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Les prolos bleus Marine

Le Monde se lance à nouveau dans sa quête du Graal : comprendre le vote FN. Pour ce faire, un journaliste a mené l'enquête en région parisienne. Malheureusement, les préjugés ont la vie dure...

"Aux portes des pavillons où séduit Marine Le Pen" est le dernier opus du Monde consacré aux Français oubliés, les périurbains. On suit des militants PS qui tractent en Seine-et-Marne, dans des 'bastions' de l'UMP : ah, la métaphore militaire ! On s'attendait à sonner chez des imbéciles, semblent dire les intéressés. Maintenant on peut vous montrer qu'en plus, ils sont racistes. Le mépris suinte. En revanche, Thomas Wieder ne précise pas si le terrain de l'investigation se situe à l'intérieur ou à l'extérieur de la zone urbanisée.

Dans l'article latéral, c'est heureusement beaucoup plus soigné... Le but du journaliste est de relier le vote avec le lieu d'habitat, aux confins de la région parisienne. J'avoue mon désintérêt face aux analystes en cuisine électorale, mais il y a des faits à analyser. Surtout, Thomas Wieder isole une idée simple : le vote FN culmine dans les couronnes périurbaines. C'est dire le malheur provoqué par des décennies d'impérities, le désaveu des élus de tous bords. Et que l'on ne vienne pas parler de surprises [et aussi Bertrand de Chin-Quentin] :

" Ce 'survote' frontiste de la France périurbaine n'est pas une nouveauté. En 1995, 2002 et 2007, c'est déjà là que Jean-Marie Le Pen avait obtenu ses meilleurs résultats. Mais l'écart avec son score national était alors beaucoup plus ténu : 2 points de plus, pas davantage."

Par la suite, j'ai un peu de mal, parce que Thomas Wieder explique l'importance de la géographie... Et interroge un directeur de l'IFOP. Celui-ci tient le discours du Normand des caricatures. Peut-être que les périurbains sont contents. Ou peut-être pas.

" [Les populations] sont là par choix autant que par contrainte. Le choix, c'est celui de la verdure, de la mise à distance de la grande ville et de ses nuisances. La contrainte, c'est celle du prix du foncier et de l'immobilier. Pour pouvoir acheter un petit pavillon à la propriété, les ménages modestes doivent aller de plus en plus loin. "

Nulle trace d'une bulle immobilière, des temps de transport, des accompagnements d'enfants, et plus généralement de toutes les difficultés financière et/ou matérielle rencontrées par les périurbains : citadins ou non... Les ruraux ont la qualité de vie et les ennuis qui vont avecMichel Bussi (université de Rouen), le géographe arrive un peu tard. Il doit cependant expliquer l'inexplicable en cinq phrases : le vote FN dans ces zones périurbaines. Comme s'il n'y avait qu'une grille d'interprétation pour décrire une carte électorale ! Je retiens l'association entre "le repli sur soi" et "le rejet de l'autre".

Droite et gauche ont creusé le fossé séparant les Français entre eux. Il n'y a là aucun critère racial, pas de tri dans les mairies distribuant les permis de construire entre Français de souche et Français issus de l'immigration du Nord : l'argument du FN ne tient pas une minute pour justifier la prétendue mise à l'écart des premiers, de toutes façons impossible à définir. La frontière passe en revanche entre accédants à la propriété d'un côté, locataires de l'autre. Ceux qui ont acheté un pavillon prendront de plein fouet le retournement du marché immobilier, tout en continuant à rembourser leurs prêts pendant des décennies.

De la même façon qu'il est illusoire d'étudier les cités séparément des autres couronnes périurbaines - exemple à Grigny - il faut intégrer les communes frontistes dans une vision d'ensemble. Sans oublier que la télévision abaisse en une seconde les barrières hermétiques entre populations : exemple en novembre 2009. Les racailles cibles de la haine d'un ouvrier d'origine polonaise - "mais qui s'est intégré, lui," dit sa femme - interviewé par Thomas Wieder ne viennent jamais dans son jardin. Ils se côtoient parfois dans les mêmes trains de banlieue... Le journaliste Patrick Buisson, conseiller du candidat Sarkozy sur la stratégie à adopter pour capter l'électorat frontiste, appuie cyniquement à l'endroit douloureux. A l'autre bout de l'échiquier, les arrières-pensées fleurissent aussi.

