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Accueil du site > Actualités > Société > L’intolérance à la douleur

L’intolérance à la douleur

La société d’aujourd’hui exigeait une certaine insensibilité de la part de ses membres qui ne devait pas afficher la douleur d’une perte, alors qu’autrefois, c’était parfaitement acceptable, voir même traditionnel.

 Ce matin, notre prof de traduction débattait tout seul sur une difficulté d’un texte à traduire, il s’agissait de mourn, deuil, et il a dit que de nos jours, on ne portait plus le deuil comme on le faisait autrefois, que la société d’aujourd’hui exigeait une certaine insensibilité de la part de ses membres qui ne devait pas afficher la douleur d’une perte, alors qu’autrefois, c’était parfaitement acceptable, voir même traditionnel.
 

Aussitôt mon cerveau se mit en branle et je concluai que, d’une manière général, la société n’aime pas les gens qui se sentent mal. Ici bas, tout le monde se doit d’être fort, responsable, indépendant et capable de surmonter ses problèmes ou ils ne valent rien, ce sont des lavettes. Bien sûr il y a la compassion de rigueur que tout le monde prétend avoir, mais elle ne va généralement pas bien loin, c’est rare de faire plus que des mots pour aider quelqu’un, et notre patience en la matière et plus où moins limitée. On finira par en vouloir à la personne quelque soit le degrès de sa douleur : “Elle pourrait pas se bouger le cul aussi !?”, “Toujours à se plaindre celui-là !”, “Arrête de badder putain !”, son mal-être persistant fait que l’attention se concentre sur elle et par sur nous, si bien qu’au bout d’un moment cette personne échoue à nous faire sentir bien alors que c’est le service qu’on essaie de lui rendre, on perd ainsi à la fréquenter, d’où une certaine irritation.

Regarde ce que je me suis fait avec cette putain de collec' de pin's !

Regarde c’que je me suis fait avec cette putain de collec’ de pin’s !

L’avantage, c’est que ça évite à tous les crybaby, aux drama queens hypocondriaques de l’attention et autres dépressifs du dimanche de proliférer. Ces gens qui ont fait de l’apitoiement un art de vivre finiront par faire le vide autour d’eux et seront bien obligés de s’en sortir par eux-mêmes (sauf s’ils rencontrent les complexés du messie dont l’art de vivre est de s’occuper de la vie des autres pour oublier la leur, et paf ! ça formera des grandes communeautés de cafardeux comme doctissimo ou france-jeunes).

Mais l’inconvénient, c’est que cela rend les gens moins sensibles aux vraies formes de douleurs, comme le deuil, les ruptures, la dépression. L’empathie se fait de plus en plus rare, ce qui pousse les gens à cacher leur souffrance et répondre un “ça va” de circonstance lorsqu’on leur pose la fameuse question triviale. La plupart des gens se contentent d’un “ça va”, “cool, elle a dit ça va, à sa gueule détruite je vois bien que ça va pas, mais si elle dit ça va c’est qu’elle gère, que j’ai pas d’effort à faire, je peux parler de moi maintenant, youpi !”. Vu qu’ils n’iront pas plus loin, cela renforcera l’idée d’un dépressif comme quoi les gens se branlent de son problème, que le monde est décidément one cold dead motherfucker et que l’humanité ne mérite vraiment pas d’être sauvée.you-have-failed-please-die

“C’est pas vrai ! Elle s’est suicidée ? Pourtant la dernière fois que je l’ai vu elle a dit que ça allait.” - ou comment s’enlever toute culpabilité morale.

Alors voilà, je suis peut-être un putain de naïf, mais quand je vois quelqu’un pleurer un public, ça me touche particulièrement (sauf une fois où j’ai vu une fille sortir d’un cours en pleurant, j’ai explosé de rire). Je m’efface de toute moquerie ou cynisme car quelque soit la raison de ses larmes, elles expriment une douleur brut et en faire ainsi étalage en public semble briser plus de tabous qu’il n’y paraît.


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7 réactions à cet article    


  • maharadh maharadh 8 mai 2009 15:03

    Je vous en prie,ne me demandez pas si j’ai réussi à le surmonter, je ne le surmonterai jamais.
     
    Je vous en prie,ne me dites pas qu’il est mieux là où il est maintenant, il n’est pas ici auprès de moi.
     
    Je vous en prie,ne me dites pas qu’il ne souffre plus, je n’ai jamais accepté qu’il ait dût souffir.
     
    Je vous en prie,ne me dites pas que vous savez ce que je ressens, à moins que vous ayez aussi perdu un enfant.
     
    Je vous en prie,ne me demandez pas de guérir, le deuil n’est pas une maladie dont on peut se débarasser.
     
