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A l’Education Nationale, on enfile les perles… à moins que…

Cet après-midi, je voulais écrire ce que l’on appelle en terme journalistique un marronnier  : c’est-à-dire un article qui revient tous les ans… Je voulais donc vous proposer quelques perles observées à partir d’une trentaine de copies corrigées sur les épreuves du bac pro en histoire-géo.

Et puis, un collègue a voulu s’exprimer sur mon blog  et donner quelques réflexions sur son métier, chose que je ne fais plus, car vous n’êtes pas sans savoir que des cerbères rôdent sur la toile afin de débusquer les enseignants subversifs

Personnellement, je ne pense que du bien des gens qui nous dirigent, c’est formidable, ils nous aiment, nous sommes des privilégiés…

Mon collègue s’appelle Xavier, je lui ai posé quelques questions…
 
M.G. - Les élèves de cette année sont-ils plus mauvais que les autres ?
 
X. - Le barème est fait (par des gens généreux que je ne connais pas) pour que la plupart d’entre eux s’en sortent. Malgré tout, nous avons constaté, à partir des moyennes relevées en Histoire-Géo, que celles-ci étaient faibles : souvent en dessous de la moyenne. Sommes-nous des monstres ?
A titre personnel, je pense que les élèves ne sont pas plus mauvais, mais force est de constater que les miens ont été particulièrement absents notamment à la fin de l’année. Or, c’est à cette période que j’ai bouclé le cours sur l’Afrique, sujet qui est évidemment tombé… La moitié de la classe n’était pas présente…
 
M.G. - Vont-ils donc tous échouer ?
 
X. - Rassurez-vous, cette année, Mr Darcos (avant de se faire virer) est un grand seigneur puisqu’il a instauré un oral de rattrapage pour ceux qui auraient entre 8/20 de moyenne et 10/20.
La foule s’écrie alors « bravo »… Quelle bonté d’âme…
Cependant attention, cet oral ne ressemble en rien à celui du bac général. En effet, l’élève ne choisit pas une matière où il aurait échoué, mais il doit passer une épreuve où il doit présenter les stages qu’il a effectués au cours de sa scolarité devant une commission composée de deux personnes. Il faudra attribuer une note en fonction de la capacité de l’élève à s’exprimer et des questions techniques pourront lui être posées sur ses stages.
S’il obtient la note de 12/20, il aura, quoi qu’il arrive, son bac.
De plus, les deux examinateurs n’auront accès ni à son livret scolaire ni à aucun autre document concernant l’élève qu’ils ont devant eux… On ne pourra vérifier si l’élève a réellement effectué son stage. Ça laisse franchement rêveur…
 
M.G. - Quel est alors le but de cette mesure ?
 
X. - Si rattraper des élèves méritants est en soi une bonne chose, certains élèves qui n’auront rien fait pendant l’année pourront eux aussi réussir l’examen. Il s’agit d’une dévalorisation complète de l’examen ainsi qu’une décrédibilisation des enseignants. En effet, pourquoi travailler si au bout du compte on peut quand même réussir l’examen ?
Le but du gouvernement est simple : afficher un excellent taux de réussite et atteindre les fameux 80% d’une classe d’âge à obtenir le bac, objectif que s’était donné Jack Lang, ministre de gauche (à l’époque…) dans les années 1980.
 
M.G. - Sommes-nous alors au bord du gouffre ?
 
X. - Très honnêtement, il y a une grande inquiétude dans le milieu enseignant. Les médias ont beaucoup parlé de la reculade de Xavier Darcos concernant sa réforme des lycées (sous-entendu généraux) mais personne ne s’est émus de la réforme des lycées professionnels. Or, dès septembre prochain, les nouveaux arrivants auront un temps de formation qui passera de quatre à trois ans pour obtenir leur bac pro et ce dans des classes plus chargées.
En effet, les effectifs étaient jusque-là limités à 24 dans les lycées industriels, les élèves seront désormais 30 par classe dès septembre prochain. Si ces effectifs sont habituels dans les lycées généraux, nos élèves arrivent du collège souvent en difficulté et ont un comportement nettement plus difficiles. Certes avoir 12 élèves en classe n’est pas une garantie de réussite, mais les petits groupes-classes sont très souvent plus faciles à gérer. Enfin le non redoublement des élèves en collège a des effets pernicieux : les élèves arrivent de plus en plus jeunes. Ils ont parfois 14 ou 15 ans, ce qui n’est pas sans poser de problèmes, à la fois de maturité dans les cours, mais aussi dans les stages. Les professionnels se plaignent déjà du faible niveau des élèves, cela ne va pas s’arranger…
 
M.G. – Merci Xavier…
 
 
Après avoir lu cet article, vous comprendrez alors pourquoi mon marronnier s’avère aussi futile. J’aurai pu vous parler de l’orthographe du mot « opinion » que certains écrivent encore « opignon », de l’emploi du terme « alphabet » au lieu « d’analphabètes » et de quelques autres perles, mais je préfère me reposer car demain je me lève tôt et les vacances ne sont que pour le 10 juillet… Et oui, il doit sans doute s’agir de la reconquête du mois de juillet…
 

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15 réactions à cet article    


  • Sinbuck Sinbuck 2 juillet 2009 12:43

    En effet, les hautes sphères de l’éducation nationale souhaitent que les profs gèrent des flux, des mouvements d’élèves... Pour le reste ils s’en foutent !

    Le barème est plus que généreux : cette année (comme d’habitude) pour les capacités expérimentales des terminales S en physique-chimie, toutes les questions simples (mettre la blouse, pipeter, verser...) étaient créditées d’un ou 2 points et les manipulations difficiles (utilisation d’un spectrophotomètre...) d’un demi-point... Je me demande vraiment à quoi on sert durant l’année ! C’est vraiment nous prendre pour des cons.
    En bio, plus besoin de faire de phrases et d’argumenter, il suffit qu’un mot attendu soit présent pour mettre les points...

    C’est étonnant qu’il n’y a pas eu de réaction face à la réforme des lycées professionnels, et pourtant quel travail... pour les profs qui récupèrent les élèves en échec au collège. Car il ne s’agit pas (la plupart du temps) d’une orientation choisie, mais d’une bifurcation professionnelle imposée.

    C’est ainsi, néanmoins nous faisons (globalement) du bon travail... il faut se rassurer ! Le problème, prend ses racines dans notre forme de représentation, les syndicats sont véritablement des NULS, il faudrait trouver un autre moyen, un autre relais possible entre nous, la base, et les hautes sphères dirigeantes.


    • mimine mimine 2 juillet 2009 17:12

      « ..un autre moyen » ?
      pendaison ? guillotine ?


    • Sinbuck Sinbuck 2 juillet 2009 23:11

      Oui, une forme « d’association indépendante » de profs ayant des idées et des propositions comme moyen d’influences et de concertations. Les « partenaires sociaux » sont des militants politisés, comme des boeufs ils labourent toutes formes d’innovation, de créativité, d’inspiration et surtout d’applications concrètes pour le métier d’enseignant et non je ne sais quelle opposition puérile enracinée dans les « acquis sociaux ».

      D’ailleurs, mes parents étaient profs comme moi, le niveau de vie d’un prof (pouvoir d’achat) est nettement en chute libre depuis une trentaine d’années : disons au moins 30 % en moins ! Et qu’on fait les syndicats pendant ce temps là ? Ils ont réussit à s’imposer comme les seuls partenaires sociaux, en fait ils ont uniquement travailler pour leurs corporations fédérales et nationales.

      La solution est une « association indépendante » de profs qui posent les problèmes et apportent des solutions concrètes. Ensuite un travail d’acceptation et de pression dans les hautes sphères de l’éducation permettra de se faire entendre.


