Le « miracle chinois » : répression sanglante contre des sans terre
Mardi 6 décembre 2005, un millier d’habitants de Dongzhou, village situé à proximité de la ville de Shanwei, dans la province du Guangdong au sud de la Chine, ont manifesté pour réclamer des compensations pour leurs terres saisies par l’État dans le cadre de la construction d’une centrale électrique. L’unité anti-émeute de la terrible PAP (police armée du peuple) a alors été envoyée sur place pour rétablir l’ordre, et elle a rempli sa mission avec un zèle faisant froid dans le dos.
Pour empêcher les manifestants de pénétrer dans Dongzhou, la police paramilitaire aurait tiré sur la foule en colère. Samedi 10 décembre 2005, soit quatre jours après les évènements, on ne connaissait toujours pas le nombre exact de victimes de la répression policière, mais des villageois faisaient état d’une trentaine de morts. Si ce chiffre s’avère exact, il s’agit de la plus terrible répression de l’armée chinoise exercée à l’encontre de manifestants, depuis les évènements de la place Tienanmen en 1989, et il atteste une nouvelle fois le peu d’intérêt que porte l’État chinois aux droits de l’homme, au moment où les pays occidentaux et les institutions internationales continuent d’admirer le « miracle économique chinois ».
La situation semble avoir dégénéré après l’arrestation de trois représentants du village de Dongzhou sur le site de la future centrale électrique, alors qu’ils constataient une présence policière massive de plus d’une centaine d’individus. Ce week-end, des centaines de policiers continuaient de surveiller les lieux, tandis que les journalistes se voyaient interdire l’accès au village. Les autorités se refusaient toujours à tout commentaire, laissant la police rechercher les meneurs de la manifestation. Pékin fait montre une nouvelle fois du peu de considération qu’elle porte à bon nombre de ses concitoyens, sacrifiés sur l’autel du capitalisme chinois. Celui-ci réussit l’exploit de faire coexister les défauts d’une économie de marché dénuée de filet social pour les plus faibles, et un dirigisme étatique de type cryptocommuniste dictatorial, sans aucune pitié pour ses opposants.
Si la Chine connaît depuis les dernières années un développement économique phénoménal, basé sur une croissance à deux chiffres, celui-ci se fait au détriment d’une immense majorité de la population, vivant en majorité dans les campagnes abandonnées par le pouvoir central. Déjà ravagées par une épidémie de Sida niée par le régime, les populations rurales de l’Empire du milieu se voient également parfois privées de leurs terres, dont la propriété foncière revient à l’État central. Cela confère un immense pouvoir aux fonctionnaires locaux, facteur bien entendu de corruption.
D’après le journal Le Monde,
en 2004, « 74 000 manifestations, dont certaines violentes, et
mouvements de protestations ont eu lieu en Chine, soit 16 000 de plus
que l’année précédente ». Ce malaise paysan s’explique en grande partie
par la multiplication des expropriations de terres par les autorités
locales, pour des projets industriels. Le pharaonique projet de barrage
des Trois Gorges est le plus emblématique, imposant finalement de déplacer
des millions d’individus. C’est sans aucun doute « nécessaire au
développement ». Ce que deviennent ces paysans pauvres, peu de gens
semblent s’en préoccuper réellement, sauf que lorsqu’ils se
révolteront, les deux millions de soldats de l’armée chinoise ne seront
pas de trop pour réprimer, à la « méthode Tienanmen », et maintenant
« Dongzhou », les manifestations de personnes réclamant simplement « leur
part du gâteau », de l’immense gâteau chinois. Mais que les Français ne
s’inquiètent pas. Ce n’est pas ce genre d’évènement qui empêchera
notre chère « patrie des droits de l’homme » d’aller vendre des Airbus
à notre « ami chinois ».
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