L'illustre auditeur de Patrick Buisson n'en déduit que des slogans. En France, on réinvente la société (et la ville) à chaque élection. Les perdants et les mauvais n'éprouvent aucun scrupule à se représenter, malgré la maigreur des bilans. Les prolos bleu marine attirent alors brièvement l'attention, comme en 2002, jusqu'à la suivante. Les 28 % de Français périurbains finiront-ils par voter à l'unisson ? Pour l'heure, je déplore le niveau de violence verbale : exemple.

*

A 21h30, je ne peux que ré-ouvrir cette tribune. Un commentateur de l'article du Monde me donne en effet des munitions inattendues. Je le cite in extenso, sans oser le nommer. Tout le XIXème remonte à la surface de cette critique voilée de l'article sur ces périurbains décidément bien médiocres. Les petits-bourgeois aspirent au bon goût et au raffinement. Ils ne parviennent qu'au clinquant vulgaire. Et en plus, ils regardent la télévision. Peut-être apprécieraient-ils d'aller à la Comédie Française ? Le commentateur n'en souffle mot...

"C'est beaucoup plus simple que cela : le rêve de l'accession à la propriété, conjugué à la volonté d'avoir un petit jardin caché derrière une haie imposante de thuyas + l'infotainement en permanence : on a peur du reste du monde. Les bobos n'y sont pour rien."


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10 réactions à cet article    


  • Robert GIL ROBERT GIL 29 février 2012 11:39

    Le français ne fait plus confiance à la classe politique, dépecé par la droite, abandonné par la gauche, le français n’ose plus défendre ses droits et le FN en profite pour détourner sa rage et son désespoir sur l’étranger, sur l’immigré. Alors le français se dit « Le Pen, c’est bien, on a jamais essayé,mais, surprise, surprise.......

    http://2ccr.unblog.fr/2012/02/18/le-francais-le-fn-et-les-autres/


    • VICTOR LAZLO VICTOR LAZLO 29 février 2012 12:19

      Bonjour, 


      Le Monde se réveille bien tard.

      Par ailleurs ce peuple périurbain n’est pas forcément en accession à la propriété contrairement à une idée fort répandue. 
      Ce sont simplement des familles qui s’éloignent des centres parce qu’elles n’ont pas les moyens d’y résider, et qui fuient les banlieues « chaudes » parce qu’elles n’ont pas moyen de « s’isoler » dans ces banlieues (cas, par exemple, de fonctionnaires beneficiant de programmes de logements sociaux spécifiques, permettant un « entre-soi » privilégié). Pour l’essentiel elles veulent assurer à leurs enfants une certaine sécurité et des chances pour l’avenir (car on se doute que ce ne sont pas ces enfants là qui beneficient de faveurs spéciales pour entrer à Sciences Po).

      Quand aux familles qui , plus spécifiquement, « votent mal », c’est à dire FN, dans ce milieu peri urbain ; leur profil est aussi connu : des gens qui travaillent dans le privé avec des petits salaires (s’ils étaient mieux payés, ils seraient dans le 16éme et voteraient Mélenchon), peu de propriétaires (ceux là votent pour la droite classique, leur protectrice naturelle), des gens qui ne bénéficient ni d’assistanat social (ce qui explique leur rage jalouse envers ceux qui en bénéficient) ni de respect de la part des médias et des politiques (qui les considérent comme des « beaufs »).

      Pour finir rassurez vous : ces gens ne menacent personne. Ils seront à terme économiquement ruinés (prix de l’essence, exclusion de l’emploi par le biais de discriminations positives ethniques dont ils seront, et sont déja, les 1éres victimes), et démographiquement réduit à rien , puisque leur pourcentage dans la population décroit d’année en année.

      L’idée serait de leur foutre la paix . Qu’eventuellement ils se défoulent un peu en votant LePen : c’est toujours plus démocratique que de foutre le feu aux écoles ou de lyncher ceux qui leur plaisent pas comme font d’autres http://www.leparisien.fr/societe/un-appel-pour-denoncer-des-ratonnades-anti-blancs-26-03-2005-2005812519.php.

      • Bruno de Larivière Bruno de Larivière 29 février 2012 14:39

        Merci de votre commentaire, auquel je retranche quand même deux biais qui affaiblissent votre démonstration. Les fonctionnaires sont au contraire pleinement concernés. Vous exagerez très largement la part des logements de fonction. Par mes deux ministères d’affiliation, je peux témoigner du cas de la Défense et de l’Education Nationale (c’est-à-dire plusieurs dizaines d’établissements).