    • Mathias G. La plume et le citoyen 3 juillet 2009 09:55

      En fait, des « collectifs » se sont crées l’année dernière un peu partout en France, rassemblant à la fois des syndicalistes et des non-syndiqués. Les syndiqués ne sont pas des bœufs, mais les syndicats n’ont pas trouvés de moyens efficaces pour se faire entendre, d’où le mécontentement de tous, même des syndiqués. Actuellement il est difficile de se faire entendre puisque, outre la crise, tout le secteur public est prié de faire des économies : hôpitaux, PTT...
      Les syndicats sont indispensables, mais ils doivent évoluer, défiler dans la rue ne sert à rien, c’est un jour de paye (environ 70 euros) en moins...


    • Sinbuck Sinbuck 3 juillet 2009 11:32

      Certes, l’expression bovine était un peu forte (quoi que), et malgré la crise, des discussions et des solutions peuvent être apportées d’un point de vue pédagogique, dans le domaine de l’autorité en classe, pour les programmes... ce n’est pas une question d’argent là.


    • heliogabale boug14 2 juillet 2009 14:13

      J’ai une question stupide : si un sujet comme « la superpuissance américaine depuis la fin de la guerre froide » et que vous faîtes une dissertation à la John Lloyds (que je trouve pertinent) mais pas conforme aux programmes de l’éducation nationale, on se tape une sale note ?

      Et j’ai une autre question il y a trois ou quatre ans environ j’avais trouvé dans un livre d’histoire (pour les premières je crois) une dissertation qui demandait d’exposer les aspects positifs et négatifs de la colonisation...vous trouvez cette question pertinente ?

       Plus généralement, le programme d’histoire dans le secondaire est un amoncellement de dates que l’on associe à des événements tout en omettant souvent les progressions historiques.

      Et puis, finalement le programme est très politisé : l’exemple le plus fameux c’est l’enseignement de Vichy et comment le programme insiste (sans le dire) sur la nécessité de faire passer d’une part la France comme un pays victorieux et d’autre part convaincre les élèves que la France de Vichy n’était pas en réalité la France officielle ou mieux encore compter dans le nombre de juifs vivant en France ceux d’Afrique du nord pour diminuer la proportion de juifs envoyés dans les camps par la police française.

      Je ne vous parle pas de la colonisation (finalement c’était pas si mal...) et de la décolonisation (guerre d’Indochine et d’Algérie) ou de professeurs devant vous enseigner la méditerranée au 12ème siècle et incapable de vous faire la différence entre sunnites et chiites (à part le fameux l"es chiites sont plus méchants et plus durs que les sunnites qu’on fait gober facilement)

      Je ne sais quoi penser de cette matière si intéressante et mal restituée aux élèves (par contrainte de temps en partie)


      • Mathias G. La plume et le citoyen 2 juillet 2009 18:04

        Cher boug14, je vais essayer de parler de ce que je connais. Même si les référentiels peuvent être « orientés » politiquement, le professeur, je crois, n’est pas un gros bœuf chargé d’appliquer bêtement le programme.
        Concernant les nouveaux programmes bac pro 3 ans par exemple en Histoire-Géo, des ajouts politisés ont été faits au référentiel pour que la colonisation soit perçue d’une manière positive. Cependant cette vision politique ne peut rien face à un certain nombre de vérités historique. A charge aux professeurs de modérer ses propos tout en ne faisant pas de négationisme.
        Enfin, en ce qui concerne les bac pro, l’épreuve est essentiellement une étude de documents suivie d’une synthèse. Nous avons les consignes de valoriser toutes les connaissances qu’ont les élèves. Même si une copie est très orientée politiquement, si elle révèle des réelles connaissances, l’élève aura forcément une bonne note...


      • savouret 2 juillet 2009 14:30

        il est vrai que les programmes d’histoire tels qu’ils sont concus donnent aux élèves une vision de l’histoire un peu trop réductrice et qui est trop impregnée d ’ethnocentrisme, car toute l’histoire enseignée est pensée a partir des valeurs du monde occidental.

        ainsi, un élève sortant de terminale possède certes des connaissances accepptables sur l’histoire du monde occidental, en revanche il se caractérise par une profonde méconnaissance de l’histoire des autres civilisations.

