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Les démagogues eurolâtres

Je n’étais pas couché le samedi 7 janvier lorsqu’en zappant j’ai intercepté François Bayrou interrogé par Natacha Poloni et Audrey Pulvar à l’émission de Laurent Ruquier. Je n’ai vu que la fin, lorsqu’il était interrogé sur l’euro. Ses paroles valent la peine d’être rapportées tant elles sont violentes pour un homme qui se dit du centre et donc dont le discours devrait a priori être à distance de positions extrêmes. Si nous sortons de l’euro, les français pleureront des larmes de sang a-t-il dit à peu près. Essayons d’analyser un tel positionnement qui est largement partagé dans la classe politique à l’exception des extrêmes.

Il est un fait que, tant le gouvernement actuel, qui fait tout pour que la France reste dans l’euro, que les politiques socialistes dans leur discours ou le centre quel qu’il soit, prônent une orthodoxie assez extraordinaire en matière monétaire. La phrase de François Bayrou ne fait que dire plus durement ce que disent aussi les autres. Mais est-ce bien vrai ? Le problème, c’est que la réalité est multiple. Prenons un exemple qui semblera évident à tout un chacun. Reprenons les propos de Louis Gallois, PDG d’EADS, qui a maintes fois déclaré que chaque fois que le dollar se déprécie de 10 centimes d’euros, Airbus perd un milliard d’euros de compétitivité. Clairement, si la France sortait de l’euro, sa monnaie dévaluerait probablement d’environ 30% par rapport au dollar et cela impliquerait un gain net pour Airbus. Pourquoi cet exemple n’est-il jamais repris par les politiques ? Mieux, la croissance continue d’Airbus (en termes d’emploi), pour cause d’euro cher, s’est faite ces dernières années hors Europe, si bien que même quand les entreprises sont européennes, les Européens eux-mêmes n’en profitent parfois guère.

Que conclure à partir de cet exemple ? Tout simplement que les discours politiques sont simplistes et qu’une étude profonde et détaillée devrait être faite pour voir l’impact réel que pourrait avoir une sortie de l’euro. Il y a assurément des points négatifs, mais il y a aussi des points positifs et il faudrait faire le tri, plutôt que d’avoir des formules à l’emporte pièce et qui ne sont fondées, objectivement, sur pas grand-chose.

Mais la phrase de François Bayrou a un sens plus profond et encore plus néfaste. En effet, pourquoi les Français devraient-ils pleurer des larmes de sang si nous sortions de l’euro ? Bien évidemment, parce que le franc dévaluerait de 30% et donc notre pouvoir d’achat d’autant. Cela n’est pas tout à fait vrai. En effet, un pouvoir d’achat, sur les marchés internationaux, diminué de 30%, signifie moins d’importations et donc, à consommation égale, plus de travail en France, plus de valeur ajoutée interne et, au final, moins de misère pour beaucoup de petites gens qui produisent de réelles richesses. Car nos politiques ont oublié une chose fondamentale à l’instar de ce qu’avaient fait Espagne et Portugal au temps des Grandes Découvertes. Ils confondent richesse et argent. Nous sommes donc aujourd’hui avec un euro surévalué qui, de fait, nous amène à vivre au-dessus de nos moyens comparé à nos capacités productives et à notre compétitivité. Le bon sens commun sait très bien que vivre au-dessus de ses moyens ne peut être qu’éphémère. Aussi, ce qui est surprenant de la part des politiques, qui sont censés être des gens responsables et qui aspirent aux responsabilités, c’est cette volonté de continuer à vivre au-dessus de nos moyens ce qui, chacun doit en avoir conscience, se terminera, pour le coup, dans un bain de sang inéluctable.

Il y a aussi un côté pathétique de type bégaiement de l’histoire dans l’incantation de l’euro par les politiques. L’euro protègerait les français comme la ligne Maginot était censée les protéger il y a plus de 70 ans. On sait comment cela finit ! Il y a aussi un vice profond dans la construction européenne qui était décrit par un de mes anciens patrons et dont je reproduis ici la trame. L’Europe, disait-il, c’est un grand jeu de Mistigri. Chaque pays assis à la table européenne arrive avec son propre Mistigri et n’a de cesse d’essayer de le « refiler » aux autres tout en essayant de ne pas récupérer le leur. Les exemples potentiels illustrant parfaitement cela sont légion, hélas !

