POUTINE, la bête noire des journalistes occidentaux...
France 2 se serait-elle livrée à une désinformation avec le documentaire consacré à Vladimir Poutine diffusé le 16 décembre ? Un locuteur y rapporte que Poutine agacé par : « les remarques sur les sujets qui fâchent » (Tchéchénie, l'assassinat d'Anna Politovskaïa ) formulées par Sarkozy, lui aurait répondu : « C’est bon, tu as fini là ? Bon alors je vais t'expliquer. Tu vois, ton pays, il est comme ça (mimant l'écart entre son pouce et index). Mon pays, il est comme ça (en écartant largement ses bras). Alors maintenant, de deux choses l'une, ou bien tu continues sur ce ton et je t'écrase. Ou alors tu arrêtes de parler comme ça et tu verras. Tu viens juste de devenir Président de la France mais je peux faire de toi le roi d'Europe », le tout sur un ton agressif ! Sarkozy serait sorti groggy de cette réunion en marge du G8 en Allemagne au mois de juin 2007, au point que certains avaient attribué son état à un abus de vodka... Le lendemain de ce reportage, le conseiller diplomatique de Sarkozy de 2007 à 2012 qui accompagnait le président français, démentait totalement la scène ! Aucun des interprètes et témoins qui assistaient à la rencontre n'a livré la teneur de cet entretien privé, de renvoyer au Verbatim conservé aux archives de l'Élysée, et de préciser que ce tête-à-tête n'a aucunement été discourtois.
Parler à propos de Poutine, c'est presque déjà porter un jugement de valeur péjoratif emprunt de clichés. La plupart des journalistes ne discutent jamais de la valeur de la position qu'il avance, mais de son ancienne appartenance au KGB, espérant ainsi marquer d'entrée de jeu le point « Godwin ». Qu'il attire ou exaspère, les médias adorent mettre en scène les moments « forts » et les comportements spectaculaires, comme si ces clichés aux couleurs délavées suffisaient à dépeindre l'homme. Les Russes ont quitté l'ère soviétique et un homme comme Vladimir Poutine n'a plus grand chose à voir avec ses prédécesseurs.
La principale difficulté d'interprétation consiste à découvrir un ordonnancement d'éléments de valeurs différentes : militaire - politique - économique - social - géopolitique, culturel, etc..., en oubliant presque le poids des caractéristiques nationales des plus aptes à mobiliser des convictions identitaires décuplées par un sentiment d'appartenance à l'origine des raisons plus que celles des causes. On ne peut « maîtriser » ce que l'on ne comprend pas ou mal, ce qui revient à peu près au même. Les différents n'ont jamais une seule cause, et tous les acteurs ne poursuivent pas le même but, l'un peut faire reposer son raisonnement sur un postulat et celui d'en face sur un autre... Comment les Russes puis soviétiques en sont venus à acquérir une mentalité particulière et comment cette société nouvelle a forgé les mentalités au point d'en faire un groupe à l'organisation sociale distincte ? La réponse est à la fois sociologique, historique et géographique ; en transformant leurs manières de vivre, ils ont aussi transformé leur manière de penser et leur façon d'agir.
L'homme n'est jamais totalement de sa génération, il porte le poids du vécu de ses parents faisant de lui un être hybride transgénérationnel. Vladimir Poutine né le 7 octobre 1952 à Leningrad (Saint-Pétersbourg) au sein d'une famille de travailleurs, est un pur produit, à la fois khrouchtchevien, Brejnevien et Andropovien. L'étudiant Poutine fut remarqué au cours de son cursus d'étude en droit à l'université d'État de Leningrad par un de ses professeurs, Anatoli Sobtchak. Dans sa thèse de fin d'études « La politique américaine en Afrique », Vladimir Poutine y décrit comment les Américains utilisent, selon lui, l'Islam et l'évangélisation pour bloquer l'Union-Soviétique et la Chine en Afrique. Son diplôme en poche, Vladimir Poutine entre au KGB en 1975 et devient champion de Sambo (self défense assimilée au judo) de Léningrad l'année suivante. L'homme qui occupera pendant une très courte période le plus haut poste du FSB en 1998, a le sens du devoir jusqu'au sacrifice. Il est animé d'une farouche détermination à redresser son pays et à y remettre de l'ordre. Si Vladimir Poutine s'inscrit dans la pensée marxiste, il n'a rien oublié de l'Histoire, de l'honneur ni du serment.
