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Accueil du site > Actualités > International > Shimon Peres : quand Caliméro devient le roi des Belges

Shimon Peres : quand Caliméro devient le roi des Belges

Après le prix Nobel de la Paix 1994, Shimon Peres vient d’obtenir la seconde consécration de sa longue carrière politique : il vient d’être élu président de l’État d’Israël ce 13 juin 2007.

Enfin reconnu !

C’est sans doute ce qu’a dû penser Shimon Peres ce 13 juin 2007 après-midi après 83 ans de vie dont 55 au service d’Israël.

D’origine biélorusse, élu pour la première fois député en 1952, nommé pour la première fois ministre en 1969, il est aujourd’hui encore numéro deux du gouvernement, et je m’étais étonné de la part de convictions et d’ambition chez cet homme qui n’hésite pas à sacrifier quelques idéaux pour rester au gouvernement.

Il vient d’être largement élu président de l’État d’Israël, pour sept ans. Poste honorifique, le siège est pourvu sur fond de scandale sexuel de son prédécesseur Moshe Katsav (accusé de viol, il a dû démissionner en janvier 2007) et de profonde crise de confiance politique pour le gouvernement actuel.

1952, date d’entrée de Peres à la Knesset, c’est aussi la date de naissance de la femme politique d’origine irakienne, Dalia Itzik, qui, depuis janvier, assure l’intérim présidentiel en tant que présidente de la Knesset.

Shimon Peres, c’est un peu comme Gorbatchev ou Walesa. C’est une personnalité très connue à l’étranger, qui jouit d’une stature éminente d’homme d’État et qui en profite pour aller faire des conférences un peu partout dans le monde, mais dans son pays, il a toujours été considéré comme un loser.

Il n’a en effet jamais gagné une élection. Et pourtant, il a été trois fois à la tête du gouvernement israélien.

En 1977, par intérim suite à la démission de Yitzhak Rabin, obligé de s’écarter à la suite d’un scandale financier. Hélas, le nouveau Likoud de Menahem Begin remporte les élections.

Puis de 1984 à 1986, il démarre une période particulière de "cohabitation à l’israélienne" où l’absence totale de majorité a entraîné un accord d’alternance entre Peres et Shamir.

Puis enfin, à l’assassinat de Yitzhak Rabin le 4 novembre 1995, il reprend l’intérim de Premier ministre jusqu’à son nouvel échec électoral en juin 1996.

Abonné tous les dix ans à de brèves séquences d’intérim, Shimon Peres aurait pu aussi assurer la succession provisoire d’Ariel Sharon lorsque ce dernier est entré dans un profond coma le 4 janvier 2006 (il n’en est toujours pas sorti) jusqu’aux élections prévues le 28 mars 2006, mais a finalement refusé les avances de son nouveau parti centriste Kadima.

Malgré sa popularité, Shimon Peres avait même échoué de façon inattendue à la même élection en 2000, victime du revirement d’un de ses soutiens.

Mais Shimon Peres le loser, est-ce vraiment le bon raccourci ?

Bien sûr que non. C’est avant tout le survivant des accords d’Oslo qui, en 1993, pour la première fois, laissait entrevoir un espoir de paix entre Israéliens et Palestiniens.

À l’époque, il n’était que ministre des Affaires étrangères, mais c’est lui qui encouragea et noua toutes les relations et négociations pour aboutir à cet accord. Les deux leaders antagonistes, Rabin et Arafat, se voyaient ainsi partager leur prix Nobel de la Paix 1994 avec le véritable initiateur de cette démarche.

À la mort du premier président israélien, Chaim Weizmann, en novembre 1952, Ben Gourion avait proposé la présidence de l’État d’Israël au célèbre physicien Albert Einstein qui refusa poliment par cette explication : « D’abord, si je connais les lois de l’univers, je ne connais presque rien aux êtres humains. De plus, il semble qu’un président d’Israël doit parfois signer des choses qu’il désapprouve, et personne ne peut imaginer que je puisse faire cela. »

Cinquante-cinq ans après, voici que l’État d’Israël se voit donc présidé, j’oserai dire protégé, par un autre Prix Nobel, qui ne manquera pas de redorer la fonction.

Consécration donc pour un homme de paix qui disait lors de l’assassinat de Rabin : « Vous pouvez tuer mille personnes ; vous pouvez abréger une vie ; mais vous ne pouvez pas tuer une idée. ».

Mais aussi, consécration pour un homme d’expérience et sans illusion sur la pratique politique israélienne assez complexe, qui remarquait que la « télévision a rendu la dictature impossible mais la démocratie insupportable. ».


