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Jamahiriya vs Regime Change : Mouvement de contestation ou Réseau de contestataires ?

La stratégie du "Regime Change" - ou changement de régime - apparaît de façon évidente comme une composante incontournable de la guerre menée par l'Otan en Libye. Le soutien populaire dont bénéficie le régime de la Jamahiriya arabe libyenne provient en grande partie des bienfaits économiques et sociaux qui en découlent ainsi que du système tribal pour lequel la redistribution de la manne pétrolière était une garantie de l'unité nationale. Il s'agissait donc d'une société pensée comme organique et dont les sujets ou citoyens se devaient de faire corps avec ce "gouvernement des masses" (traduction de Jamahiriya). Afin de faire imploser la Libye, la réalité de ce système politique a été volontairement noircie par les médias occidentaux et parmi les libyens "insurgés".

Apprendre de la Jamahiriya.

La Jamahiriya aurait pu être présentée de façon honnête par des experts, des sociologues et des journalistes pendant le conflit qui a commencé fin Février en Libye. Mais il s'avère que les bénéfices de sa structure ainsi que son efficacité économique permettaient non-seulement le maintien de la Libye au rang des plus puissants fonds souverains (La Libye était classée 12ème) mais aussi son soutien au développement de l'Afrique. Or, c'est précisément ce dernier point que les puissances réunies dans l'OTAN voyaient d'un mauvais œil car constituant un concurrent majeur en Afrique, terre de conquête pour l'occident depuis des siècles.

Dés 2008, le Congressional Research Service (centre de recherche du congrès des États-Unis) a émis certaines réserves quant aux volontés affichées par cette Jamahiriya. Au delà d'une simple critique, ces commentaires annonçaient déjà une forme d'ingérence qui entendait utiliser les groupes d'oppositions internes à la Libye pour renverser le régime de Mouammar Kadhafi. La première chose qui était reprochée à cette organisation politique était son fondement même et défini par le Congressional Research Service comme "L'autorité du peuple". Par ailleurs les "propositions pour la dissolution des ministères d’État et pour la distribution du revenu", parfaitement socialistes, était présentées comme douteuse. 

Les atouts intérieurs du Regime Change.


Dans le même document, publié une première fois en 2008, puis mis à jour le 25 Février 2011 - soit le jour du lancement de la stratégie diplomatique à l'encontre de la Jamahiriya libyenne au Conseil des Droits de l'Homme des Nations Unies par le triptyque U.N Watch ; Ligue Libyenne des Droits de l'Homme ; National Endowment for Democracy - il est fait état des groupes d'oppositions internes à la Libye. Ces groupes sont présentés en 3 entités : d'une part les Exilés et d'autre part les Frères Musulmans (Muslim Brotherhood) et le LIFG (Libyan Islamic Fighting Group). Or les représentants de ces 3 entités via la National Endowment for Democracy sont dors et déjà alliés du département d’État américain.

Pourtant, dans le document du Congressional Research Service publié en 2008 le Libyan Islamic Fighting Group est désigné comme un groupe terroriste depuis décembre 2004, les actifs de la branche états-unienne ayant été gelés par le décret présidentiel 13224 en Septembre 2001. De plus, pour le département d’État américain et de nombreux experts, les liens entre Al-Qaïda et le Libyan Islamic Fighting Group ne font aucun doute. C'est pourtant en particulier sur les représentants de cette organisation que les pays membres de l'OTAN vont s'appuyer pour soutenir le changement de régime en Libye au nom de "la croissance et du développement des institutions démocratiques dans le monde", mandat officiel de la NED.

La liquidation de la Jamahiriya.

La Jamahiriya arabe libyenne était donc un régime socialiste qui excluait les différentes formes d’extrémisme. Ce projet socialiste ambitionnait une redistribution des richesses à laquelle certains membres du régime étaient farouchement opposés. En premier lieu Mahmoud Jibril, qui avait été nommé par Saïf al-Islam Kadhafi pour moderniser et ouvrir l'économie libyenne à l'international. Mais Mahmoud Jibril avait déjà, avant les évènements de Février, rencontré Bernard Henri-Lévy à plusieurs reprises pour élaborer le projet de formation du Conseil National de Transition. Par ailleurs, lors de discussions avec d'ex-collaborateurs de Mahmoud Jibril, il nous avait été fait part de son avis quant au projet de redistribution des richesses et de dissolution des ministères : Pour lui, ce projet était "fou". En effet, il ne croyait aucunement en la capacité du peuple libyen à disposer de tels "privilèges" et donc à déterminer son propre destin.

National Conference of the Libyan Opposition - Juin 2005 - Londres

Contrairement à d'autres membres du Conseil National de Transition, Jibril n'était pas présent en Juin 1994 lors de la conférence Post-Qaddafi Libya du CSIS (Center for Strategic and International Studies) ni à celle de la National Conference of the Libyan Opposition qui s'est tenue à Londres en 2005 et qui formalisa la création officieuse du CNT. Il fut donc un arriviste dans le processus de fédération d'un réseau de contestataires déjà entamé en 1994. Mais son rôle n'en fut pas moins important puisqu'il a contribué de manière efficace à la reconnaissance d'un gouvernement illégitime par les institutions internationales.