         

        comme vous le soulignez, un des principaux problemes dans l’ enseignement de l’histoire réside dans le fait qu’il obéit à des considérations politiques ou idéologiques , ce qui implique la prégnance d’une histoire officielle qui élude trop la complexité du passé.
        sachant que cette discipline peut jouer un role fondamental dans le développement de l’esprit critique des citoyens , il serait préférable de restreindre la somme d ’evenements à mémoriser et en revanche de faire émerger chez les élèves une prise de conscience de la complexité de de l’interprétation du passé.


        • Nobody knows me Nobody knows me 2 juillet 2009 15:23

          Comme j’aurais aimé être plus attentif en cours d’histoire et géographie. Ainsi que dans beaucoup d’autres matières...
          C’est paradoxal d’avoir le plus de potentiel pour apprendre et absorber les connaissances étant jeune et plus de motivation et d’intérêt en vieillissant.
          Je vous rassure, même si le programme n’est pas parfait, nous avons quasiment tous été des bourriques en première/terminale, désintéressés par l’apprentissage.
          Malgré cela je me rappelle de mon prof de terminale qui était vraiment captivant tellement il était passionné et « agité » pendant son cours. Celui-ci n’hésitait d’ailleurs pas à donner son propre avis (de manière très drôle d’ailleurs) au détriment des consignes mais cela rendait son « histoire » tellement plus vivante et crédible !!
          Bonne journée


          • Senatus populusque (Courouve) Courouve 2 juillet 2009 15:50

            « J’aurai pu vous parler de l’orthographe du mot « opinion » que certains écrivent encore « opignon » »

            Internet, à la fois témoin et moteur de l’évolution de notre société, nous livre cette perle relevée dans une copie de terminale : « Nous vivons une époque où chacun a opinion sur rue. »


            • Mathias G. La plume et le citoyen 2 juillet 2009 18:06

              C’est assez mignon je dois dire...


              • Atlantis Atlantis 2 juillet 2009 23:00

                tant qu’on enseignera pas aux élèves que ce n’est pas savoir qui est important, mais de savoir pourquoi il faut le savoir, aucun progrès ne sera jamais fait.

                Les profs se focalisent sur le « comment » alors que la seule et unique question qui a toujours prévalu est « pourquoi ». Et eux aussi feraient bien de se la poser : pourquoi on leur demande de faire ce qu’ils font ?


                • Sinbuck Sinbuck 2 juillet 2009 23:14

                  On leur demande de faire ce qu’ils font car ils ne peuvent pas faire ce qu’ils veulent !


                • Mathias G. La plume et le citoyen 3 juillet 2009 10:08

                  La réponse à ta question est simple : lorsque l’école publique a été rendu obligatoire en 1880 (Jules Ferry), l’instituteur devait faire de ses élèves des bons petits républicains. On appelait ces instituteurs « Les hussards noirs de la République ». Aujourd’hui, des profs se posent encore la question du « pourquoi ». Tous les référentiels parlent de citoyenneté. Les élèves doivent devenir des citoyens à part entière, capable de penser par eux-même.
                  Cet objectif est infiniment difficile à réaliser, mais il est certain qu’un élève qui arrive chez nous à 15 ans n’est pas le même quand il en ressort à19. C’est peut-être une évolution naturelle, mais s’il a appris deux, trois choses qui peuvent lui servir, c’est tout bénéfice.
                  Nous ne sommes pas sous le régime de Vichy, même si je suis le premier à critiquer l’Etat. Il faut arrêter de faire des généralisations. Quand tu dis « Les profs », tu fais une généralisation, quand tu dis « pourquoi ON leur demande », tu fais une généralisation or ce « ON » ce n’est pas forcément « le pouvoir » mais des inspecteurs qui sont chargés de faire le programme. Certains d’entre eux sont aussi déconnectés de la réalité que les politiciens d’autres pas...


                • citoyen 3 juillet 2009 11:58

                  @ nobody knows me

                  moi , j’étais pas une bourrique : cela m’intéressait vraiment bien . Le lycée c’était super , et merci à mes anciens profs : 90 pour cent était super , et je n’en ai eu aucun qui pose vraiment question ;
                  Merci l’école.

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