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Manuel Valls, voiture-balai du « hollandisme révolutionnaire »

« Le moment est grave et historique. Chacun doit en être conscient. Je mets la pression sur chacun d’entre nous. (…) La question n’est pas seulement celle de l’envie, mais bien celle de la responsabilité historique qui doit prendre en compte l’intérêt de la France et de la gauche. » ("Journal du dimanche" du 27 novembre 2016).

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Je ne suis pas sûr que l’intérêt de la France et celui de la gauche soient compatibles (je suis même certain du contraire) mais là n’est pas l’essentiel. Dans plusieurs années, plusieurs décennies, les livres d’histoire politique diront à quel point Manuel Valls aura fait "pression" sur François Hollande pour l’empêcher de se représenter (le Président en avait pourtant une folle "envie"), mais aussi comment il s’est imposé auprès du chef de l’État pour obtenir Matignon en mars 2014.

Tout cela ne sera que discussion de spécialistes, car la page Hollande est désormais bien tournée. Manuel Valls, comme prévu, impatient et bouillonnant, a attendu quatre jours du délai de carence et de décence avant d’annoncer solennellement sa candidature à la Présidence de la République ce lundi 5 décembre 2016 à Évry.

Et d’abord, permettez-moi de reprendre tous ces journalistes qui n’hésitent pas à parler de la ville d’Évry comme du "fief" de Manuel Valls : il n’a été maire que de 2001 à 2012, soit un peu plus que deux mandats. Argenteuil était-il également son "fief", il en fut un élu de 1995 à 2001 ? Les communes n’appartiennent qu’à leurs habitants, et en ce qui concerne Manuel Valls, il habite à Paris…

Pour un homme qui n’a jamais fait que de la communication politique depuis le début de sa vie active, ces très longues minutes d’annonce, en quelques sortes, les minutes cruciales dans une existence politique, ont été très décevantes. Bizarrement, les médias semblent dire que la déclaration était réussie. J’ai trouvé, au contraire, que tout été mal fait, tout sonnait faux dans cette annonce. Jusqu’au slogan complètement incompréhensible (trouvé paraît-il la veille) : "Faire gagner tout ce qui nous rassemble" !

Daniel Schneidermann, dans sa chronique du 6 décembre 2016, en a presque eu pitié : « Comment ne voit-il pas qu’il va dans le mur, que le crash est écrit d’avance ? Le malheureux Manuel Valls. (…) Drame : Valls arrive enfin à l’âge adulte en plein naufrage du social-libéralisme corrigé par la com’. Contretemps fatal. (…) Comment Manuel Valls pourrait-il échapper au massacre promis ? Paradoxalement, par l’hostilité médiatique. (…) Sous leur vallsobsession, sourd un désir de meurtre. ».

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D’une part, la déclaration était très longue, beaucoup trop longue. Vingt minutes d’un discours lu sur papier. Pendant les trois quarts du temps, les yeux de Manuel Valls suivaient ses papiers. On ne voyait pas le regard déterminé, on ne voyait que des paupières un peu stressées. C’était endormant, ennuyeux, sans intérêt.

Pire pour lui, il a longuement énuméré les risques d’une victoire de François Fillon. Ce dernier pourrait le remercier, comme ses rivaux de la primaire LR, François Fillon reste et restera le centre de référence de l’élection présidentielle de 2017. C’est bon signe pour lui.

L’autre combat, c’est contre le Front national. Et là, il y a un vrai problème, un vrai problème d’efficacité. Manuel Valls est sans doute le leader de gauche (ou revendiqué comme tel) qui tient des discours crédibles sur l’autorité de l’État, sur les valeurs républicaines. Mieux que Ségolène Royal (qui avait remis le drapeau tricolore au goût socialiste en 2007).

Le vrai problème, c’est que celui qui affiche le plus fort possible son ambition de lutter contre l’extrême droite est celui qui fut Premier Ministre pendant la période où le Front national a atteint ses performances les plus élevées, jusqu’aux élections régionales de décembre 2015 avec une audience record de 27,9% des suffrages exprimés le 6 décembre 2015 et un record de suffrages de plus de 6,8 millions d'électeurs le 13 décembre 2015, après dix-huit mois de gouvernements Valls !

Vouloir rassembler toute la gauche, et même, tous les socialistes, ce serait l’objectif hyperambitieux de Manuel Valls, indispensable d’un point de vue électoral, mais qui sonne mal avec sa nature tendant aux clivages et ses déclarations évoquant "deux gauches irréconciliables".

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D’autre part, le cadre était pesant. C’est vrai, il a voulu mettre derrière lui, autour de lui, un rassemblement des personnes de tout âge, toutes origines, montrant une mixité et une diversité humaines très spécifiques à Évry. Pourquoi pas ? Mais il aurait dû demander à ses partisans de garder le sourire pendant sa déclaration car pendant quatre-vingt-dix pourcents du temps, Manuel Valls avait derrière lui des mines d’enterrement. On enterrait le "hollandisme", et probablement le vallsisme en même temps.

Car comment différencier les deux ? Comment Manuel Valls pourrait-il ne pas assumer pleinement et personnellement le bilan de François Hollande alors qu’il en a été son principal exécuteur ?

Alors, certes, il a pu ainsi se valoriser par l’expérience acquise, et solidement acquise, personne ne la conteste, expérience locale (Évry donc) et expérience nationale (ministérielle), histoire de montrer à Emmanuel Macron son implantation locale et à Jean-Luc Mélenchon son sens de l’État et sa responsabilité nationale.

Pourtant, les "hollandistes" (et pas les "hollandais" !) ne sont pas forcément très excités par la perspective de devoir soutenir cette candidature de Manuel Valls. Ils soupçonnent une trahison contre leur mentor. Une sorte de pression qui aurait amené François Hollande à se piéger, à s’enfermer, à se faire hara-kiri lui-même, devant tous les Français.

Ils n’ont peut-être pas tort. Juste après le renoncement hollandien, Manuel Valls était en visite officielle le 2 décembre 2016 à Nancy sur le thème très important du handicap. Il en a profité pour dire son respect à François Hollande : « Je veux dire au Président de la République, il le sait, à titre personnel, mon respect et toute mon affection. ».

Heureusement qu’il l’a dit, car une journaliste de "Libération", Laure Bretton, dans un article paru le 2 décembre 2016, a révélé que Manuel Valls ne cessait de dire le contraire aux journalistes, sous le couvert du "off", depuis octobre 2016, à propos de François Hollande : « Je ne le respecte pas et je ne le supporte pas. ». C’est peut-être pour cette raison que François Hollande n’a pas daigné citer explicitement le nom de Manuel Valls dans son allocution télévisée du 1er décembre 2016.



La pression sur l’Élysée fut maximale le week-end précédant le renoncement.

Le 26 novembre 2016, ancien fabiusien reconverti dans le vallsisme, le Président de l’Assemblée Nationale Claude Bartolone a estimé qu’il n’était pas insensé d’imaginer que François Hollande et Manuel Valls fussent candidats en même temps à la primaire socialiste. Réflexion que Manuel Valls a simplement commentée ainsi : « Claude Bartolone est un ami. (…) Sa parole est importante, comme celle du premier secrétaire, Jean-Christophe Cambadélis, et de tous les dirigeants du PS. Claude Bartolone a depuis toujours une exigence : le rassemblement de la gauche et des écologistes. Il nous appelle à réfléchir, sans tabous. » (27 novembre 2016).

Cette argumentation peut faire sourire ceux qui connaissaient bien les relations difficiles entre l’UDF et le RPR dans les années 1980 : c’était exactement au nom de "l’union" que Jacques Chirac voulait écraser l’UDF à son profit. Manuel Valls a simplement recyclé ce type de manœuvre politicienne.

Le 27 novembre 2016, le "Journal du dimanche" a publié une interview de Manuel Valls visant à faire encore plus pression sur François Hollande. Je rappelle le contexte du jour : le second tour de la primaire LR et le sacre triomphal de François Fillon. Ce fut le coup de grâce pour François Hollande qui annonça sa capitulation dès le lendemain au cours d’un déjeuner avec son Premier Ministre.

Manuel Valls n’a pas hésité, dans cette interview, à pilonner les positions élyséennes : « J’ai des rapports de respect, d’amitié, et de loyauté avec le Président. Mais la loyauté n’exclut pas la franchise. Force est de constater qu’au cours de ces dernières semaines, le contexte a changé. La parution du livre de confidences a créé un profond désarroi à gauche. Comme chef de la majorité, ma responsabilité est donc de tenir compte de ce climat. ».

Et d’ajouter : « Face au désarroi, au doute, à la déception, à l’idée que la gauche n’a aucune chance, je veux casser cette mécanique qui nous conduirait à la défaite. Je n’oublie pas que le Président a été élu par les Français en 2012. Mais toute candidature doit intégrer le rapport avec les Français, avec la gauche, avec notre famille politique. Toute décision qui ferait fi de ces trois dimensions apparaîtrait comme bancale ou fragile. Me concernant, j’intègre en permanence ces trois éléments. » (27 novembre 2016).

Bernard Cazeneuve a succédé à Manuel Valls ce mardi 6 décembre 2016. Lors de la cérémonie de passation des pouvoirs à Matignon, les deux hommes ont exprimé leur "indéfectible amitié" mutuelle, histoire de dire que la nomination de Bernard Cazenave n’était pas un désaveu pour Manuel Valls.

Mais en déplacement à New York, Emmanuel Macron, l’autre Brutus de la Hollandie, a tenu quand même à rappeler qu’il était, lui aussi, un grand ami de Bernard Cazeneuve, et que beaucoup de "hollandistes" étaient déjà venus le rejoindre, à commencer par Jean-Pierre Mignard. Seuls, ceux qui considèrent que l’appareil du PS est à sauver trouveraient en Manuel Valls le candidat inespéré pour poursuivre son acharnement thérapeutique (depuis 2005)…


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (07 décembre 2016)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Manuel Valls candidat.
La ville d’Évry.
Discours de Manuel Valls le 13 janvier 2015 au Palais-Bourbon (texte intégral).
Discours de Manuel Valls le 9 janvier 2016 au CRIF (texte intégral).
Manuel Valls et l’esprit républicain.
Manuel Valls vs François Fillon (24 septembre 2015).
La ville de Manuel Valls.
La confiance Valls, volet 2 (16 septembre 2014).
La confiance Valls, volet 1 (8 avril 2014).
Les relations entre l’Élysée et Matignon.
Nomination de Manuel Valls à Matignon (31 mars 2014).
Valls sera-t-il Premier Ministre ? (15 mars 2014).
Manuel Valls et son ambition présidentielle.
Manuel Valls à la primaire socialiste.
Manuel Valls et les institutions de la République.
Valls-Bayrou, même combat ?
Et la Corse dans tout cela ?
Et les gens du voyage ?

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6 réactions à cet article    


  • Alpo47 Alpo47 7 décembre 2016 10:32

    Valls est un homme sectaire, impulsif, constamment vindicatif ... c’est évidemment l’homme du système économique prédateur en place.
    On a déjà touché le fond avec Sarko et Flamby mais avec Valls, d’un genre différent, on ne remonterait guère ou pas du tout.


    • fred.foyn 7 décembre 2016 11:43
      Depuis 2012, seulement 8 personnes sont toujours dans ce gouvernement ?
      Ce n’est plus un lessivage, mais un TSUNAMI !

      • zygzornifle zygzornifle 7 décembre 2016 13:01

        Voiture balais ? c’est trop d’honneur moi je dirais le camion rouge de la Snadec celui qui vide les canalisations des chiottes de bouchées ....


        • baldis30 7 décembre 2016 18:46

          @zygzornifle
          bonsoir

          que voilà une sage et réfléchie remarque !

          Il ne faut pas insulter les balais par des comparaisons abusives !


        • aimable 7 décembre 2016 20:35

          ce monsieur qui prétend accéder a la magistrature suprême de la France a combien de passeports 2. 3    ?
          si quelqu’un peut répondre

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