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L’Ecosse face aux esprits animaux du régionalisme

La semaine prochaine, les Ecossais vont voter dans un référendum qui pourrait décider de leur sécession du Royaume-Uni. Devant des sondages très sérrés, les principaux dirigeants politiques se sont unis pour tenter d’éviter un tel désastre, dont il est difficile de ne pas voir le lien avec le néolibéralisme.

Un produit du néolibéralisme ?
 
Bien sûr, certains rétorqueront sans doute que je cède à la facilité en accusant le néolibéralisme d’être à l’origine des velléités d’indépendance de l’Ecosse. Et pourtant, à ceux-ci, je conseillerai la lecture du livre remarquable de Jacques Généreux, « La disociété  », qui analyse sur toutes les dimensions (économique, politique, mais aussi sociétal), comment le néolibéralisme affecte nos sociétés, en poussant les hommes à ne plus que se regarder à travers l’être soi et non l’être avec. Car la tonalité de la campagne à Edinbourg comme à Londres l’illustre terriblement. La politique n’est plus ici un débat sur un destin collectif mais réduite à des récriminations financières des uns contre les autres.
 
Les partisans de l’indépendance veulent garder pour eux la manne pétrolière de la Mer du Nord, argument pourtant très court-termiste. Les opposants soulignent que l’Etat dépense beaucoup en Ecosse, qu’une partie de la dette sera transférée, qu’ils ne pourront pas forcément utiliser la livre sterling, et que cela pourrait pénaliser les ventes de whisky. Bref, au lieu de parler de destin commun, de communauté culturelle et d’identité, de projets à construire ensemble, le débat tourne à une négociation de marchands de tapis. Les chefs des trois principaux partis, dans un dernier effort désespéré, qui ressemble à un coup de poker, se sont mis d’accord pour proposer un nouveau projet qui renforcerait plus encore l’autonomie de l’Ecosse, pour proposer, selon eux « le meilleur des deux mondes  ».
 
Un aboutissement égoïste et communautaire

Bien sûr, il existe une identité écossaise. Mais cette identité a toujours existé au sein du Royaume Uni et elle ne semble pas vraiment avoir dépérie. Qu’est-ce qui peut bien faire que l’unité du Royaume soit remise en question près de trois siècles après sa formation, malgré l’autonomie grandissante déjà accordée à l’Ecosse, qui a son parlement depuis 2007 ? D’abord, cela en dit long sur les conséquences de la délocalisation. Loin de calmer les ardeurs régionalistes, elle semble au contraire les exciter et les nourrir, comme on le voit aussi en Espagne. En accordant plus de pouvoirs aux régions, il est difficile de ne pas constater que cela finit par donner l’idée aux potentats locaux de voler de leurs propres ailes.

Pire, cette tendance est également nourrie par le néolibéralisme, par deux biais. D’abord, quand on théorise que la somme des égoïsmes produirait l’intérêt général, il ne faut pas s’étonner de voir grandir les égoïsmes régionaux. Ce n’est pas un hasard si ce sont l’Ecosse (assise sur sa manne pétrolière) et la Catalogne (plus riche que la moyenne espagnole) qui menacent les premiers de faire sécession, dans une parabole de ces riches déserteurs fiscaux ou ces riches multinationales qui partent en Suisse ou en Irlande. Ce sont toujours les plus riches qui partent en premier. En outre, cela rejoint également l’alliance entre le néolibéralisme et tous les communautarismes, un intérêt bien compris du premier qui peut plus facilement imposer sa loi à des petits ensembles, aussi homogènes soient-ils, qu’aux vieilles nations.
 
Ce faisant, dans l’époque que nous traversons, il est difficile de ne pas penser que l’issue le plus logique de ce malheureux référendum pourrait être la désintégration du Royaume Uni, emporté par les égoïsmes et les communautarismes nourris par le néolibéralisme que Londres promeut depuis 35 ans.

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10 réactions à cet article    


  • zygzornifle zygzornifle 12 septembre 2014 15:38

    c’est dur quand on ne caresse plus dans le sens du poils ......


    • francesca2 francesca2 12 septembre 2014 16:06

      Je suis d’accord.

      C’est l’Europe Fédérale chère aux européistes qui se cache derrière ce référendum.
      Les nations toujours plus affaiblies, le pouvoirs aux super-régions...ils agissent avec les pays comme ils agissent avec les gens...des droits, toujours plus de droits pour vous affaiblir et, in fine, vous isoler.
      Il faut avouer qu’ils sont forts, ces pervers.

      • Fab81 12 septembre 2014 17:15

        Le néo-libéralisme serait donc du côté des indépendantistes écossais plus que de la brochette de Westminster ? J’ai vraiment du mal à y croire. Je suis d’une façon générale très hostile aux régionalismes, pour les raisons déjà évoquées dans l’article. Mais je suis prêt à faire une exception pour les écossais. Le Royaume-Uni, tous gouvernements confondus, est toujours en première ligne pour réduire l’Europe à l’état d’une vaste jungle où règnent les lois du capitalisme financier le plus sauvage, complètement vassalisée par les Etats-Unis. Que ce pays puisse se retrouver affaibli, entre nous, je ne m’en plaindrais pas...