    Je vous en prie,ne me dites pas « au moins vous l’avez eu pendant tant de temps ».

    Selon vous, à quel âge votre enfant devrait-il mourir ?
     
    Je vous en prie, ne me dites pas que Dieu n’infliges pas plus que ce que l’homme peut supporter.
     
    Je vous en prie,dites-moi simplement que vous êtes désolés.
     
    Je vous en prie,
     
    dites-moi simplement que vous vous souvenez de mon enfant, si vous vous rappelez de lui.
     
    Je vous en prie,
     
    laissez-moi simplement parler de mon enfant.
     
    Je vous en prie,
     
    mentionnez le nom de mon enfant.
     
    Je vous en prie,
     
    laissez-moi simplement pleurer.
     
    Pour pouvoir parler de la douleur d’un deuil il faut la vivre soi-même, le malheur n’est pas contagieux nos sociétés ont évolués en pratiquant le concept d’encapsuler la mort afin qu’elle ne dérange pas les bonnes consciences.

    http://life-in-the-dead.over-blog.com/


    • Anthony Tabet 9 mai 2009 00:12

      Euh... avant d’apprendre à traduire, vous ne voudriez pas apprendre à écrire français ?

      Par exemple le texte d’accroche « La société d’aujourd’hui exigeait une certaine insensibilité de la part de ses membres qui ne devait pas afficher la douleur d’une perte, alors qu’autrefois, c’était parfaitement acceptable, voir même traditionnel. » écrit en RaZ donne, une fois traduit en français « La société d’aujourd’hui exigerait une certaine insensibilité de la part de ses membres qui ne devraient pas afficher la douleur d’une perte, alors qu’autrefois, c’était parfaitement acceptable, voire traditionnel ».

      Remarques :
      Quand on cite un discours à la forme indirecte (il a dit que la société exigeait) on le met au conditionnel.
      Les membres de la société sont plusieurs (et même nombreux) donc on utilise un pluriel
      Voire même est un pléonasme (et l’expression n’a rien à voir avec le verbe voir...)

      Une fois traduite en français au moins grammaticalement correct, la phrase ne veut toujours rien dire (« acceptable, voire traditionnel », est une formulation parfaitement ridicule, en quoi le fait d’être traditionnel renforce-t-il le fait d’être acceptable ? Je propose dans le même ordre d’idée « rouge, voire odorant).

      Pas le courage de lire au delà du 2ème paragraphe (j’ai soupiré au »plus où moins« - se tromper sur le ou/où dans une expression toute faite ça me dépasse - et j’ai craqué au »quelque« au lieu de »quel que« suivi du néologisme degrès - même pas correct phonétiquement, on a un mot sans aucun piège »degré comme ça se prononce" et vous le massacrez).
      Sincèrement, je ne fais jamais de remarque sur la forme, mais là, vous devriez vraiment, vraiment, acheter un Bescherelle et vous poser des questions, je vous assure que c’est un immense service que vous vous rendriez à vous-même...



      • iomej 9 mai 2009 09:39

        @ Anthony Tabet
        On peut être intelligent, capable de compassion, sans être nécessairement agrégé de grammaire ou normalien.
        Personnellement, je trouve ce papier intéressant. On escamote de plus en plus la souffrance d’autrui et la sienne propre, pour ne pas paraître indécent.


      • RaZ RaZ 9 mai 2009 17:52

        Fautes de frappe pour la plupart, je reconnais n’avoir pas relu le texte en profondeur.

        En revanche, je serais en désaccord sur « acceptable, voir traditionnel », quelque chose de traditionnel, c’est à dire une « Façon de faire, de penser, héritée du passé, dans un groupe social ou professionnel. » (merci le TLF) est généralement mieux acceptée dans ce groupe social ou professionnel, justement.

        Je me réjouis de ce genre de commentaires car ils me permettent d’améliorer mon français (20 ans et des progrès à faire, je ne le nie pas), en revanche la motivation qui pousse les gens à les faire me paraît toujours aussi cryptique.

      • soi 9 mai 2009 03:43

        J’apprécie la sensibilité de cet article et suis assez d’accord sur la vision d’une société qui se voudrait comme anesthesiée vis à vis de la douleur humaine.


        • Halman Halman 9 mai 2009 10:51

          Raz, vous décrivez une réalité que certains ne veulent pas voir mais qui est bien forte.

