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Débat Besson : une police des étrangers et une police de la pensée au service de l’identité nationale

Pire que tout ce qu’on imaginait. La circulaire envoyée par Besson aux préfets dans le cadre du débat sur l’identité nationale décline jusqu’au ridicule tous les stéréotypes traditionnellement attachés à ce type de question. Avec au final un acharnement, une obstination lourds de menaces pour les libertés.
 
En affirmant dans le préambule que le débat « répond aux préoccupations soulevées par la résurgence de certains communautarismes, dont l’affaire de la Burqa est l’une des illustrations », Besson accrédite d’emblée la thèse de la menace islamique, même si, comme on le sait, l’Islam est étranger à cette tradition vestimentaire, en outre extrêmement marginale en France. Mais les limites du débat ont au moins le mérite d’être clairement définies : comment protéger l’identité nationale de la menace étrangère ?
 
De façon perverse, car dissimulée derrière des interrogations qui, sous une apparence ouverte, ferment en réalité le débat, le questionnaire adressé aux préfets énumère, dans une logorrhée aberrante et confuse, tous les fantasmes du ministre de l’immigration : « la cohabitation entre communautés vivant séparément est-elle possible dans notre République/ dans notre Nation ? Notre République/ notre Nation est-elle multiculturelle ? » (§1.7). De l’immigration à la délinquance, il n’y a qu’un pas, franchi sans scrupule par un ministre qui, à travers le débat, cherche à légitimer sa politique de rafles policières et de camps d’internement : « Comment éviter l’arrivée sur notre territoire d’étrangers en situation irrégulière, aux conditions de vie précaires génératrices de désordres divers (travail clandestin, délinquance) et entretenant, dans une partie de la population, la suspicion vis-à-vis de l’ensemble des étrangers ? » (§1.7).
 
Pour Besson, si l’identité nationale est mise à mal par le communautarisme « ethnique, racial, religieux, social », il n’imagine pas que l’exaltation du sentiment national soit une forme de communautarisme. Décidément obsédé par « les signes ostentatoires d’appartenance religieuse », il s’interroge : « la République doit-elle aller plus loin dans la lutte contre le communautarisme », confondant dans un même regard « appartenance religieuse » et « communautarisme » (§1.8). Ne nous voilons pas la face : le Musulman, réduit à son particularisme, sera toujours inassimilable...
 
Lutte contre l’immigration d’un côté, et de l’autre, promotion d’une identité nationale tellement ringarde que le débat vire au pathétique. Pour Besson, la définition de cette identité est à chercher dans une consternante liste de propositions, inspirée par Déroulède ou par le Café du commerce.
Parmi les items constitutifs de l’identité nationale (§1.2), on note en vrac « nos valeurs » - mais on ne sait pas lesquelles ; « notre histoire » - l’histoire de qui ? Des Capétiens directs, des paysans bas-bretons, des maçons italiens ou des petits Maghrébins dont la famille vit en France depuis un demi-siècle ? Il faut bien sûr rechercher le désir de vivre ensemble à travers « notre art culinaire, notre vin, notre art de vivre » ou dans un patrimoine exclusivement chrétien, « nos églises et nos cathédrales » : les mosquées, les synagogues ou les temples protestants ne peuvent évidemment prétendre au qualificatif de patrimonial. Curieusement, le questionnaire prend la forme surannée des catéchismes d’autrefois, appris par cœur, dans lesquels chaque question induit la réponse attendue.
 
On le pressentait depuis le début, cette circulaire aux préfets le confirme : le débat est biaisé. A aucun moment, le questionnement sur l’identité nationale n’offre la possibilité de dépasser le cadre étroit voulu par le ministre. « Le débat – affirme le préambule – doit aussi faire émerger (...) des actions permettant de conforter notre identité nationale et de réaffirmer les valeurs républicaines et la fierté d’être Français ». Nulle part, il n’est suggéré que les « valeurs républicaines » n’ont rien à voir avec une conception étriquée et obsolète de la nation dont il faudrait nécessairement être fier ou que ces valeurs seraient même singulièrement mises à mal par la politique économique et sociale de l’actuel gouvernement.
 
