Initialement, le buzz est issu de communautés sûrement réduites d’utilisateurs aux intérêts divers. Dès la création du Web par les physiciens de Cern, on peut supposer que des blagues ou autres informations privées se mêlaient déjà aux partages des avancées scientifiques. Aujourd’hui, tout surfer régulier tombe un jour ou l’autre sur une petite vidéo d’une gamelle rigolote (type : afroninja), d’une casserole désinhibée (le rappeur du 92) ou d’un jeune norvégien autodidacte (Lasse Gjertsen). Mais le marketing a récupéré le phénomène et l’a baptisé « buzz » rendant sa typologie assez délicate. Notre même surfer tombe désormais plus facilement sur la promotion du film Borat, une pub pour la Clio avec Omar et Fred ou sur Alain Souchon et son nouveau single.

Mais... Comment le marketing s’est-il approprié le buzz ? Cela tient à un aspect des plus paradoxaux. Au niveau de l’imaginaire, on est bien dans le traditionnel bouche à oreille : une information qui semble confinée à un groupe ou une communauté référents... d’où l’impression pour l’internaute d’être un privilégié averti avant le reste du monde. Et pourtant... l’aspect le plus important du buzz est bien qu’il crée un engouement significatif (dont les remakes ou parodies sont caractéristiques (1)). Vous êtes un pro de la com et/ou du marketing ? J’imagine que pour vous tout est dit... et également que vous avez un train de retard si vous découvrez juste le buzz : EuroRSCG a sorti son bouquin en 2004. Ce qu’on vous dira peut-être moins mais qui se devine facilement, c’est qu’il s’agit d’une révolution marketing : pour 3 francs 6 sous, on sait rapidement si tel produit ou service aura du succès...

Caractéristique de moins en moins vraie d’ailleurs, puisqu’à mesure que le buzz pénètre l’espace public, les partenariats commerciaux se développent entre des sites devenus incontournables (Youtube, Dailymotion, Myspace etc...) et des artistes, maisons de disques ou industries du cinéma. En conséquence, les buzz se dégagent de la stricte pratique de l’Internet pour rejoindre les démarches politiques et commerciales. Ceci en conservant, comme souvent dans les NTIC, un imaginaire originel et communautaire.

Du coup, les blogs d’hommes et femmes politiques, vidéos d’artistes, un nouveau site Internet et plus généralement une simple information vont, s’ils suscitent une attention collective, être des buzz. A une condition : être lié de près ou de loin aux NTIC et encore... L’hebdomadaire Elle dit du film Little Miss Sunshine : « Pas de promo », tout s’est fait « grâce à un buzz positif et populaire » (2) venu d’on ne sait où. Et désormais, ce même hebdomadaire a intitulé une rubrique « buzzomètre » où vêtements H&M, mannequins en vue et autres accessoires de mode n’ont à peu près rien à voir avec les NTIC (3) (et je suis gentil). Bref, le terme envahit la sphère publique et devient, soyons francs, un mot-valise. Il signifie aujourd’hui :

- Un succès arrivé sans volonté stratégique ;

- Une volonté stratégique de créer un succès via les NTIC ;

- Une promotion réussie uniquement grâce à Internet ;

- Un personnage de Toy Story (je sais c’est nul mais je pense à mes jeunes lecteurs...) ;

Et demain tout ce qui sera nouveau et souhaité comme digne d’intérêt pour toujours plus de gens. Finalement tout et n’importe quoi...

- 1- Avis aux incrédules : allez voir le nombre de remake du rappeur du 92, d’afroninja, de Borat, etc... Faites moins les malins, hein ?

-2- Edition du 26/03/2007 n°3195 ed. Hachette Filipacchi

-3- Edition du 02/04/2007 n°3196 ed Hachette Filipacchi