Aubry, Hamon : les postures dérisoires de l’aile « gauche » du PS
C'est le feu dans la maison socialiste. Avec un président de la République qui bat des records d'impopularité à mi-mandat, une partie des camarades hésitent de moins en moins à tirer contre l'ambulance. Vrais désaccords de fond ou postures destinées à préparer leur avenir personnel ?
Mots durs pour désaccords superficiels
Menace sur la République ! L'ancien ministre de l'éducation n'est pas allé avec le dos de la cuillère dans sa critique de la politique du gouvernement. Bien sûr, devant les critiques de ses camarades, il a précisé que ce sont les politiques de réduction des déficits qui menacent la République, parce qu'elles affaiblissent l'Etat et pourraient favoriser Marine Le Pen pour les élections présidentielles en 2017. Mais cette présentation des choses est profondément surprenante, pour ne pas dire malhonnête. En effet, les déficits publics seront stables entre 2013 et 2015, à 4,3% du PIB et le gouvernement a réduit l'étau de l'austérité suite à la révolte fiscale de 2013. Bref, il est curieux d'exprimer une telle critique alors même que la majorité va plutôt dans la direction de Benoît Hamon, sur la question précise des déficits.
Martine Aubry a également exprimé ses divergences avec la politique menée par celui qui l'a battu en 2011. Elle propose de réduire le montant des baisses de charges à destination des entreprises, en le ciblant sur les entreprises innovantes, qui embauchent et qui investissent. Une idée qui peut sembler intéressante, mais qui ressemble furieusement aux usines à gaz souvent conçues par les énarques, autant d'occasions pour les grands groupes d'échapper à l'impôt. La mise en place serait sans doute un cauchemar. Ensuite, elle propose de réinvestir 20 milliards ainsi économisés dans la demande, en s'appuyant notamment sur les collectivités locales. On n’est jamais mieux servi que par soi-même... Une bonne illustration du caractère tribal de ces politiques qui ne voient pas plus loin que leur mandat.
Le théâtre des ambitions prédomine
Il faut rappeler que les différences idéologiques entre Martine Aubry et François Hollande sont négligeables, et tiennent plus à des questions de forme, les deux étant des enfants politiques de Jacques Delors et Lionel Jospin. Sur le fond (libre-échange, politique monétaire, régulation de la finance, Europe), il n'y a pas une feuille de papier à cigarette pour les séparer. Constatant son impopularité et la droitisation assumée de son discours, la maire de Lille fait mine de légèrement virer à gauche pour essayer d'occuper un espace politique d'où elle pourrait éventuellement le remettre en cause. Mais sur le fond, ses critiques sont extrêmement superficielles. Elle reste dans la même logique et ne va même pas aussi loin que Paul Krugman ou Joseph Stiglitz, qui restent pourtant des alternatifs modérés et sérieux.
Quant à Benoît Hamon, il est sacrément paradoxal d'attaquer le gouvernement auquel il appartenait alors qu'il fait un pas dans sa direction en ralentissant le rythme de réduction des déficits. Sa critique aurait eu un tout autre sens s'il s'était attaqué à l'obsession maladive et suicidaire de la compétitivité, qui représenterait une remise en cause vraiment frontale. Bref, la pseudo "aile gauche" du PS continue de s'agiter, occupant un créneau politique qui lui garantir attention médiatique, et, pour certains un capital politique intéressant dans leurs terres d'élection. On finit par se demander s'il n'y pas dans ces déclarations de simples postures théatralisant des différences pas si importantes, uniquement pour servir leur ambition personnelle, sans la moindre pensée véritable pour défendre l'intérêt général des Français.
Et malheureusement, quand elles sont sincères, ce que l'on peut croire de Gérard Filoche, on peut se demander si elles ne sont pas contre-productives, en créant une polémique caricaturale au mauvais moment, qui pourrait contribuer à la disqualification des alternatives au néolibéralisme.
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