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Élections américaines, ou le symbole de la lutte entre néomodernité et pensée du dysfonctionnement

Selon un sondage paru sur CNN le matin du 8 novembre, la corruption émerge en premier (41%) puis le terrorisme (40%) ensuite la question sociale (38%) enfin l’Irak (36%), comme facteurs expliquant la victoire, à l’arraché, des démocrates au Congrès (certains candidats gagnent avec quelques dizaines de voix), voire au Sénat. Or, il semble bien qu’une question émerge avec insistance, qui consiste moins à souligner que l’Irak, contrairement à ce qu’avancent les oiseaux de mauvaise augure européens, n’est, en fin de compte, pas la cause majeure du retour en force des démocrates, qu’à pointer le doigt en direction de cette idée, fortement mécaniste et au fond idéaliste, stipulant, surtout pour certains, que si les choses de la vie ne vont pas comme il faut, c’est toujours à cause d’un mécanisme défectueux ; car, autrement, tout devrait baigner sinon dans la paix et l’amour, du moins dans la douce pacification et dans le consensus.

En disant cela, il ne s’agit évidemment pas de nier la nécessité de punir les tricheurs et de corriger les erreurs et les effets pervers en votant pour celles et ceux qui semblent le plus compétents ; il s’agit d’attirer l’attention vers ce qui semble mouvoir la motivation majeure des votants, analyser l’émergence de motivations hostiles ou de questionnements sociétaux inédits comme étant des produits aberrants. Or, cette façon de penser semble devenir de plus en plus un défaut majeur de nos sociétés systémiques et technocratiques, (basées toujours par ailleurs sur l’idéal de perfection divine, même si elles le contestent).

Ainsi, si cela va mal en Irak, ce serait, selon les démocrates, principalement à cause de Bush, et ceci moins parce qu’il aurait mal anticipé et organisé les choses en faisant plus confiance aux « vieux » républicains (Rumsfeld, Cheney) qu’aux néoconservateurs (qui, sous Reagan, ont rompu avec l’idée de coexistence pacifique, poussant ainsi l’URSS vers son effondrement), que parce que "le" résultat, tel un bénéfice d’entreprise, n’est toujours pas là : à savoir une démocratie flambant neuve qui aurait dû sortir avec le sourire du chapeau bushien. De l’autre côté, du côté républicain, (au sens non néoconservateur) est-ce que les problèmes sociaux (tournant autour du dilemme liberté/sécurité) et sociétaux (bio-éthique, reconnaissance du fait homosexuel, par exemple) et de plus en plus posés par l’évolution mondiale de la société ouverte démocratique et techno-urbaine, est-ce que ces problèmes pour une part inédits sont, eux aussi, le produit, majeur, de la pensée "libérale" (au sens américain) ? Pas sûr. Or, tel semble être ici le paradoxe américain, et, partant, de tout l’Occident, qui, du haut de cette élection de mi-mandat, "nous"regarde : doit-on montrer du doigt un dysfonctionnement, et, partant, renouer en fin de compte avec la théorie sécurisante du bouc émissaire, ou doit-on se demander si les questions posées ne méritent pas, du fait de leur complexité, une analyse plus sériée et, partant, une réponse plus circonstanciée ?

Ainsi, avant le 11 septembre 2001, durant huit ans de mandat Clinton, (Bush arrive au pouvoir effectif seulement en janvier 2001, soit huit mois avant le 11), on pourrait aisément se contenter d’expliquer que la cécité de la CIA et du FBI sur la préparation des attentats est due à l’organisation de l’administration démocrate et que Clinton aurait mieux fait de s’en préoccuper que de s’attarder avec certaines jolies secrétaires. D’autres, il est vrai, ont immédiatement mis en cause la politique étrangère américaine en général, voire l’existence des USA comme symbole même de ce qu’il faut abattre. Ce qu’il y a à retenir, c’est que, pendant ce temps, a été tout à fait sinon négligé du moins relativisé l’effort de l’islamisme politique pour supplanter le nationalisme arabe comme vecteur de recomposition idéologique permettant d’atteindre l’idéal de l’âge d’or, celui de la supériorité, divine, de l’islam comme Constitution politique dans laquelle la philosophie et l’art sont bannis puisque seule l’application juridique de la loi coranique est nécessaire et suffisante pour conduire et organiser la vie humaine. Cette volonté, là, ne rentrait pas dans les grilles de l’analyse basée sur la théorie du dysfonctionnement, ou alors à la marge, par exemple en supposant que si certaines personnes adhèrent à l’islamisme politique, c’est bien moins par ultime conviction que du fait d’un dysfonctionnement social et sociétal s’exprimant par leur position d’ancien colonisé, de défavorisé, au mieux de déphasé au vu des évolutions en termes de mœurs et de libertés de penser et de se comporter.

Dans ces conditions, il ne semble pas incohérent d’observer que la défaite des républicains en général, et de Bush en particulier, s’explique dans ce cadre plus global constaté ailleurs montrant que tout dysfonctionnement incombe immédiatement à un quelconque défaut du « système » qu’incarnent les dirigeants du moment ; d’où l’idée qu’en votant pour le concurrent, immédiatement le défaut s’estomperait, comme s’il s’agissait d’un accident, alors que souvent il est plutôt question de tendances profondes, d’effets pervers, de questions inédites, et aussi de motivations éminemment nocives.

