Que va devenir Microsoft sans Bill ?
Où l’on peut s’interroger sur le départ extrêmement discret de Bill Gates de la direction du conseil des actionnaires de Microsoft.
Une nouvelle qui est passée relativement inaperçue ces jours-ci, mais qui a pourtant son intérêt :
Bill Gates a participé le 13 novembre à sa dernière assemblée d’actionnaires. Il quitte ainsi le poste de président du conseil pour se consacrer "à sa fondation". Depuis 2000 déjà, le poste de PDG de Microsoft était tenu par Steve Ballmer, personnage haut en couleur et en caractère, qui augmente donc sensiblement son contrôle de la société.
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Alors, je ne vais pas ici tenir compte des caractéristiques financières de la société, de ses prévisions de vente en milliards de dollar pour l’année qui vient. D’ailleurs, dans un monde capitaliste (ou libéral ?), il me semble que ce qui intéresse principalement les actionnaires, c’est la capacité de croissance d’une société, et pas sa valeur absolue. Quant à moi, ce qui m’intéresse, c’est ce que va faire Microsoft, quelles décisions seront prises, qui influenceront indirectement ou directement mon outil de travail dans les années à venir.
Je tiens à préciser que mon analyse est subjective.
Rappelons que parmi les informaticiens, le sujet "Microsoft" est un sujet à controverses multiples ; entre évangélistes Linux, prophètes de l’OpenSource, puristes Java et monomaniaques du Macintosh, Microsoft a la vie dure sur les blogs et les forums d’internet. Or, me sentant proches de trois de ces quatre catégories, mon article est à lire en considérant toute la subjectivité dont je suis capable. Ceci étant dit, ceux qui supportent ce pragma ainsi énoncé, peuvent continuer la lecture de cet article. Ainsi, j’analyse globalement les dernières années écoulées comme ceci :
- Les derniers systèmes mis au point par Microsoft n’ont à mon sens rien amené à mon ordinateur. Plus lourds, plus gourmands, chaque mise à jour consomme plus de mémoire, plus de processus qui tournent, étouffant progressivement mon ordinateur. Je fais les mêmes choses aujourd’hui sur mon PC qu’avec Windows 2000. De plus, la robustesse des UNIX (Linux, Apple...) reste sans égal, et la force de milliers de contributeurs dans le monde restera toujours plus importante qu’un ensemble de développeurs, aussi brillants soient-ils, qui sont dirigés par des impératifs marketing. Le coût de mise au point d’un système comme Vista est énorme au regard du retour qui en est fait.
- Rien n’est résolu au niveau sécurité. Mon ordinateur est toujours aussi "attaquable" sur internet, via mon navigateur Internet Explorer, Office ou Outlook. Ces trois programmes restent les cibles majeures des virus en tout genre, m’obligeant à un surcoût et à une veille sans cesse renouvelée, pour savoir quel produit me protégera le mieux.
- Evidemment, si je veux faire du C#, du COM, du SQL Server, les choses ont certainement évolué. Mais ceci ne m’intéresse pas. Ces différents produits propriétaires ne feront que me lier de façon exponentielle entre eux à des technologies de plus en plus chères, tandis que leur équivalents gratuits ont fait par contre des progrès considérables pendant le même temps.
- Le même type de commentaire peut s’appliquer à Office ; qui parmi les millions d’utilisateur est capable de me dire quelles sont les différences entre Office 12, Office 11 et Office 10, dont il ne peut se passer, et qui a justifié pour lui le prix de la mise à jour ? Pas moi en tout cas. Et d’un autre côté, Open Office a gagné ses lettres de noblesse et reste gratuit.
- Au niveau internet, Microsoft n’a pas réussi à s’imposer, que ce soit par son réseau MSN (dans les années 90), son moteur de recherche internet, si ce n’est par l’outil Messenger, qui emporte les suffrages des adolescents.
La trame est usée
Ainsi, de mon point de vue, Microsoft est arrivé à la limite et a épuisé jusqu’à la corde tout ce que l’on pouvait faire comme profit avec les mêmes technologies depuis une dizaine d’année. Sa stratégie commerciale n’a plus d’issue de croissance.
Le nouveau système, c’est le web
Mais surtout, le plus important aujourd’hui est que le système n’est plus un enjeu. L’utilisateur veut un navigateur web et un emailer. Ces deux outils se trouvent aujourd’hui gratuitement dans une version extrêmement performante (sinon la meilleure) : FireFox et Thunderbird. Et ce, sur l’immense majorité des OS d’ordinateurs. Le voilà le vrai "système" sur lequel se retrouve l’utilisateur : son navigateur web. Microsoft l’avait compris, le jour où Internet Explorer est devenu l’outil universel de navigation de son système, mais n’a pas su ou pas pu verrouiller son usage. Car, aujourd’hui, l’utilisateur n’est pas lié à Windows : toutes les applications Web 2.0 fonctionnent indistinctement sous les principaux navigateurs, libérant l’utilisateur d’une astreinte à un système. Sur le même sujet, il est important aussi de noter que depuis le printemps 2007, une lutte entre trois acteurs importants se joue pour obtenir la suprématie sur le marché du client Web offline entre SilverLight de Microsoft, Adobe AIR et Google Gears, tous les trois étant annoncé comme fonctionnant indistinctement sous Linux, Macintosh... et Windows.
Nouvelle guerre, nouveaux guerriers
Dans ce nouveau combat, Microsoft n’a pas les armes qu’il a l’habitude d’utiliser. Face à des adversaires difficiles à identifier, dans des marchés sans cesse renouvelés, sur des thématiques imprévisibles, il paraît parfois désorienté, réagissant en général relativement tard, face à des sociétés extrêmement innovantes. En effet, comment Microsoft, dont le cycle de réaction est d’aujourd’hui de 3 ou 4 ans, peut-il se métamorphoser pour descendre à un cycle de réaction de 6 mois ? Cela paraît difficile, en tout cas, avec un Steve Ballmer, dont un grand nombre d’allocutions consiste à déprécier et ricaner de ses concurrents (l’iPod, l’iPhone, Android de Google, pour ne citer qu’eux), on peut en douter.
Un départ... opportun ?
Alors, pour en revenir à ce qui faisait le sujet de départ, et poursuivant avec le manque d’objectivité qu’on me reprochera très certainement, je me risque à envisager que Bill Gates - avec son flair remarquable que je lui reconnais - soit parti au moment où Microsoft n’a guère d’autre issue que de décliner, ou bien de se soumettre à une révolution culturelle douloureuse et complexe.
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