L’anarchaïsme
C'est parce qu'il m'a été donné d'être physique, sensuelle, sexuelle, intellectuelle et spirituelle que je développe ici, et de cette manière, mon anarchaïsme.
Qu'on comprenne bien que je n'en fais pas modèle et que bien entendu, ma vérité étant mienne, je ne suis pas prosélyte. Néanmoins, je suis convaincue qu'en se livrant, en devisant et échangeant, nous nous apportons les uns aux autres matière à réfléchir et évoluer. Aucune autre ambition donc dans ce court texte.
J'ai appris de la vie que nous ne pouvons tenir plus que la largeur de nos bras, voir plus loin que notre vue, retenir plus grand que notre mémoire et dire plus loin que la portée de notre voix. Cependant, nous vivons une époque où les rencontres se font aussi par nos lectures, nos échanges par Internet, où les images imposées par le cinéma nous forgent autant que celles que l'on se fabriquent en lisant ou celles que nos yeux nous transmettent du réel. Je sais aussi qu'elles ne sont pas les mêmes ou du moins ne sont pas interprétées de la même façon, par les uns ou par les autres. Aussi, prendre connaissance des interprétations des uns ou des autres me paraît être un enrichissement. Je sais aussi, et d'expérience, que des blocages nombreux et variés autant qu'inconscients en obstruent le passage. Enfin, je sais qu'il y a des porte-voix, des amplificateurs, des images que l'on truquent, des messages que l'on assène, et pourtant, cette vérité n'en demeure pas moins vraie pour l'immense majorité des êtres vivants avec nous sur cette planète. Parce que cette vérité est indépassable, tout le reste n'est qu'un leurre. Leurre de la publicité qui engouent les dépensiers, mais leurre aussi des érudits qui accumulent savoirs anciens transmis, parfois, en d'inconnues conditions. On peut passer sa vie à cela, mais cela n'en est pas moins un leurre.
Ainsi, est-il naturel que ceux qui veulent diriger le monde soient à ce point incompétents, délictueux et inhumains : on ne peut embrasser l'humanité dans son ensemble – sauf dans les rêves des catholiques qui ne savent pas ce qu'ils disent et ne s'adressent qu'à une partie mégalomane ou illusoire de l'être humain particulier- aussi sont-ils contraints de le transformer en chiffres, en forces, en courants... pour lesquels aucun affect n'est envisageable. Leur folie n'est pas de n'être pas capables d'autre chose, notre folie est de les laisser faire ! À l'impossible nul n'est tenu. Pendant des siècles,- et l'on s'aperçoit à l'occasion que le pouvoir hérité ne donnait pas plus de pourcentages de nuls que le pouvoir confié, et que n'en donnerait le pouvoir tiré au sort-, les tenants de ce pouvoir se sentaient investis de responsabilité ; or, la mondialisation, écartant encore le champ, empêche toute responsabilisation : nous sommes rendus au delà du possible, qui était déjà impossiblement maîtrisable. S'il peut y avoir à la tête d'un troupeau un dominant, celui-ci ne pourrait être à la tête de dix, encore moins à la tête de l'espèce ! Et comme l'homme, ne vous en déplaise, est un animal, aucune raison pour que cela puisse fonctionner.
C'est le pouvoir qui est une erreur, seul le pôuvoir sur soi n'a d'intérêt.
Pourtant, il y a bien des gens qui attendent d'être guidés, confortés, sécurisés, soignés et cela n'est pas honteux : c'est. Mais c'est un obstacle.
Je ne reviendrai pas sur la perversion de la puissance ; la perversion de l'homme est sa plaie et il nous faudra beaucoup de patience pour en venir à bout, si on le veut ! Or, comme nous n'en sommes pas encore au point de le constater et de l'admettre, nous ne sommes pas rendus.
Depuis fort longtemps l'homme théorise ses réactions de survie à ses propres traumatismes infantiles, c'est ce que l'on appelle philosophie ; la philosophie, malgré son nom, n'a rien d'une sagesse dans la mesure où la sagesse s'appuie sur des données minimalistes, que l'on peut développer à l'infini, certes, mais qui, de ce fait devient universelle ; tandis que les philosophies se contredisent et si elles sont souvent à l'image de leur époque et qu'ainsi elles attirent nombre de contempteurs du commun, elles n'illustrent, au fond, que la multiplicité des réactions humaines à sa condition. L'engouement pour l'une d'entre elles n'est pas forcément le fait du savoir vendre de son auteur, mais son adéquation à une époque ; ainsi adoptée aux dépens d'autres contradictoires, elle peut faire d'énormes dégâts dans une société.
Le besoin d'uniformité est la première velléité de trouver remède à son insécurité. Ce besoin de « semblable », de n'être pas bousculé !!
Donc, les penseurs ne pensent pas tous juste, on ne les trouvent justes que s'ils nous correspondent, apportent de l'eau à notre moulin. En tenir compte dans nos engagements et prises de position peut bien être la caution de préserver une diversité qui trouve toujours à se rejoindre sur les fondamentaux.
