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Accueil du site > Actualités > Santé > France 2 met la psychiatrie à la une

France 2 met la psychiatrie à la une

Depuis plusieurs semaines, la psychiatrie fait la une des médias français [on trouvera à la fin du billet une petite liste de liens renvoyant sur des articles parus dans la presse]. Chacun - et principalement journalistes et politiques - alimentent un débat pour le moins polémique autour d’une problématique dont il est à craindre qu’elle ne flirte avec une logique dangereuse consistant à désigner à la vindicte populaire un bouc émissaire idéal : le fou dangereux !

Et la télévision n’est pas le dernier des médias à surfer sur cette actualité dont les responsables de chaîne peuvent penser a priori que l’émission fera de l’audience. Ainsi, Canal+ avec son magazine Jeudi investigation en date du 13 septembre a-t-il fait la présentation de l’hôpital Lucien-Bonnafé, établissement modèle ouvert à Roubaix depuis un peu plus d’un an. Sous le titre « la psychiatrie dans le mur ? », l’équipe de télévision d’Alexandra Riguet met en exergue l’absence de médecins psychiatres et des personnels infirmiers qui se sentent abandonnés. La région Nord est l’une des moins bien dotées en personnels médicaux et la psychiatrie ne fait pas malheureusement exception. A Paris, il y a un psychiatre pour 1 000 habitants. Dans le Pas-de-Calais, un pour 11 000. Et à Cambrai, un pour 32 000. Dans ce contexte, on peut se demander alors, que Nicolas Sarkozy avait fait des déclarations allant dans le sens d’un rééquilibrage de la densité médicale sur le territoire, la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, a affirmé dimanche que le gouvernement n’avait pas l’intention de remettre en cause la liberté d’installation des médecins. Certainement pour calmer les membres de la treizième université d’été de la Confédération des syndicats médicaux français devant lesquels elle s’exprimait et dont on sait qu’il représente un lobby important.

Entre polémique, ambiguïté et amalgame...

France 2 Télévision n’est pas en reste et a également décidé de mettre la psychiatrie à la une avec son magazine Complément d’enquête présenté par Benoît Duquesne : « Punir ou guérir : que faire des fous dangereux ? »

Comme le souligne Jean-Paul Garraud, député de Gironde, mais aussi magistrat, dans un article paru dans le quotidien Libération le 14/09/07, il est vrai que « le débat agite les sociologues, les juristes, les "psys", les politiques depuis des décennies ». Mais comme lui répond Emmanuelle Perreux, présidente du syndicat de la magistrature, il convient d’être conscient que « le législateur [français, ndlr] n’a cessé, depuis 2002, de durcir les peines. » Alors que faut-il faire ? Il n’est pas certain que le magazine de la chaîne publique apporte quelques réponses en la matière.

David Pujadas présentateur, au beau milieu JT, suite à la sortie de prison de Martial Leconte condamné pour agression sexuelle avec un bracelet électronique, enchaîne sa présentation sur un sujet autour du débat de la castration chimique et de la castration chirurgicale, puis fait la présentation de l’émission de Benoît Duquesne « à propos de traitement et de politique pénale... ». Encore une fois, on présente sans précaution particulière, avec une ambiguïté manifestement inconsciente, la maladie mentale avec la délinquance.

Faute de moyens : « on livre les patients à eux-mêmes »

Heureusement, l’émission de Benoît Duquesne aura évité de reprendre cette polémique à son compte. Au contraire, il ressort du reportage tant sur l’unité psychiatrique de la prison de Fresnes que sur le centre hospitalier psychiatrique de Clermont-sur-Oise que les professionnels de santé manquent avant tout de moyens pour faire face à la nécessaire prise en charge d’individus qui ne sont pas seulement des délinquants même si certains ont commis des crimes.

