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Accueil du site > Actualités > Société > La solidarité n’est qu’affaire de lucidité et de discipline (...)

La solidarité n’est qu’affaire de lucidité et de discipline sociales

 L’idée d’une civilisation planétaire cohérente – à défaut de fraternelle – ne sera donc jamais qu’une vue de l’esprit. Même si d’aucuns veulent encore croire que les conséquences logiques de la crise actuelle sonnent le glas de l’ère prédatrice de l’économie mondiale, le caractère intrinsèque des conflits d’intérêts qui, depuis la nuit des temps, jalonnent l’histoire des sociétés animales de disettes et d’affrontements meurtriers n’est, une fois de plus, que trop souligné. Non seulement le vivant cognitif n’échappe pas à ce tropisme, mais rien n’indique qu’il soit un jour capable de juguler son puissant instinct d’appropriation au nom d’une idée supérieure de l’Humanité. N’en déplaise aux disciples de Vernadski, l’entendement humain s’accommode parfaitement d’une mentalité primaire de l’homo sapiens, immuable depuis l’origine de sa socialisation.

N’est-il pas surprenant d’observer que toutes les doctrines projetant une mutation profonde de la société ont jusqu’ici considéré la cupidité naturelle des hommes comme une donnée intangible du problème à résoudre ? Du collectivisme implacable au protectionnisme plus ou moins larvé, en passant par le régime fiscal spoliateur, toutes ont invariablement procédé de la même coercition de l’individu : une « nécessaire » contrainte destinée à dépasser ses instincts primitifs et à tenter de l’élever, malgré lui, au rang d’artisan d’un phalanstère pétri d’entraide et gouverné par les plus hautes valeurs spirituelles ou morales.

Ces derniers temps, un mouvement partisan, en campagne électorale permanente, semble manifester la velléité de s’affranchir d’une telle ornière méthodologique : l’écologisme. Hélas, une fois encore, en dépit des apparences, l’idéologie à la mode appelle davantage les décideurs à sévir que la conscience collective à s’interroger sur ce qui est prioritairement en jeu dans cet avenir planétaire menaçant dont on se repait de la noirceur, et, surtout, à tirer du diagnostic les conclusions autodisciplinaires qui s’imposent. Chacun, en effet, sent plus ou moins confusément que le salut communautaire repose désormais sur des responsabilités individuelles, mises massivement et concrètement dans la balance de l’intérêt collectif.

Le 5 juin 2009, Yann Arthus Bertrand nous a gratifié d’un épisode de la campagne électorale en cours, qui ne dit pas son nom, inédit en ce que son écho fut planétaire. Fallait-il cette heure et demi d’images sublimes, auxquelles le génial photographe nous a habitué, pour amener l’affirmation toute triviale que les Hommes sont trop nombreux sur Terre – et le seront de plus en plus –, qu’ils ont globalement des appétits démesurés ? L’écologiste, journaliste reporter à succès, n’ignore certainement pas que pareilles images sont capables de faire passer n’importe quel message. Aussi, la conscience d’une éthique et d’une déontologie professionnelles auraient-elles dû y être plus présentes que dans l’expression médiatique de n’importe lequel de ses confrères. Or, Yann Arthus Bertrand n’a pas craint de s’y livrer à un abus de confiance caractérisé : celui de prétendre implicitement qu’il a les compétences techniques et scientifiques l’autorisant à suggérer que La solution énergétique universelle d’avenir passe par le recours massif aux électricités éolienne et photovoltaïque...