Nous terminerons ce texte somme toute assez court par une remarque de fond. La France a vécu avec sa monnaie pendant des siècles. Que l’on sache, pendant toute cette durée, elle a été bien souvent le pays le plus prospère d’Europe. Aujourd’hui, alors que l’euro a à peine 10 ans, nous sommes loin d’être le pays le plus prospère d’Europe et nous sommes même tout simplement loin d’être prospère. Par ailleurs, il y a 10 ans, lorsque nous sommes passés à l’euro, ce n’était pas davantage la catastrophe pour le pays que la situation actuelle, tant s’en faut. Mieux, l’Euro naissait avec une parité à 1,16 et il chutait très rapidement jusqu’à 0,85 sans que cela fut en quoi que ce soit la catastrophe. Aussi, si aujourd’hui nous revenions au franc, en considérant un euro à 1,30 et une dévaluation de notre monnaie de 30%, soit une parité de 1, nous serions encore dans une situation parfaitement supportable puisque nous avons connu bien pis, si l’on suit les canons de ceux qui veulent une monnaie forte.

Tout cela nous amène à une conclusion assez irrémédiable. Le discours politique sur l’euro est aujourd’hui non fondé économiquement. Il ne sert que d’épouvantail politique pour convaincre les indécis à perpétuer un système qui est à bout de souffle et qui est le système économique et financier mondial avec sa technostructure qui n’a de cesse de vivre en prédateur sur les peuples. Les politiques font partie du système, car ils ne créent pas de valeur depuis bien longtemps maintenant et en détruise objectivement, en France, depuis 1974. C’est cela la réalité.


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11 réactions à cet article    


  • spartacus spartacus 9 janvier 2012 10:44

    Tous sans exception n’alignent que des mots.

    Aucun n’est capable de présenter un « business plan » prévisionnel et chiffré sur ans. De l’entreprise ils ne connaissent que Zola. De l’économie ils ne connaissent que la « caisse d’épargne ». Du logement ils ne connaissent que le « passe droit » ou l’héritage. 

    Une oligarchie de droite et de gauche. Quand Kadafi ou Moubarack n’étaient pas encore dictateurs ils étaient déjà là.

    La politique française est a l’image de leurs situations : en absence cruelle de renouvellement.

    • macaque 9 janvier 2012 13:05

      Si je suis d’accord avec l’article sur le fait de dénoncer la démagogie et le système d’oligarchie actuelle qui peut prendre des décisions sans être capable de (ou sans vouloir) les expliquer, attention à ne pas tomber dans l’excès de démagogie inverse.
      Pour reprendre l’exemple d’Airbus, oui c’est vrai si une entreprise paie ses salariés moins chers, elle devient plus compétitive. Si on avait le même salaire en France que dans les pays en voies de développement nos entreprises seraient plus compétitives. Est-ce pour autant souhaitable ?
      Et le passage sur la France un des pays les plus prospères quand elle possédait sa propre monnaie, n’est-ce pas vraiment de la pure démagogie pour le coup ?
      Il me semble que certains classes encore la France 2ième pays le plus riche d’Europe et 5ième du monde. Après je suis bien d’accord que richesse (au sens économique) est différent de prospérité et que l’on devrait peut être parfois s’intéresser un peu moins aux PIB par habitant. Et même sans revenir sur le « c’était mieux avant », peut être qu’au lieu de s’intéresser à la chute, il faudrait mieux s’interroger sur le fait que l’euro l’a accéléré ou ralenti ?


      • lebreton 9 janvier 2012 13:35

        @l’auteur


        Reprendre la théologie du front national pour un représentant de la CFTC c’est surprenant ça sent les collabos de Vichy ou les résistant de la dernière heure ;
        Avec un dévaluation du franc de 30% combien coûtera le litre de carburant pour tous ceux qui bon an mal an font encore fonctionner la maison France ,que vont devenir les 8 millions de pauvres et les 5 millions de chômeurs ,vous les mettez dans des camps ? Vous etes gavés a la fédé européenne c’est sans doute pour cela que vous tenez un tel raisonnement . reprenez vous ou quittez le site pour aller rejoindre vos amis . 

        • Geneste 9 janvier 2012 20:56

          Vous me semblez faire un grave amalgame. On peut être en faveur de la sortie de l’euro et ne pas être FN. Il y a d’ailleurs tout un groupe d’économistes qui sont pour la sortie de l’euro et ne sont pas FN. Votre attaque est donc non fondée. Les termes de collabo ou de Vichy sont même insultants.
          Vous êtes complètement à côté de la plaque sur les chômeurs. La stratégie actuelle des USA est de fabriquer des dollars pour rendre son coût de travail plus attractif et son industrie plus compétitive. Le problème de l’Europe, c’est qu’elle est engluée dans un immobilisme criminel qui l’empêche de faire ce que font les USA, tout simplement parce que l’Allemagne ne le souhaite pas.
          Quand à la fédération européenne de la métallurgie, c’est une institution tout à fait respectable et qui fait de son mieux pour aider les travailleurs européens.

