• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Actualités > Technologies > Laissez-vous search-profiler

Laissez-vous search-profiler

Après avoir mis en base de données l’information du web et commencé à intégrer les bases de données offline, les moteurs de recherche stockent désormais des volumes d’information sur les individus relativement importants, peut-être pour une exploitation commerciale ou politique.

Les outils de recherche sont perçus par le grand public mais aussi par la plupart des professionnels comme des portes d’accès à l’information à sens unique : c’est le moteur qui donne l’information à l’utilisateur.

99 % des utilisateurs ignorent ou préfèrent ignorer qu’ils sont eux-mêmes une source d’information très précieuse pour le moteur qui enregistre l’ensemble de leurs requêtes : le moteur de recherche est ainsi devenu, à la fois, un outil d’étude de recherche de marché, un observatoire des opinions politiques, un centre de veille technologique/marketing sur les entreprises, un outil d’observation des habitudes de consommation de chaque internaute.

Google, AOL, Yahoo et les autres moteurs de recherche enregistrent, en toute discrétion, les profils politiques, sociétaux, personnels et de consommation de chaque individu.

Il est probable qu’à l’instar des sociétés de marketing comme Consodata, qui ont constitué dans les années 1990 des "mégabases" de données sur les comportements d’achats des consommateurs, créé des techniques d’analyses associées et commercialisées ces données aux industriels, les moteurs de recherches aient intégré dans la prochaine partie de leur business plan, la commercialisation de données sensibles sur les individus.

Pour le grand public qui n’a pas vraiment d’idée précise sur ce que stockent les moteurs de recherche, les conséquences de l’existence de ces bases de données restent floues. En outre, la science de l’analyse de l’historique des recherches des internautes n’ayant pas de nom, le sujet reste encore largement virtuel.

Donnons-lui donc un nom : le search profiling, en référence aux profileurs qui recomposent la personnalité des tueurs en série à partir d’indices en apparence anondins.

Dans notre cas, les indices pas infimes, ce sont les recherches de chaque internaute.

Afin de démontrer ce que l’on peut faire de ces données, j’ai lancé une étude fin 2006, afin de mettre en évidence trois enjeux du search profiling dans trois domaines

  • exploitation des données marketing personnelles par les entreprises ;

  • protection des opinions politiques et religieuses, telles qu’elles sont observées par les moteurs de recherche ;

  • droit d’accès aux données personnelles observées et conservées par les moteurs de recherche.

A travers les profils de recherche de cinq utilisateurs d’AOL basés sur leurs recherches entre mars et juin 2006, mes travaux rendent compte des analyses de bases qui peuvent être menées sur n’importe quel individu et posent les bases d’une nouvelle discipline du webmarketing : le search profiling.

Premier enseignement, les internautes n’ont aucun complexe lorsqu’ils réalisent des recherches dans les moteurs, protégés par un anonymat qu’ils croient total. Ainsi le premier profil analysé recherche tantôt une femme chrétienne, tant des photos associées aux pires perversions.

Second enseignement, ce sont les centres d’intérêts dominants qui transparaissent à travers les historiques de recherche : les profils de recherche de femmes et d’hommes, par exemple, divergent totalement.

Troisième enseignement enfin, avec un peu d’entrainement, il est possible, dans certains cas, d’identifier une personne précise à partir de son historique de recherche. C’est d’ailleurs ce qui est arrivé, en août 2006 (date de la publication de la base de mots clés d’AOL) à une pauvre sexagénaire américaine dont le chien avait des problèmes d’incontinence et qui cherchait désespérement à rencontrer un homme sur internet. Des search profilers sont parvenus en analysant de façon fine ses mots clés, à resserrer les mailles du filet jusqu’à remonter jusqu’à sa personne. Le search profiling peut donc parfois être d’une efficacité impressionnante.

On imagine facilement l’exploitation que pourront faire de ce type d’information les professionnels du marketing, la police ou même les gouvernements de certains Etats peu démocratiques....

