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Accueil du site > Actualités > Société > Tentative de définition du réel : M. Serres et E. Klein

Tentative de définition du réel : M. Serres et E. Klein

Sondes interplanétaires, télescopes spatiaux, accélérateurs de particules géants, éprouvettes et ordinateurs... La science progresse. Mais connaissons-nous mieux les dessous du monde aujourd’hui que lorsque Giordano Bruno rédigeait « De la magie » ou Aristote « Physique » ? Qu’est-ce que le réel de cet univers que tente de nous dépeindre la science ?

Michel Serres, philosophe, Etienne Klein, physicien au CEA. Propos recueillis par Patrice Lanoy et publiés dans Le Complot des Papillons (Certaines parties parues dans le Figaro en 2001)

Le Complot des Papillons : Philip K. Dick écrivait que le réel c’est ce qui reste lorsque l’on ne croit plus en rien de ce que l’on perçoit. Pour vous, qu’est le réel de la philosophie, celui de la science ?

Michel Serres  : Quand on emploie le terme de réel, on ne sait pas de quoi l’on parle. À première vue, il y a le réel de la perception, le réel de la passion, qui dépend de l’âge, de la culture, qui dépend du moment de l’histoire. Le réel d’un ancien Grec ce n’est pas le même que celui d’un contemporain et ainsi de suite... La question du réel a divisé les écoles philosophiques en deux depuis plusieurs millénaires. C’est deux écoles sont l’idéalisme et le réalisme. L’idéaliste dit que le réel c’est notre représentation du monde, notre idée... Le réaliste dit le réel extérieur à ma représentation, il existe. Mais ces deux décisions sont asymétriques. La première est toujours démontrable. On peut toujours montrer que le réel est une représentation, puisque la démonstration est incluse dans la proposition. Tandis que dire que le réel est extérieur à nos représentations n’est jamais démontrable. C’est un acte de foi. Et précisément, la science est fondée sur cet acte de foi. La science a pour but de toujours faire échapper le réel dont elle parle aux représentations. C’est un problème asymptotique, elle n’y parvient jamais... Une expérience a toujours besoin d’une théorie et la théorie a toujours besoin d’une expérience. Et ce mélange théorie-expérience fait un réel qui est toujours mêlé de représentation. A mesure que la science avance le réel recule et devient une sorte de point asymptotique vers lequel la représentation avance.

Le C. des P. De ce point de vue, la science avance ?

MS Sur la question du réel, ce qui avance c’est un certain nombre de saisies, de techniques perceptives ou expérimentales. Surtout ce qui avance ce sont les techniques de mesure. Quand on en est au nanomètre on est, me semble-t-il, plus proche du réel que lorsqu’on en était au centimètre. Mais de quel réel s’agit-il ?

EK Naïvement on pourrait dire que le réel de la physique c’est la matière. Et en gros il y a deux sortes de contacts possibles avec elle.. Le contact direct : on observe les choses, les matériaux... On tape sur cette table, on constate qu’elle résiste. Et l’on tire de ces contacts le sentiment d’un présence matérielle qui est non alimentée par une représentation. Et puis il y a une deuxième possibilité de contact avec la matière qui est celle qui consiste à remplacer la matière par son double, par une mise en concept qui procède d’une stratégie de l’évitement. On contourne la matière pour essayer non pas de la regarder telle qu’elle est mais de la représenter par des concepts, des formalismes, des idées. Au bout du compte on espère qu’au bout de cette galipette conceptuelle on aboutira à une rencontre plus véritable que celle que l’on a de prime abord. Michel dit que lorsque l’on est à l’échelle du nanomètre on a une matière plus réelle que celle au centimètre. Je n’en suis pas certain... L’une des questions que pose la physique aujourd’hui et notamment la physique quantique (utilisée pour décrire les phénomènes subatomiques ndlr) c’est le lien qu’il y a entre le réel empirique, tel qu’il se donne, celui des expériences, et puis la représentation que l’on en fait. Et là, on retrouve la dichotomie entre le réalisme, l’idéalisme et la démarche scientifique quand à l’accès au réel.

Le C. des P. De quelle manière la physique pose-t-elle cette question du lien entre réel et imaginaire ?

