Toujours plus vite
La Loire, sauvagement !
Oh, qu’elle est belle notre Loire ! C’est le dernier fleuve sauvage, la nature préservée et l’histoire magnifiée. On se plaît à rappeler les auteurs, les poètes qui l’ont chantée au fil des siècles. On la photographie, on l’admire, on lui fait la cour. Elle est la grande vedette des initiatives touristiques, elle est parcourue en kayak ou bien longée à bicyclette . Elle est l’écrin magnifique de la douceur de vivre …
Puis soudain, surgissent des fous furieux, des contemplatifs du compteur de vitesse. Ils fendent les flots sur des machines infernales qui sont déjà venues briser la tranquillité des côtes françaises. Ils sont les chantres de la modernité, les princes du décibel et de la vitesse. Ils sont fiers sur les engins motorisés : ils démontrent leur réussite sociale, ils attestent de leur jeunesse vivifiante.
Ils font des vagues et menacent l’équilibre naturel, ils dérangent la fraie, abîment les berges, perturbent les pêcheurs, traumatisent les oiseaux, indisposent les promeneurs, brisent nos oreilles mais ils sont puissants, riches, consommateurs avisés. En dépit des interdictions, nos responsables, si peu soucieux d’écologie au fond d’eux-mêmes, ferment les yeux, se bouchent les oreilles et détournent la tête. Ils faut avouer qu’ils auraient bien envie de faire comme ces fous furieux du guidon aquatique.
Le petit plaisir de quelques-uns est désormais prioritaire sur l’intérêt général, la préservation de l’espace et du bien commun. Il faut avouer qu’ils font vivre le commerce et que c’est bien la seule chose qui compte dans cette société sans véritable ligne de conduite. On le voit quand on croise des quads sur nos routes : ces engins qui devraient se contenter de porter assistance à ceux qui font métier de travailler en pleine nature, en rase campagne …
On permet tout et n’importe quoi au nom du commerce. On laisse des engins motorisés sur notre Loire, on dégrade son image et sa biodiversité pour faire une petite place aux intrépides décervelés. On les laisse dépasser les vitesses autorisées, violer les interdictions, faire grand vacarme dans le mépris de tous. Ils sont les éclaireurs de la modernité méprisante. La planète est leur terrain de jeu. Ils ont envahi les montagnes, les océans, les forêts, ils souillent, dégradent, détruisent pour leur seul plaisir, la griserie de la vitesse et des sensations fortes.
Pauvres malades, pauvres vaniteux qui estiment que rien ne peut entraver leurs caprices, leur volonté d’affirmer leur puissance, leur désir de briller devant quelques midinettes admiratives ! Car, la plupart du temps, ces chauffards des flots sont des mâles en quête de compensation. Ils se mettent entre les jambes ce qui doit leur faire défaut par ailleurs. Le gros cube en guise de substitution phallique, la Loire pour décor à leur complexe déplorable.
Fort heureusement, les bancs de sable veillent et, à la moindre maladresse, le bel engin va manger la poussière siliceuse. La panne et l’incident sont au rendez-vous de leur folle cavalcade. Puisque la loi se refuse à mettre à terre ces guignols désespérants, la rivière se chargera de les désarçonner. Il suffit d’un peu de patience, la culbute est prochaine !
J’enrage qu’il faille ainsi protester de ce qui ne devrait pas exister. Il y a des lois, il y a des règles mais jamais elles ne s’appliquent spontanément. La grande faiblesse de notre société est de considérer qu’une règle est faite pour être détournée. L’effet désastreux de ce principe se mesure aisément. Plus personne ne respecte rien. Chacun se plaît à s’offrir sa petite entorse à la règle.
Pour nos cinglés du jet-ski ou en hors-bord, ce n’est pas une entorse, c’est une fracture ligérienne, une insulte à tous ceux qui aiment cette rivière magnifique, qui la respectent, qui la chantent, la peignent, la photographient, la parcourent, la vénèrent. Ceux-là, n’ont aucune sensibilité, ils sont les chevaliers d’une société barbare, ils méprisent la nature, ignorent les lois, crachent sur les contemplatifs et les rétrogrades. Ils filent, ils vrombissent, ils sont la modernité inhumaine.
Colèriquement leur.
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