Du point de vue de la prison, la problématique est bien posée, en tant que détenus, ils finiront par sortir un jour ou l’autre. Or le Dr Beaurepaire, chef de service du SMPR (service médico-psychologique régional), dresse le constat de la situation de la prise en charge de la santé mentale en milieu carcéral avec une justesse digne de ses compétences de clinicienne. Il n’y a, à la sortie de la prison, aucune solution de prise en charge, on livre les patients à eux-mêmes au risque terrible d’un passage à l’acte et de la récidive que les médias ne manqueront pas de saisir.

Faute de moyens : « L’injonction thérapeutique, c’est une farce ! »

Plus loin dans le reportage, est illustrée la fameuse injonction thérapeutique censée répondre à cette obligation de prise en charge. Seulement voilà, le médecin Jean-Claude Bossard reconnaît que les patients viennent le voir avant tout pour obtenir le certificat d’attestation de suivi médical sans s’engager dans une véritable volonté de soins. Ce qui lui fait dire que « l’injonction thérapeutique, c’est une farce ! » Là aussi, ce qui ressort c’est le manque de coordination, à défaut de disponibilité, entre les différents acteurs : d’un côté, la justice qui pose l’injonction thérapeutique avec le sentiment du devoir accompli et de l’autre côté la médecine qui ne dispose que de pauvres moyens en ce domaine. Roselyne Bachelot le reconnaît elle-même : 150 médecins coordonnateurs pour l’ensemble du territoire national. Face aux questions de Benoît Duquesne, elle rappelle que ce chiffre devrait passer prochainement à 450 sans préciser la difficulté actuelle à recruter des psychiatres, sans parler de la formation.

« Que l’on soigne déjà dans les prisons »

Pour Serge Portelli, vice-président au tribunal de Paris et président de la 12e Chambre correctionnelle [pour rappel, Serge Portelli a écrit un livre Ruptures devant sortir chez Michalon, mais après des rumeurs de censure aura été publié chez L’Harmattan. Ce livre dresse le bilan de Nicolas Sarkozy au ministère de l’Intérieur], l’évolution de la pratique des experts judiciaires et des juges va dans le sens de refuser de plus en plus la qualification d’irresponsabilité pénale conduisant au non-lieu, et cela en raison d’une pression de plus en plus forte des responsables politiques et de l’opinion publique. Pour ce magistrat, la solution ne tient pas tant à créer des hôpitaux prisons que de garantir une prise en charge médicale dès le début de l’incarcération de ces personnes pour lesquelles on a pourtant voulu affirmer la responsabilité pénale mais dont on doit manifestement reconnaître qu’elles nécessitent une prise en charge adaptée.

« On ne juge pas les fous comme l’on jugeait les cochons au Moyen Âge »

Souvenons-nous qu’il y a à peine quelques mois de cela, alors que l’actuel président de la République était encore ministre de l’Intérieur et portait un projet de loi devant les députés sur la prévention de la délinquance, il avait fallu toute la détermination des professionnels de la psychiatrie (que ce soit les médecins psychiatres, les associations de familles, les syndicats de personnels) pour refuser qu’une modification de la loi du 27 juin 1990 édictant les règles en matière d’hospitalisation sous contrainte spécifique à la prise en charge de la maladie mentale ne soit incluse dans le texte fourre-tout sur la prévention de la délinquance. Craignant à quelques semaines une fronde des associations de familles de patients, le gouvernement d’alors avait justement fait marche arrière renonçant de fait à l’amalgame. Aujourd’hui, au sujet du drame du centre hospitalier de Pau, c’est le président de la République lui-même qui commente une décision de justice ouvertement devant les médias en expliquant que le rendu d’un non-lieu dans cette affaire constitue un affront aux victimes. Et dans la foulée d’édicter que les fous doivent pouvoir être jugés comme toute autre individu, omettant un élément du dossier à savoir que si un non-lieu a été rendu c’est suite aux conclusions du parquet faisant lui-même suite à l’avis de multiples experts qui se sont prononcé sur la difficile question du discernement de la personne ayant commis l’acte au moment des faits.