        • Gollum Gollum 12 septembre 2014 17:18

          Perso j’y verrai plutôt le signe de la future chute du monde anglo-saxon… L’Écosse a d’ailleurs cessé d’être indépendante au moment même où se profilait l’essor de la maçonnerie et l’indépendance américaine.. 


          Il est juste donc qu’elle retrouve son âme au moment même de la chute du monde financier.

          Lire Philippe Grasset qui a souvent de bonnes analyses métapolitiques et des vues transcendantes sur les déroulements historiques..

          La France s’affranchira de même de son passé révolutionnaire et bourgeois par un retour à l’Essentiel et ce sous peu, la déliquescence actuelle, tout à fait providentielle, du monde politique permettant ce futur basculement.

          • Le Corbeau Magnifique Le Corbeau Magnifique 12 septembre 2014 20:41

            Tous ceux qui ne sont pas d’accord avec la City sont donc des animaux !

            On avait pas eu ça encore comme « argumentaire » !!!

            C’est quoi ton prochain article ?

            « Les hommes-singes de Russie refusent de se soumettre à Wall Street »

            ou

            « Comment en finir avec les derniers cafards français opposés à la mondialisation » ?

             smiley


            • Jean-François Dedieu Jean-François Dedieu 13 septembre 2014 05:26

              D’après l’auteur : « Non » à l’émancipation de l’Ecosse mais oui à celle de la France par rapport à l’Europe ?
              Quant aux « esprits animaux »... pour lui répondre en languedocien, il débarute (il perd la tête) ce pauvre jacobin !
              Que nous sortira-t-il pour la Catalogne ?


              • kimbabig 13 septembre 2014 10:41

                Pour votre info, la France est un pays indépendant, mais qui a commis l’erreur de participer à une organisation internationale nommée union européenne. Erreur, car dans les faits cette participation prive la France de la sa souveraineté.

                Mais elle peut très bien réparer l’erreur en se retirant unilatéralement de cette organisation néfaste (ce qu’elle devrait faire sans plus tarder).

                Tandis que l’Ecosse ne peut quitter le Royaume-Uni que parce que celui-ci lui a permis de le faire, puisque c’était une partie de ce pays.

                Allez à Pékin, vous trouverez une ambassade de France. Mais pas (encore) d’ambassade d’Ecosse.


              • ALEA JACTA EST ALEA JACTA EST 13 septembre 2014 13:16

                Je vis près de la Catalogne et je suis avec beaucoup d’ intérêt et de préoccupation le bras de fer qui s’ est engagé entre le gouvernement régional et le pouvoir central.Votre billet illustre un commentaire que j’ avais fait sur mon papier agorien au sujet du morcellement de l’ Europe, à savoir, que lors d’ un référendum de cette nature on ne peut jamais séparer les questions d’ identité nationale et culturelles, des questions économiques, d’ une part...et que,le fait d’ organiser un référendum en temps de crise c’ est nécessairement donner un avantage substantiel ( et artificiel) au camp séparatiste.


                • eau-du-robinet eau-du-robinet 14 septembre 2014 00:44

                  Bonjour Laurent,
                  .
                  « Un aboutissement égoïste et communautaire »
                  .
                  Certainement pas !
                  .
                  Il existe une multitude de raisons pour le voté du OUI.
                  .
                  1. La raison principale est de retrouver leur souveraineté et avoir un fonctionnement démocratique !
                  .
                  2. La représentativité écossaise dans le gouvernement du Royaume-Uni est de 1 sur 10 . La représentativité écossaise sera alors toujours écrasé par le vote des anglais.
                  .
                  3. Les écossais sont contre la construction des nouvelles armes atomiques ... ils soutiennent la non-prolifération des armes atomiques dans le monde ..
                  .
                  4. Les revenues des ressources pétrolières sur les cotés écossaises ne profitent quasiment pas à la population écossaise. L’argent vas à Westminster et les écossais ne voyant qu’une infime partie de cet argent !
                  .
                  5. L’Écosse à les ressources et les finances pour être indépendant.
                  .
                  6. La souveraineté vas créer plus d’emplois en Écosse ... en clair cela veut dire que la politique néolibérale des anglais (politique thatchérienne) détruit des emplois en Écosse.
                  .
                  suite et source : http://www.independentscotland.org/content/voting-yes-for-scottish-independence.htm&nbsp ;


                  • Frédéric MALMARTEL Le Kergoat 14 septembre 2014 16:31

                    Donnez la définition d’ « esprits animaux », sinon le bas-peuple, ne peut pas comprendre (pour ma part, je connaissais pas, je fais donc partie du bas-peuple, heureusement dans les réponses, quelqu’un de moins con que nous a signalé qu’ « esprits animaux » était une notion économique :

                    http://fr.wikipedia.org/wiki/Esprits_animaux_%28Keynes%29

                     smiley

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