L’émigration, sujet tabou en France ?
8 milliards d'euros pas an ! C'est le coût de l'émigration, le manque à gagner pour notre économie et nos rentrées fiscales, chaque année en France. C'est en tout cas le point de vue développé et argumenté de l'essayiste Jean-Paul Gourévitch, dans son ouvrage les migrations en France. Universitaire de formation qui a enseigné l'info-communication afin d'évoluer vers la littérature de jeunesse M.Gourévitch a étudié, sans parti pris ni jugement de valeur, les flux migratoires.
Sans surprise, il rappelle que l'immigration, issue majoritairement du tiers-monde pour notre pays, peu diplômée et aux emplois à faible valeur ajoutée, coûterait 30 milliards d'euros par an à la collectivité. Estimation contestée aussi bien par l'extrême-gauche que par l'extrême-droite, dans un sens comme dans l'autre. Mais cela n'a rien de nouveau, ni de surprenant.
En revanche l'étude des migrations de jeunes diplômés, plus intéressante et instructive, peut susciter un débat peu soulevé dans l'hexagone. Un sujet tabou ? On peut le penser, car il est rare que les grands médias l'abordent. Pour faire court, JP Gourévitch considère que depuis vingt ans, et l'avènement d'une mondialisation globale accélérée suite à la chute du communisme et la victoire d'un libéralisme intégral, plus de 250000 français partiraient étudier et travailler à l'étranger chaque année. 170000 reviendraient, on retrouve dans cette catégorie des stagiaires ou des étudiants du programme "erasmus" notamment. Restent 80000 migrants définitifs, qui se sont installés et ont fondé une famille hors de France. Ils travaillent, paient des împôts et produisent de la richesse ailleurs. En l'occurence "ailleurs" c'est aux Etats-unis, au Canada, En Australie ou plus simplement en Allemagne, en Suisse ou au Luxembourg...
Des pays où les jeunes diplômés sont appéciés et correctement rémunérés, où le taux de chômage est à un niveau raisonnable. Nous connaissons tous des proches qui sont partis, et pas prêts de revenir. Ce sont majoritairement des gens à hauts niveaux de qualification, qui manquent forcément au développement de l'hexagone.
80000 migrants sur vingt ans... 80000 fois 20 = 1 600 000 personnes ! 8 milliards fois 20 cela donne 160 milliards d'euros de manque à gagner ! Si ces calculs sont discutables ils ont certainement une large part de réalité...
Au fait, pourquoi émigrer ? Il y a les salaires plus attractifs, certes, mais pas seulement. La question du climat de confiance à l'égard des jeunes se pose aussi. Il y a des pays où on confie des postes à responsabilité aux moins de trente ans. La France n'en fait pas partie, conformisme et surtout frilosité obligent. Notre gérontocratie s'est toujours méfiée des jeunes... il y a ensuite le coût du logement qui a explosé en France, des conditions de vie difficiles dans les grandes villes où la délinquance et les nuisances sont endémiques, et une froideur dans les relations souvent tendues avec le voisin. Travailler en France, où toute conscience collective a disparu, n'est pas une synécure. On rétorquera à juste titre que l'individualisme est au moins autant présent ailleurs, notamment dans les pays anglo-saxons. Mais où le jeune qualifié peut choisir son employeur en situation de plein-emploi.
Triste situation, inédite dans l'histoire contemporaine de notre pays, qui n'a jamais été une terre d'émigration par le passé. Les échecs de la colonisation du Canada puis de l'Algérie en ont témoigné, où d'ailleurs ne s'installaient que des populations pauvres ou déplacées de force. Une révolution culturelle sera à opérer à l'avenir si on ne veut pas que la France ne soit, dans quelques années, qu'une démocratie où quelques vieux rentiers composeront avec une masse de cas sociaux. Bref un pays du tiers-monde. Dire que lors du passage à l'euro on nous avait promis la prospérité... prospérité dont profitent nos partenaires avec nos diplômés !
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