L'impétrant Poutine rejoint le KGB lorsque ce dernier amorce un virage vers sa modernité et qu'il devient « Comité d'État de l'URSS » (juillet 1978). Sa formation terminée, il est affecté au Département 12 de la première Direction (renseignement extérieur), et en 1985 à la Maison de l'amitié germano-soviétique de Leipzig, RDA en tant que directeur. Il ne s'agit que d'une couverture, il est officier de liaison du KGB auprès du Ministerium für Staattssicherheit (MfS). Après la chute du mur, Poutine revient à Leningrad avec le grade de Lieutenant-colonel, peu après, son ancien professeur l'invite à occuper le poste d'adjoint aux affaires internationales du rectorat de l'Université de Leningrad et de devenir ensuite conseiller aux affaires internationales du Soviet de la ville, poste qu'il occupera de juin 1991 à juillet 1996.
En août 1990, le lieutenant-colonel du KGB Morosov annonçait dans la Pravda l'existence d'un groupe de réformateurs actifs au sein du KGB. Youri Andropov devenu secrétaire général du PCUS faisait de Mikhaïl Gorbatchev son protégé qui le 15 octobre se voyait décerner le prix Nobel de la Paix. En août 1991, Poutine joua un rôle important dans les négociations entre le KGB de Leningrad et les putschistes qui prirent Gorbatchev en otage. Trois années plus tard, Poutine fut nommé premier vice-président du Conseil municipal de Saint-Pétersbourg, et à l'automne 1995 président de la section locale du parti politique du Premier ministre Tchernomyrdine.
L'homme est décrit par ses proches comme un patriote fidèle bénéficiant d'un excellent esprit de synthèse (le propre du Perspektiv agent qu'il fut), tout le contraire des propos tenus lors du documentaire de France2. En 1996, Anatoli Sobtchak perd les élections, Poutine refuse alors de travailler sous les ordres du successeur et s'en retourne à Moscou où il est nommé adjoint au directeur des affaires de la Présidence. Il fait son entrée dans l'administration présidentielle au mois de mars 1997 dont il devient vice-président. En juillet 1998, il est appelé à la direction du nouveau FSB ; poste qu'il n'occupera qu'un seul mois, jusqu'à la nomination de Primakov comme Premier ministre. Cette période va être marquée par des luttes politiques intenses qui auront pour effet d'affaiblir Eltsine.
Le caractère et la personnalité de Vladimir Poutine semblent être un sujet de préoccupation pour les hommes politiques et les journalistes occidentaux. Quelle incidence accorder au reportage quand il avance que Boris Berezovsky aurait rencontré Poutine au mois d'août 1999 à Biarritz pour lui proposer de devenir Président..., d'ajouter qu'il aurait été choisi en raison de sa proximité avec Elstine et pour avoir un caractère peu « trempé » (les interventions dans le Caucase sont venues démontrer tout le contraire)... En janvier 1999, la famille Elstine est menacée par des enquêtes menées sur des oligarques tels que Berezovsky. En avril, Poutine est nommé secrétaire du Conseil national de sécurité puis Premier ministre au mois d'août (offensive islamique au Daghestan). L'indépendance de la Tchétchènie est perçue par Moscou comme une tentative de prise de contrôle de cette région par les intégristes islamistes qui contrôlent près de 90 % de la production de drogue en Afghanistan ! Ses prises de position, antithèses du politiquement correct vont être à l'origine de sa fulgurante popularité. Vladimir Poutine, peu formaliste, ne s'encombre pas d'un langage ampoulé. S'il choque par son franc-parler, il sait se faire entendre des plus humbles et une formule contestable peut donner des résultats surprenants.
Quand Vladimir Poutine devient président de la nouvelle Russie, Boris Berezovski, responsable du pillage des ressources de la Russie, fête l'événement dans sa villa de la Costa-Brava. L'homme fait partie des quelques oligarques qui ont financé la campagne de Boris Eltsine, ce qui lui a valu d'obtenir des participations dans les pépites de l'industrie russe. On le retrouve dans tous les fleurons de l'économie russe : l'acier, les médias, l'industrie automobile, l'aéronautique, le pétrole, participations gérées par la société Andava basée à Lausanne (Suisse) dont les dividendes et autres bénéfices sont placés sur des comptes offshores. L'homme entretient des relations avec la grande pègre, les « corrections », avertissements et les assassinats, sont monnaie courante. Le 7 juin 1994, une charge placée sous son véhicule explose tuant le chauffeur et blessant grièvement son garde du corps, lui s'en sort indemne ! L'enquêteur du FSB chargé des premières constatations s'appelle Alexandre Litvinenko ! Ce nom ne vous rappelle rien ? Empoisonné au polonium, il sera inhumé selon le rite musulman...
