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De toutes les couleurs

Ah, qu’il est beau ce symbole : le bonnet rouge, sorti d’on ne sait quel cerveau de communicant payé par on ne sait qui, et qui fait les délices des médias toujours avides de sensationnel.

Il est à la mode en cet automne morose, tout droit sorti des ateliers d’une entreprise de Quimper. Il est porté indifféremment par les ouvriers qui craignent pour leurs emplois, par les patrons qui préparent les plans sociaux, par des élus en mal de notoriété et qui rêvent d’une Bretagne indépendante qui ne manquerait pas de lever des impôts pour pouvoir survivre sans les aides de l’Etat et de l’Europe, et par des élus de l’opposition qui privilégient le court terme politique et allient l’indécence au manque de sens politique.

Derrière ce mouvement on trouve des situations différenciées, et par conséquent une somme d’intérêts divergents et contradictoires.

S’agissant de Marine Harvest, leader dans le saumon fumé, la situation est classique : il s’agit d’un groupe qui fait des bénéfices et qui en cherche à en faire davantage en fermant une usine et en licenciant ses employés. Ce n’est pas l’Etat qui est responsable, mais l’économie qui privilégie le dividende.

Pour les volaillers, on soulignera les erreurs stratégiques des entreprises Doux et Tilly Sabco, cette dernière remportant la palme de la mauvaise foi par le biais de son PDG qui confond son rôle de dirigeant avec celui de leader syndical chauffant ses troupes pour les envoyer à l’assaut des sous préfectures.

Autre symbole, les portiques écotaxe, mesure votée de manière consensuelle au Parlement et destinée à financer des infrastructures de transports. Non à cette taxe ! clament en cœur la FNSEA et le MEDEF, soutenus par une alliance de circonstance qui refuse ce nouvel impôt en oubliant de dire ce qu’ils reçoivent de l’Etat ou de l’Europe (restitutions et PAC, en particulier) pour continuer à produire en évitant de remettre en cause leur politique agricole et industrielle.

Au passage, on remarquera la solitude du mouvement qui ne trouve aucun relais dans les autres Régions, notamment frontalières, qui mettent en avant les possibilités nouvelles d’investissement dans le domaine des infrastructures.

Contradiction enfin chez ce regroupement hétéroclite qui veut défendre l’emploi ou refuse une taxe, c’est selon, et qui n’hésite pas à jouer les casseurs et à mettre les réparations ou les pertes de recettes sur le dos de la collectivité.

Pas de dialogue, mais des ultimatums : où va-t-on et pour qui se prend-il, ce groupe qui s’autoproclame protecteur des intérêts Bretons et qui cherche à manipuler l’opinion ?

Au nom de quoi accepterions-nous de suivre ces syndicats professionnels et agricoles, ces élus qui s’égarent au nom d’une pseudo autonomie régionale et ces autres élus qui récupèrent le mouvement pour mieux taper sur le pouvoir en place et qui manipulent les salariés en leur promettant des lendemains qui chantent, une fois qu’ils auront détruits tous les portiques et les radars de la Région ? Les troupes à l’attaque et les officiers à l’arrière !

Vert de rage, devant cette enflure médiatique qui, à de rares exceptions, se contente de passer les images de ces bonnets rouges enflammant des pneus (c’est bon pour le 20 heures, coco !) au lieu de faire de la pédagogie et de l’information, la vraie, pas celle qui se vautre dans le sensationnel pour faire monter l’audimat.

Noir de colère devant le délitement des mœurs politiques et devant ces partis politiques irresponsables, sans parler de ceux qui se posent en sauveurs futurs devant « l’incompétence des autres » et dont les programmes économiques ne feraient qu’aggraver les choses.

Comment en est-on arrivé là ? A cet immense lavage de cerveaux, à cette absence de mémoire individuelle et collective qui nous entraîne tout droit dans le mur ?

Chacun pour soi, on se fout des autres. Ce qui compte ce sont les intérêts individuels à court terme : on gueulera et on descendra dans la rue uniquement le jour où on sera concerné et on fera bloc avec nos licencieurs contre le pouvoir politique, quel qu’il soit, forcément incompétent puisqu’il perçoit trop d’impôts un jour et qu’il ne donne pas assez de subventions le suivant.

La légitimité politique de gauche ou de droite est en train de s’effondrer devant cette somme d’intérêts individuels portés aux nues par des médias et des commentateurs complaisants.