EK Le point de départ de la physique quantique consiste à dire que l’on va représenter les états physiques dans des espaces abstraits (par des vecteurs d’état) qui ont un nombre infini de dimensions, brefs qui ne sont pas l’identique de l’espace physique dans lequel ont lieu les phénomènes. La représentation des systèmes se situe donc dans un espace qui s’est émancipé de l’espace physique. C’est grâce à cette émancipation que l’on peut prédire correctement des résultats d’expériences qui vont pourtant se dérouler dans l’espace physique ! En choisissant ce type d’espace par nécessité, on a créé une brèche entre le réel empirique, le monde des expériences, et puis la représentation abstraite que nous en donnons C’est dans cette brèche que viennent s’engouffrer les questions sur le lien entre la représentation abstraite et le résultat d’expériences qui ont lieu dans un réel à trois dimensions. C’est quand même une expérience bouleversante pour un physicien que de faire des calculs dans ce que l’on appelle un espace de Hilbert, des calculs complètement abstraits qui finissent par arriver à un nombre réel qui correspond à un résultat possible d’expérience pour voir que c’est dans cet espace mathématique qu’il a fallu faire les calculs pour trouver le résultat de l’expérience concrète. La représentation que propose la physique théorique aujourd’hui ce n’est pas une sténographie de l’expérience mais au contraire quelque chose qui s’émancipe de la réalité physique immédiate, s’en détourne complètement et y revient par le détour de règles de correspondance. Mais cette émancipation est la cause de toutes les question épistémologiques que pose la physique aujourd’hui.

Le C. des P. Mais au fur et à mesure que l’on avance, le réel se dérobe tout de même, on découvre toujours davantage de particules, de propriétés...

EK L’idée que ce détour par un espace abstrait permet une rencontre plus profonde avec la matière est une idée qui est sous-jacente à la démarche scientifique du XXème siècle. On a toujours voulu aller vers le plus petit, le plus élémentaire au motif que c’est au niveau élémentaire que les lois fondamentales se révèlent dans leur simplicité extrême. Mais on peut contester ce point de vue. Il y a un renouveau de la physique aujourd’hui plus légère qui conteste l’idée que c’est aux hautes énergies et aux petites distances que le réel se donne vraiment. Car en fait quand on regarde les propriétés ordinaire que l’on attribue à la matière, comme la solidité, la localisation, la masse, la pénétrabilité, des trajectoires définies dans l’espace..., à petite échelle, celle des particules élémentaires, aucune de ces propriétés ne subsiste. Cela n’aurait pas de sens de dire qu’un électron a une texture bien définie, qu’il est impénétrable. Bref toutes les propriétés naturelles, spontanées que l’on attribue à la matière sont perdues au niveau des particules élémentaires.

Le C. des P. Le réel s’évade encore...

MS La matière qu’Etienne a pris pour naturelle, ou que l’espace physique qu’il prend pour naturel est déjà une élaboration, celle de la physiquedu passé. Le mot matière a mis longtemps a être mis en place, et les caractéristiques qu’il donne de la matière, la masse, l’impénétrabilité, les trajectoires, ont mis très très longtemps a apparaître en physique et en mécanique.

EK L’impénétrabilité a été inventée par Blaise Pascal.

Le C. des P. Et la masse, c’est Galilée...

MS Oui c’est Galilée, mais masse, matière c’est un mot très ancien qui veut dire le bois. Materies en latin, c’est le bois. Et la racine, c’est matter, la mère. Et cette notion qui parait naturelle, on s’aperçoit que c’est un concept extraordinairement raffiné, venu du fond des temps... Matière c’est Aristote qui le trouve, puis le XVIIème siècle le reprend... Lorsque les physiciens disent on s’émancipe de l’espace naturel, déjà cet espace naturel était un espace des physiciens anciens, qui s’étaient déjà émancipés. Comme la matière s’était émancipé du bois, et le bois de la mère, et ainsi de suite. On a des strates d’émancipation successives. Quand nos amis font la main à la pâte, quand ils disent la pâte, ils croient parler du naturel, mais en fait ils font référence à une notion qui vient de la physique de papa... Quand un physicien dit naturel, c’est précisément la physique de papa qu’il invoque....

Le C. des P. En quoi réside le mystère de la mathématisation, de cette abstraction ? Ce qui est incompréhensible, c’est que le monde soit compréhensible, disait Einstein...

MS On fait gloire à Einstein de cela, mais Appolonius de Perge (Mathématicien grec, 200 av.J.-C.) posait déjà la question : comment se fait-il que les cieux obéissent à nos modèles géométriques ? Retomber sur les nombres ordinaires en venant de l’espace mathématique de Hilbert, comment cela se fait-il ? Einstein dit que c’est incompréhensible, avant lui, Kant disait que c’était un miracle...

EK Quand on regarde la théorie quantique des champs, le fait qu’elle fonctionne aussi bien est quelque chose de profondément troublant, impressionnant. Cette efficacité mérite d’être interrogée. Dire que c’est un miracle n’est pas une attitude conforme à la raison. Dominique Lambert propose des idées qui sont que l’efficacité des mathématiques est raisonnable car elles construisent des invariants et la notion d’invariant est constitutive de la notion d’objet. Si l’on prend un électron, tous les discours mathématique sur lui diront toujours que c’est un électron. Il est invariant, quelque soient les mathématiques que l’on emploie, comme si je fais le tour de Michel Serres, je reconnaitrai toujours Michel Serres. Sa réalité vient du fait qu’elle de dépend pas du point de vue que j’ai sur lui. Cela, les mathématiques savent l’exprimer par le biais des symétries.

Le C. des P. La physique est donc en train de devenir une pensée mathématique ?

MS Non. Les mathématiques contiennent des caractéristiques qui permettent de penser le monde physique, mais on ne sait jamais, dans une expérience donnée, quelles mathématiques vont fonctionner... Et là, j’ai quelque chose à dire d’un peu important. Si tu lis les Grecs, par exemple le Timée de Platon, tu t’aperçois qu’ils veulent déduire la physique des mathématiques. Alors ils échouent à faire de la physique, car ils croient précisément que l’on peut déduire les expériences des mathématiques. C’est comme cela qu’ils ont raté la physique. On a récupéré la physique ensuite, en faisant des expériences. Pourquoi ? Il fallait avoir l’idée du contingent. C’est-à-dire qu’il y a un endroit du monde dont on ne sait pas quel endroit des mathématiques va en rendre compte. Et le contingent est là pour une raison très simple, c’est parce que le monde a été créé. Et cela ne pouvait avoir lieu que dans une vision judéo-chrétienne du monde, avec le créationnisme. Tout le monde croit que le créationnisme est un déductionnisme... Non c’est un choix contingent . Par conséquent on ne sait jamais quel lieux des mathématiques rendra compte du lieu de l’expérience. Personne ne disait que c’était l’espace de Hilbert qui allait rendre compte de la physique quantique. C’est bien la contingence du monde qui est importante et c’est ce que les Grecs n’avaient pas saisi. Les Chrétiens le peuvent. Le monde est contingent à partir du moment où plusieurs mondes étaient possibles. Lorsque Dieu crée le monde, dans la théologie classique, il y a son entendement et sa volonté. Sa volonté est arbitraire. Donc le monde est complètement arbitraire. Donc il est contingent, donc il faut l’expérience.

Le C. des P. Une réconciliation entre Dieu et la science ?

EK. Je suis d’accord, l’expérience est le seul moyen d’accès à cette contingence...

MS Et cela c’est une idée parfaitement opposée à tout ce que l’on dit aujourd’hui sur le créationnisme,

EK C’est vrai que toutes les mathématiques ne sont pas utiles. Il y a des mathématiques stériles, plus ou moins efficaces... des mathématiques que l’on oublie... Heisenberg redécouvre la mécanique des matrices lorsqu’il en a besoin pour comprendre le spectre de l’hydrogène.

Le C. des P. Oui mais finalement, qu’est-ce qui permet de savoir si l’on est plus proche du réel ?

MS Rien. Car si l’on parle du réel physique, il est en permanence en cours d’élaboration, de construction.. Quand Etienne expérimentait sur les accélérateurs de particules du CERN à Genève il construisait un réel différent de celui que l’on rencontre dans la Creuse, quand on pêche à la ligne.

EK Oui mais les deux réels sont en relation

MS. Mais ce lien est métaphysique.

EK. On peut défendre l’idée que des créatures de la physique, comme les quarks les électrons n’existent pas en eux-mêmes mais sont des constructions, des produits de notre représentation du réel.

MS Vous voyez, on est tout le temps en train de faire l’essuie glace entre l’idéalisme et le réalisme. Et quand on a fait notre livre, on l’a appelé Paysages (éditions du Pommier), pour éviter de dire image, ce qui est une représentation, et pour ne pas dire photographie, qui aurait été le réel. Oui, une image est fabriquée par une machine à faire des images, c’est une représentation. Mais dans notre esprit, y’a pas photo. Une photographie n’existe pas par elle-même, c’est le réel qu’elle est sensée montrer.


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12 réactions à cet article    


  • Francis, agnotologue JL 20 juin 2007 17:58

    Vous dites : «  »Et le contingent est là pour une raison très simple, c’est parce que le monde a été créé. Et cela ne pouvait avoir lieu que dans une vision judéo-chrétienne du monde, avec le créationnisme. «  »

    Question : doit-on comprendre que vous défendez là une thèse créationniste ?


    • patrice lanoy patrice lanoy 20 juin 2007 18:19

      Bonjour Merci. Houla, non, pas le moins du monde. Michel Serres situe là le point de vue « philosophique » chrétien dans l’histoire des idées. On peut affirmer que Michel Serres est tout sauf créationniste.

      Il ne vous aura pas échappé que le point de vue créationniste a été de mise en Occident chrétien jusqu’à fort récemment. Voir les Conciles du Vatican, notamment celui de Trente. Et les ennuis de ceux qui s’opposèrent, jusqu’au 18eme.

      Cordialement.


    • Francis, agnotologue JL 21 juin 2007 08:44

      Alors j’ai dû passer ’à coté’.

      Peut-être faut-il comprendre que l’on n’a pu faire ces progrès que parce que l’on croyait au créationnisme ? J’en doute.

      M. Serres, encore lui dit : «  »L’idéaliste dit que le réel c’est notre représentation du monde, notre idée... Le réaliste dit le réel extérieur à ma représentation, il existe. Mais ces deux décisions sont asymétriques.«  »

      Et moi, excusez du peu je dis : le réel c’est à la fois ma représentation du monde, le monde, et moi".


    • Francis, agnotologue JL 21 juin 2007 23:43

      «  »Il ne vous aura pas échappé que le point de vue créationniste a été de mise en Occident chrétien jusqu’à fort récemment. «  »

      Non seulement ça ne m’a pas échappé, mais de votre coté vous aurez sûrement remarqué que ce point de vue revient en force. Et c’est ce qui m’inquiète.

      à vous lire. Cdt.


    • toapes 21 juin 2007 21:27

      Ouais, c’est ça l’idée, on a avancé en physique, et dans la connaissance en général (Einstein, Heisenberg, Planck et toute la clique), parce qu’on était persuadé que l’homme avait été parachuté de toute pièce il y a six milles ans du Créateur sur la Terre... C’est ça que dit Michel Serres !

      Genre !

      Il y a peut-être quelque chose de différent, dans ce que dit Michel Serres, de ce qu’on entend « usuellement » par créationisme. Peut-être ça vaut le coup de lire le texte et la manière dont il l’explique plutôt que de jouer les esprits offusqués en tiquant sur un mot, parce qu’il aurait maladroitement glissé hors du « scientifiquement correct », ou alors aurait révélé sa véritable nature, obscurantiste forcément.

      Chouette chouette, il a prononcé un mot interdit, il n’y a plus qu’à s’offusquer et se baigner suavement dans notre douce arrogance : « j’en doute ».

      Pas de commentaire sur le dernier paragnraphe, sauf que ça ressemble de loin à la deuxième méditation, et que j’ai du mal à cerner ce que ça apporte de plus que « votre représentation », et à qui alors vous adressez vous ?


      • Francis, agnotologue JL 22 juin 2007 08:53

        Toapes, c’est moi qui ai prononcé ce mot. Votre texte, au second degré, est ambigü pour moi. Pouvez-vous être plus clair ? Merci.