Le 1 décembre 1989, la rencontre entre le pape Jean-Paul II et Mikhaïl Gorbatchev avait ouvert la voie à de nouvelles réalités géopolitiques auxquelles le Vatican ne fut pas étranger... Trois années plus tard, Gorbatchev écrivait : « Sans ce Pape-là, les choses auraient été différentes ». Gorbatchev avait lancé une invitation à Jean-Paul II de se rendre à Moscou, cette bouteille à la mer avait peu de chance d'aboutir en raison du différent entre le Vatican et l’Église orthodoxe russe. Poutine a su rallier à sa politique d'endiguement de la menace islamique dans le Caucase et en Europe centrale le Patriarche de Moscou, fervent défenseur de la doctrine « Russkiy mir » (monde russe ) hostile à l'indépendance de l'Ukraine et à la politique occidentale.
En ce qui concerne la politique étrangère, Vladimir Poutine est favorable à une culture unificatrice, les personnes disposant de contacts en Europe centrale se sont entendues « confier » que l'axe se devait à reposer sur l'entente de la chrétienté afin d'enrayer l'islamisation du continent. La thèse de l'étudiant Vladimir Poutine, n'abordait-elle pas l'évangélisation ? En 1991, le Président Eltsine a ouvert toute la Russie à ces religions évangéliques, certaines servant de couvertures à la CIA et de filières... Lorsqu'il vous arrive de croiser ces jeunes hommes proprets, avez-vous conscience de rencontrer parmi ceux-ci des agents (juniors) en formation ? Si par curiosité vous les filez, vous découvrirez qu'ils ne se rendent pas tout à fait par hasard au domicile de certaines personnes et sûrement pas pour des échanges religieux...
Le mercredi 10 juin 2015, Vladimir Poutine rencontrait pour la deuxième fois (la précédente rencontre s'était déroulée au mois de novembre 2013), sa Sainteté le Pape François sous les ors du palais du Vatican. Au centre des conversations, la situation conflictuelle au cœur de l'Europe entre l'Union européenne et la Russie, et la situation des Chrétiens d'Orient (catholiques et orthodoxes) qui assimilent la position occidentale à un monde de Gribouilles. La rencontre entre le pape et le patriarche Kirill au mois de février 2016 n'a pas débouché sur les résultats espérés. La religion chrétienne n'ayant pu servir de dénominateur commun à l'Occident étendu jusqu'à l'Oural, la religion Orthodoxe allait contribuer au renforcement du sentiment national russe. Si seulement 6 % des Russes croient en Dieu, ils sont 60 % à être membres de l'Église orthodoxe russe qui revendique environ 100 millions de fidèles.
Poutine n'est pas l'homme immature, portrait brossé par les reportages tendancieux, il a même de la suite dans les idées. Si des hommes politiques se comportent en véritable girouette, Poutine souffle le vent. Pour l'ancien directeur de la CIA, M.McLaughlin : « Vladimir Poutine parle ouvertement de son objectif principal de rétablir la Russie en tant que grande puissance mondiale. C'est maintenant à la CIA, et autres agences d'espionnage, de comprendre comment il va le faire. »
Le 17 décembre 2016, Poutine a appelé le pape François à l'« occasion » de ses 80 ans, les deux chefs d'État d'évoquer la défense des chrétiens dans les zones de conflits et l'importance d'un dialogue inter-confessionnel avant d'exprimer le souhait d'une nouvelle rencontre. Si le panslavisme peut agir comme un trait d'union entre la religion et l'appartenance européenne, en France, la culture chrétienne s'est effacée au profit d'autres cultures religieuses au point de céder le pas à une laïcité devenue nouvelle religion d'État. Vladimir Poutine semble « marcher » sur les brisées lointaines de Vladimir 1er (958-1025). Le 4 juin 2016, il a inauguré une statue érigée à la gloire de Vladimir le Grand, prince de Kiev, au centre de Moscou. Le père fondateur de la Sainte Russie reçu le baptême en 988, imposa le christianisme, et apporta aide et soutien à l'empereur byzantin Basile II qui défit les troupes du calife fatimide al-Aziz lors du siège d'Alep (995), délivra Antioche, et annexa une partie de la Géorgie avant d'en finir avec les bulgares musulmans. Poutine confie en aparté : « seule une religion peut en battre une autre ». L'histoire semble devoir lui donner raison, lorsque deux cultures se sont opposées, l'une a fini par absorber l'autre...
Documents joints à cet article
23 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON