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La République Non Démocratique du Congo

La démocratie réside dans le fonctionnement permanent d’un système politique, d’une forme de gouvernement dans lequel la souveraineté émane du peuple. De ce fait, les rapports sont établis à l’intérieur d’une institution, d’un groupe... tenant compte, aux divers niveaux hiérarchiques, des avis de ceux qui ont à exécuter les tâches commandées. Partant de ce principe, on peut aisément s’interroger, du point de vue démocratique, sur la pratique politique au Congo-Kinshasa.

Quid du calendrier électoral

Le refus d’inscrire sur les listes électorales les nouveaux majeurs – estimés à environ 7 millions, soit plus de 20 % du corps électoral congolais – a incité les experts de l’OIF à recommander au Parlement de poursuivre la réforme de l’état civil sur la base d’un recensement général de la population. Très récemment, le nouveau président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a estimé que l’actualisation du fichier et les financements des élections étaient les deux préalables majeurs avant la publication d’un nouveau calendrier global et aménagé.

De plus, la loi portant répartition des sièges pour les élections municipales et locales ayant été promulguée très tard par le chef de l’État, on ne peut que tirer les conséquences logiques d’un rééchelonnement du calendrier électoral. Dans cette optique, la nécessité de réaménager ledit calendrier a été recommandé par un arrêt de la Cour constitutionnelle. Cette institution a effectivement exigé l’organisation de l’élection des gouverneurs et vice-gouverneurs des nouvelles provinces avant d’envisager les scrutins locaux.

Un sénat inamovible

Il a fallu neuf ans pour que le redécoupage territorial puisse se conformer à la Loi fondamentale. Pendant tout ce temps, les circonscriptions sénatoriales reposaient sur des entités administratives virtuelles. À l’exception des sénateurs, ainsi que des députés des provinces de Kinshasa et du Bas-Congo, tous les autres avaient été élus sur la base des districts inexistants. Par conséquent, neuf parlements provinciaux et la chambre haute ont longtemps fonctionné dans l’illégalité – c’est-à-dire en violation pure et simple du texte fondamental. De facto, le non-respect du chronogramme défini par la CENI a permis de reporter sine die la tenue des élections provinciales et sénatoriales. Ainsi le Sénat, dont les circonscriptions viennent enfin d’être matérialisées, continue-t-il de fonctionner en toute tranquillité dans l’illégalité.

La CENI aurait été crédible si elle avait articulé le calendrier électoral dans un délai raisonnable et échelonné les différents scrutins de manière cohérente. Le fait d’avoir agi dans la précipitation, pour calmer le courroux des populations mécontentes et donner aux éventuels bailleurs de fonds l’impression de s’atteler sérieusement à la tâche, et programmé entre-temps des intervalles relativement courts s’apparente à une supercherie pour repousser les différents scrutins – la finalité étant de prolonger, sans aucune élection, les mandats des personnes siégeant dans les institutions étatiques.

Opposition essoufflée et manœuvre gouvernementale

Face à une dérive s’apparentant à un coup d’État institutionnel, l’opposition parlementaire ne parvient guère à impulser une dynamique nouvelle en vue d’une alternative politique crédible. Impuissante à l’intérieur du pays, constamment absente de l’hémicycle, elle a de plus en plus du mal à jouer efficacement son rôle. Essoufflée et ne parvenant guère à démontrer de manière pacifique le vrai rapport des forces populaires, de plus en plus discréditée aux yeux du peuple congolais, ses représentants cherchent désespérément la solution hors du territoire national. Ainsi cèdent-ils au chant des sirènes dans le but de revenir en force sur l’échiquier politique interne.

En revanche, pour conserver le pouvoir, la majorité présidentielle s’applique à fragiliser davantage l’opposition dans sa globalité. À cet effet, après réussi à noyauté l’opposition parlementaire, quelques caciques ont claqué publiquement la porte de ladite majorité et se sont proclamés opposants. Curieusement, cette mutation soudaine ne s’est faite sur aucune ligne idéologique. Seul le stratagème électoral a motivé, de manière cynique, ce positionnement cousu de fil blanc. Comment peut-on se coucher libéraux, et se réveiller tout à coup sociaux-démocrates, ou tout simplement socialistes ? « Le zèbre ne se défait pas de ses zébrures », dit un vieux proverbe bantou.

Par ailleurs, il est incroyable qu’un gouvernement d’une République censée être « démocratique » ait pu proposer au Parlement, en vue de son adoption, un projet de loi électorale contenant les germes de l’incohésion nationale. Tout comme est inadmissible l’avis de la Cour Suprême de Justice ayant qualifié conforme à la Constitution une loi qui affirme l’inégalité des Congolais au regard de la représentativité politique. De la même façon qu’est très consternant le fait pour l’opposition parlementaire d’avoir approuvé les dispositions iniques contenues dans le texte promulgué par le président de la République, qui plus est censé être le garant de la Constitution. Enfin, il est incompréhensible de constater l’immobilisme de la société civile contre une loi qui viole sans aucun doute la Constitution.

Une transition politique

Le peuple congolais doit absolument faire émerger une nouvelle classe politique crédible, c’est-à-dire à la vision constructive, et non continuer à faire confiance aux acteurs politiques ayant sans cesse privilégié leurs intérêts personnels au détriment de la chose publique. Le souverain primaire doit donc mettre un terme au glissement vers une République Non Démocratique du Congo, souhaitée par la majorité présidentielle et tacitement cautionnée par une opposition institutionnelle complaisante.

Vu les arguments développés supra, l’avenir du Congo-Kinshasa dépendra à court terme de la mise en place, comme au Burkina-Faso, d’un conseil national de transition, ou d’un gouvernement de salut public, lequel définira les grandes orientations relatives aux prochaines élections, à l’harmonisation de la Constitution, à la morale patriotique, à la défense nationale et aux institutions de la République. Bref, une IVe République reste la voie salutaire pour le devenir du peuple congolais.

Gaspard-Hubert Lonsi Koko


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2 réactions à cet article    


  • Le p’tit Charles 8 janvier 2016 12:15

    l’Afrique entière est sous dictatures...Dictatures imposées par les « démocraties »....(sic)


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