      • toapes 22 juin 2007 16:30

        C’est de « créationisme » que je parle bien sûr ! Je trouve dommage que vous le ponctionniez isolèment du texte de Michel Serres, car il en donne dans ce même texte une explication très ouverte, beucoup plus que celle qu’entend usuellement le sens commun et qui alimente à bon frais une opinion selon laquelle la science moderne aurait chassé de ses terres l’idée d’un Dieu créateur.

        Il y a deux choses à mon sens dans son texte ici très intéressantes et assez nouvelles vis à vis de certaines idées reçues : l’idée que la civilisation judéo-chrétienne a produit une recherche intellectuelle propre à accepter la contingence amène en effet :
        - l’attitude de foi, c’est-à-dire d’attente, est propre à inspirer une recherche capable de s’effacer devant la contingence et de se remettre en cause.
        - le créationisme de Michel Serres, parce qu’il s’affirme et s’identifie dans cette prise en compte de la contingence se pose en porte-à-faux contre celui du sens commun, selon lequel l’homme est créé de toute pièce et de manière définitive à un moment de l’histoire.

        Voilà, je trouve ça dommage de relever le mot « créationisme » de manière isolée comme ça et de d’en instruire un procès larvé qui ne peut que difficilement échapper à la facilité de l’amalgamer à une théorie biologique marginale et, à mon sens, vulgaire.

        voilà en gros, désolé pour mes ambiguités, j’espère avoir été plus cair ici. toapes


      • patrice lanoy patrice lanoy 22 juin 2007 21:21

        Ce « débat » sur le créationnisme n’a evidemment pas lieu d’être, comme bien lu et vu par Toapes. Il s’agit d’un contresens.

        Sur la contingence :

        Au XIIIe siècle, la Faculté de théologie de l’Université de Paris a été le lieu de débats philosophiques majeurs. Investis de la plus haute autorité en matière d’exégèse, les théologiens ont questionné la philosophie massivement héritée des mondes grec et arabe à partir du XIIe siècle. Ils l’ont confrontée aux standards de la culture latine, dominée par les figures d’Augustin et de Boèce. Les textes traduits ici (Être, essence et contingence, Ed. Belles lettres) sont les pièces d’une discussion qui a opposé trois des maîtres les plus influents de ce temps. Ils datent des années 1286-1287 et constituent la version rédigée de la première querelle sur l’être et l’essence en Occident latin. Déjà en 1250-1260, Thomas d’Aquin avait établi une distinction entre l’être - l’acte d’exister -, et l’essence - la détermination qui fait d’une chose ce qu’elle est, un homme, une rose, etc. En 1286, Gilles reformule cette distinction sur de nouvelles bases. Dans le contexte d’un néoplatonisme converti aux exigences de la théologie chrétienne, il considère l’être comme une forme réellement ajoutée à l’essence simple - la rose en soi - pour la faire exister dans la réalité concrète. Henri de Gand combat cette distinction, qu’il juge outrée, en associant Avicenne au souci de la contingence (Dieu est libre de créer le monde qu’il veut). Godefroid de Fontaines rejette aussi la distinction réelle, mais pour revenir à ce qu’il considère comme la stricte orthodoxie philosophique. Convoquant les enseignements des philosophes des années 1270 (Siger de Brabant), il confine la distinction entre « être » et « essence » dans le champ de la sémantique. Au cours de ce débat, la temporalité et la contingence se sont installées au coeur des questionnements philosophiques.


      • patrice lanoy patrice lanoy 22 juin 2007 21:24

        Pour ceux que la filiation entre la « contigence » et la lecture mathématique du monde intéresse :

        Être, essence et contingence

        Ed Belles Lettres

        Au XIIIe siècle, la Faculté de théologie de l’Université de Paris a été le lieu de débats philosophiques majeurs. Investis de la plus haute autorité en matière d’exégèse, les théologiens ont questionné la philosophie massivement héritée des mondes grec et arabe à partir du XIIe siècle. Ils l’ont confrontée aux standards de la culture latine, dominée par les figures d’Augustin et de Boèce. Les textes traduits ici sont les pièces d’une discussion qui a opposé trois des maîtres les plus influents de ce temps. Ils datent des années 1286-1287 et constituent la version rédigée de la première querelle sur l’être et l’essence en Occident latin. Déjà en 1250-1260, Thomas d’Aquin avait établi une distinction entre l’être - l’acte d’exister -, et l’essence - la détermination qui fait d’une chose ce qu’elle est, un homme, une rose, etc. En 1286, Gilles reformule cette distinction sur de nouvelles bases. Dans le contexte d’un néoplatonisme converti aux exigences de la théologie chrétienne, il considère l’être comme une forme réellement ajoutée à l’essence simple - la rose en soi - pour la faire exister dans la réalité concrète. Henri de Gand combat cette distinction, qu’il juge outrée, en associant Avicenne au souci de la contingence (Dieu est libre de créer le monde qu’il veut). Godefroid de Fontaines rejette aussi la distinction réelle, mais pour revenir à ce qu’il considère comme la stricte orthodoxie philosophique. Convoquant les enseignements des philosophes des années 1270 (Siger de Brabant), il confine la distinction entre « être » et « essence » dans le champ de la sémantique. Au cours de ce débat, la temporalité et la contingence se sont installées au coeur des questionnements philosophiques.


      • Francis, agnotologue JL 22 juin 2007 20:10

        Wikipedia :

        "Le dessein intelligent (Intelligent Design en anglais) est le concept selon lequel « certaines observations de l’univers et du monde du vivant sont mieux expliquées par une cause intelligente, et non par des processus aléatoires tels que la sélection naturelle. »

        Ce concept a été développé par le Discovery Institute, un cercle de réflexion conservateur chrétien américain. Certains commentateurs y voient une résurgence du créationnisme.

        "Le créationnisme au sens large est la thèse selon laquelle la Terre, et par extension l’Univers, a été créée par un être, c’est-à-dire un dieu. Il constitue une croyance des trois principales religions monothéistes (judaïsme, christianisme, et islam). Le créationnisme peut aller, dans ses formes extrêmes, jusqu’à la négation de toute théorie de l’évolution. Le débat entre créationnisme et évolutionnisme est intense aux États-Unis, mais, en 2007, il n’a pas encore vraiment atteint l’Europe.

        "Les défenseurs de ce concept, dans le domaine de la biologie et de la biochimie, affirment que la théorie scientifique traditionnelle de l’évolution par voie de sélection naturelle ne suffit pas pour rendre compte de l’origine, de la complexité et de la diversité de la vie. En particulier, les partisans de ce concept estiment qu’il existe des exemples de complexité irréductible qui ne peuvent être expliqués par l’évolution, et plaident donc pour la théorie du Dessein intelligent.

        Caractère scientifique L’Académie nationale des sciences des États-Unis (United States National Academy of Sciences) et le Centre national pour l’éducation scientifique des États-Unis (National Center for Science Education) ont décrit le Dessein intelligent comme étant de la pseudo-science


        • Francis, agnotologue JL 23 juin 2007 14:11

          A Agoravox : Je note dans la rubrique : «  »Derniers commentaires de cette contribution«  » de « Tentative de définition du réel : M. Serres et E. Klein »

          http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=26015

          ceci :

          «  »22/06 : 21h24 > Tentative de définition du réel : M. S ... Pour ceux que la filiation entre la « contigence » et la lecture mathématique du monde intéresse ... par patrice lanoy

          22/06 : 21h21 > Tentative de définition du réel : M. S ... Ce « débat » sur le créationnisme n’a evidemment pas lieu d’être, comme bien lu et vu par ... par patrice lanoy

          22/06 : 20h10 > Tentative de définition du réel : M. S ... Wikipedia :"Le dessein intelligent (Intelligent Design en anglais) est le concept selon lequel … par JL

          …….«  »

          Question à Agoravox : Comment se fait-il que je ne puis afficher le commentaire de patrice lanoy du 22/06 : 21h21 ?

          J’ai essayé tout, à commencer par « actualiser » bien sûr (encore que c soit inutile, j’ai paramétré mon navigateur pour avoir toujours la nouvelle version su site), en cherchant à « contourner » ce lien.

          Le commentaire a-t-il été retiré ? Je subodore qu’il faisait réponse à mon propre commentaire. JL


          • patrice lanoy patrice lanoy 23 juin 2007 14:25

            @ jl c’est juste le système qui coince parfois, je crois j’ai reposté voir-ci dessus

            rien à voir entre contingence et créationnisme « actuel »

            cordialement

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