Jadis, les femmes étaient très perceptives, elles savaient l'âme humaine ; elles savaient que le dédain et le rejet étaient dus à une déception ; elles savaient que la timidité pouvait être impolie, et mille autres choses de ce genre, aussi, étaient-elles tempérantes. Je ne vois rien de plus archaïque que ce savoir étrange qui se transmet sans école et presque sans mots ; c'est insupportable cet obscurantisme, les femmes d'aujourd'hui le savent bien qui l'ont jeté !
Or, que voyons-nous ? L'obscurantisme le plus pauvre, parfois le plus abject, faire son retour.
L'archaïsme, c'est trouver au fond de nous tous, le commun, le fondamental qui, bien sûr ne peut englober tel ou tel moeur, tel ou tel chant .
Une chose est remarquable, la civilisation, plutôt que de réunir les hommes sur leur commun profond, faisant fi de leurs aspérités qu'en aucune manière nous sommes obligés de fréquenter, a inventé une façon d'artifice, de devoir, d'obligation : la politesse. Ceci est tellement ancré que la plupart ne peuvent s'en départir, ne peuvent comprendre, admettre, que cette surface apprise, à l'intérieur d'une même culture, -ce qui pose problème si on sort de chez soi-, n'aide en rien l'harmonie de la cohabitation tant les passions, les frustrations, les convictions, les croyances sont puissantes qui provoquent des dérapages à la moindre occasion. On peut croire qu'elle fonctionne quand tout va bien alors qu'en réalité c'est l'assurance donnée par la paix, qui fonctionne ; peut-être des formules sont-elles empruntées pour se faire reconnaître, mais comme j'ai toujours entendu la politesse comme une manière poli(ssé)e de garder la distance, c'est plutôt une barrière hissée au delà de laquelle la guerre sera déclarée !
Alors que reconnaître en l'autre la même faiblesse, le même désarroi d'une même condition, évident peut-être surtout quand il se déguise en certitude et qu'il s'affirme contre vous, donne un efficace onguent aux relations, quand elles sont obligées , car, par ailleurs, rien ne nous contraint à nous causer. Ce subterfuge tente de réparer une obligation inepte : la contrainte, le rythme boliogique bouleversé pour satisfaire à l'exploitation de l'homme par l'homme ; tant que l'on ne sortira pas de cette anomalie fondatrice de tout le reste, nous tournerons en rond dans notre bocal ; car c'est une chose de bouleverser son rythme naturel pour parer à des urgences, ou à des passions, il en est une autre que d'y vivre sa vie, tellement que l'on ne sait plus quel est son rythme naturel ! C'est à cet endroit que tout se déclenche, depuis l'incomprenante mère elle même incomprise, jusq'au zèle du dévoué serviteur qui devient vite le passif exploité. Mais on passe par toutes les soumissions à l'autorité induites par la soumission au père ou à la mère ; les peurs d'être rejetés à celles d'être punis ; bref, un parcours de non combattant programmé. Et c'est là qu'il faut dérailler.
Il est notable cependant que les déguiseurs de doute profond, cherchent l'affrontement comme par désir inconscient de se faire reconnaître, voire consoler mais sans pouvoir l'admettre.
Pourtant cela est instinctif, de trouver en l'autre le petit biais d'entente pour que l'éphémère rencontre se passe bien ; quand c'est la confrontation qui se désire, c'est une pathologie !
C'est pour cette raison que je base, en premier, l'anarchaïsme, sur la santé : l'anarchisme ne peut être qu'un « modèle » sain ! C'est pourquoi il est utopie. Quand je parle de santé, je parle de santé psychique, base de santé physique et sexuelle.
Malgré les ajouts, malgré les artifices, malgré les névroses, il y a, au fond de chacun, un germe de santé primordiale, quelque chose qui peut nous guider si on l'entend. Mais pour l'entendre il faut ne pas s'être assourdi par nos trucs qui ne semblent marcher que parce que nous y sommes aliénés, pour avoir l'air quand même.
Reich parle de cuirasse, vous savez cette armure qui est sensée nous protéger et qui en fait nous alourdit et nous fait avancer au pas du robot en détruisant tout sur notre passage. Enfermé à l'intérieur au point d'être aveugle au monde, je ne m'aventurerais pas à soigner ; mais la plupart n'est pas à ce point enfermée ; il advient des évènements, des rencontres, des relations, des dilemmes, des contradictions, des blessures qui font souffrir : c'est le moment d'ouvrir les yeux du cœur. Si tous les cœurs étaient ouverts et si tous les yeux étaient à leur service, tout serait plus facile. La croyance, la conviction, la volonté... seraient des mots- musée. Des archaïsmes !!
Il faut bien, évidemment, ne pas confondre ce lieu commun entre tous les êtres vivants, fruits du hasard en tant qu'individus, éphémères et sans importance, ce qui laisse à chacun sa responsabilité et son centre de perceptions unique, donc valable par essence et « ayant droit », avec le plus petit dénominateur commun d'un concensus imposé, inventé par un mental déjà, donc spéciste, et qui, comme chacun le sait bien, tire tout le monde vers le bas.
Le lieu commun de tous les êtres vivants, c'est la vie, une vie qui renaît sans cesse mais qui meurt, forte de laisser sa place à d'autres incarnés éphémères tout autan, mais qui, dans leur temps imparti, quelques heures, quelques jours, quelques années, seront, de fait ou s'ils le veulent, les maillons d'une chaîne qu'on peut ou veut savoir infinie.
Des espèces disparaissent, des cultures disparaissent, on peut faire en sorte de les protéger, nous, humains, logés à la même enseigne, donc par essence motivés, responsables, compatissants, mais ayant acquis pour survivre en tant qu'espèce, un mental et un intellect qui nous plongent dans le passé, le futur, le possible ou le souhaitable, comme bons nous semblent.
L'anarchaïsme est le but de cette entente foncière qui ne nous exonérera pas des conflits ou des luttes que chaque être vivant a à mener pour assurer sa survie, la survie de son espèce ; mais l'archaïsme est forcément ce lieu commun qui nous y conduira. Ce lieu commun que l'on s'efforce de nier.
L'empire, n'est pas naturel ; la suprématie mondiale, n'est pas naturelle ; elle est la construction de cerveaux malades. Car tous les hommes, autant qu'ils sont, même abâtardis par leur histoire, leurs peurs, leur ignorance, possèdent cette nécessité primordiale de préserver leur vie, individuelle, mais leur survie en tant qu'espèce. Aller à sa perte comme nous le faisons aujourd'hui n'est que le symptôme de carences, de traumatismes, d'insanité.
L'archaïsme est ici pris au sens de simplicité, profondeur, et partage ; simplicité parce qu'elle précède l'amoncellement d'artifices au cours des siècles et parce qu'elle le but de la sagesse ( celle-ci étant l'épanouissement de la santé mentale), profondeur parce que nous sommes pluriels et que la part active de notre psyché se situe dans les profondeurs, partage qui rappelle notre nécessité de vivre en groupes, ensemble.
L'amour est simplicité, l'amitié, l'hospitalité, -la simplicité d'un accueil qui met à l'aise le passant-, la simplicité d'une ouverture, d'une curiosité, d'une rencontre, même éphémères. ; sans calcul et sans peurs. Cela existe, depuis toujours, ces rencontres qui n'espèrent rien mais qui se vivent comme une vie se vit d'instants, pleins.
Je vais finir cette très sommaire synthèse de l'anarchaïsme par un exemple.
Pourquoi devenir riche ? Pourquoi rêver ou espérer devenir riche ? Pourquoi être frustré de ne pas l'être ? Tout simplement par acceptation du monde tel qu'il est, tel qu'on nous l'a fait ; mais ce n'est pas obligation, nous avons tout le loisir de faire un autre voyage et si nous y étions plus nombreux, il en serait d'autant plus agréable.
La bête humaine est comme toutes les bêtes, avec ses nécessités, ses besoins : se nourrir, avoir une aire de repos, un abri sûr pour la maternité. Ce qui est étrange et jamais relevé, est bien que l'homme qui s'auto-place en haut d'une hierarchie qu'il invente, se trouve beaucoup plus intelligent que n'importe quel organisme vivant ; or l'aboutissement de sa civilisation – preuve de son intelligence supérieure- est toute entière tournée vers le matériel, cette extrapolation qui devient de plus en plus perverse au fur et à mesure que sa civilisation avance. Il se garde un alibi avec la science, mais cette science n'a que le matériel comme but ; où sont donc passées sa spiritualité, son intellect, sa créativité artistique, son pouvoir magique, sa conscience, sa sagesse ? Retrouver l'archaïsme de la matérialité c'est lui redonner sa place, basique, incontournable, lui conférer un caractère agréable si possible, inventer, innover mais une fois trouvé l'équilibre, s'en contenter. L'homme m'apparaît donc très con, et surtout très malade, à se laisser enfermer, puis rester dans un gouffre de miasmes dont il n'a, il semble bien, ni de près ni de loin, la possibilité de sortir. Quant aux autres, aux accumulateurs, leur insécurité est sans remède, la folie est prison, la leur est bien bouclée.
Voilà, un archaïsme, c'est quelque chose qui a passé de mode depuis longtemps, sûrement depuis que la mode existe dans l'artifice d'une organisation sociale loin, très loin de nos besoins et de notre être profond. L'anarchisme est une utopie, loin, très loin devant, un jour, peut-être, se rencontreront-ils, retrouveront-ils la quintessence de la vie, refondront-ils un monde vivable, un monde naturel bien suffisamment dur, sans besoin d'en rajouter.
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