Le prétendu "mouvement de contestation" libyen n'est donc en réalité qu'un réseau de contestataires qui a su trouver un appui considérable au sein des pays coalisés dans l'Alliance. Ce réseau, au delà d'être assisté par l'OTAN, a également suivi les directives fournies par l'Alliance afin de faire imploser la Jamahiriya arabe libyenne. Une implosion dont la méthode a consisté à détruire tous les acquis économiques et sociaux de cette société organique afin d'en anéantir l'identité culturelle. Cette identité, indestructible, est basée en grande partie sur le système tribal, lui même garant de l'unité nationale.Il n'est donc pas étonnant d'avoir vu le CNT et ses alliés occidentaux insister sur le caractère non-tribal de la "Nouvelle Libye" (voir les documents ci-dessous).

Julien Teil

www.laguerrehumanitaire.fr

http://laguerrehumanitaire-lefilm.tumblr.com/reflexions

BHL parmi les "rebelles" en Libye avec en fond un slogan (voir ci-dessous)

Slogan de la propagande "rebelle" : No More Tribal System : We are one large Tribe


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2 réactions à cet article    


  • SEPH SEPH 9 novembre 2011 18:27

    D’accord avec cet excellent article. Je viens de lire l’information suivante qui prouve que le prétendu « mouvement de contestation » libyen n’est en réalité qu’une supercherie.


    5000 SOLDATS QUATARIS ONT PARTICIPE A LA COLONISATION DE LA LIBYE

    Après avoir longtemps affirmé n’avoir pas participé aux combats en Libye qu’en envoyant quelques avions, le Qatar a admis il y a une dizaine de jours avoir déployé des centaines de combattants au sol.

    Le Qatar avait envoyé pas moins de 5 000 membres de ses forces spéciales en Libye, bien avant la chute du colonel Kadhafi, selon une source diplomatique française qui suit le dossier. Chargées d’épauler les rebelles, les troupes de Doha se sont d’abord déployées à Tobrouk puis ensuite à l’ouest dans le djebel Nefoussa, où le chef d’état-major qatarien, le général Hamad ben Ali al-Attyiah s’est rendu à plusieurs reprises.

    Enfin, le Qatar a organisé un pont aérien pour approvisionner les mercenaires d’Al Qaida en armes de l’OTAN. 


    Par ailleurs, la chaîne de télévision qatarie Al-Jazeera a joué un rôle déterminant dans la propagande de guerre, allant jusqu’à tourner en studio de fausses images de l’entrée des « rebelles » dans Tripoli.

    Le journaliste du Figaro, réputé proche des services de renseignement français, Georges Malbrunot, avance désormais le chiffre de 5 000 soldats qataris ayant combattu en Libye.

    5 000 soldats étrangers, cela n’est pas compatible avec la version des médias atlantistes selon laquelle il se serait agi d’un soulèvement populaire contre Mouammar el-Kadhafi et d’une intervention humanitaire internationale. Cela correspond par contre à la version des médias russes et chinois selon laquelle « Protecteur unifié » était une guerre impérialiste.
    http://blog.lefigaro.fr/malbrunot/2011/11/5-000-forces-speciales-du-qata.html



    De plus 6 mois avant la « révolte » de Benghazi, il y avait sur place en Libye des services secrets des USA, France et Grande Bretagne pour préparer cette pseudo révolution, et que des armes ont été fournies et qu’ au deuxième jour des manifestations des bâtiments publiques ont été attaqués avec des armes anti-char. Ce qui n’était pas le cas à Tunis ou au Caire !!!

    ( Cf  : Médiamensonges, encore et toujours propos de Michel Collon)


    ON EST BIEN LOIN DE LA REVOLUTION POPULAIRE SPONTANEE DE LA TUNISIE OU DE L’EGYPTE.

    CHAQUE JOUR IL SE CONFIRME QUE CETTE GUERRE A ETE PREPAREE PAR L’EMPIRE ET SES ALLIES POUR S’EMPARER DES RICHESSES DE LA LIBYE ET METTRE EN PLACE UNE CHAPE DE PLOMB SUR LE PEUPLE LIBYEN.



     


    • wilkins 10 novembre 2011 13:58

      Bravo, une fois de plus monsieur Teil pour votre travail.

