Contre les hystériques de tous bords politiques : « la paix ! »
Effet Sarkozy, l’avantage va en politique aux hystériques de tous bords. Résistons par un appel au calme, face à la nouvelle religiosité d’un bouleversement général de l’ordre civil, qu’il vienne de Sarkozy ou d’ailleurs.
L’Etat-Sarkozy s’est donné une mission : réformer la France. Concrètement, cela signifie qu’aucune semaine ne peut passer sans qu’un grand chantier soit ouvert. Sarkozy ne sera pas satisfait tant que les institutions françaises ne seront pas toutes ventre ouvert comme le centre de Paris au temps de la reconstruction des Halles, dans l’attente de son scalpel de grand chirugien. On ne peut s’empêcher de penser au Dr. Knock et à tout son village mis au lit. C’est toute la France qui est malade. Rien ne saurait poursuivre sa gentille petite vie, rien ne doit demeurer stable. Il faut que la France bouge, et il faut tout mettre sens dessus dessous.
Dans ce climat hystérique, plus personne ne se sent le droit de demander : pourquoi réformer ? Chacun doit, au contraire, reconnaître qu’en effet, il faut des réformes, et toute la différence dont un opposant s’ose capable, c’est de dire que « oui, il faut réformer, mais pas comme cela ». Dans cette entreprise de déstabilisation totale, la prime, parmi les opposants, va à ceux qui attendent le renversement de la société. Le Nouveau Parti Anticapitaliste d’O. Besancenot n’est-il pas du Sarkozy à l’envers ? Les intelligents aiment dire que Sarkozy fait Besancenot comme Mitterrand fit Le Pen. Au-delà du douteux parfum de théorie du complot, on peut affirmer que cela est vrai dans l’exacte mesure où, dans cette atmosphère générale de renversement de toutes les institutions de la République, alors qu’il est interdit de demander un peu de calme (et n’est-ce pas précisément en temps de crise qu’il faut chercher une certaine stabilité institutionnelle ?), l’opposition légitime à Sarkozy le destructeur de droite ne peut consister que dans un appel au renversement de toutes choses, mais de gauche.
Hannah Arendt montre, dans les Origines du totalitarisme, que le système totalitaire se caractérise notamment par la faculté de créer un incessant « mouvement », d’empêcher que quoi que ce soit ne demeure stable. Le nazisme comme le stalinisme, explique-t-elle, se donnèrent pour mission de laisser les grandes forces de l’Histoire agir (conformément à l’idéologie), et cela devait se faire au prix d’une annulation de toute liberté humaine, celle-ci risquant toujours de freiner l’action de ces grandes forces.
Nous ne sommes certes pas dans une telle situation. Mais n’y a-t-il pas dans les circonstances présentes comme un effort pour entraîner chacun dans la pensée qu’il doit se soumettre à un destin qui va s’accomplir ? Chacun doit se faire le serviteur du nécessaire bouleversement général. Si Sarkozy est le plus haut représentant de cette forme de doctrine, il n’en est pas le seul. N’entendons-nous pas chaque jour que nous sommes coupables de vivre comme nous vivons, que nous devons prendre conscience des crimes que nous commettons en mangeant ce que nous mangeons, en buvant ce que nous buvons, en achetant ce que nous achetons ? Bref, il faut un homme nouveau pour une terre nouvelle, renoncer à tous les usages de l’homme ancien (et il y a, dans l’incessant appel aux générations futures, comme une manière de vouloir faire disparaître l’humanité présente…). Il faut renoncer, baisser la tête, s’agenouiller encore, avec componction, honte, remords.
Contre cette tendance générale qui incline à rendre inepte toute liberté de pensée, qui cherche à faire passer l’exigence de rendre raison pour de l’ignorance des catastrophes imminentes, face à ces nouvelles eschatologies de droite et de gauche, la vraie résistance consiste à demander du calme, à se refuser à l’hystérie générale, à faire l’éloge de ce qui marche, et en particulier à nous féliciter d’avoir hérité de l’histoire, récente ou plus ancienne, des institutions qui ont fait leurs preuves (une école, une université, un État social, des droits qui ne sont pas si mauvais). Il faut s’opposer à tous ceux, complices objectifs, dont l’ennemi premier est l’ordre juridique de la République, qui est notre abri et la garantie de notre liberté.
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