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Accueil du site > Tribune Libre > Esclavage 2.0

Esclavage 2.0

Nous faisons-nous abuser par tous les sites qui nous demandent de participer à leur élaboration, de Flickr jusqu’à AgoraVox ? Un lecteur m’a interpellé à ce sujet à la suite d’un article du Monde sur le Web 2.0. L’auteur y reprend une idée en vogue, résumée notamment par Karl Dubost sur son blog.

Je crois qu’il ne faut pas être dupe. Le tout-gratuit sur Internet a conduit à l’explosion de la bulle en 2000. Si la plupart des sites sont restés gratuits, ils ont dû trouver de nouvelles méthodes de financement. L’une d’elles est d’utiliser l’internaute comme force productive. Mais nous ne sommes pas des esclaves : personne ne nous oblige à collaborer, personne ne nous oblige à publier nos photos sur Flickr ou nos articles sur AgoraVox. Nous ne le faisons que quand nous y trouvons un intérêt, celui de partager, celui d’échanger, celui de nous faire connaître. Si les Arctic Monkeys n’avaient pas partagé leur musique, personne ne les aurait jamais connus. Quand je publie un article sur AgoraVox, je bénéficie d’un peu de pub. J’offre quelque chose, je reçois autre chose. Tout le monde y trouve son compte.

Que les sites collaboratifs gagnent de l’argent sur notre dos, c’est la règle du jeu. D’un côté, ils nous offrent gratuitement une plate-forme ; de l’autre, ils se débrouillent pour la rentabiliser. C’est du donnant-donnant. Dans cette affaire, personne n’est contraint de donner. Il nous reste toujours la possibilité de créer notre propre site. Mais cette approche est périlleuse, car il est difficile d’attirer les internautes. Publier un article sur AgoraVox nous offre tout de suite des centaines de lecteurs dont le recrutement coûte beaucoup d’argent. AgoraVox nous fait ce cadeau, nous lui en faisons un autre. Nous sommes partenaires dans un business.

C’est la même chose quand Google pique sur nos sites des bouts de phrases pour nous faire apparaître dans sa liste de résultats. Tout d’abord, nous ne sommes pas obligés de donner, et nous pouvons décider de ne pas être référencé (méta-tags, fichiers robot.txt...). En revanche, si nous acceptons le référencement, nous devenons partenaire d’un business tout simple : en échange de nos textes, Google nous envoie des visiteurs.

Vouloir faire payer Google pour ce service est absurde. Un nouveau client coûte plusieurs dizaines d’euros. Google nous offre souvent plus que nous ne lui offrons. Le système fonctionne pour cette raison. Si nous sommes persuadés que ce que nous offrons vaut plus que ce que Google nous offre, nous devons rompre le contrat, c’est-à-dire nous déréférencer. Après, il nous reste à faire les comptes pour voir ce que nous perdons vraiment.

De toute façon, nous n’en sommes qu’aux premiers stades des sites collaboratifs. À l’avenir, les collaborateurs seront aussi rémunérés. Des initiatives de ce genre voient le jour, zlio.com par exemple. La concurrence est ouverte, les sites collaboratifs qui nous offriront le plus de bénéfices seront les vainqueurs. Je n’appelle pas ça de l’esclavage.

En fait, il y a des sites qui abusent de nous sans nous le dire, c’est plus pernicieux : Amazon par exemple. Nos choix sont automatiquement analysés puis resservis à d’autres consommateurs. Quand Amazon nous offre le port, c’est une façon de rémunérer notre travail, mais sans le dire. Encore une fois, c’est du donnant-donnant. Et nous avons encore le choix d’acheter nos livres dans une librairie. Non, nous ne sommes pas des esclaves.

La vraie question n’est pas la pertinence des sites collaboratifs, mais plutôt la modalité du partage des revenus. Si le site gagne beaucoup plus que ses collaborateurs, il y a un problème évident. Là, on nous prend vraiment pour des philanthropes. Un site collaboratif coté en Bourse aura tendance à maximiser ses bénéfices. Pour cela, il réduira les revenus de ses partenaires, c’est-à-dire nous. D’une certaine façon, c’est la logique du capitalisme.