        Dans ce cas précis, seuls les postes de direction administrative impliquent le droit à un appartement sur place. Pour des milliers d’enseignants dont le salaire maximal se situe en fin de carrière à 3000 euros (CAPES) ou  4000 euros (Agrégation) le pavillonnaire périurbain est une quasi obligation en région parisienne !

        Pour ce qui est de l’accession à la propriété, elle est également généralisée par nature. Les pavillons symbolisent la « sortie » de la ville et des quartiers HLM. C’est sans doute là que se situe le plus délicat. Comment distinguer le rêve d’ascension sociale de la volonté de se distinguer de la France ’du bas’...


      • foufouille foufouille 29 février 2012 13:02

        ils esperent que la police fera son travail
        les defendre des delinquants
        mais comme la police obeit aux ordres, faut trouver un coupable


        • eric 29 février 2012 14:25

          Comme d’hab, les « chercheurs » de gauche trouvent ce qu’ils cherchent mais ne voient pas leurs propre nez au milieu de leur propre figure. Car l’enseignement le plus évident de l’étude, c’est que ce sont les riches par définition du centre parisien qui votent le plus Hollande. Pour mémoire prix moyen du m2 dans l’ancien à Paris plus de 8000 euros.
          Après, on peut les nommer bobo ou pas comme on veut, mais le fait le plus central est là. Les électeurs les plus privilégiés se reconnaissent dans le programme du PS. Et ce n’est pas un hasard. Les impôts français payent les meilleurs services publics du pays à Paris. Ils ont également les meilleurs services à la personne privé grace à la proximité d’une main d’oeuvre migrante pas cher.

          Pour continuer à avoir les meilleurs lycées de France avec les meilleurs profs et les meilleurs femmes de ménage. Qu’importe les impôts si on en récupère pour plus qu’on en paye ?

          Contre Hollande, le président des riches, votez Sarko .


          • jullien 29 février 2012 14:37

            Contre Hollande, le président des riches, votez Sarko.
            Hannibal Lecter : « Je vous laisse choisir : intestins par devant ou intestins par derrière ? »


          • eric 29 février 2012 15:12

            expansion.lexpress.fr/economie/jospin-choisit-en-priorite-de-baisser-les-impots_84185.html
            Jospin and co ont baissé les impôts de la classe moyenne sup. Leur électorat, au lieu d’aider les pauvres ou de diminuer la dette. Il est normal que celle ci voue au PS une certaine reconnaissance. D’autant qu’en tant qu’urbains, ils sont bénéficiaires net des dépenses et services publics. Aujourd’hui, l’ensemble de la population paye,la clientèle PS profite.
            Ils veulent continuer et c’est le sens du programme du PS. Pour faire croire le contraire, ils mettent en exergue les quelques types qui gagnent beaucoup d’argent ; C’est une escroquerie odieuse d’une classe sociale prédatrice.


          • hacheii 1er mars 2012 09:50

            L’une des conclusions qu’on peu tirer de ce genre d’étude, c’est qu’il ne faut jamais répondre aux sondages ou aux questions posées par téléphone,
            .
            Les résultats de ces études sont utilisés à des fins politiques partisanes, pour dénigrer tel ou tel électorat, et même puisque les politiques et les hauts fonctionnaires connaissent ces sondages, pour casser les corps de métier qui votent mal.


          • Bruno de Larivière Bruno de Larivière 29 février 2012 15:38

            A Julien et à Eric,
            Relisez mon papier et vous verrez que je ne distingue pas le PS de l’UMP. Il n’y a pas équivalence - je pense vraiment le contraire ! - mais en revanche, il y a même résultat en terme de gestion communale depuis une trentaine d’années (et les lois de décentralisation). Le vote - sanction porte bien son nom...
            Nicolas Sarkozy non seulement n’a pas lutté contre les ’dynamiques’ urbaines ; il les a même accéléré. Exemple à Villeneuve-le-Roi, dans un quartier construit sur des gravières, tout proche de l’aéroport d’Orly http://www.youtube.com/watch?v=01xZ-ERhSQg&feature=results_video&playnext=1&list=PLA98E390941AAED64

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