Avec l’effondrement du bloc soviétique, le Conseil de sécurité retrouve un nouvel intérêt, notamment pour les USA, qui cherchent à donner une respectabilité à leur interventionnisme militaire extérieur. Depuis 1965, le Conseil de sécurité de l’ONU compte, outre ses cinq membres permanents (Chine, USA, France, Grande-Bretagne, Russie), dix membres non permanents élus pour deux ans à la majorité des deux tiers par l’Assemblée générale et renouvelés par moitié tous les ans. Cinq nouveaux membres non permanents seront ainsi élus à la mi-octobre 2006. Or, pour être adoptée, une résolution du Conseil doit recueillir l’approbation d’au moins neuf membres et ne pas faire l’objet d’un veto des cinq permanents. Autant dire que les places sont chères. Pour sa part, le Vénézuéla et son turbulent président Hugo Chavez sont prêts à mettre le prix pour s’assurer un siège et par là-même occasion une nouvelle tribune. La manne financière générée par les ressources pétrolières leur donne les moyens de s’attacher quelques faveurs.
En coulisse, cette candidature fait grincer quelques dents. Celles des USA, qui voient d’un mauvais œil l’arrivée de leur premier détracteur, mais aussi celles de nombreux Etats qui, à la différence du Vénézuéla, concourent au fonctionnement de l’institution par leur contribution financière et en force militaire. Pas de quoi pourtant effrayer l’oncle Sam, qui a tout intérêt à ce que les sièges de membres non permanents reviennent à des Etats pauvres. Une fois élus sous l’alibi de la représentativité, ceux-ci sont souvent sensibles aux bonnes faveurs de Washington. On ne se met pas impunément les USA à dos, notamment quand ceux-ci peuvent, le temps d’un mandat, allouer une aide au développement particulièrement généreuse.
Toutes ces faiblesses, le secrétaire général actuel, Kofi Annan, les connaît bien. Lors de l’ouverture de la 61e session de l’Assemblée générale de l’ONU, et quelque mois avant le terme de son mandat, le 31 décembre 2006, Kofi Annan a dressé un bilan contrasté de ses dix années à la tête de l’ONU et en a assumé sa part de responsabilité. Les larmes aux yeux, il a décrit sa tâche, au cours des dernières années, la comparant à celle de Sisyphe, condamné à rouler perpétuellement en haut d’une montagne un lourd rocher, qui toujours retombe. Par manque de consensus entre les membres permanents, toutes les réformes préconisées par le diplomate ghanéen sont restées dans les tiroirs. Le rapport qu’il a commandé, "Investir dans l’organisation des Nations unies pour lui donner les moyens de sa vocation mondiale", reconnaît l’inadaptation des structures administratives actuelles, et propose de "remettre entièrement à neuf " l’ensemble de l’organisation.
Inadmissible pour les USA, qui veulent se garantir que le futur secrétaire général sera bien un simple administrateur, et non un politique. Son remplacement devrait obéir à une règle informelle, néanmoins fondamentale, de rotation géographique. Ce serait donc au tour de l’Asie, après l’Europe dans les années 1970 (l’Autrichien Kurt Waldheim), l’Amérique latine dans les années 1980 (le Péruvien Javier Perez de Cuellar) et l’Afrique au cours des quinze dernières années (Boutros Boutros-Ghali et Kofi Annan). En tout état de cause, le fin mot de l’histoire appartiendra aux cinq membres permanents du Conseil, armés de leur droit de veto.