Cette logique va-t-elle perdurer ? Si le site collaboratif veut attirer des investisseurs, s’il veut éviter de se faire avaler par un concurrent, il doit jouer le jeu capitaliste. En revanche, cette stratégie va braquer les collaborateurs qui risquent de se détourner vers un concurrent moins gourmand et qui offre plus d’avantages. Logiquement, les sites les plus équitables devraient donc se développer au profit des plus gourmands, ce qui laisse présager l’apparition d’une nouvelle économie post-capitaliste.

Les sites collaboratifs préfigurent la société de demain. Une société qui parie sur le gagnant-gagnant et non sur le gagnant-perdant, comme la société capitaliste.


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17 réactions à cet article    


  • zen (---.---.230.222) 19 juin 2006 11:07

    Toujours aussi indécrotablement nul en analyse politique,notre auteur...comme si le développement harmonieux du Net allait nous projeter vers le « post-capitalisme »...(C’est quoi ?) Enfin, si réver vous fait du bien...


    • Marsupilami (---.---.183.77) 19 juin 2006 11:27

      Ouaf !

      Je partage ton avis. Ce type est « gars-gnangnan-gars-gnangnan ». C’est hallucinant le nombre de gens qui croient qu’Internet va tout changer dans un sens ou dans un autre. Ou : comment des codes binaires accouchent d’une nouvelle pensée magique.

      Houba houba !


    • L'équipe AgoraVox Franck 19 juin 2006 11:30

      Toujours aussi indécrotablement nul en analyse politique, notre subtil commentateur d’articles... Enfin, si cracher sur les autres vous fait du bien et vous permet d’être vraiment « zen »... pfff

      Article très intéressant qui démontre une connaissance réelle de la problématique et des dérives potentielles du web 2.0


    • Marie Pierre (---.---.40.50) 19 juin 2006 12:04

      Je n’ai pas bien compris le sens de votre article : Google nous fait des cadeaux ? Oui, pour le visiteur lamba qui cherche une info. Mais Google est déjà payant.

      Pour avoir travaillé dans une entreprise NTIC, je sais que le référencement payant rapporte beaucoup à Google et autres. Convaincre le client que son site marchand sera en première page sinon en première ligne d’un moteur de recherche et une activité lucrative et pour Google et pour le créateur/référenceur.

      Par ailleurs, au début de Google, il existait un petit référencement gratuit. Il a disparu depuis quelques temps.


      • Internaute (---.---.143.5) 14 juillet 2006 11:59

        Google a deux référencements.

        Référencement gratuit. Quand vous faites une recherche il y a une liste de résultats qui remplit toute la page et même plus. Les auteurs qui apparaissent sur cette liste n’ont rien payé pour y être.

        Référencement payant. Selon le critère de recherche apparaît en haut à droite une petite liste de « liens commerciaux ». Ceux-là acceptent d’être facturé chaque fois qu’un quidam clique sur leur référence (5 à 15 cts selon le cas).

        L’auteur parle du premier référencement.


      • Sam (---.---.98.165) 19 juin 2006 12:56

        Sommaire repérage du vocabulaire de cet article :

        Business : 4 occurrences

        Revenu : 2 occurrences

        Argent : 3 occurrences

        Rentabiliser : 1 occurrence

        Expression : 0 occurrence

        Citoyen : 0 occurrence

        Démocratie : 1 occurrence

        Collectif : 1 occurrence

        Exploitation : 1 occurrence

        Proletaire : 1 occurrence

        Capitalisme : 2 occurrence

        Trois grandes familles sémantiques :

        - ECONOMIE de l’avoir, du faire : avec les termes « argent, business, revenu, rentabiliser » ;

        - ECONOMIE 2 en tant que système et/ou oppressif : « prolétaire, exploitation, capitalisme » ;

        - POLITIQUE : avec les termes « expression, citoyen ».

        Economie : 1O occurences au total ;

        Economie 2 : 4 occurences au total ;

        Politique : 0 occurences au total.

        Ce rapide aperçu du vocabulaire de l’article montre que l’important - selon l’auteur- pour un blog collaboratif, comme Agoravox, c’est le challenge économique et les résultats positifs qu’il obtenir dans cette compétition.