Loin de vouloir ignorer le sort tragique des victimes que nous pouvons tous être potentiellement, il conviendrait de se souvenir que la justice, c’est le contraire de l’émotion et de la loi du talion. Et comme l’expliquait il y peu Dominique Rousseau, professeur de droit et ancien membre du Conseil supérieur de la magistrature, il ne faudrait pas retombait dans une logique de lynchage et de vengeance. Or, « le lynchage, c’est l’immédiateté : je prends, je pends. » Concernant la volonté du chef de l’Etat de juger les irresponsables, d’autres s’interrogent de manière dubitative « si ça continue comme ça, on va recommencer à faire des procès d’animaux, comme au Moyen Âge ». Serge Portelli insiste « on ne juge pas les fous comme l’on jugeait les cochons au Moyen Âge ». Cette question de la responsabilité est donc loin d’être tranchée.

L’article 122-1 du Code pénal stipule que "n’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes". Mais le même article précise que, si le discernement n’est qu’"altéré", le jugement est possible. C’est une vieille crainte populaire : "l’excuse" de la folie qui permet d’échapper à la justice. La pression sociale s’exerce sur les experts, qui privilégient l’altération du discernement à son abolition, et les juges, qui hésitent à prononcer un non-lieu. 203 ordonnances de non-lieu ont été rendues par les juges d’instruction, en 2005, au nom de l’irresponsabilité pénale, contre 600 en 1989. Moins d’une centaine correspondent à des crimes. C’est ainsi que beaucoup de personnes au discernement altéré passent en jugement et remplissent les prisons, où près d’un quart des prisonniers - environ 15 000 détenus, dont 4 000 psychotiques - sont des cas psychiatriques et rendent la détention intenable pour eux, leurs codétenus et les surveillants.

On le voit, bien que le reportage tente de montrer la difficulté de la prise en charge médicale de la maladie mentale, nous sommes bien loin de l’appel à la sérénité du Dr Yvan Halimi, président de la Conférence des présidents de CME (commission médicale d’établissement) des centres hospitaliers psychiatriques « notre discipline, actuellement au coeur de l’actualité, est consciente de ses responsabilités »... « la conférence des présidents doit veiller à faire avancer ces questions et les prochaines réformes dans la sérénité, loin des résonances médiatiques, dans un cadre collectif intégrant de façon équilibrée l’ensemble des personnes concernées et en conciliant le respect des libertés individuelles et le légitime souci de sécurité de nos concitoyens » précisant au passage un élément essentiel, que l’on semble volontairement ignorer, « que la quasi-totalité des patients traités en psychiatrie ne présentent pas de dangerosité et ont surtout besoin de soins de qualité ». (source)

On retiendra tout de même la conclusion de la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot face aux questions pressantes de Benoît Duquesne sur la perspective d’hospitaliser sans limite dans le temps des ex-détenus dans les hôpitaux prisons suggérés par le président de la République : « en tant que ministre, en tant que professionnelle de santé, en tant que citoyenne, je me refuse à prononcer une sorte de peine définitive ». Sans remettre en cause ouvertement la proposition du chef de l’Etat, Roselyne Bachelot n’en laisse pas moins entendre que cette piste de réflexion ne constitue pas une panacée universelle.

De son côté, Rachida Dati a visité récemment un hôpital fermé aux Pays-Bas

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Voici une petite liste qui, loin d’être exhaustive, permettra de mieux appréhender comment la psychiatrie est mise à l’honneur dans notre actualité. Comme vous le constaterez, c’est rarement pour défendre le travail accompli par les professionnels mais plutôt pour mettre en avant un tableau inquiétant :

Le Figaro dans son édition du 1er septembre revient sur l’affaire Abderrahmen M’Hamed : le patron du supermarché du quartier du Franc-Moisin qui s’était fait agressé pour souligner son hospitalisation en psychiatrie et titre là-dessus comme un fait explicatif. Heureusement, il cite un policier qui précise « ses propres turpitudes n’exonèrent en rien les voyous qui s’en sont pris à lui. » Fallait-il le préciser ?

