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Accueil du site > Actualités > Politique > François Hollande, seul contre tous en Europe ?

François Hollande, seul contre tous en Europe ?

Dans un article publié le 1er mars sur Le Point.fr, Philippe Tesson soutient que François Hollande est « seul contre tous en Europe » car « il propose des mesures contraires à la stratégie de ses partenaires ».

Voila qui est bien vite dit.

Plaçons-nous tout d’abord dans l’hypothèse où Philippe Tesson aurait raison : François Hollande serait isolé. La belle affaire ! En quoi le fait d’être isolé emporte-t-il que l’on a nécessairement tort ? L’histoire abonde en situations où il fallait être isolé pour avoir raison. Né en 1928, Philippe Tesson a eu le loisir d’en vivre quelques belles illustrations. Il a été, de 1960 à 1974, rédacteur en chef du journal Combat, dont les fondateurs avaient fait la démonstration, pendant la guerre de 39-45, que la résistance de quelques-uns pouvait avoir raison de la soumission de la majorité aux puissances du moment. 

Quoiqu’il en soit, il se dit en effet que les gouvernants de la droite au pouvoir en Allemagne, en Italie et en Espagne refuseraient de recevoir le candidat socialiste français.

Pour l’Angleterre, c’est déjà fait et il semble bien que cela ait réjoui Philippe Tesson, à en juger par le ton badin avec lequel il évoque cet épisode : « Ainsi donc, François Hollande a pris l'air de Londres, brève étape d'une tournée européenne qui sera modeste. Mais l'attend-on avec tant d'impatience et curiosité dans les différentes capitales du continent ? (…) il aurait pu remonter dans le train en faisant l'économie d'une journée sans intérêt. »

Pour les autres pays cela se discute encore mais la rumeur est suffisamment établie pour que Der Spiegel, dans son édition du 4 mars, évoque un accord de boycott du candidat français, au point que de nombreuses voix commencent à s’élever contre ces graves manquements à une tradition d’ouverture et de courtoisie qui a longtemps prévalu au sein de la communauté des dirigeants européens, en exercice ou en situation de candidature crédible. Les protestations viennent de France mais aussi des pays européens dont les dirigeants se seraient associés à cette manœuvre. Dans un entretien à l’édition du 5 mars de Die Welt, Guido Westerwelle, ministre des Affaires étrangères allemand, fait part de son inquiétude face à cette situation et notamment au soutien à Nicolas Sarkozy affiché par Angela Merkel.

Pour Philippe Tesson, cependant, « la cause est déjà entendue : l'opposition des dirigeants européens à François Hollande est inscrite dans les faits. Angela Merkel, forte de son leadership, aussi bien que Herman Van Rompuy, fort de sa fonction de président du Conseil européen, ne sont pas disposés à transiger (…). N'est-ce pas une réponse a anteriori à l'espoir de François Hollande de trouver l'oreille de ses partenaires ? ».

Ce paragraphe est profondément révélateur. Il revient à considérer qu’un candidat à l’élection dans l’un quelconque des pays de l’Union européenne n’a pas d’autre choix que d’aligner son programme sur les prescriptions des gouvernements en place dans les pays qui assureraient (à quel titre ?) le « leadership » du moment. Le panurgisme érigé en ligne de conduite politique ? Pour en arriver là, monsieur Tesson, il faudrait réduire au silence un élément du dispositif démocratique de nature à perturber ces petits arrangements : le corps électoral ! C’est de lui qu’il faut « trouver l’oreille » et non de dirigeants dont le pouvoir - transitoire - sera aussi remis en jeu. Rien ne permet donc d’affirmer que, dans les années qui viennent et dans l’hypothèse où il viendrait au pouvoir « Au coeur de l'Europe, François Hollande serait un homme seul parmi ses pairs ».

Mais il y a mieux, car l’auteur ajoute : « Mario Draghi, président de la BCE, récusait récemment toute alternative à la mise en oeuvre de sévères plans d'austérité. Il est exclu, disait-il, que les pays européens fassent marche arrière sur leurs objectifs de réduction de dette. Les marchés réagiraient immédiatement. La réduction des déficits publics s'impose plus que jamais, assortie de profondes réformes structurelles, concernant notamment les systèmes sociaux. ». Ainsi donc, François Hollande devrait non seulement faire allégeance aux gouvernants en place (en tout cas ceux qui ont le bon goût de prôner la politique économique et sociale ayant l’aval de l’auteur) mais aussi à la BCE, actuellement dirigée par un éminent représentant des anciens de Goldman-Sachs. Voila qui nous éloigne encore un peu plus du jeu démocratique ! 

Au passage, on comprend aussi que François Hollande ferait bien de ne pas froisser les « marchés ». Faisons un pari : ce sont les « marchés » qui réclameront bientôt que l’Europe renonce aux excès de ses plans d’austérité par crainte d’un effondrement économique et d’un désastre social qui finirait par nuire au « business ».