La classe politique, usée jusqu’à la corde, et décrédibilisée dans l’opinion s’apercevra t-elle qu’il est temps de revoir son logiciel actuel formaté uniquement sur la conquête du pouvoir et le maintien des féodalités locales ?

La convergence des luttes, mise en avant par certains syndicats, n’est-elle pas en train de trouver ses limites dans ce qui se passe en Bretagne, en ce sens où la manipulation et le poujadisme semblent en être les principaux catalyseurs ?

Le modèle unique de décentralisation a vécu : trop de couches et trop d’intervenants qui se neutralisent les uns et les autres au nom de leurs intérêts particuliers. Cette crise, montée en épingle, est là pour nous montrer les limites des modes de gouvernance : sachons saisir la balle au bond.

 


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13 réactions à cet article    


  • alinea Alinea 6 novembre 2013 14:56

    "Noir de colère devant le délitement des mœurs politiques et devant ces partis politiques irresponsables, sans parler de ceux qui se posent en sauveurs futurs devant « l’incompétence des autres » et dont les programmes économiques ne feraient qu’aggraver les choses."

    Vous pouvez éclairer ma lanterne ? Je ne fais pas partie de ceux qui sont dans vos secrets et je ne comprends pas !


    • alinea Alinea 6 novembre 2013 21:21

      Merci de votre éclairage !


    • eric 6 novembre 2013 14:58

      Merci !
      Merci pour ce cris du cœur !

      Oui c’est bien le peuple qui est dans la rue. Le peuple le vrai, avec ses diversités. Les Ouvriers, les patrons, les riches, les pauvres, les touristes, les retraites, les badaux, ne sachant pas exactement pourquoi ils sont la...Avec des intérêts, des discours, divergents, contradictoires, pas nécessairement explicites ou explicitées, ses sensibilités et choix politique varies.
      Qu’il est fort en effet le contraste avec les 700 rigolos qui ont défilé a Carhaix. Tous semblables sociologiquement, intérêts corporatistes monolithique,convergence idéologique de fait.


      • périscope 6 novembre 2013 15:14

        La taxe sur les camions, votée à l’unanimité a été dévoyée par ceux qui ont fait bénéficier leurs copains du contrat « léonin » pour la société chargée de gèrer.
         La redite de la manipulation, faite sous Villepin pour privatiser les autoroutes, au profit d’amis initiés et pour faire rentrer de l’argent plus vite dans les caisses de l’Etat.
         En plus cette décision gène fort pour la cohérences des redevances transport. Chez nos voisins d’ Allemagne, pas de doubles entre la taxe camions et le péages des autoroutes qui sont restées fédérales.


        • périscope 6 novembre 2013 15:34

          Je complète
           Rien à voir, ici, avec la Bretagne, mais choix pour manifester de cette région où, d’une part on a le « sang chaud » mais où il y a conjonction d’autre facteurs :
          * problèmes de déchets des porcheries et poulailles industriels, qui s’agrandissent à l’infini pour « optimiser » la fiscalité. (à noter que les transporteurs font de même, avant de vendre, la retraite venue, leur boite à des fonds de placement apatrides.
          * Baisse d’activité prévisible depuis que Bruxelles en toute logique (le poulet à bas prix empêche le paysan africain de produire) et suite à des accords internationaux, a décidé de ne plus subventionner les exportations de poulet. On le savait depuis des mois : qu’a fait l’Etat pour compenser ?
          * surtout,depuis qu’ à cause de la main-d’oeuvre, beaucoup plus chère en Allemagne qu’en France, nos abattoirs font travailler les carcasses en Allemagne. Ainsi, celle qui devait être la première nation agricole de l’Europe ne nourrit même plus ses nationaux ! C’est grave, surtout quand l’Etat ne fait rien.
          La révolte actuelle est la résultante de toutes ces démissions et corruptions. 


        • bernard29 bernard29 6 novembre 2013 16:40

          Bon, vous exprimez un peu le fait que nous sommes dans le mur . Bien !! pourquoi pas . Moi aussi je pense que le système du corporatisme généralisé nous y entraîne, et que peut être que nous sommes au bout de quelque chose. Mais ce n’est une raison pour rejeter avec morgue tous les aspects de la manifestation des bonnets rouges.