Toujours Le Figaro dans son édition du 31 août revient sur la situation de la « pédophilie » pour en souligner le manque de moyens mais au passage on met en avant que près d’un quart des condamnés incarcérés dans les prisons françaises sont des délinquants sexuels, fort heureusement tous ne sont pas pédophiles ou violeurs multirécidivistes. On se heurte en France à plusieurs difficultés : le manque de psychiatres formés dans ce domaine très spécifique, le manque de moyens attribués aux rares psychiatres qui acceptent de prendre en charge de manière régulière ces patients, le manque de soutien de la part de la justice. Une des difficultés tient en particulier à la fin de la période d’obligation de soins, lorsque les patients sont suivis en ambulatoire.

Après l’annonce de la création d’hôpitaux prisons pour délinquants sexuels, survenue cet été à la suite de l’affaire Francis Évrard, Le Figaro s’est rendu à l’hôpital psychiatrique Paul-Guiraud de Villejuif (Val-de-Marne), où sont programmées des structures spécialement dédiées aux détenus, surnommés ici les « D 398 ». La psychiatre Christiane de Beaurepaire, chef du service médico-psychologique régional : « ... en psychiatrie, les moyens sont de moins en moins nombreux. Le roulement est rapide. On soigne la maladie mentale comme on soigne une appendicite. » (...) « La confusion est effarante : on ne sait plus ce qui relève de la médecine ou de la justice ».

Présentation de l’émission Jeudi investigation « La Psychiatrie dans le mur ? »

La castration chimique deviendra-t-elle obligatoire ? Métro

Quelques sites :


Ascodocpsy : réseau documentaire en santé mentale

Association pour la Fondation Ey

Le Syndicat des psychiatres des hôpitaux

Syndicat des psychiatres français / Association française de psychiatrie

Association française des psychiatres d’exercice privé / Syndicat national des psychiatres privés

Coordination nationale des médecins généralistes en psychiatrie

Psychiatrie et violence, un site canadien


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7 réactions à cet article    


  • La Taverne des Poètes 25 septembre 2007 16:46

    Les amateurs de calembours (comme moi) apprécieront le titre ! smiley

    - Concernant les CAE contrats d’accompagnement dans l’emploi : ex CES - contrats emplois solidarité) : Plusieurs associations et syndicats (Fnars, SNC, Emmaüs-France, Coorace, Cnei, CNLRQ, Chantier Ecole, Réseau Cocagne, CFDT) ont dénoncé, le 20 septembre, dans une déclaration commune, la réduction des emplois aidés.

    - A propos de l’injonction thérapeutique modifiée par la réforme sur la prévention de la délinquance (3èm volet) , il me semble que l’avis de l’expert psychiatre s’impose désormais au juge qui perd donc là-dessus tout pouvoir d’appréciation. Pourquoi pas mais, avec l’instauration des peines planchers, cela montre la méfiance du pouvoir envers les juges


    • citoyen citoyen 25 septembre 2007 19:10

      Pour ce qui du titre, il est à prendre bien évidemment :
      - au sens propre même si l’horaire de l’émission relativise cette « mise à la Une » [néanmoins l’articulation entre le JT de Pujadas et l’émission confirme cette volonté de rebondir sur une actualité « sensible » dans l’opinion] ;
      - mais aussi dans un second sens en référence au fait que France 2 a réussi a dépasser l’audience de TF1 sur la programmation de la série TV concernant justement l’hôpital pour laquelle TF1 avait pourtant beaucoup misé [mais n’étant spéciasliste médias je me suis contenté d’une allusion que tu as relevé à juste titre, Merci]

      Concernant les CAE, je te remercie de l’information qui m’avait échappé, je ne manquerai pas de propsoer un billet là-dessus, sinon il sera sur mon blog

      bien à toi


    • ddacoudre ddacoudre 29 septembre 2007 17:20

      Bonjour citoyen.