Dans un autre article, paru le 28 février sur le même support, Philippe Tesson s’en était déjà pris à François Hollande, cette fois-ci au motif que sa proposition de taxer à hauteur de 75 % la tranche de revenus au-delà d’un million d’euros était « improvisée » dans la forme et « irréaliste » sur le fond. Puisque l’auteur Tesson semble vouloir rejoindre la petite cohorte d’experts économiques autoproclamés qui nous entretiennent doctement de leurs convictions à longueur d’antenne, sans doute sait-il aussi que le taux d’imposition marginal aux USA, après avoir été porté à 80 % sous la présidence Roosevelt, y a dépassé les 90 % dans les années 1950 avant de décroître jusqu’à 70 % dans les années 1970 ? C’est ensuite la présidence Reagan qui a engagé un nouveau processus de baisse, jusqu’au palier de 35 % adopté sous la présidence de George W. Bush. Les USA ont donc prospéré dans un contexte fiscal « irréaliste » pendant un demi-siècle, avant que la dérégulation et la libéralisation à outrance prennent l’ascendant sur les esprits, avec les résultats flatteurs que l’on sait. 

Cet article du 28 février donne l’éclairage qui convient sur les opinions émises par Philippe Tesson : « 57 % des Français s'apprêtent à voter Hollande au second tour de l'élection présidentielle. S'ils vont jusqu'au terme de leur intention, le pays aura donc à sa tête un homme instable, inconséquent, léger, distrait, maladroit et peu respectueux de ses conseillers ».  On comprend donc que l’auteur a fait, lui, le choix d’un candidat stable, conséquent, profond, concentré, adroit et respectueux du choix de ses conseillers.

De qui peut-il bien s’agir ? Le suspense est bref : « (Mon) analyse est sommaire ? Pas plus sommaire ni médiocre que celle qui consiste à inférer de la soirée du Fouquet's que Sarkozy est un salaud. (…). On sait que ce ne sont pas les quelques millions d'euros que cette surtaxation rapportera qui régleront le problème des finances françaises et qui créeront de la richesse et du travail. On ne gouverne pas à force de symboles. »

Puisque monsieur Tesson manifeste un léger doute et nous invite à évaluer son analyse, répondons-lui : oui, elle est sommaire. Aussi sommaire que l’affirmation péremptoire par laquelle il conclut son billet : « On ne gouverne pas à force de symboles ». Si, de tous temps on a aussi gouverné avec des symboles et ce n’est pas près de changer. Reste à choisir les bons et à s’y tenir.

www.citoyensunisdeurope.eu


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15 réactions à cet article    


  • Fergus Fergus 7 mars 2012 09:52

    Bonjour à tous.

    Philippe Tesson est un vieil histrion pathétique de la droite française qui disqualifie régulièrement ses propos par leur contenu outrancier, et parfois haineux, à l’encontre des caciques de gauche. Son avis n’a donc strictement aucune valeur car il ne convainc que les inégristes de l’UMP.


    • anarcococo 7 mars 2012 10:03

      Un proche de Merkel répond à « challenges.fr » au sujet de Hollande et de l’alternance :

      Berlin est critique vis-à-vis des annonces de François Hollande. Il a été dit et écrit, y compris dans la presse allemande, qu’Angela Merkel ne souhaitait pas recevoir le candidat socialiste à Berlin ?

      « Nous, nous avons plutôt l’impression que François Hollande préfère ne pas être reçu. Mais s’il souhaite être reçu, il sera reçu. La polémique sur cette visite a été très exagérée dans le débat français. Il n’empêche que nous estimons que l’annonce de revenir sur l’âge de la retraite ou de renégocier le pacte fiscal n’est pas de nature à rassurer les marchés financiers. Même si ce n’est que du langage de campagne électorale, ce n’est pas réaliste. D’autant que les économies ont besoin de continuité. Regardez, nous en Allemagne, nous avons adopté une politique pour la compétitivité et pour l’emploi qui a résisté à l’alternance. Elle a été menée sur dix ans, sous trois gouvernements : sous Gerhard Schröder, sous la grande coalition (ndlr chrétienne-démocrate, social-démocrate), puis sous l’actuelle coalition chrétienne libérale. »


      • Al West 7 mars 2012 11:00

        Evidemment qu’on a exagéré l’affaire dans nos médias. Hollande, c’est le plus docile des politiciens, ça n’est même pas crédible que les Européens aient peur de lui... 


        En revanche, si nos médias se font le relai de ce genre d’annonce pathétique qui équivaut finalement à crier « Hé regardez bien !!! Hollande c’est un vrai de vrai anti-européen, même Merkel en a peur ! », ce qui est la plus grosse blague de l’année, c’est qu’ils sont sûrement en train de douter de la capacité de Flamby a se faire élire... 

      • Yvance77 7 mars 2012 10:06

        Salut,

        Tesson, Tilliniac, D’Ormesson etc... sont tous des portes-plumes d’un ex. RPR à ranger dans la catégorie « dinosaures conservateurs », qui n’ont jamais fait l’effort intellectuel de voir les pires turpitudes de la Chiraquie.

        A mettre dans les poubelles de l’oubli !


        • manusan 7 mars 2012 15:42

          seul contre tous en Europe ... mais avec la City.

          lire le gardian.


          • scripta manent scripta manent 7 mars 2012 19:48

            Dans le Guardian ?
            Merci de communiquer la référence de l’article.


          • Richard Schneider Richard Schneider 7 mars 2012 16:56

            Décrire Hollande comme un affreux crypto-marxiste, anti-européen et tout - cela fait rigoler tout le monde ! Que demande le socialiste : une (très) timide renégociation du nouveau traité européen (recherche commune d’un volet « croissance »). Eh bien même cela est rejeté avec force par les ultra-libéraux de l’Euroland !

            Moi, au contraire, je pense que Hollande devrait promettre aux Français, s’il était élu, de soumettre le MES à référendum ... Mais ne rêvons pas.
            Quant aux experts, journaleux, commentateurs ( Reynié, Dessertine, Cohen etc ...) qui, grâce à leurs analyses magistrales, ont tout prévu depuis les subprimes, on sait très bien pour qui ils « roulent ». Et si jamais, leur champion était battu le 6 mai, il faudra s’attendre à un déferlement de haine, tel celui qu’on a connu en mai 81.

            • Michel DROUET Michel DROUET 7 mars 2012 19:05

              C’est le discours ambiant actuellement : Hollande n’a pas de stature européenne, il est mou, etc...

              Et pourtant les sondages le donnent encore gagnant : cherchez l’erreur

              Et si les français rejettaient massivement le « style » Sarkozy avec ses outrances ?

              Et si les Français voulaient d’abord que leur Président s’occupent d’eux au lieu de sauter d’avion en avion pour serrer dans ses bas Merkel, poser avec Poutine ou avec Bachar Al Assad ?

              Et si les Français n’avaient pas avant tout envie d’un Président normal qui les protège et qui leur explique les enjeux ?


              • Tall 7 mars 2012 19:33

                C’est une bonne affaire pour la gauche que Merkel et d’autres soutiennent Sarkozy.

                Ils n’ont rien compris au peuple français, ces andouilles.

                • Aita Pea Pea Aita Pea Pea 7 mars 2012 19:38

                  Bonsoir ,Tall,je dirais meme plus:ces andouilles,qu’on les vire !!!Pas pu m’empecher.


                • scripta manent scripta manent 7 mars 2012 21:30

                  Certes, mais que proposez-vous pour les andouilles de Guéméné ?


                • Tall 7 mars 2012 22:24

                  Une UE plus à gauche, avec sa propre planche à billets comme la Fed.


                • Al West 8 mars 2012 06:27

                  Avec sa propre planche à billets ?! Parce que ça n’est pas déjà le cas ?
                  Ou alors c’était ironique, auquel cas je fais amende honorable.


                • Tall 8 mars 2012 08:11

                  Sauf que la BCE ne peut rien prêter directement aux états. Aujourd’hui elle prête donc aux banques à 1% maximum, qui, elles, re-prêtent aux états au taux du marché ( exhorbitants pour les pays qui vont mal ), empochant ainsi au passage des paquets de milliards payés par les contribuables, et ce, sans rien fiche.

                  C’est du racket pur et simple.

                  Et le pire c’est que c’est dans les pays qui vont le + mal que les contribuables doivent donc payer le +, ce qui aggrave encore leur situation. D’autant que les + riches contribuables échappent largement, eux, à ces impôts.
                  Le cas de la Grèce est tout-à-fait typique avec ses politiciens corrompus, ses armateurs en goguette et l’UE dirigée pour l’instant par une Merckel qui ne comprend rien à l’économie ( dicsit George Soros ) et qui refait les mêmes erreurs qu’après 1929 ( austérité => récession ).

                  Enfin, heureusement, de + en + de dirigeants de l’UE commencent à comprendre ces réalités, y compris des libéraux, et c’est en train de bouger dans le bon sens.

                  Pour en en revenir à la planche à billets, il faut que la BCE puisse prêter directement aux états, comme la FED le fait aux USA, et idem en Chine, en Russie, etc ..

                • scripta manent scripta manent 8 mars 2012 11:32

                  Oui, il faut :
                  - abandonner le principe d’indépendance de la banque centrale,
                  - autoriser celle-ci à prêter en premier ressort aux collectivités publiques,
                  - revenir au privilège d’émission pour l’Etat,
                  - le tout sous contrôle d’un organisme genre Cour des comptes,
                  - restreindre évidemment les déficits publics mais en distinguant dépenses d’investissement et dépenses de fonctionnement et en répartissant l’effort fiscal de façon plus équitable,
                  - agir pour que la dette publique soit détenue en majorité par les ménages résidents (c’était le cas il y a une trentaine d’années) : double gain, pour les ménages (meilleur taux que l’épargne « populaire ») et pour les collectivités publiques (meilleur taux que ceux des « marchés » et/ou rentrées fiscales).

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