Une enquête d’une ampleur inédite menée par le New York Times révèle que l’eau peut s’avérer malsaine, même lorsqu’elle respecte les normes de qualité fixées par les autorités nord-américaines.
Le scandale de l’eau aux USA
Publiée au début de cette année - et rapportée par Le Figaro du 8 Janvier- cette étude rigoureuse dénonce le laxisme des normes sanitaires sur l’eau du robinet.
Dans le New Jersey et en Oklahoma, on a ainsi trouvé des traces d’uranium dans des niveaux de concentration qui laissent craindre un danger pour « les reins » des consommateurs.
En Arizona, au Texas et au Nevada, les investigations réalisées par le plus influent quotidien américain révèlent la présence d’arsenic, à un niveau de « teneur associé au cancer ».
Dans ces deux cas, les normes de qualité de l’eau établies par la réglementation américaine (Safe Drinking Water Act) sont totalement respectées. La présence accrue de ces polluants dans l’eau est rendue légale par les lacunes d’une réglementation qui n’a pas évolué depuis les années 2000.
Depuis dix années, aucun nouveau polluant n’a été ajouté à la liste des 91 substances surveillées par les autorités sanitaires nord-américaines ! « 60 000 produits chimiques polluants sont pourtant utilisés dans le pays », s’inquiète le New York Times.
Et en France : que contrôle-t-on ?
Aucun organe de presse n’aurait les moyens (ou l’ambition ?) de mener une enquête de cette ampleur dans l’hexagone. Il est pourtant légitime de se poser la question : les contrôles sanitaires de l’eau potable définis par la Directive Cadre de Bruxelles sont-ils suffisamment rigoureux ?
Les plaquettes commerciales des grands distributeurs d’eau vantent régulièrement les mérites d’une eau qui serait « le produit alimentaire le plus surveillé ». Mais que surveille-t-on ? 30 000 substances chimiques sont utilisées par notre industrie. Elles sont donc rejetées dans notre environnement.
Les autorités sanitaires comme
l’Institut de Veille Sanitaire rappellent qu’
« une soixantaine de composés font l’objet d’une réglementation ». Rappelons qu’aux USA, 91 substances sont recherchées et mesurées dans l’eau du robinet…
Potentiellement, 30 000 polluants peuvent se retrouver dans notre eau potable. 60 seulement sont donc surveillés*. Il est d’autant plus facile de déclarer une eau de’ bonne qualité’ lorsqu’on n’effectue pas les tests adéquats ! Sans compter tous les risques liés au réseau de distribution, car l’eau n’est pas contrôlée sur son point de distribution. Une enquête en cours menée par l’Afssa* devrait nous en dire plus dans quelques mois sur la prolifération de ces polluants émergents non contrôlés.
Les contrôles actuels sont-ils suffisants ?
Conséquence ?
Les micropolluants (pesticides, résidus médicamenteux, phtalates, retardateurs de fllamme bromé et dioxines) non-mesurés par les tests de qualité de l’eau du robinet peuvent générer à terme des effets cancérigènes, neurotoxiques ou allergogènes. Voire être à l’origine de
« troubles de la reproduction, de la croissance et du développement » s’inquiète l’équipe du Professeur Jean-Claude Lefreuvre,
La France, s’est fixée pour objectif, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, d’atteindre un bon état écologique et biologique des eaux souterraines et superficielles d’ici 2015. D’ici là, ignorera-t-on l’état réel de pollution de notre eau potable ?
Tout comme pour les téléphones portables, aucune étude sur l’exposition à long terme à ces micro-polluants, liés à une consommation régulière d’eau du robinet pendant 20 ans, n’a été lancée.
Une chose est sûre : en matière de contrôle sanitaire, immobilisme et laxisme n’ont jamais fait bon ménage…
* Agence française de sécurité sanitaire des aliments.
* Et encore, un récent séminaire de la Direction regionale de l’environnement en Ile de France * publiée en septembre 2009 révèle page 21 que près de la moitié des stations de mesures du contrôle des eaux superficielles sont « en mauvais état » c’est-à-dire incapables de veiller au respect des normes de la Directive Cadre de Bruxelles. Même les polluants qui sont officiellement contrôlés ne sont pas rigoureusement investigués dans nos eaux superficielles !