 La nécessité de réaffirmer la fierté nationale apparaît en filigrane tout au long du document à travers ses aspects les plus caricaturaux mais aussi potentiellement lourds de menaces pour les libertés individuelles : il s’agira ainsi ( § 2.3) de « mettre en place dans l’ensemble des 100 préfectures et 350 sous-préfectures des cycles d’instruction civique ouverts à tous : élèves et parents d’élèves, associations, centres de loisir (...) Donner à tous les enfants de France l’occasion de chanter au moins une fois par an la Marseillaise (...) Accroître la place des symboles (drapeau, Marianne) dans l’ensemble des édifices publics ». Pour les récalcitrants, on veillera à « imposer [c’est moi qui souligne] le respect des symboles de la Nation » (§1.13) : par la prison, la contrition publique ? Rappelons au passage qu’aujourd’hui l’ « outrage aux symboles nationaux » est déjà punissable de six mois de prison et de 6500 euros d’amende. Le crime de blasphème n’est pas loin. Les intellectuels, sociologues, historiens, se voient quant à eux sommés de s’expliquer publiquement sur le « malaise » que génère chez certains d’entre eux, la question de l’identité nationale (§1.12).
 
On le voit, ce qui se met en place, à travers ce débat mystificateur, c’est, parallèlement au renforcement de la police des étrangers, une inquiétante police de la pensée : la liberté de conscience, voire la liberté de parole, sont bridées au nom d’une prétendue défense de l’identité nationale. Le ministère de l’immigration et de l’identité nationale qui, avec Hortefeux, limitait son action – certes avec brutalité – à la chasse aux étrangers, s’arroge aujourd’hui avec Besson des prérogatives dans la formation civique et morale des citoyens. Une formation étayée sur les pires égarements de l’extrême-droite.
 
« Pourquoi nous sentons-nous proches des autres Français, même sans les connaître ? », interroge Besson (§1.1). Il est vrai que si les Français connaissaient mieux certains d’entre eux, ils auraient toutes les raisons de s’en méfier.
 
 

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6 réactions à cet article    


  • morice morice 30 novembre 2009 22:19

    ça nous dit pas ce qu’on fait si on arrête une tunisienne de 22 ans dirait Guillon...



    • ddacoudre ddacoudre 30 novembre 2009 22:30

      bonjour bernard

      beaucoup ont compris le cheminement de notre ministre qui ne vise qu’a déterminer un nationalisme qui définira qui en serons les ennemis qu’il faudra éliminer. diaboliquement dangereux.

      cordialement.


      • ZOULOU 6 1er décembre 2009 01:13

        C’est curieux : dès qu’on dénonce les agissements des arabes et de l’iSSlamisme militant, on est forcément d’extrême droite !
        Alors oui, je suis d’extrême droite, même si ma femme est noire et de formation musulmane (Dieu merci, maintenant, elle mange du porc et boit du champagne), car je n’ai pas envie que mes filles portent la burqa ou le tchador en France !
        Alors arrêtez de tout caricaturer !
        Pourquoi acceptons-nous les mosquées alors que les autres brulent nos églises et égorgent nos religieux en « terre d’iSSlam » ?


        • non666 non666 1er décembre 2009 12:32

          Si ce debat avait vraiment un interet autre que de faire la claque aux tentatives de Sarkozy de « reconquerir » le vote nationaliste/souverainiste qui lui echappe, on pourrait en faire un sujet de referendum.

          LA , chaque parti devrait s’engager clairement et repondre sans ambages.

          1) Etes vous pour ou contre la politique de colonisation africaine qu’a mis en place la France depuis 30 ans ?

