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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Marcel Mouloudji, un artiste entier

Marcel Mouloudji, un artiste entier

Marcel Mouloudji est né le 16 septembre 1922 à Paris.

Il est le fils d’un ouvrier maçon d’origine Kabyle, et d’une mère bretonne, comme il le dira dans les années 70 "Catho par ma mère, musulman par mon père". Sa mère sera internée après avoir sombré dans l’alcoolisme et la folie alors que Marcel n’a pas encore 10 ans.

La famille vit très modestement dans le XIXème arrondissement. Très tôt, le jeune Marcel est imprégné de politique en accompagnant son père dans les meetings du parti communiste. Enfant, avec son frère André, ils exercent une quantité de petits métiers dont celui de chanteur de rue.

Durant son adolescence, il monte toujours avec son frère André, un petit groupe au sein des faucons Rouges, un mouvement de jeunesse de gauche.

En 1935, il fait la connaissance de Sylvain Atkine, metteur en scène dans le Groupe Octobre, organisation affiliée à la Fédération des théâtres ouvriers de France. C’est là qu’il sera remarqué par de grands noms de la scène comme Jean-Louis Barrault, qui l’hébergera et l’introduira dans le milieu artistique de Paris. Il suivra également des cours avec Charles Dullin.

A l’époque du Front Poulaire, et avec de nombreux autres artistes solidaires des grandes grèves de 1936, il joue dans les usines.

C’est aussi à cette époque, et alors qu’il n’a que 14 ans, qu’il démarre au cinéma grâce à Jacques Prévert, qui lui fait obtenir un petit rôle dans Jenny de Marcel Carné en 1936. Il enchaîne alors film sur film.

Un des plus célèbres d’entre eux, est "les Disparus de Saint-Agil" de Christian-Jaque en 1938.

Au début de la Seconde Guerre mondiale, Mouloudji file dans le sud de la France, à Marseille, en zone libre, avec le Groupe Octobre. C’est là qu’il fait la connaissance du chanteur Francis Lemarque.

Grâce à son frère André, il évite le STO . Mais Paris lui manque, et assez vite il repart pour y vivre en semi-clandestinité tout en y effectuant un tas de petits boulots.

C’est aussi pendant la guerre, en 1943, qu’il fait la connaissance de Louise Fouquet, dite Lola, qui deviendra sa femme et son agent artistique jusqu’en 1969.

C’est à cette période également qu’il se décide à écrire "Enrico", un livre de mémoire (il a 20 ans !) qui reçoit le Prix de la Pléiade à la Libération en 1945.

Après guerre, tout en poursuivant une carrière au cinéma, Boule de Suif (Christian-Jaque, 1947), Nous sommes tous des assassins (André Cayatte, 1952) etc…., il s’intéresse de plus en plus à la chanson, dans les cabarets en vogue, il chante Boris Vian ou Jacques Prévert.

En 1951, Mouloudji enregistre son premier disque avec des titres comme "Rue de Lappe", "Si tu ‘imagines" et "Barbara".

C’est Jacques Canetti, le fameux agent artistique qui a tant fait pour la chanson française, qui fait enregistrer "Comme un p’tit coquelicot" à Mouloudji. Cette chanson obtient un énorme succès et remporte le Grand Prix du disque 1953 et le Prix Charles-Cros en 52 et 53.

"Un jour tu verras" en 1954 obtiendra un succès aussi important.

Toujours engagé et militant pacifiste, Mouloudji devient une cible politique quand il interprète au Théâtre de l’Œuvre le jour même de la chute de Diên Biên Phu, Le Déserteur de Boris Vian.

La chanson est interdite d’antenne. Par la suite, d’autres titres de son répertoire connaîtront le même sort.

Interprète des textes des autres jusqu’à cette période, il commence à écrire de plus en plus à la fin des années 50. Cette fois la chanson prend la première place dans sa vie.

Lorsque surviennent les événements de Mai 68, le militant politique reprend la route pour chanter dans les usines comme en 1936. Pour Mouloudji les convictions prédominent sur la carrière.

C’est également à cette époque qu’il fait la connaissance de la comédienne Lilianne Patrick, avec qui il partagera sa vie désormais.

En 1974, il participe à l’enregistrement d’un album consacré aux chants et poèmes de la Résistance. On l’entend également sur une compilation de chants ouvriers et une autre sur la Commune.

Mouloudji continue sa route sans se soucier des conséquences. Il sait que de toutes façons il sera très peu diffusé en radio.

L’essentiel c’est que le public lui reste fidèle. C’est ainsi qu’en 1974 il est accueilli avec enthousiasme lorsqu’il se produit sur la scène du Théâtre de la Renaissance, puis à l’Olympia en septembre 75.

En 1976, il enregistre avec l’accordéoniste Marcel Azzola une anthologie du musette.

Dans les années 80, il continue de chanter, on le retrouve entre autres en 1987 à l’Élysée Montmartre. Puis il consacre plus de temps à l’écriture et à la peinture, ses anciennes amours.

A 70 ans, en 1992, une pleurésie lui enlève en partie sa voix.

Cependant il se produira encore par exemple le 17 novembre 1993, dans la carrière de la Sablière à Chateaubriant, (Loire-Atlantique), où avaient été fusillés 27 communistes, dont le jeune Guy Môquet, le 22 octobre 1941.

En mars 1994, il est invité au festival Chorus des Hauts-de-Seine en région parisienne pour un hommage. Puis il donne un ultime récital près de Nancy en avril.

Il s’éteint le 14 juin 1994 alors qu’il avait encore de nombreux projets. Il est enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris.

 

 


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21 réactions à cet article    


  • Pierre Régnier Pierre Régnier 5 novembre 2013 10:13

    Hasard intéressant, juste à côté du vôtre paraît mon article sur Natasha Besriche qui, comme le grand Mouloudji a elle aussi, par sa mère je crois, des origines kabyles


    • ARMINIUS ARMINIUS 5 novembre 2013 10:37

      Mouloudji, c’est surtout pour moi la version pacifiste de « Messieurs qu’on nomme grand » qui dénonçait l’absurdité des guerres et fut censurée à l’époque de l’Indochine et de l’Algérie...nombre de jeunes pacifistes« appelables » de l’époque se la passait en boucle et la fin ou le « déserteur » annoçait : si vous me poursuivez prévenez vos gendarmes que je serai sans armes et qu’ils pourront tirer...« en opposition avec le texte initial de Boris Vian : » que je possède une arme et que je sais tirer..." qui lui seul aurait (peut-être) mérité la censure...


      • Pierre Régnier Pierre Régnier 5 novembre 2013 11:12

        Arminius

        J’ai une expérience semblable. En 1959 à la caserne de Montargis, un copain me passa en cachette La Question d’Henri Alleg et Le Déserteur de Boris Vian. J’ai, depuis, constaté qu’il y avait deux versions mais je ne savais pas que c’était Mouloudji qui avait « pacifié » la chanson.

        Après ça j’ai été envoyé en Kabylie pour y faire la guerre mais, ayant été nommé « instituteur » j’ai eu la grande chance de ne pas la faire vraiment. J’ai eu aussi la grande chance de faire la connaissance du peuple kabyle pour lequel j’ai, depuis, une attention et une affection particulières, d’où mon commentaire précédent.


      • cedricx cedricx 5 novembre 2013 14:31

        Tiens comme c’est amusant, moi aussi il y a quelques moi j’ai visité la région, la vallée de la Soumam particulièrement, où c’est tenu en 1956 le fameux congrès du FLN qui posait les bases de l’Algérie indépendante et j’ai eu la chance grâce à une heureuse rencontre de participer de nuit à la commémoration de cet événement avec levée du drapeau algérien et beaucoup d’émotion sur les visages, c’était vraiment émouvant ! Si ça se trouve le père de Mouloudji était issue de cette vallée, qui sait ?


      • Constant danslayreur 5 novembre 2013 14:49

        Cedricx
        « Si ça se trouve le père de Mouloudji était issue de cette vallée, qui sait ? »

        Il n’y a pas de qui sait qui tienne, Saïd Mouloudji est un Ait Waghlis … la plus grande tribu de la Vallée de la Soumam.

        http://fr.wikipedia.org/wiki/At_Waghlis


      • cedricx cedricx 5 novembre 2013 14:58

        Merci Constant pour cette précision !


      • Pale Rider Pale Rider 5 novembre 2013 14:47

        Merci pour cet article qui fait du bien en ces temps de racisme de plus en plus menaçant.


        • Henri Diacono alias Henri François 5 novembre 2013 15:09

          A l’auteur,
          Quelle joie et surtout quelle émotion de retrouver, grâce à vous, tout une tranche de jeunesse à la fois militante et musicale. D’avoir fait resurgir dans notre mémoire collective les paroles divines qu’on avait failli oublier.
          Mais nom d’un chien n’y a -t- il pas en France un quidam quelconque, un producteur, un homme de télé,un chanteur, qui puissent redonner vie à ces textes et ces mélodies, à cet homme, qui demeurent d’une actualité brûlante et donc essentiels de nos jours ? 


          • kitamissa kitamissa 5 novembre 2013 15:14

            Pourquoi n’a-t-il pas été prendre le maquis avec ses frères d’armes alors Mouloudji ??


            Résistant, c’est pas que chanter dans le confort d’un petit monde intello, il faut prendre son courage et son fusil à deux mains !! 

            • norbert gabriel norbert gabriel 5 novembre 2013 15:28

              Parce qu ’il était pacifiste de nature, et pas très doué pour les armes d’une part.. D’autre part, à l’époque il ne chantait pas, même s’il a fait un essai sans suite dans les années 44-45 avec son ami Henri Crolla ’Enrico’ à la guitare.
              Qui auraient pu être ses frères d’armes selon vous ?
              Est-ce de Gaulle en Angleterre était un résistant selon vous ? Il n’ a pas pris le maquis et son fusil lui non plus ... Quant à son rôle, ce qu’on sait c’est que Lola Fouquetn sa compagne, était en prison dans les années 43’44 pour faits de résistance


            • cedricx cedricx 5 novembre 2013 16:01

              Oh le gros et vulgaire mensonge Morvandiau !!! Mais je suis sûr que de votre part c’est un mensonge par ignorance dicté par votre haine du F.L.N ( 50 ans après, vraiment vous devriez vous inquiétez et sans doute vous faire soigner si je puis me permettre !)

              Les kabyles et leurs compatriotes des Aurès, eux aussi berbères, ont été le fer de lance de l’insurrection algérienne, que vous l’ignoriez soit, mais que vous prétendiez sciemment le contraire c’est insulter l’intelligence des lecteurs d’Agoravox. 

            • Henri Diacono alias Henri François 5 novembre 2013 16:56

              On peut résister avec ses propres armes, surtout lorsqu’on a en horreur celles qui tuent, qui ôtent la vie. Quant au petit monde intello que vous évoquez pour Mouloudji laissez moi sourire. Et puis, vous savez, votre sorte de résistance - je le répète chacun la sienne - aurait pu nous faire perdre cet homme qui a eu le don de faire beaucoup réfléchir un bon nombre d’entre nous.
              Bien à vous. Jeune homme. Du moins je le crois.
              PS - Le fait qu’il ait été kabyle n’ a eu aucun effet sur son attitude d’alors. Pour l’avoir rencontré voilà une quarantaine d’années à Nice, je peux vous affirmer qu’il était d’une très grande timidité.


            • Pierre Régnier Pierre Régnier 5 novembre 2013 17:09

              morvandiau, Cedricx...

              Hors la guerre il me semble qu’ici Taos Amrouche résume bien la réalité kabyle :

              http://www.dailymotion.com/video/xjo3k9_taos-amrouche-et-la-dualite-culturelle_news


            • norbert gabriel norbert gabriel 5 novembre 2013 15:18

              C’est un des purs disciples du Groupe Octobre et de la contre-bandes des Prévert, quand il n’y avait pas d’étiquettes pour classer les artistes dans des boites étanches. Il a eu aussi le mérite et le courage d’étre le premier à éditer Bernard Diméy.
              Pour « le déserteur » il y a une histoire complète de cette chanson et ses avatars divers, c’est là
              http://www.nosenchanteurs.eu/index.php/2012/12/29/histoire-dune-chanson-le-deserteur/


              • cedricx cedricx 5 novembre 2013 16:25

                Merci pour le lien, en effet j’apprend beaucoup de choses sur l’histoire de cette chanson.


              • fatizo fatizo 5 novembre 2013 18:43

                Merci aussi pour le lien, très intéressant . 


              • cevennevive cevennevive 5 novembre 2013 17:24

                Bonjour à tous,


                Merci Fatizo pour ce bel hommage.

                Et je pourrais chanter avec Mouloudji « que le temps passe vite, hier j’étais encore enfant, le coeur tout neuf, comme un printemps... » Ma préférée.

                Le Déserteur, le p’tit coquelicot, etc.

                Les armes dont il n’a pas voulu parlent encore de par le monde et parleront de plus en plus. La « fleur au fusil », hélas, a la couleur du p’tit coquelicot si cher à son coeur.

                Bonne soirée.

                • fatizo fatizo 5 novembre 2013 18:50

                  Bonsoir Cevennevive

                  J’ai réussi à la trouver sur Dailymotion .

                • dixneuf 5 novembre 2013 21:52

                  Si Mouloudji était encore parmi nous en France, serait-il partisan du port de la burka ? Et du voile ? Chanterait-il contre la mutilation des femmes, des mariages forcés....


                  • Henri Diacono alias Henri François 5 novembre 2013 22:16

                    Je pense sincèrement dix neuf que votre question est hors de propos dès l’instant où connaissant le parcours de Mouloudji elle n’a pas lieu d’être.
                    Mince alors ! J’ai oublié de faire un rapprochement. Vous posez cette question car le père de cet homme d’exception était kabyle donc, selon vous, islamique radical. Alors là, votre question est idiote !


                  • norbert gabriel norbert gabriel 1er septembre 2015 02:36

                    @dixneuf

                    Mais bien sûr que non pour la première option, et oui pour la seconde , il l’a assez dit (et chanté) qu’il était athée. Comment imaginer qu’un type qui s’est battu contre toutes les censures, et pour toutes les libertés pourrait se taire sur ces sujets ??

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