      Tu as effectivement mis le doigt sur le fait que l’attente des citoyens n’est pas de faire face à la dangerosité de notre existence pour reculer une échéance mortelle que nous ne reconnaissons que par la maladie ou le vieillissement altération naturelle de nos cellules.

      Mais pour ce qui est de la mort et des blessures engendrées par nos comportements il en est tout autrement. Il fut un siècle ou notre ignorance nous faisait éliminer radicalement le fauteur de trouble, et nous étions si saut que le pouvoir entre les mains de faiseurs d’opinions ecclésiastique condamnait des animaux comme tu le rappelles. Nous pourrions penser qu’aujourd’hui devant la quantité phénoménale de connaissances dans tous les domaines, il puisse en être autrement. Or ce n’est pas à cela que l’on assiste mais à une forme d’intolérance, une forme de peur latente paranoïaque qui se conforte au travers de slogan comme « risque zéro, principe de précaution, droit d’ingérence, tribunal international des crimes contre l’humanité ». Une parenthèse (parfois je me pose la question de savoir si c’était les autres cultures qui nous les édictes est-ce que nous l’accepterions.)

      Et les découvertes des scientifiques ne nous confirmes aucune mesure nous permettant de pouvoir tout déterminer et donc que tous ces slogans dans leur acception se justifient.

      C’est l’inverse, ils disent que plus ils découvrent plus apparaissent des questions et plus apparaît la certitude d’avoir existence tant cosmique que biologique produite par un nombre de données si élevées qu’il doivent admettre que c’est le Hasard qui commende à notre destiné tellement il y a de données aléatoires (dont nous faisons des réalisations avec certaines). Sauf qu’au lieu de le donner à apprendre aux citoyens pour qu’ils accroissent leur potentiel réflexif, les faiseurs d’opinions utilisent les sciences et parfois les scientifiques comme des faire valoir attestant la crédibilité de leur assertions, la plupart du temps « théâtreuses » (dans le sens de mauvais comme journaleux).

      Il y a bien longtemps que Max Weber à dit que le crime n’est que social. Mais qui l’apprend ? Qui l’explique ? Cela ne justifie pas la nuisance à autrui, mais fait comprendre comment chacun de nous participe inconsciemment à sa construction. Que quelqu’un essaie d’expliquer (à quelque exception prés) que la victime à une coresponsabilité dans l’évènement survenu, cela ne se dit qu’entre professionnel.

      Alors que de part l’apprentissage sociétal qui est le notre et l’apprentissage technologique nous construisons plus largement tout ce dont nous nous plaignons y compris nos délits et crimes.

      Et encore je n’évoque pas ceux que nous ne qualifions pas comme tel parce que nous le pratiquons tous, la guerre, l’empoisonnement par pollution, la mal bouffe (je l’ai fait volontairement, mais je ne pense pas à Bovet, mais à tous ceux que nous tuons par l’excès de boissons, nourriture etc. Mais là nous sommes trop nombres alors nous nous contentons (heureusement) d’un commentaire civique.

      Alors pourquoi les autres crimes et délits qui sont tous autant social nous les traitons différemment.

      Pourquoi les faiseurs d’opinions développent l’intransigeance stupide plutôt que la protection lucide.

      Pourquoi ne donne ton la parole qu’a ceux-là ? (En cette question ne croyait pas en ma naïveté ce serait désolant).

      J’ai donc bien apprécié ton pavé dans la mare.

      Si demain les hommes veulent supprimer les pulsions, ils devraient commencer par les publicités qui s’appuient dessus. Car l’homme raisonnable fait parti des nombreuses tartes à la crème que nous nous « balançons » quand nous refusons de vouloir comprendre notre part de responsabilité d’acteur social.

      J’ai un jour essayé d’expliquer cela je te joins le commentaire sur ce sujet.

      Le Savoir impose d’apprendre ou d’essayer de comprendre ce que nous sommes avec notre agressivité parce que nous l’observons. « L’agressivité naturelle » est indispensable à la survie de toutes les espèces, dont la nôtre.