        Ces blogs ne changent pas la donne générale, le système capitaliste. S’ils l’aménagent ou le font évoluer, ils ne s’inscrivent ni en-dehors, ni contre. Même s’ils sont conscients de l’inégalité et de la servitude qu’il provoque.

        On ne s’étonnera donc pas que les attentes éminemment politiques des publics et des participants aux blogs, attentes en matière d’expression plus large, de citoyenneté plus forte, de pluralisme, ne revêtent pas grande importance et n’apparaissent que peu dans l’article.


        • Antoine Diederick (---.---.208.131) 19 juin 2006 14:22

          Article pertinent....qui gagne quoi et comment... ?

          Produit et production et lien économique ou modèle économique.

          Qu’est ce qui est gratuit ou pas ?


          • Antoine Diederick (---.---.208.131) 19 juin 2006 14:31

            le WIN WIN est la formule toute faite des « apaisements sociaux », c’est une manière de dire que les parties on toutes obtenues quelque chose et abandonné quelque chose.

            Dans le cas du collaboratif via internet et ds le contexte évoqué par vous, pourquoi les internautes produisent du contenu (par ex sur Agoravox) gratuitement et sans contraintes ( tout du moins ténues) et sans rétributions (a moins qu’il y aient des bénéfices secondaires réels ou supposés)pour chaque participant.

            Pas d’accord avec l’optimisme de la chute de votre article, d’accord avec les questions qu’il peut susciter.


          • zen (---.---.155.24) 19 juin 2006 18:26

            Qui pourrait m’expliquer ce que peut être le « postcapitalisme » ? ...Je n’en dors plus...


            • Marsupilami (---.---.162.6) 19 juin 2006 18:35

              Ouaf !

              Allons Zen, reste zen. Le postcapitalisme est ce qui adviendra grâce à la magie d’Internet et du rassemblement des internautes croyant dans les vertus transcendentales du binaire...

              Houba houba !


            • zen (---.---.155.24) 19 juin 2006 19:02

              Merci Marsu, tout est clair, je vais retrouver enfin le sommeil...


            • FredLeBorgne (---.---.41.42) 19 juin 2006 19:08

              Utopique ? ou développement des symbioses ? ou synergies grâce au troc virtuel ?

              Les échanges de « services » ne sont pas taxés. Les intérêts se combinent dans la création de poles d’attractivité pour internautes, par définition zappeurs.

              Un site généraliste ou une association de « marques » (comme pour une galerie marchande)devrait payer ses collaborateurs (animateurs dans la gallerie) pour parvenir au même résultat.

              Là, le collaborateur est déjà un vendeur (journaliste, écrivain) ou un internaute qui veut intéresser les autres.

              Il y a donc, non pas un échange, mais une collaboration pour l’entretien d’une plate forme attractive pour attirer des proies dont on ne s’interesse pas aux mêmes morceaux.

              Je pourrais comparer çà aux récifs de coraux.

              Et le modèle peut être viable. Néanmoins, les marchands ne sont pas loin et sont bien heureux de pouvoir s’implanter sur ces pôles sans avoir à débourser plus que la mise en place d’un site uniquement dédié à la vente, même si il faut partager un peu d’espace. Les sites gratuits sont des appâts qui ne leur coûte rien.

              Le coté gnan gnan philosophique est pour un type de « clients ». En faisant du caustique, on en « appate » d’autres. Mais en ces temps de « politiquement correct » obligatoire pour les chefs de sites, il vaut mieux laisser les dérapages aux internautes « anonymes »


              • pierrot (---.---.141.25) 19 juin 2006 20:21

                Pourquoi donc cet article est-il miraculeusement changé depuis ce matin ?

                J’aimerai bien le savoir


                • pingouin perplexe (---.---.250.250) 19 juin 2006 21:34

                  C’est en effet troublant. Les statistiques de Sam s’en trouvent d’ailleurs révolues o)

                  Je suis loin de souhaiter la disparition des idéaux, lorsqu’ils se donnent les moyens de se tenir. Quelque intérêt pour les questions herméneutiques peut aider à comprendre que le souci de communiquer sans commun-niquer peine parfois à trouver les ressources adéquates.

                  De quoi rester perplexe...


