Pascal Durand humilié
On peut penser ce que l'on veut de Pascal Durand.
Du moins de Pascal Durand le politicien, l'homme de tous les compromis. Et quand on dit " l'homme de tous les compromis" on sait que la compromission forcément n'est pas loin.
On peut l'admirer ou au contraire n'avoir aucune estime pour ce dirigeant de parti que l'on pourra juger comme l'archétype du politicien parfaitement adaptable, capable de prôner une orientation politique tactique apparaissant à l'opposé de ses convictions personnelles ou des convictions du parti qu'il représente.
On en pensera ce que l'on veut, mais il ya une chose sur laquelle l'unanimité aura bien du mal à ne pas se faire, c'est sur la manière avec laquelle il a été désavoué par ceux qui jusqu'à peu l'encensaient.
Objectivement Pascal Durand a été humilié, et ça, ça n'est acceptable pour personne. Lui-même n'utilise pas ce terme pour qualifier ce qu'il a subi, mais ses mots en témoignent : "C’est humainement très dur. C’est une sorte de chasse à courre, d’hallali." (Le patron des écolos Pascal Durand poussé vers la sortie ? - leJDD.fr ).
Et qu'a-t-il donc fait pour mériter ce sort, pour subir ce pilonnage en règle que ses anciens supporters lui ont infligé pendant une semaine dès après son discours devant le Conseil fédéral d'EELV le 14 septembre ?
Forcément un crime de lèse-majesté, comment pourrait-il en être autrement ? ( vous pourrez jugez en visionnant la vidéo postée en fin d'article). Et effectivement il s'avère que la colère à l'origine de son lynchage politique a eu lieu sous les dorures de l'Elysée ; quand la rumeur journalistique avait fait de Jean-Marc Ayrault le donneur d'ordre de la sanction : EELV : Pascal Durand poussé vers la sortie par Hollande ? - France Info.
Aussitôt Cécile Duflot convoqua l'irrévérencieux dans son ministère pour lui indiquer la sortie de la direction d'EELV. Et la canonnade commença. « "Ce n'était pas approprié, ni équilibré", a lâché Jean-Vincent Placé sur iTélé. Et Pompili d'embrayer quelques minutes plus tard sur France 2 : "On doit éviter de faire des ultimatums, parce que ce n'est pas forcément la meilleure méthode. La meilleure méthode, c'est de hausser le ton quand il faut hausser le ton mais aussi, et c'est ce qu'on est en train de faire, de discuter", explique la co-présidente du groupe écologiste à l'Assemblée, qui a été reçue mardi à Matignon avec les autres chefs de file parlementaires des Verts. »( Le Figaro ). (Laquelle Pompili s'était déjà fait remarquer par son opinion sur les résistants de Notre-Dame-des-Landes : « Ces "activistes d’extrême gauche qui sont dans la lutte pour la lutte", sont "minoritaires" dans ce combat et bien loin des "vraies questions" que soulèvent "les agriculteurs et expropriés (…) vraiment pas extrémistes". "Je ne veux pas qu’on caricature les opposants de Notre Dame des Landes simplement en les réduisant à ces quelques extrémistes" , Barbara Pompili, AFP, 07/11/2012 »). Pascal Durand évincé, il fallait bien sûr le remplacer sur le champ : « "Il y a un consensus sur Emmanuelle Cosse" au sein d’un "pôle de stabilité" en cours de constitution et qui vise à regrouper plusieurs sensibilités du parti dans le but d’être majoritaire au congrès de Caen le 30 novembre, ont confirmé le coprésident des députés EELV François de Rugy et le député du Gard Christophe Cavard.(...) La constitution de ce pôle regrouperait notamment Cécile Duflot, Jean-Vincent Placé, François de Rugy ou encore Yannick Jadot. » (DNA). François de Rugy qui s'était signalé lui aussi à propos de NDDL : « "Les squats de maisons à NDDL ne servent pas la lutte des vrais opposants au projet d’aéroport que sont les agriculteurs, la population [sic] et les politiques" déclarait il y a quelques mois [avant novembre 2012] François de Rugy ».