          2) Etes vous pour ou contre le partage de NOTRE terre avec d’autres cultures/civilisations/peuples  ?

          3) Avez vous compris la séparation de l’Eglise et de l’Etat comme tant le droit des autres religions monotheistes aliennes a venir militer chez nous ?

          4) Avez compris compris la volonté de « faire l’Europe » comme etant juste un preambule à la mondialisation, lorsque vous avez dit oui a cette Europe ?

          5) Etre Français est ce juste etre « citoyen du monde » ?

          6) La democratie française peut elle etre l’otage de la demographie des envahisseurs ?

          Des questions aposer, il y en a des tas si on veux des reponses claires du peuple français et une solution voulue par le peuple.
          Maintenant , evidemment, si on ne veut pas de reponses, on peut juste effleurer le sujet en esperant que personne ne fera voler les interdits.
          Il n’y a pas d’exemple dans l’Histoire de l’humanite de civilisation diffrentes ayant cohabité, avec des valeurs diffrentes sans que l’une ait finit par tuer l’autre.
          La discrimination positive, la politique de droit du sol , le regroupement familial sont des armes qui menacent clairement et directement les autochtones de ce pays.
          Le nom des Traitres est connu et ils sont depuis des années au sommet de l’Etat.
          Aujourd’hui , ils soulèvent un debat dont ils esperent orienté les reponses et les gains electoraux.

          Mais et nous ?
          Quels sont nos interets dans cette affaire ?
          N’avons nous pas interet justement a nous saisir de cette affaire et a y repondre, quitte a faire imploser ceux qui l’ont imprudement utilisée ?


          • stephane 1er décembre 2009 12:51

            La petite fille de Marc Bloch s’offusque -c’est sur contreinfo- que des écrits de son aïeul aient été utilisés par Sarkozy dans ses récents discours sur l’identité nationale, bien entendu après les avoir sorti de leur contexte et dénaturé si bien qu’il leur a fait dire l’inverse de ce que pensait l’auteur !

            Côté symboles ce gouvernement ne connaît pas de limites !

            Sans parler du « mariage gris » : quand on connaît les statistiques des mariages « traditionnels » -1/3 de divorces dans les 3 premières années- on se demande où veulent en venir leurs initiateurs ? Cela se traduira-t-il par le fait de pouvoir désigner et faire reconnaitre devant un tribunal son conjoint -ex étranger - comme fautif par le simple fait qu’il veut vous quitter dès lors qu’il s’agit d’une union mixte ?
            C’est évidemment une dérive qu’il faut envisager.
            Quand on voit l’augmentation des unions avec des femmes originaires de pays étrangers, cela pourrait favoriser un véritable chantage, une prison mentale pour ces femmes qui n’auraient d’autre choix que de rester avec leur conjoint, le pire soit- il . Si on rajoute dans la loi que ce prétexte pourrait mener à la perte de la nationalité nouvellement acquise, ce serait alors l’émergence d’un réel esclavage moderne ....

            Si des quinquagénaires se font régulièrement « michetonner » en pensant avoir trouvé le grand amour à l’étranger, c’est tant pis pour eux . Non, nous n’avons pas à légiférer sur des exceptions, surtout quand la loi ne le prévoit pas pour les unions « traditionnelles ». C’est du pur racisme !


            • non666 non666 1er décembre 2009 17:34

              Justement,
              Attendu que le mariage blanc existe et est bel et bien un moyen de tourner les lois sur l’immigration,
              Attendu qu’un certains nombre de français et de françaises sont victimes « d’excroquerie à l’amour » avec des gens qui ne visdent qu’a entrer dans notre pays coute que coute, quitte a simuler,
              Il serait au contraire opportun de ne donner que des nationnalités françaises « a durée limitée » (par le dit mariage) a tous ces amouireux qui viennent du tiers monde que pour partager notre pain.
              S’ils ont menti, rien ne nous oblige à les garder ensuite.

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Auteur de l'article

Bernard Girard


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