Pour encourager une prise de conscience de ce qui se cache derrière le search profiling, nous avons mis en ligne cinq profils de recherche sur http://www.searchprofiling.com et lançons un concours d’analyse de profils de recherche.

Pour aider l’internaute lambda comme le professionnel à classer un historique de recherche, nous avons dressé une typologie des informations que l’on peut trouver dans un historique.

Le profil personnel

Il regroupe l’ensembles des informations connexes à la sphère privée :

  • loisirs (sports, culture, arts, passe temps, voyages...),

  • habitudes quotidienne (trajet),

  • réseaux privés (famille, relations, amis, couple...,)

  • centres d’intérêts,

  • évenements exceptionnels (vols, accident),

  • santé (maladie, traitements médicaux, opération...),

  • données citoyennes (domicile, impôts),

  • actes délictueux éventuels,

  • études et formation,

  • sphère intimes (recherche de partenaires, divertissements en ligne...).

Le profil de consommation

Il consiste dans l’ensemble des requêtes qui permettent d’analyser la consommation de produits et de services d’un individu :

  • type de produits recherchés,

  • suivi du cycle d’achat d’un produit en particulier (identification, recherche de fournisseur, évaluation, achat du produit en ligne ou hors ligne),

  • fidélité ou intérêt pour les marques,

  • prescripteurs privilégiés.

Le profil sociétal

Il permet d’observer et d’analyser trois groupes d’information :

Le profil politique : candidats ou partis politiques de prédilection, recherche sur l’actualité politique, intégration à des réseaux (partis, syndicats, communautés en ligne, association à but non lucratif, lobbying...)

  • le profil civique : c’est tout ce qui reflète la participation à la vie publique (dons ou participation à des associations caritatives, vie de quartier...)

  • le profil religieux et philosophique : confession, pratiques religieuses, lieux de culte fréquentés, parareligieux (philosophie, ésotérisme, sectes).

Le profil professionnel

Il permet d’analyser les activités professionnelles dans le cadre de l’activité courante de l’individu mais d’anticiper ses réorientations éventuelles (formation, changement d’emploi...).

  • veille marketing, technologique, concurrentielle et environnementale (fournisseurs, client, réglementation...),

  • réseaux professionnels,

  • formation : permanente, continue, cours, diplômes, recherche d’établissements,

  • recherche d’emploi,

  • centres d’intérêts professionnels périphériques.


Moyenne des avis sur cet article :  4.73/5   (15 votes)




Réagissez à l'article

8 réactions à cet article    


  • aurelien 13 juin 2007 10:53

    "N’hésitez pas à exercer vos droits ! La meilleure protection de votre liberté commence par là : exigez l’information préalable en manifestant votre mécontentement si un organisme prétend vous ficher sans vous informer de l’utilisation qui sera faite des données collectées, ou, par exemple, sans vous laisser la possibilité de vous opposer à une cession ultérieure de ces données. Si vous souhaitez ne plus être importuné, exercez votre droit d’accès, votre droit de rectification et votre droit d’opposition auprès de ces organismes.

    Votre vie privée, si vous vous en fichez, vous en serez privé !"

    (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (2003))

    A visiter :


    • aurelien 13 juin 2007 10:56

      Pour lire le texte et signer la pétition contre la rétention des données personnelles :


    • aurelien 13 juin 2007 10:57

      pour signer c’est un peu tard...


    • jako jako 13 juin 2007 14:29

      bonjour j’ai essayé votre site c’est impressionnant merci de l’info (he oui une base ce données cela marche dans les deux sens)


      • Avatar 13 juin 2007 17:00

        "Un psychothérapeute canadien qui a écrit un article sur le LSD dans lequel il reconnaît en avoir consommé dans les années soixante s’est vu interdire l’entrée aux États-Unis.

        L’incident rapporté par le New York Times a eu lieu l’an dernier alors qu’Andrew Feldmar franchissait la frontière entre les deux villes jumelles que sont Vancouver et Seattle. Un inspecteur de l’immigration a tapé son nom sur un moteur de recherche qui a fait apparaître l’article en question.