      La socialisation nous permet d’en définir différents concepts, de manière à pouvoir en bannir quelques-uns comme asociaux. Néanmoins, « l’agressivité » reste l’élément moteur, bien que socialisée et de ce fait acceptable. Maîtrisée durant l’évolution de nos aptitudes et de notre capacité cérébrale, elle a façonné l’homme et lui en retour son espace.

      Par « agressivité naturelle », j’entends la capacité d’action de l’homme d’inter agir sur lui-même, sur les autres, ainsi que sur toutes choses de son environnement, même si un jour il doit réorganiser son existence en ayant compris qu’il ne disposait d’aucun libre arbitre.

      Il impose de ce fait, contrainte, transformation ou destruction dans l’ignorance partielle du TOUT qu’il est, dans un TOUT plus grand que lui dont il est le semblable, l’univers. Il ne s’agit donc de ne pas confondre ici agressivité et violence.

      En effet, chaque Être ou sujet ou individu, n’est qu’un élément inséparable d’un ensemble, d’un Tout, que nous appelons l’espèce humaine. Elle-même étant contenue dans un ensemble plus grand dont elle est issue, l’univers. Elle ne peut donc qu’être régie par les mêmes lois qui ont construit l’univers, et qui ont donné naissance à des singularités, telle notre planète. Des lois que nous commençons à mieux cerner aux travers des sciences.

      A leurs sujets, Stephen Hawkins disait : « L’histoire des sciences tout entière n’est que la compréhension progressive du fait que les événements n’arrivent pas de manière arbitraire, mais qu’ils reflètent un certain ordre sous-jacent qui peut ou non, avoir été inspiré du divin ».

      Cette remarque est d’autant plus importante qu’elle s’applique à nous, elle s’applique au déroulement de notre existence. De telle manière que les événements de notre existence ne proviennent que des ordres (systèmes, organisations) qui les ont inspirés, et notre cerveau par la construction de son psychique en est un producteur efficace dans la représentation de ses affects à partir de la nécessité vitale fondatrice de se nourrir, s’accoupler et s’abriter.

      Partant de là l’agressivité prendra des nuances capables de répondre à toutes les éventualités de 0 à l’infini que nos schémas conceptualisés lui suggéreront, suivant la traduction et la représentation des informations que nos sens auront recueillies du monde, pour façonner les moyens de vivre ou s’entre-tuer.

      Ceci est d’autant plus important à préciser que nous essayons en permanence de réduire l’éventualité de s’entre-tuer, et nous regardons l’agressivité comme nécessité naturelle motivée par la frustration, ou bien dans une approche morale, comme la nocivité, le méfait, le crime qui se justifie quand l’homme est un loup pour l’homme, le contraire de la bienveillance dans un idéal d’amour ou d’harmonie sociale.

      Pour en saisir toutes les nuances il nous faudrait avoir accès à l’infini, un infini pour lequel nous n’avons ni de départ ni d’arrivée, mais qui au lieu de nous décourager doit nous permettre de comprendre éventuellement : que, si depuis 2000, voire 3000 ans ou plus nous appliquons toujours les mêmes principes punitifs ou méritocratiques sans résultat, qui souvent s’apparente à de la persécution , il serait peut-être temps de s’interroger. Donc la capacité d’agressivité ne doit pas être prise comme seulement l’expression de violence, mais en un sens plus générique qui est la capacité d’agir pour aller prendre chez l’autre (son alter ego et le monde) ce qu’il vous donne afin d’exister quelles qu’en soient les motivations.

      L‘Homme n’est donc pas irrévocablement un être violent. Il est lui-même la construction d’un amalgame d’informations ordonnées qui ont élaboré son psychique ; mais il a la difficile responsabilité à partir de celui-ci, de quantifier et qualifier les informations qu’il perçoit dans l’ignorance la plus totale du monde objectif, en bâtissant au fil des millénaires l’image de ce qu’il a pu comprendre de lui et du monde. Et ce n’est qu’à partir des définitions qu’il leur donne qu’il est en mesure de transformer une agressivité innovatrice en violence mortelle intra espèce en l’absence d’un inhibiteur inné.