En définitive, quel message s’emploie-t-il à nous adresser ? Devons-nous sauver, coûte que coûte, une abstraction idéalisée, aux exigences esthético-affectives souveraines et figées dans l’inconscient collectif, appelée planète Terre ? Ou ne devons-nous pas plutôt sauver l’idée généreuse d’une solidarité humaine vraisemblable, sinon l’existence physique de l’espèce ? N’y a-t-il pas, tout à la fois, une incroyable présomption et une confusion des intentions émotionnelles sous-jacentes à prétendre que les hommes sont capables de détruire la planète ? On s’empresse de rassurer Yann Arthus Bertrand et ses coreligionnaires : il ne fait pas l’ombre d’un doute que notre Terre et toutes les créatures qui la peuple se remettraient facilement et rapidement des stigmates causés par la métastase humaine dont la disparition partielle ou totale n’affecterait guère la marche du monde.

En tout état de cause, aucune superproduction cinématographique – fût-elle constellée des plus alarmantes observations statistiques – n’est aujourd’hui en mesure de répondre à la seule question s’imposant avec prégnance : jusqu’où les Hommes peuvent-ils aller, sans s’entre-déchirer, dans l’automodération économique et, surtout, démographique pour tenter de réduire les atteintes à la biodiversité et la dénaturation des sols et des océans, corollaires inéluctables du processus de civilisation ? De même qu’à la question subsidiaire : à quels niveaux de dégradations – considérés proches des niveaux de dégradations naturels – peuvent-ils considérer que leur sobriété ne s’imposerait plus ou s’imposerait moins ? Nos nouveaux prophètes n’iront quand même pas jusqu’à affirmer qu’en l’absence du genre humain la biodiversité demeurerait inaltérée !

Au risque de choquer, il semble donc bien que l’Homme soit condamné à une fuite en avant civilisatrice, perpétuelle et contrôlée, mais une fuite en avant tout de même. Il sait son règne limité et, lucide, se voit comme ce lierre n’ayant d’autre choix que coloniser le chêne puissant, jusqu’à l’étouffer et, tôt ou tard, ne pas survivre à sa disparition. C’est en vertu de cet implacable ordre des choses que tout individu est légitimement fondé à donner une priorité absolue à l’optimisation de sa communauté de destin. Même s’il ne perd pas de vue des préoccupations métaphysiques qui l’on toujours aidé à vivre, celles-ci ne seront jamais en mesure d’influencer sa condition et celle de ses enfants autant que les vicissitudes sociales contemporaines.

Le contexte économique actuel incite plus que jamais cet individu – généralement citoyen – à considérer que la garantie d’un niveau de vie élémentaire ne peut désormais plus reposer que sur la capacité des ressortissants nationaux à veiller eux-mêmes sur leur intérêt collectif, quitte à composer avec les préceptes politiques et les règles du jeu économique en vigueur, quels qu’ils soient.

Ainsi, du choix sélectif des comportements grégaires à celui des biens de consommation, une intelligence sociale inédite pourrait-elle mettre rapidement à jour le vrai périmètre d’un humanisme débarrassé de l’hypocrisie et de la démagogie du discours théologique. Ce faisant, elle ne tarderait pas à révéler que la solidarité universelle est un leurre idéologique auquel la conscience ordinaire du concept caritatif a toujours été indifférente. Tôt ou tard, elle finira bien par décomplexer ceux qui qualifient de funeste irresponsabilité le fait d’en appeler à la conscience de citoyen du Monde pour structurer une vie nationale.

Ceux que cette problématique sociétale passionne découvriront un type de mutation sociale, susceptible de secouer la société plus tôt qu’on ne le pense, en se procurant l’ouvrage auquel le présent article emprunte le titre, publié aux éditions Edilivre-Aparis (http://www.edilivre.com/doc/12002). Ils y trouveront également la relation d’une trahison caractérisée de l’intérêt général : le sabordage, en 1997, du surgénérateur Superphénix, victime sacrificielle (et écologique !) de la conquête du pouvoir. Fidèle à la vérité établie des faits, cette relation décline l’identité réelle des protagonistes.

