Loi Anti-cumul des mandats : Surtout ne pas l’abroger et aller au-delà...
La gravité de la situation écologique et les défis du XXIe siècle qu’elle suppose devrait être placé au coeur des débats et des politiques à conduire pour faire face aux problématiques démographiques, énergétiques, climatiques, de même que notre entrée à marche forcée dans la quatrième révolution industrielle dont la Digitalisation, robotisation, Big Data, drones, impression 3D etc. ne sont que la surface visible des bouleversements sociétaux, culturels, énergétiques, environnementaux et économique qui nous attendent et pour lesquels, avec la négligence intellectuelle des prétendants à la fonction présidentielle sur le sujet, en France on peut s’attendre au pire… Voir mes précédents articles sur le sujet (http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/presidentielles-la-quatrieme-184778 et http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/la-quatrieme-revolution-183570) …Or, une bonne partie de la classe politique est beaucoup plus préoccupée par des débats internes portant sur l’écume des choses dans le seul but de lui permettre de sauvegarder certains de ses privilèges, notamment, ceux liés au cumul des mandats, dont la remise en cause par certains de la loi qui en limite le nombre, cependant assez peu contraignante, est surréaliste et ne peut, par ailleurs, que renforcer les dérives populistes.
Précisément, à propos du cumul des mandats
Quand M. Jean-François COPE, pour qui le non-cumul est « une folie dictée par la bien-pensance », il semble oublier que le cumul de mandats est un furoncle au visage de la démocratie Française. Est-il normal que 84 % des députés cumulent les fonctions électives, dont 58% des députés et 59% des sénateurs détiennent également une fonction exécutive locale, sans compter tous les élus locaux qui cumulent plusieurs mandats de Maire, Conseillers départementaux ou Régionaux, Président ou vice Président d’intercommunalité… la France se singularise d’ailleurs par un très fort taux de cumul au regard des principaux pays Européens comparables. Cette proportion n’est que de 24% en Allemagne, 20% en Espagne, 13% en Italie et seulement 3% au Royaume-Uni…
A noter également que 51,4 % des députés français au Parlement européen cumulent en effet leur mandat avec d'autres fonctions électives contre 19,2 % pour les Allemands, 3,7 % pour les Espagnols, 12,3 % pour les Italiens et 4,1 % pour les Britanniques.
Un enjeu récurrent du débat politique
Le cumul des mandats reste un enjeu récurrent du débat politique, mais également un tabou. Le 22 Janvier 2014 le parlement a bien voté l'interdiction du cumul de mandats. Mais s’il interdit le cumul de fonctions exécutives locales (Maire, Président ou vice Président de Département, Régions) avec le mandat de député ou de sénateur, ainsi que le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen, les nouvelles dispositions entreront en vigueur au 31 mars 2017. Si ces deux projets de loi vont dans le bon sens, ils restent toutefois très insuffisants, car ils n’interdisent pas totalement tout cumul de mandats.
Les pro-cumuls des mandats ignorent-ils que le cumul des mandats est une plaie pour notre démocratie.
Cette pratique, contribue à la mise en place progressive d’un système d’inspiration aristocratique et dynastique qui mine notre république. C'est l'invention progressive d’un corps constitué, d’un groupe distinct de femmes et surtout d’hommes, parfois de familles, qui font profession de politique. Le cumul en est la clé de voûte dans la mesure où il réduit d’autant le nombre de mandats accessibles aux citoyens qui veulent s’engager. On peut également s’interroger sur le fait que quelques grandes écoles, ou quelques professions seulement, fournissent l’essentiel des élites politiques françaises... Les avocats, les médecins, voire des chefs d’entreprises sont à ce point mieux représentés que les artisans, commerçants, agriculteurs, ouvriers, employés, enseignants du primaire et du secondaire, infirmièr(e)s etc.
Comment s’étonner dès lors que l’électorat populaire se sente coupé des élus dans lesquels il ne se reconnaît pas ? Les votes de rejet ou d’adhésion à des thèses populistes néfastes et les taux d’abstention qui battent des records à chaque élection sont là pour nous le rappeler. Si le bien public est une vocation, la politique n’est pas une « carrière ». Le cumul des mandats, avec les effets de cour, les facilités du pouvoir et de l’argent public sont des dangers contre lesquels il convient de mettre définitivement un terme sans autoriser la moindre dérogation. Ce qui veut dire qu’il ne doit pas être possible de cumuler deux mandats de quelque niveau que ce soit, même avec celui de modeste Conseiller Municipal de village. Cela ne veut pas dire pour autant que le, ou la titulaire d’un mandat d’élu(e) ne puisse être candidat(e) à une autre élection. En cas d’élection, il ou elle devra choisir le mandat à conserver.
Interdire tout cumul des mandats améliorerait incontestablement le renouvellement du personnel politique, toutefois il faut aller au-delà en interdisant qu’au cours d’une vie publique l’on ne puisse exercer plus de deux fois le même mandat. Pour tous les mandats la durée ne doit par ailleurs pas excéder cinq ans.
Faux arguments pour les partisans du cumul des mandats
Pour le député et maire du Touquet, Daniel FASQUELLE, il serait « incompréhensible que la droite ne revienne pas sur une loi qu’elle juge « stupide » et poursuit : « Nous sommes tous d’accord pour dire qu’interdire aux maires d’être parlementaires, c’est affaiblir l’Assemblée et porter un coup fatal au Sénat, la chambre qui représente les collectivités territoriales. On ne peut pas laisser faire ça »...Et de rajouter que si l’abrogation immédiate n’est pas possible, Mr. FASQUELLE soutient qu’avec un peu de bonne volonté, « il serait envisageable de surseoir à l’application de cette loi en convenant qu’elle ne s’appliquerait qu’en 2020, à la fin des mandats des maires élus en 2014 »... Avis partagé naturellement par Jean-François COPE qui rajoute « qu’à droite, personne ne veut d’une Assemblée transformée en une chambre d’apparatchiks totalement déconnectés »,
Que signifie une chambre « d’apparatchiks totalement déconnectés » quand on sait que les député(e)s en France sont élu(e)s d’une circonscription territoriale et qu’à ce titre ils sont en contact direct avec les élu(e)s locaux et les habitants de leur territoire d’élection. Certains, lorsqu’ils ne cumulent pas d’autres mandats désignent des délégués parmi les habitants qui sont chargés de relayer les doléances de la population. Je me souviens que le député de ma circonscription, la 11ème du département du Rhône (Givors), Georges FENECH, lors de sa première élection en 2002, avait mis en place ce dispositif.
Que signifie : « porter un coup fatal au Sénat, la chambre qui représente les collectivités territoriales »
Comme je viens de le préciser, les député(e)s en France sont élu(e)s d’une circonscription territoriale et en plus de leurs obligations législatives, ils (eles) représentent implicitement les intérêts de ce territoire. Sous certaines conditions de représentation des minorités qui en sont actuellement exclues, grâce, notamment, à l’introduction d’un correctif appliqué comme indiqué, par ailleurs dans un précédent article, je suis d’ailleurs favorable au maintien de mode de scrutin actuel pour l’élection des députés. S’il y a bien une question à poser, c’est celle concernant l’utilité du Sénat.
Nous n’avons plus besoin d’un système « Bicaméral » il faut supprimer le Sénat.
Promulguée le 4 octobre 1958, la constitution de la Ve République confère au Sénat un rôle éminent dans les institutions. L'universitaire constitutionnaliste et ancien sénateur (1959 - 1971) Marcel PRELOT (1898 - 1972) n'hésitait, d'ailleurs pas, à parler de « République sénatoriale ». Le président du Sénat devient le deuxième personnage de l'Etat et assure l'intérim de la présidence de la République.
La France n’a, par ailleurs, plus besoin d’un système Bicaméral. On peut noter que75% des lois sont dictées par l’Europe, ce qui signifie qu’en France, la suppression du Sénat ne poserait aucun problème sur le plan législatif. D’autant que dans le cadre des navettes entre l’Assemblée nationale et le Sénat pour l’adoption de projets ou propositions de loi, en cas de désaccord, c’est l’Assemblée Nationale qui seule décide de l’application ou non de la loi. En cas de désaccord prolongé sur un texte, le gouvernement peut confier aux députés le soin de trancher. Quant à la responsabilité du gouvernement devant la Haute Assemblée, la Constitution prévoit simplement que « le Premier ministre a la faculté de demander au Sénat l'approbation d'une déclaration de politique générale ».
Le Sénat, Cette assemblée du 19° siècle est désormais obsolète. Déjà En 1969, le Général de Gaulle avait soumis à référendum un double projet de réforme des régions et du Sénat. Outre les collectivités territoriales qui éliraient cent soixante-treize sénateurs, le Sénat représenterait désormais l'activité sociale, économique et culturelle du pays, avec cent quarante-six sénateurs désignés. Mais surtout, le projet aurait ôté toute attribution législative et tout droit de contrôle du gouvernement par le Sénat, il en aurait fait une simple Chambre consultative. De plus, il aurait retiré au président du Sénat, au profit du Premier ministre, l'intérim de la présidence de la République.
L'opposition est très vive chez les élus locaux comme au Sénat, où le nouveau président, Alain Poher, prend la tête du combat pour le « non » au référendum. Les résultats de la consultation d'avril 1969 lui donnent raison. Par 52,41% des suffrages exprimés, les réformes proposées sont rejetées
46 ans plus tard, en 2015 Claude BARTOLONE président de l’Assemblée Nationale se dit favorable à sa suppression et reprend la proposition du Général de Gaulle de fusionner le Sénat avec le Conseil économique et Social… Une assemblée consultative avec des citoyens désignés, ce qui est le cas du Conseil économique et social, avec des citoyens élus, le fussent-ils indirectement, ne me semble pas très rationnel.
Supprimer le système « bicaméral », en renforçant la démocratie parlementaire de l’Assemblée Nationale et celle des citoyens par l’introduction du référendum révocatoire, implique une suppression pure et simple du Sénat. Un système monocaméral suffit amplement
A noter qu’un sénateur coûte près d'un million d'euros aux contribuables, ce qui revient à 350 millions d'euros par an pour le budget du Sénat qui gère par ailleurs une réserve de 1, 5 milliards d'euros. Près de 90 % des dépenses du Sénat consistent en des dépenses de personnel : indemnités parlementaires des 348 sénateurs, plus traitements et primes de leurs collaborateurs. Pour rompre avec l’opacité qui faisait partie des usages de cette assemblée, en 2013, pour la première fois, les comptes ont été certifiés par la Cour des comptes. « Mais cela ne veut pas dire que le Sénat est bien géré, simplement qu’il respecte les règles comptables » fait observer l’un des magistrats de la Cour…
Pour conserver ses espoirs de présence au second tour de la Présidentielle de 2017 M. FILLON, comme d’autres, ne doit pas céder aux sirènes des pros-cumul.
Contrairement à de nombreux élu(e)s de Droite, même si à gauche, certains ont « rallé » contre la loi anti cumul des mandats, les candidats aux primaires Socialistes, aucun ne semble vouloir revenir sur cette loi. Ainsi que François FILLON qui confirme noir sur blanc : « Je le dis clairement : je ne reviendrai pas sur le non-cumul des mandats. J’aurai d’autres priorités que de m’occuper de cette question qui est si anecdotique au regard des défis qui sont devant nous. » Mais les pros-cumul, eux, n’en démordent pas, encouragés par Christian JACOB, le très « Sarkozyste » président du Groupe des député(e)s LR à l’Assemblée nationale, Ils ne voient pas pourquoi le candidat ne ferait pas marche arrière sur cette question, comme il vient de le faire sur l’assurance maladie et ils ont bien l’intention de se faire entendre le 10 janvier, lors de la prochaine rencontre entre François FILLON et le groupe parlementaire.
Pour conclure sur ce dossier
Si François FILLON (comme d’autres candidat(e)s parmi les futur(e)s élu(e)s potentiel(le)s) venait à céder sur cette question, à laquelle une très grande majorité de citoyen est particulièrement sensible, il y a de forte chance que ses espoirs de présence au second tour des Présidentielles de 2017 soit compromis.
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