          Les gens ont beau savoir que vous avez eu infarctus+dépression+diabète, ils vous voient au travail même si c’est à mi temps thérapeutique, même si pour faire un dixième du travail que vous faisiez avant il vous faut 3 jours pour vous en remettre, ils vous disent « oh mais t’es guéri alors ! »

          Alors qu’on est bourré de médicaments, que les effets secondaires à vie font souffrir et épuisent pour le moindre geste, qu’on se prépare longtemps à l’avance avec vitamines, jus de fruits, litres de thé pour se remettre un peu en forme rien que pour aller changer un clavier de l’autre côté de l’hôpital, que même pour changer un loggin on se pose sur une chaise épuisé pour reprendre un peu de forces pendant une minute.

          Mais les gens vous voient relativement en forme un quart d’heure de temps en temps et concluent que vous allez bien alors que vous êtes perclus de douleurs et que chaque pas vous coûte et vous épuise.

          Et quand on leur explique nos problèmes on se prend des « oh mais dis nous quelque chose de gai des fois ! »

          Alors on se tait, on souffre en silence et c’est la boucle. On ne dit rien alors les gens pensent qu’on va bien.

          Et un jour on s’écroule.

          Et ils sont étonnés « ah mais tout à l’heure il m’a fait rigoler ».

          Quant aux mi temps thérapeutiques, aux congés longue maladie cela n’est pas éternel. Vous n’y avez droit qu’à un certain temps. Et il faut bien reprendre le travail. Et les collègues et les drh ont la comprenette difficile à l’épuisement et à la souffrance. On se crève à remettre quelque chose en place, à refaire une base de données monstrueuse, des documents inexistants, un service en place mais non on se prend des « cool Raoul devant votre ordi M. H..... » par une jeune drh de 30 ans qui sort à peine de l’école.

          Alors on ne s’étonne plus que 3 collègues par an se suicident aux médicaments.

          Et on ne vous apprécie, on ne vous sourit, on ne vous parle, on ne vous convoque en réunions que lorsque vous avez fourni un boulot de dingue. Et quand vous êtes épuisé à vômir et que vous prennez des jours, on ne vous parle plus, on entend des « mais y’en a marre de ce service d’handicapés ».

          Et il faut refaire ce travail épuisant non seulement de se reconstituer soi même et de reprendrer ses marques avec les collègues et avec le travail, mais en plus attention avec le sourire ! Surtout ne pas avoir l’air fatigué, ne pas faire la tête même si vous vous tenez au mur même pour aller manger !

          Et ils ne comprennent plus qu’on ai des moments de dépressions parce qu’on ne supporte pas d’être devenu l’ombre de soi même, on entend des « il est encore en train de chialer ».

          Et on leur balance des « faites bien attention à votre santé ! C’est facile quand on va bien ! »

          Et on se retrouve mis dans le panier des antipathiques.

          Seul et unique moyen de s’en sortir : se défoncer au boulot. Même si on est malade à en vômir, alors là on vous reconsidère. Là seulement.

          Et quand la réglementation le permet, ils ne comprennent pas qu’on se barre vivre avec les petits droits de handicapés. On se prend des « vous voyez bien qu’il attendait que ça de rien foutre, de se barrer avec son argent ! »

          Alors que le moindre effort pour déplacer un écran ou une imprimante vous donne mal à la poitrine pour 3 jours.

          Malgré qu’on leur explique tous les détails de votre souffrance 20 fois par jours.

          Alors on comprend pour la 100000 fois que tant qu’ils ne sont pas malades eux mêmes ils ne peuvent pas comprendre, que c’est dans la nature humaine de ne pas comprendre tant qu’on y est pas confronté soi même.

          Les gens ne veulent voir que ce qui va bien, et se bouchent les yeux à la moindre souffrance de l’autre.

          Il y a beau avoir des ergonomes et un médecin du travail, rien que pour commander un logiciel et un clavier pour mal voyant, c’est le parcours du combattant qui dure des mois, voire des années. Il faut en passer par des associations spécialisées, des réunions dont la drh se fout royalement, expliquer aux collègues que leur voisine de bureau doit prendre telles genres de précautions et que non ce n’est pas une emm***se qui a ses manies et ses petites habitudes.

          Alors que tout ceci devrait être tellement naturel.


          • Halman Halman 9 mai 2009 11:07

            J’oubliais la famille.

            On est trop crevé pour sortir, pour aller les voir.

            Quand on nous invite on doit se planquer pour prendre ses médicaments, se faire sa petite piqure de glycémie, sa piqure d’insuline, parce que ça fait malade, ça fait dépressif, ça impressionne, ça gâche l’ambiance et pas devant les enfants non plus.

            Et on ne vous invite plus parce que vous ne rigolez plus comme avant parce que vous restez dans votre coin, trop crevé pour dire quoi que ce soit.

            Et le lien se brise.

            Et on entend plus parler d’eux.

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