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13 réactions à cet article    


  • caramico 15 juin 2007 10:08

    Peu au fait de la politique israélienne, j’ai en tête l’image d’un opportuniste pas très fanatiquement à gauche.

    me trompe-je ?


    • Pierre R. Chantelois Pierre R. - Montréal 15 juin 2007 10:12

      Commentaire intéressant sur un personnage énigmatique. Toutefois, vous avez suscité chez moi une petite interrogation. Croyez-vous que Peres sera sensible, dans l’exercice de ses nouvelles fonctions, à cette préoccupation, que vous citez, d’Einstein : « De plus, il semble qu’un Président d’Israël doit parfois signer des choses qu’il désapprouve, et personne ne peut imaginer que je puisse faire cela  » ?

      Pierre R.

      Montréal (Québec)


      • Sylvain Rakotoarison Sylvain Rakotoarison 15 juin 2007 13:02

        À Pierre R.

        Je pense que Shimon Peres a déjà avalé de nombreuses couleuvres, mais peut-être pourrait-il peser malgré le rôle mineur de sa fonction sur toutes les décisions en rapport avec le processus de paix ?

        Cordialement.


      • L'enfoiré L’enfoiré 15 juin 2007 12:10

        @L’auteur,

        Quand j’ai modéré l’article, je n’ai aucune peine pour l’accepter mais au sujet du titre, je suis resté perplexe. J’ai essayé de rechercher le mot « belge » dans l’article pour une explication. Pas trouvé.

        Alors si tu pouvais m’éclairer Calimero, c’est trop injuste, il ne pourrait se placer à nouvel ordre au poste auquel tu l’envoies.

        Nous ne sommes pas le 13 décembre et ça m’étonnerait que la RTBF relancerait son pavé dans la marre. smiley


        • Sylvain Rakotoarison Sylvain Rakotoarison 15 juin 2007 13:00

          Bonjour L’enfoiré,

          Merci. Le titre est peut-être un peu tiré par les cheveux, mais je trouvais qu’il résumait assez bien et sans doute maladroitement Shimon Peres.

          Caliméro : « c’est trop injuste ». C’est sans doute le sentiment que Shimon Peres a dû ressentir lors de ses nombreux échecs électoraux alors qu’il est une personnalité de grande intelligence et qui a contribué de façon décisive à une paix encore en devenir.

          Roi des Belges : maintenant, Peres accède à une fonction honorifique, mais va pouvoir aussi jouer un rôle essentiel pour maintenir l’unité d’une classe politique très divisée avec un Likoud redynamisé, un parti travailliste qui vient de subir des primaires éprouvantes et un gouvernement très critiqué pour sa gestion de la ‘guerre’ libanaise de juillet 2006. Bref, un peu le rôle du roi des Belges dans son propre pays.

          Raccourcis peut-être trop rapides ?

          Cordialement.


        • L'enfoiré L’enfoiré 15 juin 2007 13:34

          Bonjour Sylvain,

          Oui, Caliméro : « c’est trop injuste ». Shimon Peres a toujours le Poulidor de la politique israéliennes. Une personnalité de grande intelligence et qui a contribué de façon décisive à une paix encore en devenir. Parfaitement. Polyglotte avec une voix presque hésitante du fond de la gorge. L’hésitation venait simplement de sa volonté d’être réfléchie.

          « Fonction honorifique comme le Roi des Belges »

          >>>oui, j’aurais dû y penser. « Raccourcis peut-être trop rapides ? » Non, mais il fallait le fil même blanc qui relie.

          Après un président précédent qui traînait des casseroles, un gouvernement qui patine sans glace. Une économie qui n’a plus la force d’antan avec PIB de la péninsule ibérique. Un tourisme quasiment nul. Il y a du pain sur la planche et pas nécessairement tout blanc.

          Cordialement.


        • Sylvain Rakotoarison Sylvain Rakotoarison 15 juin 2007 17:43

          À L’Enfoiré,

          En regardant sur Google, j’ai découvert après coup (sans lien) ce site qui parle d’un « effet Caliméro » pour la classe politique belge, qui se résume en quelques sortes ainsi : plus un homme politique est contesté et est l’objet de scandales, plus il est populaire et plus on vote pour lui.

          « L’effet Caliméro ( 27 janvier 2007)

          Connaissez-vous l’effet Caliméro ? L’expression est née en Belgique aux débuts des années 70. A cette époque, un homme politique belge bien connu, Monsieur VDB (je ne sais plus comment orthographier correctement son nom) commença à avoir des ennuis avec la justice : détournements de fond public, blanchiment d’argent,.... Ses adversaires politiques n’hésitèrent pas à en profiter pour le traîner dans la boue dans tous les médias... Et plus ils le faisaient... plus sa cote montait non seulement dans les sondages, mais aussi aux élections.

          On a remis cela avec ce qu’on a appelé ici “les affaires” : des hommes politiques de très haut rang ont dû passer au Tribunal et se sont même fait jugés coupables tant dans l’affaire Cools que dans les affaires Agusta ou Dassault... Messieurs Mathot, Spitaels et Coeme ont été très durement sanctionnés. Ils ont été inéligibles pendant un temps (pour certains), mais leur cote électorale n’a pas baissé pour autant. Monsieur Coeme a fait un tabac aux dernières élections communales. En Flandre, la même chose. Monsieur Van den Broeck (encore un VDB) s’est même expatrié aux Etats-Unis pendant un temps, mais quand il est revenu, son succès électoral avait augmenté.

          Si bien que des politilogues ont émis cette hypothèse : A partir d’un certain moment, plus on charge ou l’on critique un homme politique connu, plus les électeurs sont tentés de prendre sa défense en votant pour lui...

          Alors, quand je vois les coups nauséabonds (accusation de non paiement d’impôt, d’incompétence en politique internationale, enquête sur un de ses collaborateurs,... etc.)que doit essuyer Mme Royal, en France, je me dis que l’UMP ne doit pas bien savoir ce qu’ils risquent... A leur place, je me dirais qu’il est grand temps de lever le pied et d’en finir avec ces pratiques qui risquent bien d’amener Ségolène sur un fauteuil à l’Elysée.

          Mais, un belge peut toujours se tromper... »

          http://vudebelgique.blog.lemonde.fr/2007/01/27/leffet-calimero/

          Cordialement.


        • L'enfoiré L’enfoiré 15 juin 2007 20:58

          Sylvain,

          L’effet Caliméro ( 27 janvier 2007)

          J’ignorais qu’il y avait un l’effet Caliméro.

          « débuts des années 70. un homme politique belge bien connu, Monsieur VDB (Paul Vanden Boeynants, URL) ... plus sa cote montait non seulement dans les sondages, mais aussi aux élections. »

          >>> On le vit encore aujourd’hui. On n’aime pas les souffre douleur dans la population. L’effet Michel Daerden est un peu du genre sous un autre angle.

          « les affaires Agusta ou Dassault »

          >>>les 3 Guy : Messieurs Mathot, Spitaels et Coeme ont été très durement sanctionnés. Ils ont été inéligibles pendant un temps (pour certains),

          >>> Le reste n’engage que toi.

          « Mais, un belge peut toujours se tromper... » »

          >>> Non, peut-être... ! smiley


        • Sylvain Rakotoarison Sylvain Rakotoarison 15 juin 2007 21:16

          L’Enfoiré,

          « Mais, un Belge peut toujours se tromper. »

          Ah non, ça ne m’engage pas, je ne faisais que citer l’auteur de cet article, qui est belge. Je ne me serais pas permis.

          En France, il y a quelques retours (ou maintiens) un peu du même genre, je ne les cite pas mais il y en a dans le 92, le 61, le 38 entre autres...


        • Internaute Internaute 15 juin 2007 15:25

          En choisissant un pépé de 83 ans comme président, les juifs on cherché à minimiser l’exercice du droit de cuissage auquel s’adonnait son prédecesseur.


          • Jean G. 15 juin 2007 23:03

            Merci d’avoir mentionné ce mot : la « télévision a rendu la dictature impossible mais la démocratie insupportable. ».

            Encore que, impossible, la dictature ? Et quand la télé - les medias - tombent dans les mains du pouvoir ?


            • Adama Adama 17 juin 2007 17:13

              Petite erreur dans votre biographie de Shimon Peres, celui-ci est né à Vishniev en Pologne (maintenant en Biélorussie).


              • Gilles Gilles 17 juin 2007 17:34

                Peres est non seulement considéré comme un loser en Israël, amis aussi comme un opportuniste qui bouffe à tous les râteliers (ou presque). Rentrer dans Kadima avec Ehud Olmert, successeur du longtemps honnis Sharon par la gauche, en est une parfaire illustration.

                Un homme consensuel en bref. Tous les partis qui l’on élu savent qu’il est convaincable et à la fin de sa vie, on peut croire que n’ayant plus rien à espérer de plus, il sera servir les intérêts du pays avant les siens.

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