui tourne en boucle dans les médias pour se pose en victime de la censure islamique !
          (Philippe Val a un notion bien à lui de la liberté d’expression  comme on l’a vu avec Siné, et comme on le voit encore lorsqu’il défend Clearstream - ils ont le même avocat - et essaie de discréditer Denis Robert)

          22H30 "débat" " Avoir 20 ans en Amérique" dirigé par Daniel Leconte, avec Nicole Bacharan "Politologue". C’est sympa de se retrouver entre amis néocons, le "débat" est tout de suite beaucoup plus reposant. Il faut aussi voir comment ils brocardent volontiers la droite chrétienne fondamentaliste américaine, ceci afin de se faire passer pour des "anti Bush" ! Mais ils "oublient" complètement le lien direct entre leurs homologues néocons américains et le droite de la droite du likud : c’est pourtant bien ce que déplore le quotidien israélien Haaretz ! Ending the neoconservative nightmare (!) Arrêter le cauchemar néoconservateur..Je suis bien d’accord...Conclusion : il vaut mieux lire Haaretz que de regarder Arte.




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