          Sincèrement, j’aurais bien voulu savoir dans quel département de l’Ouest vous avez exercé vos fonctions de directeur territorial ? parce que de mon point de vue , ni au niveau historique, ni au niveau de la géo-économie du territoire, vous ne semblez pas du tout au fait de la situation de la Bretagne. 

          Presque toutes vos phrases sont à côté de la plaque.

          « le bonnet rouge, sorti d’on ne sait quel cerveau de communicant payé par on ne sait qui » ah bon, vous ne connaissez pas l’histoire de la révolte des bonnets rouges ?.?

          « Non à cette taxe ! clament en cœur la FNSEA et le MEDEF, soutenus par une alliance de circonstance .... » C’est faux , l’alliance n’est pas circonstance , c’est une revendication bretonne et depuis longtemps. « pas de péage sur le plan routier breton » ça date de De Gaulle ! et d’ailleurs à mon avis ce sont les français qui devraient être contre cette taxe. Il ne faut pas être malin pour comprendre que bientôt ce seront toutes les voitures qui seront taxées de cette manière. On est arrivé au « ras le bol fiscal » et donc il restera la voiture. La voiture a toujours été « la vache à lait » du trésor public et les gens des villes (maintenant des « métropoles ») n’en ont rien à foutre . On va bien trouver un moyen de taxer la liberté de circulation dans les régions rurales. .. Pourquoi les départements bretons et la Région ont laissé dépérir le fret ferroviaire ?? Posez vous la question ? avant il y avait bien la « STEF ».

          Quant aux canaux en Bretagne, pour la navigabilité autre que touristique ou militaire du temps de napoléon, on repassera. Donc la route et (la mer) sont les seules alternatives. 

           

          « la solitude du mouvement qui ne trouve aucun relais dans les autres Régions, notamment frontalières » D’abord, attendez un peu quand même avant de fustiger la solitude bretonne !

          Ensuite la situation d’extrême périphicité bretonne est quand même singulière et pour atteindre des frontières ici, il faut soit se lever tôt ou soit savoir nager.

          C’est d’ailleurs cette situation qui explique que la région Bretagne est OBLIGATOIREMENT ouverte sur le monde. C’est une question de survie économique. Alors quand j’entends dire que la Bretagne veut se replier sur elle même ( réflexe identitaire etc ) c’est une aberration, et un contresens complétement idiot. La Bretagne n’existe qu’ouverte sur le monde, toute son histoire le prouve. . ! 

          Un exemple au sujet de Martin Harvest pour laquelle vous dites que la situation est classique ! Ce qui n’est pas très classique, c’est comment il se fait que les entreprises de saumons se soient maintenues en Bretagne si longtemps, alors que notre région n’est plus une région de production de saumons depuis des décennies et des décennies.. Vous êtes vous posé la question ?? Mélenchon lance fièrement que l’éco taxe servira à la relocalisation des industries en Bretagne. Quel clown ! dans le cas de Martin Harvest, le coût du transport est sans nulle doute une des raisons de la fermeture de cette entreprise.

          Tant qu’a y faire ! au sujet des subventions ? j’ai toujours été convaincu que la région parisienne était une pompe à finances, et un lieu de concentration des richesses nationales au détriment du désert français. (lisez plutôt sur le POINT l’article de Baverez qui glorifie les métropoles au détriment des Etats et Pays). Au sujet de l’agriculture , il ne faut pas non plus oublier les propriétaires céréaliers qui engloutissent une grande part des subventions européennes. (peut être moins maintenant que le prix des céréales flambent. Quel secteur économique n’a pas de subventions ? l’automobile ( et les primes à la casse etc .. ?? ) Les banques ??

          voilà , ce sont des réflexions, jetées un peu à la va comme je te pousse, pour contrebalancer votre article un peu sans nuances sur la manifestation des bonnets rouges.

           


          • vesjem vesjem 6 novembre 2013 18:35

            @ l’auteur
            apparemment , tu es jacobin et n’aime pas l’identité régionale ; serais-tu un peu jaloux de la forte identité culturelle bretonne ? en as-tu une dans ta région ?
            tu es nationaliste pour ton pays et tu refuses une petite autonomie bretonne ? c’est contradictoire ;
            la bretagne ne remet pas en cause la nation française ; elle a juste perdu sa langue , ce qui l’empêche pas de parler et d’agir ; elle te montre l’exemple de la révolte ; elle n’est pas « pour » la chimie dans les champs ; elle subit comme ta région , la catastrophe écologique induite par les règlements de la pourriture technocratique européenne ;
            quant au poujadisme ; tu as plusieurs guerres de retard ; adresse-toi aux fermiers allemands , polonais , étatsuniens , voire chinois ; eux , pratiquent l’auto-protectionnisme , en ce sens qu’ils prennent grand soin de leurs diverses corporations
            salutations 


            • Le421... Refuznik !! Le421 6 novembre 2013 19:00

              la catastrophe écologique induite par les règlements de la pourriture technocratique européenne...