                • meta-tags en php (---.---.41.253) 20 juin 2006 00:12

                  Il y a tant d’aspects des meta-tags qu’on veut OU on ne veut pas publier a « Google ». « C’est la même chose quand Google pique sur nos sites des bouts de phrases pour nous faire apparaître dans sa liste de résultats. Tout d’abord, nous ne sommes pas obligés de donner, et nous pouvons décider de ne pas être référencé (méta-tags, fichiers robot.txt...) »(loc. cit. ultra ). Concernant mes informations declassifies a Google,moi,je fais toujours un echange plus ou moins equilibre. En langue latin un « dos ut des » et je Vous donne un example en php : « header( »date d’expiration : Mon, 19 Juin 2007 01:01:01 CentralEuropeanTime") ; header(« modification derniere : » . date format greenage temps moyen(« Jours, Jour Mois Anne Heure:et:l’infinitesimal ad libidum ») . « CET ») ; header(« Control du Cache : pas de reservoir, pas de cache, Vous avez a revalider ») ; header(« Controle du Cache : controle-apres=0, control-avant=0 », vrai) ; header(« Pragmatique : pas du cache ») ; header(« Type du contenu : texte/xml-applications ; ensemble de characteres=$Languaged’EspeceCharactereEnsemble ») ;" Cet [h]autheur avec ses ambitions & ses prestations, tcrouzet a Balaruc les Bains, provoque pas mal de rancune chez le Collectif Juif « il-us-ami » : « avec plus de 300 000 ouvrages vendus depuis 1997, je suis l’un des vulgarisateurs des technologies Internet les plus lus en France »(tcrouzet(Balaruc les Bains), agoravox france, curriculum vitae(carte visite)). Cette phrase explique beaucoup des reactions agnostiques sur tcrouzet’s article le 19eme Juin 2006 .Moi, j’ai les Freres Muselmans d’Egypte sur mes serveurs durant les elections.A mentionner aussi l’Abysse Serveur de la Federation Islamique du Salut en Algerie pour laquelle dans le sable de la sahara on rend - refroidissant et ca c’ est l’amitie vraie - un service merite.


                  • JC BENARD (---.---.92.11) 20 juin 2006 10:02

                    Le problème est lié au fait que les commerçants se sont emparés du Web alors que sa destination n’était pas commerciale.

                    N’ayant aucun modèle économique viable le Web oscille entre le semi payant et le semi gratuit. Si le Net survit c’est en partie parce que les individus ont de plus en plus envie de ce fameux « moment de célébrité » qui touche notre planète. Il faut y voir un syndrome équivalent à « nouvelle star » ou « star ac »

                    Des initiatives comme Agoravox permettent à des citoyens de s’exprimer alors que les autres media en sont toujours au courrier des lecteurs. Ainsi les journalistes citoyens ont la sensation de participer à la vie du monde et peut être le rêve secret de faire bouger les choses.

                    Le Web continuera d’avancer à sa cadence et de former des groupes de pensée, d’affinité ou autres. Le Web restera difficile à domestiquer et nombre d’entreprises resteront en marge du fonctionnement de celui-ci.

                    Si le Web collaboratif est vu comme un « esclavage » par certains, c’est une peine bien douce à côté de ce qu’endurent des millions de gens aujourd’hui encore dans beaucoup de pays. Si les internautes savent apporter réflexion et contenu il y a une grande chance que ce soient eux qui définissent les grandes tendances du monde de demain.

                    Celà vaut bien quelques heures « d’esclavage » consenti.


                    • Offset (---.---.240.214) 22 juin 2006 17:44

                      Vous m’avez vraiment décus avec votre conclusion :

                      « Les sites collaboratifs préfigurent la société de demain. Une société qui parie sur le gagnant-gagnant et non sur le gagnant-perdant, comme la société capitaliste. »

                      Alors que vous arrêtez pas de dire avant :

                      « Quand je publie un article sur AgoraVox, je bénéficie d’un peu de pub. J’offre quelque chose, je reçois autre chose. Tout le monde y trouve son compte. » « Si nous sommes persuadés que ce que nous offrons vaut plus que ce que Google nous offre, nous devons rompre le contrat »

                      Typique d’une reflexion Liberale ... m’enfin, c’est quand même dingue les préjugés sur le capitalisme, jusqu’a le sortir de son sens.

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