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La souffrance dans le milieu professionnel : gérer le stress ou revaloriser le travail ?

Un nouveau rapport, commandé par l’Elysée, vient d’être publié. Il s’intitule : "Rapport sur la détermination, la mesure et le suivi des risques psychosociaux au travail." Ce texte de 42 pages, comme l’indique son titre, est avant tout un travail d’observation et les mots comme "mesurer", "recenser" et "indicateurs" reviennent régulièrement. Il est aussi question - et l’expression est osée - de faire une "autopsie psychologique des cas de suicides". Bref, il s’agit en grande partie de mesurer l’ampleur du phénomène du stress au travail. Apparemment, les auteurs du rapport ne sont d’ailleurs pas complètement satisfaits de leur enquête car ils préconisent de lancer à présent des études approfondies.

Les causes du stress ne sont évoquées que dans un court paragraphe. Le rapport aborde aussi les efforts de prévention à envisager. Rien de très original : redéfinir les responsabilités de chacun, répartir plus justement la charge de travail en fonction des effectifs, mais aussi aider les individus à mieux gérer leur stress, leur apprendre à se relaxer et dialoguer avec eux.

Un rapport assez froid et technique. Pourtant, la phrase de conclusion est tout un programme :

"Ainsi, point n’est besoin d’attendre pour agir ensemble, si nous le voulons, et pour remettre l’homme au centre du modèle et des préoccupations de l’entreprise."

Quand, pendant la campagne présidentielle, j’ai entendu parler de "revalorisation du travail", j’avais d’ailleurs cru qu’il s’agissait de cela : remettre l’homme au centre du monde du travail. J’avais cru qu’il s’agissait de "redonner de la valeur" au travail qui, en effet, est souvent source de souffrance ou de mal-être alors qu’il devrait et pourrait être tout autre chose. Hélas, faux espoir, il ne s’agissait que de demander aux salariés de faire des heures supplémentaires. On était dans le domaine financier et non dans le domaine psychologique ou philosophique. Malentendu ! Mais voilà que le sujet de fond revient sous un autre angle.

"Quand on aime, on ne compte pas". C’est vrai aussi pour le travail : quand on aime ce qu’on fait, on ne compte pas les heures, on ne compte pas les années. Parenthèse : si les Français étaient mieux dans leur travail, la réforme des retraites serait d’ailleurs mieux passée.

Nous voilà donc invités à avoir une réflexion de fond sur le travail. Pourtant, a-t-on besoin de nouvelles études pour définir les causes du stress et ses remèdes ?! Ces recherches n’ont-elles pas déjà été faites ? Tout n’a-t-il pas déjà été dit ? Bien sûr que si ! Et depuis bien longtemps ! Par des penseurs et philosophes de tous les pays : Hegel (l’homme se libère par le travail en prenant conscience de lui-même), Marcuse (le travail répétitif et parcellaire aliène l’homme qui devient unidimensionnel), Hannah Arendt (elle observe que toutes les langues européennes distinguent le labeur et l’oeuvre et que c’est l’oeuvre qui épanouit l’homme), Jean-Paul II ("le travail est avant tout pour l’homme et non l’homme pour le travail") et bien d’autres...

Pourquoi y a-t-il souffrance dans le travail ? En lisant ces penseurs de bords si différents ainsi que la belle phrase de la conclusion du rapport, on trouve une réponse commune : il y a souffrance quand, dans le monde du travail, l’homme n’est plus à la première place, quand il est un pion sur l’échiquier, quand il n’est pas reconnu en tant que personne dans son travail, quand il doit s’adapter à la machine et non la machine à lui pour soulager sa peine, quand il n’est pas respecté dans son rythme, dans ses obligations familiales, dans son besoin de créativité et d’initiatives, quand la loi du marché et la loi du profit passent avant son équilibre personnel, quand les hommes sont au service de l’entreprise au lieu que ce soit le monde du travail qui est au service de l’être humain.

"Le travail est avant tout pour l’homme et non l’homme pour le travail".

Bref, suite à ce rapport, ou bien on va chercher à gérer le problème existant en apprenant aux salariés à le supporter ou bien on va s’attaquer aux causes en oeuvrant pour une réelle revalorisation du travail. Mais redonner de la valeur au travail, c’est lui redonner une dignité et un sens afin qu’il contribue à l’épanouissement de la personne et cela peut nous entraîner loin, très loin, sûrement plus loin que ne le souhaitent les chefs d’entreprises et les politiques qui les soutiennent. Là est le problème.


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