La communication asymétrique
Ce que nous pourrons lire demain dans Paris-Match :
Exclusif : nos journalistes ont retrouvé les talibans qui ont abattu les dix soldats français.
Eric de Lavarène "a rencontré un des assaillants qui ont tendu un piège fatal aux hommes du 8e RPIMa le 18 août dernier en Afghanistan" avec la photographe Véronique de Viguerie.
Que nous apprennent-ils, à travers cette interview ?
"Ces talibans sont installés à une vallée de distance seulement de l’Uzbin où a eu lieu l’embuscade qui a coûté la vie aux soldats français. Le premier village afghan est à vingt minutes de marche. Selon un chef taliban, ce n’était pas compliqué. ’Nous disposons de caches d’armes un peu partout et nous connaissons évidemment bien le terrain. Nous étions positionnés avant qu’ils n’arrivent. Cent quarante combattants bien entraînés’."
Il est tout à fait remarquable que des journalistes soient allés interviewer les talibans juste après les bombardements ayant fait des victimes parmi les civils...
Au travers de cette vidéo, Véronique de V. nous explique que, pour réussir cette interview, il a fallu contacter les chefs talibans et ce sont les "têtes pensantes qui examinent la demande et qu’eux aussi commencent à être bons en communication" (vous noterez le sourire) et que, par conséquent, une fois que ces têtes pensantes ont donné leur aval, les journalistes sont quasiment sûrs de pouvoir se déplacer sans encombre. Et elle rajoute : "J’imagine que les services secrets aimeraient bien savoir où se trouvent ces talibans-là (ceux qui ont fait le coup de force contre les Français), ce qui n’est pas très difficile à savoir..."
Les journalistes d’investigations seraient-ils mieux renseignés que les agents de la DST ? On peut se le demander. De plus, à la lecture des explications données au sujet de l’attaque du 18 août, nous pouvons noter que les talibans connaissent aussi très bien leur cible :
"Les talibans ont des kalachnikovs, des fusils de tireurs d’élite et des lance-roquettes RPG pour frapper des véhicules, mais qu’ils utilisent aussi comme mortier. Très vite, le chef de section du 8e RPIMa, l’adjudant Evrard, est touché à l’épaule. L’interprète et un transmetteur radio sont mortellement blessés. Une deuxième radio est détruite".
Nous pouvons donc en déduire que les talibans, comme les journalistes d’investigation, tiennent des informations de premier ordre.
Alors que dire de la mort de ces dix hommes, que dire aux familles, aux enfants, aux frères, aux parents ?
Sous couvert d’une traque d’un hypothétique ennemi, où, selon le besoin de la source d’information, on utilise le terme "terroriste" ou "barbare moyenâgeux", la mort de jeunes soldats permet encore à servir la soupe infâme de l’information spectacle... Cette embuscade n’a, militairement, pas une grande importance d’un point de vue stratégique, mais on peut relever le fait qu’elle en a de plus en plus au niveau médiatique. Mais où donc ces barbares moyenâgeux ont-ils appris à utiliser les nouveaux outils de communication et de guerre asymétrique ?
Il est d’autant plus étonnant qu’il y a quelques années de cela un autre journaliste avait déjà tissé des liens avec la résistance afghane du temps où elle aurait contré l’influence des talibans. Mais force est de constater que nos politiques ont fait un autre choix de communication à l’époque.
Pour aller plus loin : La Guerre asymétrique ou la défaite du vainqueur, de Jacques Baud, Editions du Rocher.
Pour assurer leur propre sécurité, les « Occidentaux » doivent donc se résoudre à (re)penser et accepter le conflit dans toute sa dimension tragique, et donc à se réapproprier les valeurs « archaïques » - en fait aristocratiques et communautaires - qui le fondent, l’expliquent et le transcendent.
Lien doc : http://www.polemia.com/contenu.php?cat_id=43&iddoc=330
Autre doc : http://pedagogie.ac-montpellier.fr/hist_geo/defense/pdf/cercle/asymetrie_defense.pdf
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