          De grâce, ayez un peu de tenue... Dans vos propos !


        • Geneste 9 janvier 2012 20:59

          Je n’ai jamais dit que l’Allemagne n’avait pas un bon niveau de vie à l’époque du franc. Par contre, en 1973, si ma mémoire est bonne, la France avait le 2ème PIB du monde par tête juste derrière les USA. Aujourd’hui nous sommes aux alentours du 14ème rang européen... Le discours n’est donc pas simpliste...


        • Pelletier Jean Pelletier Jean 9 janvier 2012 15:17

          Il est vrai que « l’incantation » même lyrique n’est pas une preuve en soi et encore moins une démonstration. La sortie de François Bayrou sur le sang et les larmes que verseront les français en cas de sortie de l’euro n’était pas glorieuse pour un homme qui fait de la vérité son étendard politique.

          Je ne crois pas à la sortie de l’Euro, mais pour autant il n’y a jamais qu’un seul chemin en politique, ceux qui disent le contraire sont des dogmatiques.
          http://www.over-blog.com/profil/blogueur-984719.html

           


          • LE CHAT LE CHAT 9 janvier 2012 15:23

            C’est aussi credible que les bains de sang promis par saif al islam Khadafi !


            • BA 9 janvier 2012 21:01

              Italie : taux des obligations à 10 ans : 7,159 %.

               

              http://www.bloomberg.com/apps/quote?ticker=GBTPGR10:IND

               

              Italie : la Bourse de Milan perd 1,67 %.

               

              La banque italienne UniCredit a chuté en Bourse lundi du fait de la forte décote attachée à son augmentation de capital. L’action de la première banque d’Italie par les actifs a chuté de 12,81 % à 2,286 euros pour le premier jour de sa levée de fonds.

               

              L’action UniCredit a fondu de plus de 37 % en trois jours la semaine dernière, lorsque la banque a annoncé que l’augmentation de capital serait proposée avec une décote de 43 %, au prix de 1,943 euro par action.

               

              L’indice Eurostoxx 50 du secteur bancaire a reculé de 2,2%, les investisseurs redoutant que des banques européennes ne soient dissuadées de faire appel au marché après l’expérience difficile que connaît leur concurrente italienne.

               

              "Le plongeon de l’action UniCredit, après l’annonce de son augmentation de capital la semaine dernière, indique qu’il est quasi impossible pour les banques européennes d’envisager l’option augmentation de capital pour trouver des capitaux frais", commente Franklin Pichard Directeur Barclays Bourse.

               

              L’opération d’UniCredit, qui cherche à lever 7,5 milliards d’euros, fait figure de test pour l’ensemble du secteur bancaire européen pressé par l’Autorité bancaire européenne (ABE) d’améliorer ses volumes de fonds propres.

               

              L’ABE exige que les banques européennes parviennent à un ratio de 9% d’ici la mi-2012 afin qu’elles soient en mesure d’encaisser le choc d’une éventuelle aggravation de la crise de la dette de la zone euro.

               

              (Dépêche Reuters)


              • daily.logan 10 janvier 2012 06:45

                Cher BA,

                Merci pour votre intervention (vous nous manquez sur Tropical Bear et Turgot).

                Je suis entièrement d’accord avec vous : SEULS l’évolution de la Bourse et les l’évolution des taux d’intérêt indiquent la santé d’une économie. Il n’y a STRICTEMENT aucun autre indicateur à regarder.

                Merci donc de nous renseigner sur toutes ces choses que nous n’avons jamais vues ni lues ailleurs !


              • zelectron zelectron 9 janvier 2012 23:32

                et que dire des démagogues europhobes ? Votre billet à charge exclusivement est totalement déséquilibré.


                • Geneste 10 janvier 2012 00:19

                  Je ne cherche pas à être équilibré. J’ai des opinions et je les affirme. Un bon article est un article d’opinion de mon point de vue. Je ne suis pas là pour tromper ou noyer le lecteur. Je déploie mes arguments logiquement. Maintenant, on a le droit d’être en désaccord.

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