        Il lui a demandé s’il en était bien l’auteur et s’il avait bien consommé du LSD. Devant sa double réponse affirmative, il lui a interdit l’accès du territoire américain sur lequel vivent ses deux enfants.

        Conclusion de Feldmar : “Je dois vous prévenir que les traces électroniques que vous laissez sur le net seront utilisées contre vous. Elles ne peuvent pas être effacées”."

        http://pisani.blog.lemonde.fr/category/risques/

        http://select.nytimes.com/gst/tsc.html?URI=http://select.nytimes.com/2007/05/14/us/14bar.html&OQ=_rQ3D1&OP=309fd600Q2FU,PQ7CUCY5jjCUIggEUg7UQ51Q3CUFYUQ51Q3CQ7Cb5Q7B(CJm


      • IP115 13 juin 2007 20:04

        Excellent article Raphaël,

        Qui contrebalance l’angélisme de ceux qui ensensent le « gratuit » offerts par ces grands humanistes de la recherche ...

        Certes les moteurs de recherche profilent de plus en plus les utilisateurs, mais ils n’ont plus besoin de les identifier car de plus en plus les internautes le font d’eux même ... le piège se situent justement dans ces fameux logiciels « gratuits » offerts gracieusement par ces « philantropiques » société du net (le principe est le même que tous ces logiciels gratuit bourrés de spyware) ...

        Jusqu’à maintenant il y avait les outils de communications : yahoo mail, messenger, gmail, gtalk and co (pour ceux qui ne connaissent pas, les robots adwords qui parcourent vos mails pour y insérer de la pub remontent beaucoup d’infos personnelles et contribuent à enrichir votre profil parfaitement identifié puisque vous vous êtes connecté vous même pour y accéder) ... puis il y a eu les outils (toujours « gratuits ») dits collaboratifs online (où ils pouvaient facilement récuperer de l’info sur votre profil professionnel) et maintenant vous avez les outils offline (enfin pas si offline que ça) ... smiley

        Tout cela contribuant à offrir des services de pub contextuelle de plus en plus performants et ciblés. pub qui ne l’oublions pas représentent 99,9% des revenus de boite comme Yahoo et Google (c’est un peu plus compliqué pour Microsoft) ... bienvenue dans le monde du GRATUIT !


        • Dominique Dutilloy Dominique Dutilloy 18 juin 2007 11:29

          « Laissez-vous search-profiler », nous suggérez-vous dans le titre de votre article... Puis, en vous lisant, vous nous parlez de « search-profiling » ! Que de mots barbares non francophones...

          raphaelric, j’aurais aimé savoir pourquoi n’avez-vous pas essayé d’employer un terme résolument français au lieu de nous parler de « sarch-profiler » ou de search-profiling" ?

          Pitié pour les francophones que nous sommes : on en a assez de l’intrusion de mots anglais dans notre si belle Langue de Molière, qui, grâce à son vocabulaire étendu, est très riche...

          Même, si tout comme moi, il y en a, parmi des Francophones, qui parlent, lisent et écrivent parfaitement la langue anglaise, il y a de quoi se demander quelle est la signification de ces termes que vous employez dans votre profession !!!!

          Ne pourriez-vous pas être plus simples pour les simples lecteurs -même journalistes- que nous sommes ?

          De grâce, merci de nous traduire : « search-profiler » et « search-profiling »....

          D’avance, merci !


          • Dominique Dutilloy Dominique Dutilloy 18 juin 2007 11:32

            raphaelic, nos articles qui sont repris par Google, Yahoo ou un autre moteur de recherche, sont-ils protégés par d’éventuels droits d’auteur ?

            Par ailleurs, comment protéger efficacement ses données lorsqu’elles apparaissent sur ces moteurs de recherche ?

            N’aurait-il pas fallu une législation pour interdire l’inscription de certaines données (à définir) sur ces moteurs de recherche ?

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès