Des sympathisants si sympathiques
Ceux qui acceptent avec enthousiasme des excuses fictives ...
Des œillères devant les yeux.
Ils n’en démordent pas, ils soutiennent mordicus leur champion en dépit des rumeurs, des accusations, des faits et des révélations. Ils sont merveilleux de fidélité, ils tiennent le cap dans la tempête, restent droits dans leurs escarpins ou leurs bottes d’équitation en dépit des odeurs nauséabondes auxquelles ils ne peuvent échapper. Mais qu’importe, ils sont sympathisants et face à cet engagement de toute une vie, de tout un arbre généalogique, rien ne peut les faire dévier de leur choix.
Les sympathisants ont des œillères, c’est ce qui les rend si sympathiques à ces personnages douteux, les canailles de la république qui font métier de la politique. Avec eux, pas besoin d’être exemplaire, irréprochable, ni même crédible, ils sont en tout temps et en toutes circonstances des soutiens indéfectibles, des supporters zélés, des compagnons de route sans le moindre doute. Le réel n’a aucune prise sur ceux-là, ils ferment les yeux, se bouchent les oreilles et hurlent leur admiration pour leur champion.
Ils portent des badges, se griment comme les foules beuglantes des stades. Ils agitent des drapeaux, souvent tricolores ; ils sont patriotes en dépit des coupes sombres que fait leur favori dans les caisses de l’état. Ils s’en moquent d’ailleurs, ils en sont même un peu fiers. Ils appartiennent à cette classe supérieure dont la principale activité est de tromper le fisc, de dissimuler et de mettre de côté. Alors oui, ils admirent leur favori, il a su mener sa barque et se remplir les poches sans se faire prendre durant si longtemps.
Chez ces gens si sympathiques rien n’est pire que de donner de l’argent à des pauvres. C’est là, la plus parfaite abjection, c’est prendre le risque d’en faire des parasites, des assistés, des oisifs à qui l’état ne rend nullement service. Leur charité chrétienne s’arrête aux portes de l’église, entre gens biens, entre bourgeois de la pire espèce, ces culs bénis si méprisants pour ces prochains qui ne sont pas de leur caste.
Ils vivent dans un monde à part, ignorent tout de la société telle qu’elle est. Leurs enfants fréquentent des établissements confessionnels, ils sont épargnés par cette odieuse diversité. Ils grandissent dans le culte du travail, de la famille et de la patrie. L’argent est le Dieu véritable mais il convient de ne pas trop le montrer. Beaucoup ont eu des grands-parents qui étaient derrière le maréchal durant la dernière guerre.
Ces sympathisants si sympathiques sont persuadés que leur champion est victime d’un complot. Voilà l’argument clef qui leur permet de l’exonérer de cette incroyable cupidité avec laquelle il a puisé dans la caisse. À sa place, ils auraient fait de même, l’argent va à l’argent et tant qu’il ne profite pas aux inutiles, aux sans-dents, tout va bien ! Et puis monsieur le Châtelain est si agréable, sa famille est un bel exemple de la grande tradition petite bourgeoise. Quelle allure ! Quelle classe ! Sa femme est une belle femme, on l’inviterait avec plaisir dans un salon de thé.
Alors tout ce bruit, ces attaques sordides, ces coups bas, ces révélations forcément mensongères, ils n’en ont cure. Ils soutiennent leur champion, ils s’indignent qu’on puisse se montrer aussi vils, aussi mesquins à son encontre. Ils conspuent les journalistes, ils méprisent leurs voisins qui sont scandalisés par de tels soupçons (c’est une habitude chez eux de mépriser ainsi leurs voisins). Ils ne peuvent croire qu’un si bon chrétien puisse pêcher en eaux troubles de la sorte. Monsieur le curé est d’ailleurs d’accord avec eux, tout ceci est encore un coup des francs-maçons.
Les sympathisants ne me sont guère sympathiques. Ceux-là aujourd’hui, ceux d’un autre camp la fois d’après ou bien la fois d’avant. Ils n’ont aucun esprit critique, ils suivent tête baissée leurs couleurs, oublient si vite les turpitudes des uns et des autres pourvu qu’ils soient dans leur camp. Ils font preuve d’une immense mansuétude pour les leurs tout en étant impitoyables pour ceux d’en face. La tolérance est en berne dans le monde des sympathisants.
Et ce sont parmi ces gens bornés, obtus, méchants et stupides que les partis vont puiser leurs futurs cadres. C’est à désespérer de la politique tout en expliquant mieux les commentaires de ces pauvres parlementaires qui devant l’évidence continuent de défendre l’indéfendable par esprit de corps, par fidélité, par loyauté. Ont-ils oublié qu’ils sont d’abord représentants de la République et non pas de leur officine mafieuse ? C’est d’ailleurs ce qui me fait penser que pour véritablement changer de République, il faut éradiquer les partis politiques, ces matrices des sympathisants si peu sympathiques.
Encartement leur.
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