AA, faut pas rigoler, la dette française annonce-t-elle un scénario à la grecque ?
L’agence Standard & Poor’s a abaissé d’un cran la notation de la dette française, qui passe de AA+ à AA, autrement dit, de 18/20 à 16/20, ce qui n’est pas si mal mais traduit en langage des marchés obligataires, cela conduit à augmenter d’un cran les taux d’emprunt à 10 ans, un cran qui n’est pas si anodin car il se chiffre à 0.22 points, une goûte d’eau mais n’importe quel emprunteur ayant passé un moment avec son banquier sait ce qu’il en coûte et d’ailleurs, certains clients se mettraient carrément à poil devant le conseiller financier pour quémander une baisse du taux d’emprunt de 2 dixièmes.
Après cette décision, la seule réaction du ministre Moscovici fut de déclamer haut et fort que l’agence avait fait des calculs erronés. Alors que Jean-Marc Ayrault souligne que la dette française est l’une des mieux notées au monde. On comprend alors pourquoi tant de parents d’élèves vont voir le professeur pour dire qu’il s’est trompé dans la notation de la dissertation de philo et que l’encre crachée par le rejeton sur la feuille blanche ne méritait pas les 8 sur 20, surtout que le rejeton en question est un futur Spinoza. Cette boutade ayant été énoncée, notons cette habitude gouvernementale consistant à pratiquer le déni de réalité en ne voyant pas la situation sociale et économique. D’ailleurs, un hebdo vient de sortir un édito sur ce déni pratiqué par François Hollande, le comparant à Louis XVI avant la Révolution. Aurais-je fait des émules en titrant il y a deux semaines sur François Louis XVI ?
Concrètement, cette baisse de notation ne laisse pas augurer des jours heureux, ni pour les Français, ni pour le gouvernement. Il faudrait être aveugle ou vivre sur une autre planète pour ne pas voir que la question de la dette devient de plus en plus critique et que les déficits s’accumulent, augmentant le poids de la dette. Les officiels ont beau annoncer une réduction de quelques milliards du déficit, cela n’empêche pas la dette d’augmenter car le déficit reste élevé, autour de 4 points. De plus, les prévisions ne sont pas bonnes, ni pour ce qui concerne la croissance, ni pour l’état de l’emploi. L’engrenage est terrible car le poids de la dette impose des mesures qui empêchent la possibilité de rembourser cette dette. Le gouvernement n’aura plus le choix qu’entre la peste et le choléra, obligé de prendre des mesures fiscales drastiques ou alors de suivre les bons conseils de Mme Lagarde qui depuis son loft doré au FMI nous suggère de ponctionner l’épargne des Français, ce qui serait peut-être inconstitutionnel et surtout impopulaire. On vient vous saisir d’une partie de vos biens alors que vous avez travaillé, payé vos impôts, respecté la loi et épargné quelques sous des dépenses futures indispensables.
Sauf mesures exceptionnelles de la BCE, exceptionnelles d’autant plus qu’elles sont impossibles dans les textes, la France se dirige doucement vers un scénario à l’italienne et à l’espagnole. Avec quand même quelques atouts pour éviter de plonger et de prendre des mesures aussi pourries que la récente augmentation de la TVA sur les produits culturels décidées par Madrid ce qui a suscité une tribune salée du réalisateur Almodovar. Ce scénario, c’est un peu la traduction de l’agence S & P qui a estimé que la France avait perdu quelques uns de ses atouts qui la plaçaient dans une position plus favorable par rapport à des pays comparables.
La situation est néanmoins loin d’être catastrophique. La note AA est accompagnée d’une perspective stable. Ce qui signifie que d’ici deux ans, la note ne risque pas de baisser. Mais aussi qu’elle ne risque pas d’augmenter. En langage de bistrot, on est un peu dans la merde et on va y rester. Ce bon vieux Herriot nous dirait que l’économie c’est comme la politique qui est comme l’andouillette, faux que ça pue mais pas trop. Bonne nouvelle, la dette à court terme est encore très bien noté. La France peut lever quelques fonds sur un an à un taux autour de zéro. Et puis pour lever des fonds cette fois pour rembourser les emprunts, il reste aussi la fiscalité sur les riches. Le président devra bien y songer, d’autant plus que c’était annoncé dans son programme. Il reste à entendre l’analyse de François Bayrou, notre Nobel spécialiste de la dette.
Il me reste à livrer ma propre notation. Dans deux ans, perspective favorable pour les très riches qui vont s’enrichir, perspective négative pour les classes moyennes et les déclassés qui vont voir leur pouvoir d’achat diminuer de peu mais ces petits peu finissent par nourrir les ressentiments qui font ensuite les révoltes. La situation de la France est en plus aggravée par les égoïsmes généralisés faisant que toutes les parties se renvoient la balle et que personne n’est prêt à lâcher un peu de lest, surtout pas les plus aisés. Sinon, je confirme à nouveau que j’ai la solution pour sortir de cette crise. Si vous croisez François Hollande, glissez lui un mot sur un rédacteur d’Agoravox qui mérite d’être écouté.
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