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Accueil du site > Actualités > Technologies > Les virus deviennent géants mais sont-ils pour autant vivants (...)

Les virus deviennent géants mais sont-ils pour autant vivants ?

L’étude des virus permet de comprendre le vivant mais aussi de tracer des questions sur ce que nous ignorons de la vie car plus les données s’accumulent et moins le schéma devient clair, notamment avec la découverte il y a dix d’un virus géant baptisé mimivirus pour signifier qu’il imite les microbes, non pas dans son mode d’existence mais par sa taille microscopique et la dimension de son génome. 1.18 million de bases ADN et mille gènes, plus que chez certaines bactéries. Le mimivirus infecte une espèce très étudiée d’amibes, l’acanthamobea. Par la suite, d’autres virus géants ont été découverts, le record établi étant accordé au megavirus chilensis (1.26 Mb) isolé au Chili et lui aussi infectant les amibes. Autre curiosité, le mamavirus, un peu plus petit que les précédents, isolé dans une tour réfrigérante à Paris et dont la particularité est d’être lui-même injecté par le virus sputnik, une première dans la taxinomie virale. Mais la logique est respectée. Le propre d’un virus étant de se reproduire en utilisant un organisme hôte qui peut être un organisme pluricellulaire, animal ou plante, une simple cellule, eucaryote comme l’amibe ou procaryote dans le cas des bactériophages si nombreux dans votre estomac alors, dernière étape, le virophage qui se sert des mécanismes d’un hôte lui-même virus.

Parmi les caractéristiques de ces virus géants, on note la présence de gènes inédits qu’on ne retrouve pas chez les autres virus de taille plus « normale » comme la grippe, la polio et toute la liste de ces virus bien connus depuis des décennies, souvent parce qu’ils sont pathogènes. Ces découvertes ont renforcé la conviction des biologistes persuadés que les virus constituent un quatrième règnes du vivant, à côté des bactéries, des archaea et des eucaryotes. Mieux encore, les virus géants appartiendraient à un sous-règne. La question est en suspens. La présence de l’enveloppe virale, la capside, étant un caractère lui aussi important, essentiel au vivant qui se doit d’avoir une interface, une frontière qui le relie tout en le séparant du milieu. Néanmoins les virus ne disposent pas du dispositif de contrôle de l’énergie, notamment les enzymes responsables des réactions électroniques et celles métabolisant l’ATP. Dans une certaine mesure, les virus ne seraient que des structures portant des informations et capables de les reproduire, voire les partager avec les cellules hôtes qui sont indispensables aux virus. Et peut-être que les virus eux aussi sont indispensables à la vie. Mais cette hypothèse est plus difficile à entendre.

Les records étant fait pour tomber, cet été 2013, une équipe marseillaise, la même qui découvrit le mimivirus, a publié une note retentissante sur la découverte de deux autres virus géants, hôtes de l’amibe et dont la particularité est de ne pas disposer de gènes permettant de produire les habituelles protéines de capside qu’on trouve sur les virus, d’où une absence de forme géométrique et l’apparence d’une bactérie entourée de sa membrane (N. Philippe et al. Science, 341, 281-286). D’autres protéines habituelles des virus ne figurent pas chez ces virus géants baptisés pandoravirus, l’un détecté en Australie et l’autre en au Chili. Avec comme taille génomique, 1.91 pour « P. dulcis » et 2.49 Mb pour « P. salinus », ce qui est considérable. Ces deux virus ont des séquences alignées, excepté quatre large zones chez le plus grand, ce qui laisse entendre que le plus petit serait un sous-produit du premier. Reste à comprendre comment de telles similarités peuvent se produire à des distances dépassant dix milles de kilomètres alors que les amibes n’ont rien d’oiseaux migrateurs.

Les chercheurs de cette étude menée sous la direction de Chantal Abergel et Jean-Michel Claverie se sont ensuite focalisés sur l’étude de P. salinus. Ils ont repéré des caractères inattendus. Pas moins de 2500 protéines sont codées sur le génome. La comparaison avec les bases de données indique que seulement 400 des séquences codantes seraient communes avec des gènes répertoriés dont 43 viraux, 58 bactériens et 300 eucaryotes. D’où deux enseignements, d’abord le nombre important de gènes inédits spécifiques à ce virus et qu’on ne trouve pas ailleurs, ensuite le « matching » qui indique une préférence pour des similitudes avec le règne eucaryote, ce qui laisse penser à d’intenses échanges avec les cellules hôtes. Les analyses phylogénétiques menées sur trois protéines « universelles », tryptophane et tyrosine ligase puis DNA polymérase, confirment une proximité phylogénique de ces pandoravirus avec le règne eucaryote. On peut être certain que la liste des virus n’est pas prête de s’achever. Mais il faut aller les chercher et un virus ne se repère pas aussi facilement qu’une nouvelle espèce de grenouille.