      Donc l’information est capitale pour l’homme, et traiter l’information oblige d’apprendre, d’apprendre en permanence, sinon on la subit. Nous la subissons dans toutes les formes imparfaites et barbares dans lesquelles nous la figeons en nous croyant possesseur de la compréhension ultime. De ce fait nous faisons en permanence le procès de l’Homme, au lieu de celui de sa construction psychique, même si celle-ci porte un nom par acteur, tout en n’ayant jamais appris à cet acteur comment fonctionnait un organe aussi essentiel que son cerveau, avec lequel il allait devoir passer sa vie.

      Dans notre monde, le traitement moderne de l’information ou de la désinformation, occupe une place quotidienne à tel point, qu’il est apparu des experts et spécialistes en traitement, de la communication, de l’image (pour l’essentiel la presse écrite et audio- visuelle), informations qui, à moins d’être un ermite nous atteint. Ainsi, toutes ces informations, et le langage qui les véhicule, façonnent le raisonnement et le comportement individuel, et elles sont parties intégrantes de nos échanges journaliers.

      Nous faisons donc au quotidien sous notre seul arbitraire un échange d’informations croisées, qui en dehors d’une structure d’enseignement didactique s’appelle la conversation.

      S’il en a été ainsi, et en sera ainsi quelles que soient les diverses formes sous lesquelles se diffuseront les informations, celles médiatiques ne rencontrent pas de contrepoids ou pouvoir, si ce n’est celui de leurs propres controverses.

      En règle générale, ces informations médiatiques constituent une information descendante qui, si elle se nourrit des manifestations d’opinions collectives ou individuelles exprimées (le vote, les sondages d’opinions, les porte-parole de groupements associatifs, les manifestations populaires sporadiques, et tout événement), cette information descendante s’impose par sa quotidienneté et est subie, en l’absence de droit de réponse (les types d’informations inters actives sont rares et ne peuvent être que sélectives, du fait de la loi des nombres).

      Elles sont donc souvent prises à tort comme représentant la réalité sociale, politique et économique d’un « effet loupe » qui se répand, et donne tout son poids aux médias.

      De ce fait dans ce « marché de l’esprit », si je peux me permettre de l’appeler ainsi, la variété et la crédibilité de l’information s’atrophient malgré une liberté acquise. Le commentateur, faiseur d’opinion, a pris de l’ampleur pour le meilleur ou le pire, car il est à but lucratif, et il doit d’abord se vendre, tandis que le rôle de l’auditeur ou du lecteur se réduit presque exclusivement à celui de répétiteur (pour plaire à Socrate). L’Homme moderne répète et ne prend jamais le temps de s’interroger de l’intérieur, d’autres cultures disent méditer.

      Cordialement.


      • citoyen citoyen 29 septembre 2007 18:51

        Merci pour ce commentaire qui, loin de se contenter de mettre en exergue un article quelque peu « bâclé » au regard de l’importance du sujet, le transcende et l’enrichit avec pertinence. Comme quoi l’intolérance et la violence naturelle de l’homme sont des comportements et des passions que nous sommes à même de canaliser.


      • Alexe 29 septembre 2007 22:14

        Juste deux choses en passant, parce que le sujet me touche.

        Il n’y a pas que des « fous » en hôpital psy, je m’explique.

        On y trouve des gens en « simple » dépression, des gens comme vous et moi, si nous pouvons vous et moi être considérés comme « normaux » - ce qui reste à prouver -, des gens donc qui ont vu leur vie basculer pour surmenage, rupture, deuil, allaitement, que sais-je. Méfiez-vous donc, un petit tour et puis s’internent les pauvres marionnettes que nous sommes.