Puis ce fut les seconds couteaux : « "Son discours de samedi, ce fut une goutte d’eau qui a entraîné une perte de confiance. Pascal n’est plus en situation de conduire un large rassemblement à vocation majoritaire", explique Alexis Braud, un des cadres du mouvement. "Je ne connais ni sa ligne politique pour les trois ans qui viennent, ni la façon dont il voudrait la mettre en œuvre, ni ce que serait son équipe", regrette David Cormand, proche de Jean-Vincent Placé. (...) Un pilier du parti souligne : "Ce qui est reproché à son discours de samedi, c’est d’avoir mis un niveau de menace qui n’était pas concerté. On peut ne pas être sous contrôle mais se contrôler. Là, il est peu sur une logique christique en se voyant comme le dernier rempart pour sauver l’écologie. Il peut retomber sur ses pieds mais ça tangue sérieusement pour lui. A lui de rassurer sa majorité." Un autre dirigeant se montre moins optimiste pour Durand : "Cela fait un moment qu’on tolère ses foucades. Là, il a tenu un discours tellement négatif, avec un côté "moi ou le déluge", que ça énerve tout le monde. Cela devient ingérable politiquement. Sa sortie est le scénario le plus probable, mais si aucun des possibles successeurs ne fait consensus, il pourrait redevenir le moins mauvais compromis." Sur son discours de samedi, un des pontes du parti ajoute : "Une sortie comme celle-là, ce n’est pas possible. Cela défie les lois de la politique. Nous voulons un pôle de stabilité dans le parti. On cherche à fédérer largement. Il n’est plus en capacité de le faire." » ( leJDD.fr).
Or comment s’était donc comporté Pascal Durand, mis en place par Jean-Vincent Placé et ses amis en juin 2012, pendant tout son mandat ? De manière totalement conforme à ce qu’ils attendaient. Et ils n’ont cessé de l’en féliciter...
Pascal Durand était capable d'affirmer la main sur le coeur que Fessenheim et le processus de dénucléarisation de la France ont toujours fait l'objet de sa préoccupation quotidienne, quand en réalité il s'employait à botter le plus souvent en touche, et parfois même avec une rapidité confondante (Trois jours après que le Conseil fédéral de mai ait pu de nouveau réclamer la fermeture immédiate de Fessenheim, il pouvait par exemple délivrer ce message dans la presse : " nous ne nous contenterons pas de la fermeture de Fessenheim en 2016 " (et non pas : de la fermeture immédiate !!!) ( Regards.fr) ). Quand bien même était-il capable de ces trahisons dictées par ceux qui l'avaient hissé au sommet du parti (Mamère : "Duflot est la vraie patronne d'EELV", Durand un "fusible"), méritait-il une telle humiliation ?
EELV. Mais quel est donc le péché capital de Pascal Durand ? - Le Nouvel Observateur
Si vous avez une petite demi-heure devant vous, prenez donc ce temps pour visionner cette vidéo du discours de Pascal Durand au Conseil Fédéral d'Europe Écologie Les Verts. Il le mérite bien. Et vous pourrez alors mesurer l'ampleur du "péché capital" de Pascal Durand, le "scandale" qu'il représente.
Et vous pourrez aussi constater qu'effectivement « "samedi, [il] ne [s'est] pas fait siffler par la salle, loin de là. Le reste, c’est l’écume de quelques cadres, plus intéressés par le Congrès que par la conférence environnementale. Mais cela n’intéresse pas les militants", confie Pascal Durand, convaincu d’avoir plus de soutien chez les militants et à la gauche du parti. » (leJDD.fr)
Photo 1 : le JDD.fr
Photo 2 : Kenzo Tribouillard. AFP
Photo3 : Libération.fr
14 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON