Walter Reed ou le monde comme il va
Ce court article s’appuie surtout sur une compilation d’articles de journaux. Ce procédé est un peu inhabituel sur AgoraVox, mais il m’a semblé que cette information intéressante n’avait pas beaucoup attiré l’attention de nos médias, sinon pour citer les déclarations indignées de Georges W. Bush. J’y ai aussi adjoint un petit prolongement personnel.
Le Walter Reed Hospital reçoit environ le quart des
soldats américains blessés en Irak. Son « état critique » été révélé par cet
article du Washington Post : « Soldiers face neglect, frustration at Army’s top
medical facility » Dana
Priest and Anne Hull du 18/02/2007.
Souris, cafards, ascenseurs en panne, coupures d’eau
courante et de chauffage, soins et traitements qui ne viennent jamais. Certains
blessés se sont suicidés. D’autres sont retournés chez eux plutôt que
d’attendre des semaines un traitement qui ne viendrait pas, sans que personne
ne le remarque.
Comment en est-on arrivé là ? Cela a été expliqué
dans cette dépêche de l’AP : « Walter Reed deal hindered by disputes » Donna
Borak du 19/03/2007 et dans cet autre article du Washington Post : «
Privatized Walter Reed workforce gets scrutiny » Steve
Vogel and Renae Merle du 10/03/2007.
En 2000, Georges W. Bush a décidé de supprimer 425
000 postes de fonctionnaires. Le ministre de la Défense Donald Rumsfeld a annoncé
pour sa part son intention d’« externaliser » 320 000 emplois. En 2003, l’armée
lance un appel d’offres pour l’externalisation de la maintenance du Walter
Reed. Une seule compagnie répond : Johnson CWS. En 2004, l’armée constate que
cela lui coûterait plus cher que de le faire elle-même et ne donne pas suite.
En 2005, Johnson CWS est racheté par IAP. Six mois après, l’armée, bizarrement,
révise à la hausse sa propre estimation de coûts internes et réitère son appel
d’offres. Cette fois IAP est retenue, au même prix qu’auparavant. Suite à des
plaintes de syndicats, le contrat ne débute qu’en janvier 2007. Au lieu de 90
employés prévus, IAP ne peut en fournir que 10.
IAP est dirigée par des cadres de K,B&R, une
filiale de Halliburton, la société du vice-président Dick Cheney, et appartient
au hedge fund Cerberus, dirigé par John Snow, ancien ministre des Finances.
Cerberus emploie également l’ancien vice-président
Dan Quayle, selon cet article
de Business Week du 03/10/2005, qui signale également que Donald Rumsfeld était
personnellement investisseur de Cerberus en 2001.
Selon cet article
de USA Today du 19/1/2006, Cerberus a fourni 110 000 $ au sénateur républicain
Jerry Lewis, pour l’inciter à changer d’avis sur un programme d’informatique
militaire qu’il souhaitait faire abandonner, et qui était réalisé par la
société MCI, dont Cerberus détenait une part significative de capital. Le
programme a été poursuivi.
Compte rendu des évènements fait par TF1
le 21/03/2007 : « George W. Bush s’est dit "profondément troublé"
par les faits rendus publics : ils sont "inacceptables pour moi,
inacceptables pour notre pays, et cela ne se poursuivra pas" ».
On peut toujours espérer que le nouveau ministre de
la Défense, Robert M. Gates, soit moins sensible aux sirènes des hedge funds.
Nommé en 2006, il avait été jusqu’en 1993 directeur de la CIA. Entre-temps,
comme l’indique cette notice
de la SEC, il a été administrateur de TRW, un des premiers fournisseurs du
Pentagone, et de VIP E.I. Ce dernier est le fonds d’investissement privé («
private equity ») de Fidelity M&R, première caisse de retraite privée
américaine (« mutual fund »). Fidelity M&R est une société du Delaware, Etat accommodant, mais toutes ses participations industrielles sont relayées
par Fidelity Investments Ltd située aux Bermudes. D’après son rapport 2005 VIP E.I. possédait en 2005 entre autres
41 M$ d’actions Halliburton.
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