        On y trouve également du « personnel », qui a bien raison de se plaindre, mais pas seulement. Je ne peux m’empêcher de penser à cette compagnie de théâtre de l’hôpital de Ville-Evrard, à Neuilly-sur-Marne, qui entre autres activités professionnelles prend en charge des petits groupes de volontaires pour jouer un peu au milieu de ce territoire de désolation.

        www.verticaldetour.new.fr

        Des gens motivés pour améliorer la vie d’un pareil lieu, il en existe donc, malheureusement peu soutenus, et toujours sur la brèche.

        A qui la faute ? Qui est fou dans cette histoire ?

        Alexe


        • ddacoudre ddacoudre 30 septembre 2007 11:57

          Bonjour Alexe.

          Un sujet bien délicat que de définir la folie. Le rapport aux choses et aux êtres peut être altéré par des lésions momentanées ou constantes, mais toutes ne conduisent pas à la folie. Hier la maladie d’Alzheimer à du très certainement faire interner des personnes pour folie, comme l’a été l’hystérie en son temps. L’impossibilité de s’adapter à nos normes sociétales aux contraintes de nos servitudes, peut n’être qu’une insuffisance adaptative ou un conditionnement clos. Les enfants loups élevés par une louve, n’ont pu s’adapter à notre mode de vie, ils n’étaient pas fous pour autant. Dans des organisations tribales qui n’ont ni prison ni asile, le rapport du groupe au « décrété fou » est différent. Parfois ils sont respectés pour être considéré en relation avec les esprits et s’ils représentent une dangerosité les membres du groupe s’en écartent. Souvent ce qui nous fait écarter un des nôtres comme fou, c’est la difficulté de l’assister en permanence, ou leur dangerosité dans l’usage de nos produits et matériels qui ne sont pas sans innocuités. L’inadaptation aux normes sociétale n’est pas de la folie si elles proviennent d’insuffisances acceptables. Je crois même qu’avec le temps et les progrès de la science en neurologie cette notion éculée synonyme d’incompréhension devrait disparaître du langage.

          Le sort des hystériques enchaînés dans des cellules devait les conduire à une désintégration cérébrale totale, puisqu’ils avaient en dehors de leur crise toute lucidité. C’est cette aptitude à la lucidité qui est un élément déterminant pour définir la folie passagère ou constante, mais bien sur pas la lucidité normative, une dure tâche pour les professionnels.

          Cordialement.


        • Alexe 30 septembre 2007 17:01

          Bonjour cher ddacoudre,

          entièrement d’accord avec vos vues ; ayant rencontré un infirmier en psychiatrie il y a quelque temps, et curieuse d’en savoir un peu plus, je lui avait demandé à partir de quel moment la folie était considérée comme une pathologie. Il m’avait répondu quelque chose comme « lorsqu’elle se traduit par une perte d’autonomie, d’indépendance, quand elle empêche de vivre »libre«  ».

          Je tenais simplement à signaler le fait que justement, tous les gens internés ne sont pas pathologiques pour autant, que cela peut se retourner contre n’importe qui en des circonstances sombres de la vie. On y croise des gens en perte de vitesse, en perte d’autonomie certes, mais provisoire, comme des cas beaucoup plus gravement atteints ; et que tous ces gens mélangés dans des structures dénoncées par les personnels eux-mêmes comme obsolètes ou « lâchées » par les autorités, forment une cocotte-minute prête à craquer face à un personnel débordé, dérisoire, peiné de ses conditions de travail.

          C’était là le sens de ma question « qui est fou dans cette histoire ? », qui, comme vous y avez en partie répondu lors de votre intervention, pose le problème de la détermination 1/ de la folie passagère ou sévère et 2/de l’irresponsabilité d’un gouvernement qui coupe des budgets et ferme des places alors que certaines conditions d’internement sont parfois pires que la crise elle-même qui y a conduit.

          J’espère avoir été plus claire, merci d’avoir pris le temps de répondre, à bientôt,

          Alexe

          www.si-les-idees-suffisaient.net

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