Ces remarquables travaux complètent le savoir sur les virus et ne peuvent que contribuer à nous demander si un virus est du côté de la frontière séparant le vivant de l’inorganique ou de l’autre côté ? J’aurais tendance à dire, ni l’un ni l’autre. Il est évident que l’on se situe bien au-delà de l’inorganique, ne serait-ce que par la complexité du virus et de son organisation. Mais il manque un élément essentiel pour en faire des systèmes vivants, c’est la capacité à métaboliser et produire de l’énergie pouvant être utilisée par les composants. Ces organismes complexes en sont incapables, dépourvus qu’ils sont des gènes et protéines permettant la circulation des énergies et des potentiels d’énergie libre sans lesquels il ne peut pas y avoir une autonomie opératoire (qui permet notamment aux premières cellules de se déplacer grâce à des cils et de se répliquer entièrement). En admettant que le schéma de G. Auletta soit pertinent, on retrouve dans le virus deux des éléments fondamentaux du vivant, une membrane et de l’information organisée (si bien qu’elle permet parfois la réplication de virophages). Pour donner une image, le virus est un organisme formel organisé complexe mais inanimé, et je répète, inanimé, tel un rubik’s cube laissé par terre mais qu’un individu peut saisir pour le manipuler. Ou bien un livre placé sur une étagère qu’une cellule décide d’ouvrir et de lire puis de répliquer. Ces images signifient en fait que faute d’être autonome en énergie, le virus se prête à une manipulation par la cellule qui le capte ou l’organisme et parfois, ça tourne mal.

Nous en restons donc sur cette énigme de l’information virale et de ces gènes et protéines assez décalés et laissant penser, pourquoi pas, au virus géants comme palimpsestes dévoilant les premières copies du vivant ou alors des informations condensées pouvant être partagées lors d’un jeu génétique mené entre le virus et l’hôte, un peu à la manière d’un jouer de carte qui trouve des figures, les récupère, reproduisant les cartes puis lançant d’autres figures pour un prochain joueur de passage. Et bien évidemment la question qui n’a pas été posée et qui est cruciale. Les virus sont-ils antérieurs ou postérieurs à l’émergence des cellules auto-réplicatives ? Je crois pouvoir dire que cette question dépasse de très loin la question des virus. Est-ce que l’information se constitue et précède l’élaboration des dispositifs assemblés du vivant, ainsi que les régulations métaboliques et autres transferts d’énergie ou bien l’inverse, un biotope moléculaire énergétique et réservoir d’informations qui réalise des fonctions alors que le dispositif de l’information organisée se met en place ? Cette conjoncture est tellement universelle qu’on en trouvera une version philosophique dans l’éthique d’Aristote sur le fonctionnement de la raison.

Lien vers l’article de Science

http://www.sciencemag.org/content/341/6143/281


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10 réactions à cet article    


  • Demian West 29 août 2013 09:04

    Cet article est tellement spécialisé et il suscite tant de questions que seuls des chercheurs confirmés pourraient en débattre. C’est pourquoi je me demande naturellement, après ma lecture, si je ne me suis pas trompé de journal, ou si l’auteur se plaît à diffuser de telles communications dans les lieux les plus excentrés pour son message.


    Ce qui est assez amusant et inquiétant à la fois.

    Mais la lecture en est agréable et très dépaysante, c’est certain ! smiley

    • WILLEMS Lionel 29 août 2013 11:57

      Je trouve que ça ne fait pas de tort d’avoir un brin de diversité, entre deux articles sur la Syrie smiley


      • Demian West 29 août 2013 12:07

        Vous pointez plus encore l’équivoque de l’auteur qui a publié un article sur la Syrie le même jour.


        Comme s’il neutralisait sa différence si éloquente dans cet article ci-dessus d’une plus haute volée certaine et moins remarquée à cause de ce déluge de nécessité syriaque qui étouffe toute exploration.

        • Demian West 29 août 2013 15:03

          Le débat des scientifiques fut un peu court à mon goût. Et pourtant je pensais les avoir incités un peu... smiley


          • Demian West 29 août 2013 19:28

            T’es trop fort Tall, même quand tu dis un truc aussi sérieux, on t’écoute parce que toi au moins tu sais le dire avec humour, même vachement caché. smiley


          • escartefigue 29 août 2013 19:34

            Les virus , les virus .....les analyses phylogénétiques menées sur trois protéines « universelles », tryptophane et tyrosine ligase puis DNA polymérase, confirment une proximité phylogénique de ces pandoravirus avec le règne eucaryote.


            C ’est exactement ce que je me disais ce matin en me lavant les dents .

            • Demian West 29 août 2013 21:38

              Virus > virusses > o’kayyyyyy CIA j’ai compris. Les virusses sont géants et inhumains pas vivants, la menace quoi !


              En fait, Dugué nous la joue Pôle Emploi ce qui est une couverture de CIAiste pour casser du Russe en des articles cryptés. En fait, je me demandais de quoi il vivait depuis si longtemps.

              Dugué est un espion bardé de diplômes US.

              Je ne vois pas d’autre explication.

              • Demian West 29 août 2013 21:41

                D’ailleurs on n’a jamais vu Batman et Dugué dans la même pièce. C’est une preuve.


                • escartefigue 30 août 2013 14:04

                  C ’est Gérard Depardieu Qui a attrapé le virus , car le viefrançais lui suce 

                   les trois-quart de ce qu’ il gagne . 

                  Ils sont cons en Viefrance il suffirait qu’ ils soient raisonnables au point de vue 
                  fiscal  et ne traite ses artistes mondiaux de sous-merde . 

                  A propos je voulais mettre un post sous l’ article de morice mais à cause de ce gros naze 
                  je me suis fait sucrer mon pseudo Rocla-Haddock . 

                  C ’est un gros salopard ce type doublé d’ une balance sordide . 

                  l’ esquisse du sous-homme .

                  • Ruut Ruut 16 septembre 2013 11:04

                    Et si les virus étaient des bases de données biologiques qui font tout pour préservées leurs données.

                    Des disques dur biologiques.

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