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Subir le capitalisme ou en sortir, That is the question

Quand on évoque la crise financière actuelle, on ne voit en réalité la crise que du point de vue de ceux qui la subissent, à savoir les pays dits “développés”, en oubliant ainsi la majeure partie des habitants de cette planète, à savoir les “BRICS” d'une part, et “tous les autres” d'autre part. Car pour eux, la situation n'a strictement rien de comparable avec celle que nous traversons : si les perspectives européennes les inquiètent réellement, elles n'empêchent pour autant ni la croissance ni le business, et constituent même pour certains l'occasion de faire de bonnes affaires…

Car ce qu'on oublie trop souvent dans cette histoire, c'est que le monde ne se résume ni à l'Europe ni même aux Etats-Unis, et que le capitalisme fonctionne tout à fait “normalement” d'un point de vue global : la croissance mondiale est plutôt bonne, l'argent circule et les mauvais gestionnaires se trouvent logiquement contraints, un jour, de payer leurs dettes… Et c'est bien là que nous en sommes arrivés. La crise était inévitable car les pays riches ont refusé de voir que la roue du capitalisme était en train de tourner, et ils ont tout fait pour y échapper. Mais même en trichant, la réalité démographique a pris le dessus sur la théorie économique : l'Europe et les Etats-Unis, avec à peu près un milliard d'habitants, ne sont que peu de chose comparés aux près de 6 milliards des autres habitants de la planète. Même les plus conservateurs ne pouvaient donc pas décemment espérer que la domination d'un petit milliard d'êtres humains puisse éternellement s'exercer sur six autres milliards… et c'est donc face à cette réalité qu'il faut regarder cette crise, qui n'est pas une punition divine mais simplement la conséquence logique de l'Histoire de l'Humanité.

A l'occasion de cette crise se pose maintenant la question de savoir ce que vont faire les pays riches, qui n'ont le choix qu'entre deux alternatives : soit ils acceptent le retournement qui s'effectue, et doivent se préparer à voir leur niveau de vie baisser, soit ils le refusent et doivent alors changer les règles du jeu capitaliste, de gré ou de force.

La première hypothèse pourrait sembler la plus plausible aux vues des mesures d'austérité qui se profilent en Europe et aux Etats-Unis, mais c'est sans compter qu'il est plus difficile de se séparer du confort que de s'y habituer, et que peu sont prêts à consentir ce genre de sacrifices : on peut même penser raisonnablement que les plus riches seraient les plus difficiles à convaincre… et les plus riches, ce sont justement ceux qui gouvernent, de près ou de loin, les Etats aujourd'hui en difficulté. Dans cette hypothèse, ce ne sont donc pas les riches qui devraient faire des sacrifices, mais bien les pauvres qui y seront contraints : et je doute qu'ils ne s'y soumettent sans rechigner non plus.

La seconde hypothèse, bien qu'elle soit considérée comme farfelue par beaucoup, est cependant tout à fait envisageable, car elle correspond exactement à la direction que prend le cours des choses : pour revenir à l'équilibre, les sacrifices exigés du peuple seront tellement importants que les dirigeants des Etats en difficulté risquent de se voir contestés fortement, et les grands financiers prêteurs de se détourner vers des profits plus intéressants…ailleurs. Changer les règles du jeu devient alors une hypothèse alléchante, car elle permettrait aux gouvernants d'échapper à la sanction des échéances électorales ainsi qu'à la perte de puissance de leurs Etats (des places de choix au G8, G20, FMI, OMC, Banque Mondiale, ONU, OTAN….) au sein du concert des nations. Et en emportant avec ce programme l'adhésion des peuples concernés, consentants plus facilement à des sacrifices en échange d'un avenir meilleur que celui de la première hypothèse.

Cette hypothèse correspondrait alors à une véritable reprise en main du politique sur le financier, comme les évènements actuels peuvent le laisser penser : en effet, toute cette agitation autour de la faiblesse des banques et de leur besoin de recapitalisation semble un coup de poker menteur joué par une Christine Lagarde qui savait très bien où ses “petites phrases” conduiraient. Alors qu'il est certain que les banques européennes, même fortement impactées par un défaut de la Grèce ou de l'Italie, s'en sortiraient malgré tout (elles font de l'argent partout ailleurs dans le monde, et spéculent à la hausse comme à la baisse), la rumeur de leur fragilité a permis aux politiques de faire avancer leurs pions d'une case de plus sur l'échiquier qui oppose désormais les pouvoirs politique et financier : en faisant croire que les banques ne seraient pas capables de faire face à une mise en faillite de certains Etats, ce sont les banques elles-mêmes qu'on met “pour de vrai”en péril, en jouant sur la peur de “petits épargnants” prêts à retirer leurs économies à la première occasion, bien mieux qu'un “bankrun”. Car s'il est une chose qui doit être bien certaine pour tous, c'est qu'un Etat ne peut pas faire faillite ! Il ne peut être ni vendu ni dissous, et cela malgré la faillite de toutes les banques du monde ! Il faudra toujours et des champs et des routes, et des maisons et des usines, et des écoles et de hôpitaux, et des voitures et des télés…à manger, à boire, de quoi se loger et se déplacer, que ce soit avec un euro fort ou un euro faible, et même avec pas d'euro du tout !

Par contre, il se peut qu'en émettant les rumeurs d'une faillite des banques, elles risquent de se produire vraiment, par “auto-réalisation“. La nationalisation serait alors une option nettement plus probable que la restructuration (autrefois envisagée par le FMI de DSK), suivant la volonté non plus des marchés, mais des politiques. Ce qui constituerait un changement décisif du rapport des forces ; ainsi que la possibilité de modifier totalement les règles du jeu économique à travers un changement de régime total, c'est à dire une sortie pure et simple du capitalisme.

Car nationaliser des banques mondialisées, cela signifie modifier le système monétaire international de manière radicale : la plupart des grandes banques mondiales sont européennes ou étasuniennes, et nationaliser les plus grandes à l'intérieur d'un Empire “du nord” (Europe/Etats-Unis) permettrait à ce “consortium” d'imposer au reste du monde une refonte totale du système monétaire international, un nouveau Bretton Woods avec le bancor à la clef ; et d'échapper ainsi à l'inévitable retournement imposé par les règles du capitalisme d'aujourd'hui.

On comprendrait mieux alors à la fois l'insondable incompétence des économistes qui plongent les Etats “du nord” chaque jour un peu plus dans la récession, et la volonté des “BRICS” de rassurer les marchés pour en retirer les fruits capitalistes : se profilent derrière ces deux options les véritables alliances dont j'évoquais il y a quelque temps la mise en place, avec l'Europe et les Etats-Unis d'une part, partisans de la fin du capitalisme pour échapper à la dégradation, et les BRICS d'une autre, pris entre le désir de perpétuer un système qui leur devient enfin favorable et celui de faire allégeance au projet de refonte du système pour en bénéficier le jour venu.

La bataille se trouve donc être double, car elle se joue à la fois entre “le nord” et “le sud”, et entre le pouvoir politique et le pouvoir financier. Mais elle ne fait que commencer, et il est encore trop tôt pour engager un pronostic : car même dans le cas où le pouvoir politique l'emporterait sur le financier, cela ne signifie pas pour autant que la bataille pour imposer aux pays “du sud” les nouvelles règles “du nord” sera victorieuse… Il suffit pour s'en convaincre de constater que les guerres pour l'énergie et les territoires fertiles s'étendent partout à travers le monde (sur le dos des plus faibles bien entendu), comme si l'on se préparait déjà, des deux côtés, à assumer par la force le refus des uns de se soumettre aux autres.

Le capitalisme pourrait donc bien un jour se terminer : mais ce par quoi il sera remplacé risque bien d'être encore pire !

Caleb Irri

http://calebirri.unblog.fr


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5 réactions à cet article    


  • Jean-Pierre Llabrés Jean-Pierre Llabrés 17 septembre 2011 09:36

     Subir le capitalisme ou en sortir, That is the question

    Posséder le capitalisme, that’s the answer !

    Le Dividende Universel.
    Synthèse capitaliste pour instaurer une authentique compatibilité entre compétitivité et cohésion sociale ; entre compétitivité et solidarité.


    • Kalki Kalki 17 septembre 2011 10:55

      ou le peuple peut crever ... on coupe les retraites, on vire les fonctionnaires et les autres et on s’amuse comme des fous


    • Kalki Kalki 17 septembre 2011 13:43

      JPL : seul chuck norris possède le capitalisme , seul chuck norris est capable de le baiser


    • le journal de personne le journal de personne 17 septembre 2011 14:41

      Beurre et confiture

      Je déclare la guerre aux considérations vulgaires : la crise boursière... les souris dans la souricière...et les hommes libres dans les fers...
      Je dis qu’il n’est plus question de se laisser faire
      Il y a un temps pour tout... il est temps d’être sévère !
      J’exagère ? 
      Ça me rassure... j’aime quand je passe la mesure

      http://www.lejournaldepersonne.com/2011/09/beurre-et-confiture/


      • Slipen’Feu 17 septembre 2011 18:21

        Il est difficile d’expliquer a un zombie qu’en faite il n’est pas encore humain

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