              Et moi qui pensais que les bretons étaient des fortes têtes et ne faisaient que ce qu’ils voulaient... Je pensais qu’il ne vivaient que pour leur région, pour la préserver, l’embellir...
              En fait, ce ne seraient que des productivistes pollueurs et inconscients ?? Ah bon ??
              Je crois surtout que ce sont certaines minorités capables de beaucoup de dégâts qui sèment la zizanie sans se préoccuper des gens autour d’eux. Leur intérêt prime, avec ou sans l’Europe. Ceci dit aussi, l’Europe, quand elle verse du pognon, on trouve ça bien et on n’en parle surtout pas parce que du côté de la répartition, bonjour !!


            • vesjem vesjem 9 novembre 2013 11:00

              @le421
              tu as trop la tête dans le guidon , et donc ta vision des problèmes est monolithique ; dommage pour ta compréhension 


            • Le421... Refuznik !! Le421 6 novembre 2013 18:54

              Doux, Tilly Sabco, Marine Harvest... Normalement, si j’ai bien compris, ils ne devraient pas fermer puisque l’écotaxe est moribonde !!

              Ah ?? C’est pas ça ?? J’ai mal compris alors...

              Alors, ils gueulent pour quelle raison ?? On leur a mis la retraite à 62 ans ??
              Ca, ils s’en foutent, visiblement...
              Comprends plus rien moi, je dois être devenu con en vieillissant.

              Ceci dit, j’ai un doute. La FNSEA, le MEDEF, ils sont pas vraiment à gauche, si je me rappelle.

              OOOHHH !! NNOOOONNN !! Ca ne serait pas juste pour emmerder Hollande par hasard ??
              Non, c’est pas possible... Bon, je peux me tromper. Puisque je deviens con...


              • antonio 7 novembre 2013 10:25

                Le piège, c’est le régionalisme : la colère éclate en Bretagne et on met en avant les particularismes de la Région : les bonnets rouges...j’ai même entendu : « Les Bretons sont têtus, durs à la tâche » « habitués aux révoltes »  ; ajoutez-y les « racines celtiques » , la musique, les danses....Alors que l’économie est mondialisée, que les zones commerciales de toutes
                les villes présentent les mêmes boutiques,les mêmes supermarchés, un environnement effrayant de laideur...les zones pavillonnaires se ressemblent toutes, les habitants cachés par leurs murailles de thuyas (les fameux lotissements ), les mêmes chaînes de télés abrutissent ceux qui ont encore le courage ou l’inconscience de les regarder....
                Et demain si les Picards, les Bourguignons entrent en révolte, que va-ton vanter de leur région, quels particularismes seront mis en exergue ?Pourra-ton dire qu’ils sont « durs à la tâche » Non ! ça, c’est breton !
                Le chômage ( qui connaît une légère décélération, langage de technocrate ) touche plus de 10 pour cent de la population qu’elle habite à Marseille ou Miramas ( bien sûr beaucoup plus dans certains endroits ( 20 à25 Pour cent), la misère étend sa main crochue sur de plus en plus de foyers,etc....
                Les « particularismes locaux » sont « boostés », rabâchés , essentiellement pour faire marcher l’industrie du tourisme, attirer par tous les moyens les consommateurs « culturel s » leur donner l’illusion d’être devenus plus intelligents (les visites en cars de tourisme se font à grande vitesse dans les musées mais on ne rate pas le petit producteur local, plus bio que bio...
                Quel que soit l’endroit où elle habite, toute la population française est concernée et doit lutter toute ensemble. Ne nous laissons pas leurrer par ces « différences », ne laissons pas les régions en venir à se dresser les unes contre les autres !


                • vesjem vesjem 7 novembre 2013 21:35

                  @ tonio
                  tous ensemble , tous ensemble , ouais , ouais !


                • vesjem vesjem 7 novembre 2013 20:35

                  « Comprends plus rien moi, je dois être devenu con en vieillissant ».... .... ?

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