André PELLEN


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2 réactions à cet article    


  • faxtronic faxtronic 8 juin 2009 16:34

    C est vrai que toute societe est basee sur la coercition, pour plusieurs raisons :

    L etablissement naturelle d une hierarchie sociale par la naissance, car on prefere ses propres enfants aux autres enfants. Si tu a un enfant, et que l on propose de tuer soit ton enfant, soit un enfant a 1000 km, tu n hesiteras pas. Dans la meme logique le parent avec le pouvoir confiera ce pouvoir a son fils. Et ainsi de suite

    La limitation des ressources. Les ressources et leurs productions sont limites, donc conflit pour la survie ou pour le confort. Cela se couple avec le point precedent.

    La valeur de ta propre vie est infiniment superieur a la valeur de la vie de ton voisin.

    Enfin l insatiabilite. Un etat stable est un etat mort, on cherche toujours a evoluer, a progresser, meme au depends d autrui.

    De surcroit nous ne pouvons pas vivre seul, donc oblige d etre accompagne.

    Cela implique qu il a eternellement competition entre les hommes, et les lois t empechent de tuer ton voisin, lui piquer ses legumes ou son argent, ou ses enfants, etc...


    • paul muadhib 8 juin 2009 18:32

      Interessant, salut a l auteur..
      une civilisation coherente a defaut de fraternelle..... ? une vue de l esprit ?
      de quel esprit parlons nous, y a t il un esprit point barre ?, si oui la continuite du malheur est programmee car cet esprit s exprime toujours dans le meme sens..predateur gagnant..sauf si le perdant eternel ne se transforme en predateur, mais ainsi il change de camps.
      je m interesse depuis quelques temps a l ego que j appelle faute de mieux le cerveau analytique qui fonctionne dans mon hypothese comme une unitee centrale d ordi , le cerveau analytique/ego s etant en fait « reproduit », une machine reproduisant une machine..l ego/cerveau analytique est la source de toute pensee,actions humaine..que fait cet ego , il entrepose des experiences personnelles , les observe et analyse une fois stockees et cet ego projette ainsi une conclusion quelconque basee sur oui/non,rejet ou pas...ainsi dans les domaines pratiques de la matiere, des techniques c est un outil qui nous permets la survie du corps par l accumulation de connaissances et d application, jusqu a la ca va, l equivalent de la capacite de l oiseau a survivre et faire son nid douillet, en plus complexe evidemment . Cerveau analytique/ego..pourquoi je parle d ego, enlevez la memoire que reste t il de la personnalite ? quasiment rien , l ego se situe dans le cerveau analytique ..j insiste car de cet ego vient tout le probleme de l humain , les problemes plutot tellement ils sont nombreux..cet ego fonctionne sur sa memoire qui , etant tout ce qu il connait devient un absolu , chaque ego est un absolu limite a son experience, et donc rejette tout ce qui n est pas lui, ou accapare tout ce qui lui sert , ma femme ,mon mari ,ma voiture, mon partie, ma nationalite,ma religion et pour finir le + interessant : mon cul ! En utilisant cette fonction/ego /analyse du cerveau on est ainsi tous separes par des opinions , meme opinions=j aime parce que c est moi , opinions differentes =j aime pas je rejette, dans les deux cas l opinion empeche le contact direct, on voit l opinion pas la personne.
      Le monde va mal certains sont contents, d autres projettent des idees pour changer cela..
      et l on fait confiance une fois de plus a cet ego source de tous les problemes pour resoudre les problemes et que fait l ego , ? il augmente les problemes , car n en resolvant aucun, sauf problemes techniques, il rajoute des problemes aux problemes et l humain se retrouve totalement perdu , ne comprenant absolument rien a ce qui se passe , et comme ca le depasse il se depeche de projeter de projeter ....d autres reves , et rien ne change jamais car l on ne regarde pas l origine du probleme c est a dire le cerveau et son fonctionnement et faute de s engager dans cette voix qui est la connaissance de soi, nous pouvons continuer a esperer c est tout ce qu il reste , mais l illusion sera a nouveau au rdv et tout recommence ainsi de generations en generations..
      putain c est dur !!

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