Ainsi en Irak, ce cœur du nationalisme arabe, son projet, celui du Califat, ne différait en rien du souhait islamiste, sauf que le renouveau de la puissance et la gloire arabe devaient s’accomplir sans avoir besoin de s’en référer à la lettre du Coran jusqu’à porter littéralement son habit. D’où le fait qu’en effet, il y avait moins de présence apparente de la religion dans les rues irakiennes ; sauf que trente ans de gabegie et aussi, voire surtout, le refus des évolutions sociétales comme l’émancipation des femmes, articulé sinon justifié par le refus de limiter sa vie à autre chose qu’une consommation effrénée des produits ostentatoires, peut avoir suscité une profonde aversion dudit laïcisme baathiste au profit d’un retour supposé authentique à l’islam. Car personne ne peut laisser croire que la présence américaine en Irak a suscité en l’espace de trois ans un tel climat de prépondérance religieuse, au-delà du problème spécifique de partage de pouvoir entre shiites, sunnites, d’une part, entre Arabes, Mésopotamiens, Babyloniens, Perses et Kurdes d’autre part.

C’est bien parce que la société dite irakienne était déjà en décomposition avancée qu’elle était susceptible de tomber entre des mains encore plus dangereuses, comme on l’a vu avec l’arrivée des talibans au pouvoir, qui s’est faite sous la présidence du démocrate Clinton, de même que l’arrivée au pouvoir en Iran des islamistes khomeynistes s’est faite sous la présidence du démocrate Carter. Est-ce à dire que Clinton et Carter sont responsables de cette montée de l’islamisme radical ? Et que celle-ci serait le produit de la toute-puissance américaine, républicains et démocrates confondus, revient à avancer ce que je signale ici depuis le début, à savoir qu’en fait le problème, c’est l’existence de dysfonctionnements au sein du supposé système occidental qui suscite des rancoeurs ; alors que c’est son existence même qui s’avère être l’enjeu de tous ceux qui refusent l’émergence d’une société démocratique mondialisée dont les spécificités culturelles et institutionnelles n’empêchent pas l’émergence de nouvelles questions liées à notre techno-urbanité et demandant des réponses circonstanciées et complexes pour une part, comme l’évolution des moeurs et l’arrivée de nouveaux entrants, et des réponses très simples et efficaces pour une part, comme la place respective des libertés privées et des libertés publiques.

Il est à craindre que les élections américaines ne répondent pas - ou le fassent peu - à ces nouvelles questions sinon par la négative, le refus et le turn over des élus, il est à craindre que les élections françaises n’amplifient le phénomène, celui d’une impasse à penser autrement le lien entre le politique et la politique dans nos sociétés ouvertes complexes mondialisées, luttant à la fois pour préserver leur identité et permettre à la différence de l’actualiser sans pour autant la dissoudre. Tel est, semble-t-il, l’enjeu, celui d’une néo-modernité à penser, et ceci à nouveaux frais.


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3 réactions à cet article    


  • Romain Baudry (---.---.28.111) 14 novembre 2006 14:50

    Peut-être que je ne suis pas suffisamment (r)éveillé, mais je trouve que le propos de cet article est assez confus et que l’expression y est franchement embrouillée. Certaines phrases ressemblent à des sacs de noeuds (par exemple, la deuxième de l’accroche : « Or, il semble bien qu’une question émerge avec insistance... »).

    Sur le fond, il est sans doute vrai que les électeurs ont tendance à imputer à leurs élus des dysfonctionnements dont ils ne sont pas responsables. Aux USA, par exemple, le prix de l’essence a un effet important sur l’opinion (mais il était en baisse, récemment). Cela dit, on ne reproche pas au gouvernement Bush des choses dont il n’est pas responsable : c’est lui qui a décidé d’envahir l’Irak, c’est lui qui a réagi si piètrement à l’ouragan Katrina et c’est en son sein qu’on trouve une bonne dose de corruption. Au sujet de l’Irak, il est de bon ton chez les conservateurs américains de prétendre aujourd’hui que personne n’aurait pu prévoir ce qui allait arriver, ce qui suggère qu’ils n’ont vraiment prêté aucune attention à ce que le gouvernement français (pour une fois inspiré) leur serinait à l’époque.


    • Passant passant 14 novembre 2006 17:52

      Je n’ai pu saisir où vous voulez en venir ? Et dire que j’ai pu écrire un ouvrage sur la philosophie de Maïmonides ! Ce dont j’étais sûr est que vous allez nous sortir votre thème préféré : L’islam. On perd toute crédébilité dans deux cas : 1- En état de guerre (quand on juge l’ennemi). 2- Quand on renie ce que nous sommes pour se convaincre de ce qu’on n’est pas. Il vous faut une thérapie (en profondeur) et puis essayez encore une fois, vous allez alors écrire des articles au lieu d’une propagande partisane.


      • (---.---.37.70) 15 novembre 2006 13:00

        Il est vrai qu’il est étrange que tout ces tributs Irakiennes s’entretues dans la joie et la bonne humeur. Cela prouve en tous cas une nouvelle fois qu’une société multi-culturel/multi-ethnique n’est pas viable en démocratie. D’ailleur le fait des Cité a compté dans le choix personnel de Chirac de s’opposer (pour de rire, bien sur, personne de sérieux ne pouvant s’imaginer que les USA allaient abdiquer leur souveraineté pour faire plaisir à Chirac) aux USA.

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