      La conférence postée sur agoravox tv est également édifiante. Le rôle joué par les organisations humanitaires, tuyautées par Washington est absolument évident, vous en faites une démonstration très convaincante.
      Si l’on ajoute le processus politique très ancien, comme vous le précisez dans cet article, on voit alors se dessiner une opération habilement menée, afin de faire croire à une authentique révolte spontanée.
       Il suffit de préciser les ambitions géostratégiques des Etats-Unis, qui souhaitaient absolument éviter l’union politique des forces panarabes de la ligue arabe pour compléter le tableau.
      Le pari américain était de déstructurer intégralement les entités « arabes » de la région, politiquement et économiquement, pour les substituer par des micro-états coincés dans leur réalité régionale. Depuis les années 70, tout ce que le milieu du renseignement US compte de think tank théorise et implore une balkanisation du moyen-orient, qui oublierait ainsi ses ambitions régionales dans des conflits locaux, des antagonismes religieux et une scission cardinale entre sunnites et chiites. L’utilisation des intégristes musulmans est clairement revendiquée à cette fin par les think tank fondateurs de la géostratégie atlantiste.

      C’était le projet de Brezjinsky, du CFR et de leurs successeurs. Pour cela, il fallait s’appuyer sur les pétromonarchies du golf, facilement manipulables et privées de toute vision politique et stratégique.
      Les dictateurs laïques, tels que Saddam Hussein et Khaddafi, essayaient de forcer l’union panarabe par une globalisation des puissances énergiques du moyen-orient.
      Ils pouvaient compter sur l’appui de l’Egypte, de la Syrie et de l’Algérie, notamment, pour concrétiser le mouvement de bascule.
      Leur projet à terme était d’imposer le dinar/or, maintenant, tout le monde le sait. En le faisant, ils s’octroyaient le droit de faire dévisser le dollar, purement et simplement, sur le marché des matières premières.Tous les économistes reconnaissent aujourd’hui qui se le dollar perd son exclusivité sur ce marché boursier, en tant que devise, les Etats-Unis ne sont alors plus une superpuissance, mais seulement une puissance comme les autres.

      La Libye devait tomber, c’était inéluctable. D’autant que l’union énergétique panarabe aurait eu tendance à se tourner vers la Chine et la Russie, comme elle le fait naturellement depuis 30 ans.

      On peut, en tant qu’occidental, douter d’un monde où les dictateurs laîcs de l’Irak, la Libye, l’Egypte ou l’Algérie décident, du fond de leurs palais princiers, du cours de l’or, de la devise du marché des matières premières et pérpétuent leur ascendant énergétique pour encore 50 ou 100 ans. Le tout en fournissant allègrement la Chine dans ses besoins quotidiens.
      Une Chine qui ainsi approvisionnée aurait continué son petit manège de dumping social, de croissance exponentielle par l’union et le soutien de ses structures bancaires, la sous-évaluation de sa monnaie pour l’exportation, et la création logique d’excédents... qui servent à acheter de la dette et racheter nos ports.

      Les Américains ne sont pas fous, il n’y avait pas d’issue favorable pour les nations occidentales autres que le surendettement qui contribue à accroitre notre dépendance aux pays excédentaires.
      C’était un cercle vicieux sans fin. La Chine aurait racheté à peu près tout ce qu’elle voulait par appartement.

      En dégommant la Libye, ce n’est rien d’autre que ce système qui s’effondre. Au passage, la Chine perd, petit à petit, tous ses points d’appuis en Afrique. Comment va t-elle s’approvisionner quand ses besoins en pétrole augmentent de 10% par an ?

      Il n’y a plus de dirigeants arabes, tous sont passés à la moulinette des guerres ou révolutions impulsées par les Etats-Unis. Il ne reste plus que les régimes fantoches pro-américains de l’Egypte, la Tunisie, la Libye et l’Irak d’un coté (tous envahis ou dégommés), les pétromonarchies alliées des US de l’autre (Qatar, Arabie saoudite, EAU, Koweit) et l’Iran au milieu, pour maintenir la scission sunnites/chiites.

      Tout, absolument tout ce qu’avait prévu Brezjinsky s’est réalisé.
      Ce sont deux visions du monde qui s’affrontaient, et les US ont sauvé leur peau.

      Sauf qu’il s’agit bien d’un projet impérialiste, d’une manipulation constante des extrémistes religieux et d’Al-Qaeda et de mensonges ehontés additionnés à des guerres qui ne disent pas leur nom.

      Au passage, la Libye a été renvoyée à l’age de pierre parce qu’elle envisageait de faire quelque chose d’assez comparable à ce que nous avons fait en créant l’euro. Mais dans une perspective énergétique qui assurait le succès de l’entreprise.
      Imaginez si on nous avait envoyé des salafistes assoiffés de sang dans nos villes pour nous punir de nos ambitions économiques. Le coup de la guerre humanitaire aurait été dur à avaler.

      Vous devez aller au bout de votre reportage monsieur Teil, vous avez largement de quoi prouver que la guerre libyenne n’est absolument pas spontanée et légitime, vous l’avez démontré avec votre travail sur les organisations humanitaires et la préparation politique de l’après-Khaddafi.

      Il faut que votre reportage sorte.

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